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Le triomphe de la vérité

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Societas: Faut-il s’endetter pour enterrer un parent ? Des Béninois en parlent


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L’organisation en grande pompe des enterrements de parents décédés avec de l’argent emprunté,n’est pas conseillée. C’est ce que plusieurs Béninois ont confié dans ce numéro de Societas qui a abordé la question. Ils souhaitent plutôt que les enfants s’occupent par tous les moyens de leurs parents, de leur vivant. Lisez plutôt.

Hubert Olivier DOSSOU-YOVO, Ingénieur Agronome Chercheur & Consultant: «Organiser les funérailles de façon sobre»

«La mort, selon son sens étymologique, est un événement douloureux même si certains passages de la bible évoquent la vie éternelle, une vie après la mort. En se basant sur les désagréments psychologiques que crée la mort d’un être cher, l’on ne devrait faire que dans la sobriété pour enterrer les parents défunts. Mais force est de constater que les cérémonies funéraires sont devenues de nos jours, objet de concurrence au sein des collectivités. Dans un pays sous-développé comme le Bénin, l’on ne devrait courir le risque de s’endetter pour enterrer de façon grandiose des parents quand bien même, on estime que les concernés ont passé un temps plus ou moins important sur la terre. Il est inutile et inconcevable que des êtres humains enterrent leurs parents à coût de millions pour se retrouver dans des situations de dettes les entraînant parfois dans des crises d’hypertension et  même à leur propre mort. À ces divers risques s’ajoute le fait que la sociologie du Bénin nous enseigne que beaucoup de cérémonies organisées de façon grandiose dans certaines collectivités sont des sources de malheur pour ceux qui s’y livrent et ce de façon mystique. Somme toute, il est idoine et idéal d’organiser les cérémonies funéraires des parents de façon sobre sans s’endetter.»

Fréjus FIOSSI, reporter d’images: « C’est une aberration»

«Dans la culture africaine, les obsèques sont une occasion pour les familles endeuillées de tout mettre en œuvre pour que les adieux à leur défunt soient exceptionnels. La tradition veut que l’on invite tout le village à un repas au dernier hommage rendu au défunt. Et c’est là que le problème se situe, selon moi. Car, on constate des gens mourants qui sollicitent de l’aide de leur famille sans l’avoir.  Mais dès qu’ils décèdent, ces mêmes personnes sont prêtes à se cotiser des millions pour les funérailles. Cette mentalité qui consiste à faire les funérailles en grande pompe, histoire de rendre un vibrant hommage aux défunts pousse même certaines personnes à aller s’endetter. Et ce fait qui est devenu monnaie courante de nos jours est une réalité que moi je ne partage pas. Celui qui est décédé ne verra pas tout ce qu’on a dépensé, soit disant pour son dernier hommage. Du coup, c’est préférable qu’on cherche à rendre un hommage à nos parents depuis leur vivant et à leur mort, on fait juste un enterrement simple dans la sobriété sans tambour ni trompette. Car, aller s’endetter pour faire des enterrements en grande pompe est de l’aberration. C’est mon opinion par rapport à ce sujet».

Mr AGOSSOU SEDAMI MIRECK, ingénieur en communication digitale: « Cela peut mettre en péril la stabilité financière de la famille »

« Organiser des funérailles somptueuses pour ses parents décédés est une décision qui mérite une réflexion approfondie, surtout lorsqu’elle implique de s’endetter. Bien que la perte d’un être cher soit une période où les émotions sont intenses, il est crucial de considérer les implications financières à long terme de telles décisions. La priorité financière devrait toujours être prise en compte en premier lieu. Contracter des dettes pour des funérailles coûteuses peut mettre en péril la stabilité financière de la famille, surtout si elle est déjà confrontée à des difficultés financières. Les besoins financiers à long terme doivent être prioritaires sur les dépenses ponctuelles, aussi importantes soient-elles. De plus, il est important de reconnaître que des funérailles grandioses ne changent pas la réalité du décès. Les parents décédés ne bénéficieront en rien d’une cérémonie plus coûteuse, ce qui rend l’endettement pour de telles dépenses peu judicieux sur le plan financier. La pression sociale et les attentes irréalistes peuvent également influencer la décision d’organiser des funérailles coûteuses. Cependant, il est essentiel de résister à ces attentes et de se concentrer sur des choix qui correspondent aux moyens financiers de la famille. Une alternative plus prudente consiste à opter pour des funérailles plus modestes mais significatives. L’authenticité et la signification des funérailles ne sont pas déterminées par leur coût. Des célébrations qui mettent l’accent sur les souvenirs et les valeurs plutôt que sur les dépenses extravagantes peuvent honorer la mémoire des défunts de manière tout aussi appropriée, voire plus. Enfin, sur le plan éthique, contracter des dettes pour des dépenses non essentielles comme des funérailles coûteuses peuvent soulever des questions importantes. Il est crucial d’éviter de compromettre la santé financière de la famille ou de créer des difficultés de remboursement à long terme. En conclusion, avant de décider d’organiser des funérailles somptueuses pour ses parents décédés, il est essentiel de peser attentivement les implications financières et émotionnelles de cette décision. En privilégiant la prudence financière et en optant pour des hommages authentiques plutôt que coûteux, il est possible de rendre un dernier hommage significatif tout en préservant la stabilité financière de la famille ».

Jean HOUNKONNOU, journaliste

«Il faut opter pour une cérémonie d’enterrement en fonction de ses moyens»

«On ne peut pas s’endetter pour enterrer en grande pompe un parent. Parce que le parent en réalité est déjà mort. Et je pense qu’il faut faire la cérémonie de son enterrement à la hauteur de ses moyens. Il ne faut pas enterrer pour plaire aux gens. Si c’est possible, je trouve juste que l’on s’endette pour sauver la vie d’un parent qui était peut-être couché sur le lit d’hôpital. Si ce n’est pas le cas, je dis non. Vous l’avez déjà perdu. Donc, je ne conseille pas du tout de contracter une dette pour enterrer. Parce que quand vous le faites et qu’après vous n’arrivez pas à rembourser dans le délai, c’est un problème que vous vous créez. D’abord, vous devenez une personne de mauvaise image auprès de celui qui vous a fait le prêt. Ensuite, cela peut vous amener devant les juridictions. Le mieux, c’est donc de vous épargner de ces petits soucis post-enterrement en optant pour une cérémonie en fonction de vos moyens».

Franck Armel HOUNGBEGNON, enseignant: «On ne doit pas s’endetter pour organiser des funérailles »

« Le corps sans vie est plus important que l’homme debout dans certaines sociétés africaines et notamment au Bénin et plus particulièrement au centre et au sud de notre pays. C’est pourtant le triste constat qui se dégage de cette problématique. Pour ma part, l’on n’a plus à beaucoup dépenser voir faire des emprunts pour enterrer un parent proche si réellement les devoirs envers ses parents sont respectés de leurs vivants. Le corps sans vie ne maitrise plus rien de son environnement. Pour nos parents une fois en vie, nous devrions être à leur écoute et c’est même l’occasion où on peut s’endetter pour rendre heureux ses parents de leur vivant en leur apportant tout le soin possible.

Malheureusement, il y a des personnes qui passent 5ans et plus dans le même pays sans voir leurs parents qui sont dans le besoin du minimum pour survivre, car ce n’est plus leur préoccupation. Après le décès d’un parent, certains préfèrent même laisser le corps à la morgue des mois le temps de construire de belles maisons dans le village, car le jour de l’enterrement on ne veut pas être ridiculisé. Or ce dernier aurait vécu dans une chambre en terre battue et c’est après sa mort qu’on construit des maisons en brique.  La mort est devenue source de commerce par endroit. C’est le moment par excellence de vider les beaux fils, d’aller faire d’usure pour rendre un dernier hommage aux disparus. C’est le moment trouvé pour d’autres de montrer à la face du monde leurs pouvoirs financiers en organisant des cérémonies vraiment pompeuses ; en faisant des mets que la personne même de son vivant n’a jamais mangés. Ils préfèrent le faire juste pour plaire aux autres. En Afrique et notamment chez nous, nous aimons la mort et c’est la raison fondamentale qui fait que la mort ne s’éloigne pas de nous car nous aimons célébrer les morts plus qu’apporter notre assistance aux personnes en difficulté, ou sur le point de mourir. On ne doit pas s’endetter pour organiser les funérailles de nos parents défunts mais, le faire selon ses moyens. Nous devrions chercher par tous les moyens possibles à être proches de nos parents et leur apporter tout notre soutien quand ils ont plus besoin de nous. C’est en cela que nous aurions de bénédictions venant d’eux qui nous accompagneront toute notre vie. »

Valentin OUIKOUN, prestataire de sonorisation et animateur présentateur live: «Je suis pour un hommage digne du nom à nos disparus quand nous en avons les moyens»

«La mort est un événement douloureux pour toute famille. Et quand elle frappe, il faut se résigner et s’organiser pour mettre en terre le cadavre de la personne disparue. Ailleurs cela se passe dans les 24h. D’autres coutumes conservent les cadavres pour plusieurs jours voire plusieurs mois pour organiser des obsèques dignes de leur rang. Pour la plupart, la personne décédée ne jouit peut-être pas de privilèges qu’on lui réserve à sa mort quand elle vivait encore. Je pense pour ma part que les obsèques pompeuses sont une aberration. Si un fils qui a entretenu son parent comme cela se doit de son vivant, organise une grande fête à la disparition de  ce dernier, je serai d’accord s’il possède les moyens. Mais s’endetter pour le faire alors même qu’il n’a pas pu s’endetter pour entretenir ce dernier de son vivant… Je suis pour un hommage digne du nom à nos disparus quand nous en avons les moyens, mais contre l’endettement dans l’organisation pompeuse des obsèques de nos disparus».

Basilia KOUKOUI, contrôleur et gestionnaire de risque incendie: « Je ne vais jamais oser le faire»

« J’ai envie de rire et vous allez me demander pourquoi. J’avais une tante chérie que j’aimais beaucoup, que j’adorais. Un jour elle est tombée malade, je lui ai dit Tassi, le jour où tu mourras, si j’ai 200.000f dans ma poche je ne pleurerai pas. J’achèterai juste ton cercueil, je te mettrai l’habit et je prendrai le corbillard qui va t’amener au cimetière, le reste, je m’en fous. Aller emprunter de l’argent pour enterrer un proche, c’est du ridicule, c’est se tromper. Si je n’ai rien fait à mon proche de son vivant, je ne vais pas prêter l’argent pour l’enterrer. Je vais préférer faire des obsèques sobres et supplier Dieu pour que son âme repose en paix, et qu’il prie pour moi pour que je puisse trouver les moyens et lui faire des souvenirs après, des anniversaires de décès et autres. Je ne vais jamais oser faire un prêt pour enterrer un proche. Certains pensent que c’est en faisant cela qu’ils auront du monde et rembourser mais ils n’arrivent même pas à trouver les 1/10 du prêt. Il est préférable de souscrire à une assurance décès ou soit une cotisation ou une épargne que je ramasse pour le faire. Tu prêtes pour faire quelque chose qui n’a pas de retour, ça n’a pas de sens. Quand on emprunte de l’argent il faut le fructifier et non mettre dans un trou de décès »

Christian TCHANOU, Journaliste: « Les parents qui décèdent n’ont jamais demandé de s’endetter pour les enterrer »

« Déjà le parent qui est décédé constitue une perte, une séparation et  une grande douleur. Je pense à mon humble avis qu’il ne faut pas qu’on se donne davantage de peine en allant s’endetter. Si celui qui a un parent décédé a les moyens suffisants pour honorer la mémoire de son parent défunt, il peut le faire mais dans une certaine mesure. On ne peut pas refuser à quelqu’un de magnifier la vie d’une personne décédée en offrant des obsèques dignes. Les obsèques dignes ne veulent quand même pas dire des obsèques monstrueuses mais qui marquent tous ceux qui ont connu la personne décédée. Maintenant faudrait-il s’endetter pour enterrer la personne décédée ? Je dis non. Non parce qu’ici au Bénin, la tradition est celle là où tout le monde veut vraiment enterrer son père et sa mère dans un climat où on met beaucoup d’argent. L’argent aurait pu servir à sauver la personne si elle était malade. Parfois on a l’impression que c’est une sorte de m’as-tu vu où on veut montrer qu’on a les moyens ; exposer sa fortune en tuant des bœufs, en mettant les bâches kilométriques sous lesquelles les invités mangent et boivent à satiété, solliciter des orchestres qu’on paie souvent à coup de centaine de milles. Même si la personne ne s’endette pas, c’est de l’argent qu’il a mobilisé à la sueur de son front qui va pour moi en fumée. Je suis contre le fait qu’on s’endette. Les parents qui décèdent n’ont jamais demandé de s’endetter pour les enterrer. Moi personnellement, j’ai connu des situations pareilles où j’ai dû m’endetter à un moment donné et je sais ce que ça m’a coûté par la suite. Je conseille simplement que les gens enterrent leurs parents dans la mesure de leurs moyens et penser à honorer leur mémoire en priant beaucoup pour le repos éternel de leur âme. Je déconseille vivement les gens qui continuent de penser qu’il faut forcément avoir de l’argent par tous les moyens pour enterrer leurs parents décédés ».

Mawutondji Gérard GODONOU

« Les funérailles ne devraient pas être des concours de dépenses extravagantes »

« D’une part, la pression sociale et les attentes culturelles peuvent pousser les enfants à s’endetter pour des funérailles extravagantes afin de répondre aux normes et aux attentes de la société béninoise. Par exemple, dans de nombreuses communautés au Bénin, les funérailles sont des événements sociaux importants où la famille et les enfants du défunt sont souvent jugés sur la base de la grandeur de la cérémonie. Cette pression sociale peut inciter les enfants à dépenser au-delà de leurs moyens, même s’ils savent que cela peut avoir des conséquences financières néfastes. D’autre part, certains enfants peuvent percevoir des funérailles luxueuses comme un moyen de célébrer l’héritage et le statut social de leurs parents décédés. Pour certaines familles, les funérailles sont considérées comme une occasion de montrer le respect et la reconnaissance envers les défunts et les ancêtres, ce qui peut conduire les enfants à des dépenses excessives pour honorer leur mémoire. Selon moi, s’endetter pour des funérailles luxueuses demeure une décision financièrement irresponsable. Les funérailles ne devraient pas être des concours de dépenses extravagantes, mais plutôt une occasion de se souvenir et de célébrer la vie des défunts. Se mettre dans une situation financière compromettante et regrettable en s’endettant pour des funérailles au-delà de ses moyens est égoïste et imprudent. Les dettes accumulées pour les funérailles peuvent prendre des années à être remboursées intégralement. Ceci peut avoir un impact durable sur la santé mentale des enfants, entraînant des problèmes tels que la dépression, l’anxiété et le stress chronique. Une cérémonie simple et symbolique pourrait transmettre autant de respect et d’amour aux défunts que des dépenses extravagantes. Néanmoins, si un enfant choisit d’organiser une cérémonie coûteuse, il est essentiel de planifier soigneusement les finances à l’avance pour éviter un endettement excessif. Des solutions comme l’assurance-vie ou l’épargne spécifique pour les funérailles peuvent aider à atténuer le fardeau financier ».

La Rédaction

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