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Le triomphe de la vérité

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Edito: Ouvrez les yeux


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logo journalMarchés de dupes.  Tel est le titre d’un ouvrage de 323 pages publié, il y a quelques semaines, par deux prix Nobel d’Economie. Il s’agit de George Akerlof, prix Nobel d’économie 2001, professeur d’économie à Berkeley et de Robert Shiller, prix Nobel d’économie 2013, professeur d’économie à Yale.     Dans cet ouvrage, les deux auteurs montrent, exemples à l’appui, que la logique à l’œuvre dans les marchés, relève d’abord d’une « économie du mensonge et de la manipulation ». Une thèse qui s’explique par le fait que nous, consommateurs, loin d’être rationnels, aimons nous raconter des histoires, que le marché exploite sans vergogne au nom de la recherche du profit et à notre détriment.

Les auteurs montrent ainsi la façon dont les entreprises – quel que soit le secteur – abusent des consommateurs pour les pousser quotidiennement à l’achat :    abonnements trop chers, médicaments inutiles, voire mortels, produits ou services qui n’ont rien de nouveaux, crédits bancaires abusifs…

Cette « économie du mensonge et de la manipulation »

 

Depuis Adam Smith, le principe cardinal du marché est celui de l’équilibre naturel, c’est-à-dire qu’une « main invisible » tend toujours à créer   l’équilibre de sorte que les producteurs concourent à répondre à la demande des consommateurs en fonction de ce que ces derniers sont prêts à payer.  Or, l’intelligence du producteur est d’avoir compris qu’on peut imposer au consommateur même, les produits et services dont il n’a rien à faire, ceux qu’il utilisera à peine. Le producteur et le commerçant utiliseront   la psychologie des consommateurs pour leur proposer sous  des colorations ou des appellations nouvelles, les anciens produits et services remis au goût du jour. Cette science en plein essor qui étudie le comportement du consommateur, c’est l’économie comportementale, qui résulte des progrès de la psychologie et des neurosciences où les émotions et les biais sont pris en compte. Pour la macro-économie « mainstrean » (traditionnelle) , nous sommes des « homo economicus » qui faisons des choix rationnels pour améliorer notre bien-être. Pour nos deux prix Nobel, il faut au contraire faire « la différence entre ce que les individus veulent vraiment  (ce qui est bon pour eux) et ce qu’ils croient vouloir (ce qui est bon pour le singe perché sur leur épaule – le singe représente les « esprit animaux » que Shiller avait analysés dans un précédent ouvrage). «  Il suffit de changer l’attention des individus pour changer les décisions qu’ils prennent », affirment les deux auteurs.  J’ai pu suivre, avec une certaine préoccupation, la polémique provoquée par une phrase de Jack Ma, le patron du groupe Alibaba, le géant chinois du commerce en ligne, lors d’une réunion avec des investisseurs. Il disait donc ce mardi 14 juin, selon  le Wall Street Journal : « Le problème est que les faux produits présentent aujourd’hui une meilleure qualité et un meilleur prix que les vrais produits ».  Malgré le tollé provoqué par sa déclaration, Jack Ma n’a fait que traduire le sentiment général du public des consommateurs qui sont de plus en plus attirés par les faux Vlisco, les faux Dolce Gabana, les faux Touareg, les faux Hyundai ou encore les faux Christian Dior. Ce sera toujours ainsi, tant que le consommateur sera manipulable à merci.

 Mais alors, comment remédier à cette situation dans laquelle le consommateur se fait duper ? Selon les deux auteurs, il faut que le gouvernement ou les parlements imposent des normes. Mais ces détenteurs du pouvoir politique sont souvent aux mains des lobbies, des producteurs ou des commerçants.  De sorte que seul le consommateur attentif et rigoureux pourrait passer entre les lignes de la duperie ambiante. Reconnaissons malgré tout qu’il est très difficile ,voire impossible pour le citoyen honnête, de ne pas se faire duper par des entreprises organisées et disposant de moyens colossaux pour atteindre leurs objectifs. Encore que dans la plupart des cas, le consommateur lui-même considère qu’être trompé est moins important que le désir qu’il  a de paraitre. Ainsi, une nouvelle bière qui n’est en fait que le relooking de l’ancienne pourra facilement s’écouler sur le marché, non pas seulement parce que le producteur aura été génial et malin, mais surtout parce que dans bien des cas, le consommateur lui-même aime bien paraitre branché au lieu de rester attentif à ce qu’on lui propose. Un seul conseil donc si vous allez aujourd’hui dans un supermarché : ayez les pieds sur terre pour qu’on ne vide pas vos portemonnaies pour rien.

 Par Olivier ALLOCHEME

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