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Le triomphe de la vérité

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Editorial:Chinoiseries africaines


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L’Afrique est définitivement chinoise. Et c’est une chance. Parce que les peuples africains ont l’opportunité de vivre comment se construit le surgissement irrévocable d’un peuple décidé à braver les fatalités historiques. La Chine, comme autrefois l’Amérique ou encore la vieille Europe, vient nous montrer l’épineuse voie du développement.

Mais elle se développe en s’appuyant sur l’Afrique. Elle est même une puissance africaine, selon le mot de François Lafargue.

Devenue vorace en matières premières stratégiques, elle nous gave de routes et d’infrastructures rutilantes. Voilà ce que les Africains aiment : des «peuples frères et amis » qui leur font la grâce de leur soutirer leur pétrole, leur cuivre, leur fer et leur bois contre quelques échangeurs et quelques autoroutes. Mais les Chinois sont allés au-delà. N’est-ce pas eux, nos « frères et amis », qui nous ont fait cadeau du siège flambant neuf de l’Union Africaine ? Ce sont des gestes aussi désintéressés que la présence chinoise au Soudan…

A Cotonou, Dakar, Abidjan ou Libreville, la Chine construit désormais tout. Cela va des tours administratives aux monuments historiques en passant par les lieux de spectacles. Le tout généralement, à des prix dérisoires visiblement destinés à épater les « frères et amis » si avides de cadeaux. Les opérateurs économiques locaux sont scandalisés, les PME du secteur des BTP sont sinistrées et les commerçants sont obligés de changer de paradigme. Désormais, la route des affaires passe par Pékin d’où l’on importe massivement les électroménagers dont rêvent les foyers, les motos et autres appareils de bureau dont raffolent nos administrations et nos entreprises. Nous voici à l’ère chinoise.

A y voir de près, l’émergence de la Chine ne peut favoriser que les pays africains qui se sont préparés à leur propre émergence. C’est-à-dire qu’avec son poids stratégique et son pouvoir de négociation, il est difficile de résister à une telle puissance si l’on n’est pas soi-même en position de force. Car, les offres chinoises, bien qu’étant bon marché et de bonne qualité, sont celles d’une puissance en devenir.

Elles enferment les pays bénéficiaires dans des choix stratégiques qui font toujours, comme de juste, la part belle à la partie chinoise. Ce sont ses produits que l’on déverse quotidiennement sur nos marchés, ses banques et ses fonds d’investissement qui prennent d’assaut nos grandes entreprises et nos marchés financiers, et ce sont bien ces industriels qui s’installent chez nous.

Face à cette nouvelle vogue, les pays européens n’impressionnent plus. Il est vrai que l’Union européenne continue d’être pour la majeure partie de nos Etats un partenaire de poids. Mais la percée chinoise est sur le point d’éclipser ou, tout au moins, de mitiger durablement l’influence euraméricaine désormais séculaire.

Imperméable aux préoccupations démocratiques, la partie chinoise ferme les yeux sur les sombres dictatures africaines. Elle fait son commerce, et c’est tout. Elle contrôle en douce les leviers de nos économies. Ailleurs, dans le monde, elle opère des incursions vertigineuses qui inquiètent tout le monde.

La semaine dernière encore, une commission du Congrès américain recommandait à l’administration Obama d’interdire à deux firmes chinoises des télécommunications d’intervenir dans les secteurs vitaux de la superpuissance. Malgré toutes les garanties qu’elles ont offertes. Tant il est vrai que la Chine s’est donné les moyens d’investir la grande Amérique en y faisant main basse sur des fleurons de son industrie comme IBM passée à Lenovo, le géant chinois de l’informatique.

L’Afrique n’échappe donc pas à la grande toile chinoise qui se tisse aux quatre coins de la planète. La croissance chinoise est un facteur important de la croissance mondiale et celle africaine en particulier. Mais qu’y gagnons-nous ? Autrefois aux mains froides d’hypocrisie des puissances colonisatrices, nous nous sommes fait prendre pour de grands enfants, lorsqu’enivrés de discours faussement négrophiles, nos dirigeants avaient fini par croire en la bienfaisante Europe et à l’amicale Amérique.

 Ils ont livré leurs terres à de vils prédateurs qui en ont fait des terres de souffrance et de division, terres de sous-développement et de guerres civiles. Invités aujourd’hui au rendez-vous de la puissance, ils devraient y chercher les mécanismes de leur propre salut. Et sur ce terrain-là, les Africains devraient savoir qu’ils ont à faire à des gens pour qui toute générosité se paie cash.

Olivier ALLOCHEME

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