.
.

Le triomphe de la vérité

.

Editorial: La nouvelle humiliation


Visits: 123

La France a fini par comprendre que ses positions sur le Niger sont irresponsables. Emmanuel Macron a annoncé hier que Paris va rappeler son ambassadeur et rapatrier les éléments de sa base militaire de Niamey. C’est tout ce que demandaient les autorités actuelles du Niger.

Bien sûr, cette décision fait suite aux conditions de plus en plus difficiles imposées non seulement aux militaires français sur place, mais aussi à l’ambassadeur Sylvain Itté. Les putschistes nigériens ont instauré un blocus sévère aussi bien sur la base française que sur l’ambassade de France à Niamey. La position d’Emmanuel Macron, tentant d’instaurer en Afrique une démocratie à la sauce occidentale, constitue un paternalisme rétrograde. Et les Africains en ont marre de cette attitude qui, depuis 63 ans, a contribué à arriérer nos Etats.

Ce qui s’est passé au lendemain du coup d’Etat du 26 juillet 2023 n’a pas servi de leçon à Paris. Dans les coulisses, on sait que l’armée nigérienne était prête à livrer bataille pour défendre Bazoum au lendemain du coup de force. Se jetant dans une précipitation maladroite, Paris avait ordonné à ses hommes d’intervenir pour libérer le président déchu. Bazoum lui-même aurait sollicité l’aide française à cet effet. C’est sans compter avec la colère de l’armée qui s’est sentie trahie par son chef, au moment où elle était prête à le défendre. Les chefs de l’armée avaient alors tourné casaque, dégoûtés par ce qu’ils ont perçu comme une trahison impardonnable. Le contre-coup d’Etat n’aura jamais lieu. La garde présidentielle a réussi à rallier avec elle l’armée nigérienne dirigée jusqu’alors par des proches du président déchu. Paris devait prendre leçon de l’échec de sa politique interventionniste. Il a préféré se rabattre sur la CEDEAO pour imposer au Niger les sanctions les plus iniques, allant jusqu’à la menace d’une intervention militaire pour imposer Mohammed Bazoum. Seul le Bénin paie aujourd’hui le prix de cette erreur historique.

Le Nigeria n’applique pas les sanctions de la CEDEAO. Les 1500 km de frontière entre le Niger et le Nigeria sont des passoires qu’aucun douanier, aucun militaire ni aucun policier nigérian ne contrôle. Au vu et au su des forces de l’ordre, les usagers circulent de jour et de nuit dans les deux sens sur les axes secondaires. Et pour une simple raison : il n’y a pas un seul point de passage comme à Malanville et plus encore, il n’y a pas une barrière naturelle comme le fleuve Niger entre les deux pays. Du coup, les Béninois se retrouvent seuls à supporter les conséquences nées des décisions de la CEDEAO, une institution désormais vue comme vassale de la France.

La base française bientôt démantelée, pourra-t-elle être redéployée au Bénin, son point d’ancrage le plus proche ? Rien n’est moins sûr. Paris avait cherché par tous les moyens à les installer au Bénin, suite à la débâcle malienne. Le refus manifeste de Patrice Talon a obligé Paris à se rabattre sur Niamey. Il est fort probable que le chef de l’Etat maintienne sa position, pour ne pas donner raison à ceux qui le disent valet de l’Elysée. Dans ces conditions, le Tchad est la destination la plus probable, encore que le pays abrite déjà une base française, comme d’ailleurs le Sénégal et la Côte-d’Ivoire.

Dans tous les cas, on assiste à la débâclede la France au Sahel, et débâcle est un bien faible mot pour désigner cette série de reculades.

Les nouvelles autorités de Niamey peuvent dès lors se frotter les mains. Comme je l’ai déjà dit ici, les régimes militaires ne sont pas plus efficaces que les régimes civils sans vision et sans idéologie. AbdourahmanTchianifera-t-il exception à la règle ? Je le souhaite vivement, pour que le Niger retrouve la stabilité et la prospérité qu’il mérite après tant de décennies de pauvreté, d’instabilité  et d’insécurité.

Quant à Patrice Talon, il faut se demander comment il pourra se sortir de la mauvaise passe où il s’est embourbé tout seul. Il est difficile de le conseiller en matière diplomatique et géostratégique, lui qui pense depuis toujours que les diplomates et autres spécialistes en relations internationales sont inutiles. Si la crise nigérienne ne lui a pas enseigné de s’entourer au plus tôt de conseillers diplomatiques dignes du nom, c’est qu’on ne peut plus rien pour lui.

Par Olivier ALOCHEME

Reviews

  • Total Score 0%



Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

You cannot copy content of this page