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Le triomphe de la vérité

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Editorial:Une équipe en point d’interrogation


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Quel est le mode de fonctionnement du Chef de l’Etat béninois ? La question posée à la cantonade par l’un de nos lecteurs prend tout son sens dans ce remaniement quelque peu décalé. Pour la première fois dans le Bénin du Renouveau, le Chef de l’Etat se retrouve à la tête d’un ministère, celui stratégique de la défense. Il n’y a donc plus personne dans la République en qui Boni Yayi pourrait encore avoir confiance pour lui confier un portefeuille aussi sensible.

Il faut que ce soit lui-même qui assume le rôle, en plus de ceux qu’il avait déjà de par le titre présidentiel. Depuis la période révolutionnaire qui a vu le Général Kérékou s’affubler parfois d’une dizaine de portefeuilles à lui seul, c’est bien la première fois depuis deux décennies qu’un Chef d’Etat s’octroie un titre de ministre. C’est aussi la première fois dans notre jeune démocratie qu’il y a un ministre sans portefeuille, un « garçon de courses » officiel pour le Président de la République.

 Il faut même chercher loin dans l’histoire pour trouver un poste similaire. Il ressemble à s’y méprendre aux ministères de récompense créés dans les républiques bananières d’Afrique, du temps où régnait la gabegie et la déliquescence érigées en systèmes de gestion. Un Bongo père ou un Mobutu par exemple ont eu l’habitude de ce type d’outrecuidances.

Grosso-modo, ce sont les fournisseurs officiels de femmes du président de la république, les intermédiaires auprès des marabouts et des ordres maçonniques, distributeurs de valises de billets de banques aux amis du Président, etc. C’est en même temps l’homme de confiance, d’une confiance de frère ou d’alter ego qui le place au centre de sa gouvernance et l’enchaine à l’intimité et à la personne du Chef de l’Etat.

Ces dernières années, les ministres en charge des affaires présidentielles ont pu signifier autre chose. En Côte-d’Ivoire où Alassane Ouattara s’est octroyé le portefeuille de la défense, c’est son frère et presque sosie Tené Birahima Ouattara, précédemment directeur financier de la présidence, qui est entré au gouvernement le mois dernier comme ministre chargé des Affaires Présidentielles.

 C’est carrément le numéro deux de l’équipe. Idem au Liberia avec M. Edward B. McCLAIN, Ministre d’Etat chargé des affaires présidentielles et chef du cabinet de la Présidente Ellen Johnson Sirleaf. Son prédécesseur au poste, Willis Knuckles, a été limogé en 2008 suite à la publication d’une photo le montrant en pleine action avec deux prostituées dans un hôtel de Monrovia, la capitale libérienne…

En Guinée, du temps de Lansana Conté, Fodé Bangoura, bras droit du Chef de l’Etat, était devenu en 2005 ministre d’État chargé des Affaires présidentielles, c’est-à-dire le numéro 2 de l’appareil d’État. C’est son entregent qui a fait le malheur de Cellou Dallein Diallo limogé de son poste de premier ministre suite à un bras de fer avec le super-ministre Bangoura.

On le voit donc, Issifou Kogui N’Douro hérite d’un portefeuille de haute confiance. Il ne sera pas, loin s’en faut, le porteur de valise que l’on imagine, mais bien le numéro deux du régime, l’alter ego du Chef de l’Etat. C’est clairement un message de désaveu adressé à Pascal Irénée Koupaki. Passablement atteint par les récents déboires du gouvernement avec le PVI et la grève des enseignants, il se voit supplanté dans la hiérarchie.

 A moins d’un autre contenu donné localement à ce ministère. Les bruits de démission du désormais ex-ministre de la défense peuvent faire penser qu’il s’agit d’un poste stratégique pour le contenter après de graves mésententes. Les lobbys sur lesquels la présidence Yayi fonctionne sont encore solidement ancrés au cœur du système.

Ce remaniement surprise intervenant au lendemain de l’an 1 de Yayi 2 laisse pourtant songeur. Pour la énième fois, le ministère des finances change de titulaire, un peu comme si le Président de la République avait un sérieux problème avec la gestion des finances publiques. Symbole de rigueur et de sérieux, ce ministère est pratiquement devenu un panier à crabes, aussi volatile qu’un ministère de la culture balancé à mille personnes en quelques années. Et ce n’est pas le moindre des interrogations soulevées par ce remaniement.

Olivier ALLOCHEME

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