.
.

Le triomphe de la vérité

.

Edito: Gouvernance économique et vérité


Visits: 1

C’est désormais connu. Une guéguerre est née entre le premier ministre Lionel Zinsou et le ministre en charge des finances, Komi Koutché. Dans une correspondance officielle adressée au ministre des finances le 25 août dernier, Lionel Zinsou se plaint de la fermeture du Sygfip (Système intégré de gestion des finances publiques), et ce depuis février. Pour  le premier semestre de cette année, cette situation a entrainé un taux d’exécution de 19% des dépenses au sein de l’ex-Ministère en charge du développement, Ministère qui revient dans le giron de la primature depuis le remaniement.
Ce qui intéresse le grand public dans cette guéguerre au sein même du Gouvernement, ce ne sont pas les mésententes au sein de l’appareil d’Etat. Ce n’est même pas le problème de l’autorité réelle du premier ministre dans un Gouvernement où le vrai chef reste Boni Yayi en personne. Le problème ici, ce sont les chiffres qu’avance Lionel Zinsou. Il nous donne, en effet, de connaitre le taux d’exécution des activités dans un Ministère stratégique comme celui du développement durant le premier semestre de l’année. Il y a quelques semaines, le Gouvernement, par l’entremise du ministre des finances, soutenait que le taux d’exécution du budget 2015, durant les six premiers mois de l’année, était de l’ordre de 50%, tous Ministères confondus. Mais voilà que le premier ministre nous apporte, presque sans le vouloir, une information qui contredit   directement le ministre des finances.
Qu’est-ce qui peut donc expliquer cette contre-performance aveuglante ? Pour le premier ministre, il n’y a pas à chercher loin : c’est la fermeture du SYGFIP depuis février 2015. C’est-à-dire que depuis ce mois de février, les structures de l’Etat ont du mal à accéder à l’argent qui leur est réservé dans le cadre du budget 2015. Presque toutes les institutions sont concernées. C’est un euphémisme qu’elles ont un mal fou à honorer leurs engagements auprès de leurs créanciers. Autant dire que tous les marchés publics passés depuis lors sont en souffrance. Les dépenses publiques ne se font qu’au compte-goutte.
Mais bien sûr, ce qui intrigue, c’est le chiffre avancé par le ministre des finances qui semble nous dire que tout va pour le mieux dans le  meilleur des mondes possibles, au moment même où le premier ministre laisse entendre exactement le contraire. Posons-nous la question qui vaille en cette circonstance : quel est l’Etat de nos finances publiques ?
En posant cette question, la peur de ces derniers jours nous saisit. Depuis le 26 août 2015, le Gouvernement a plus que doublé les  tarifs de télécommunications au Bénin. Par un décret pris par le chef de l’Etat, tous les prix, que ce soit des SMS, des appels nationaux ou internationaux, tout a plus que doublé. C’est dire que si les opérateurs GSM décidaient d’appliquer ces nouveaux tarifs imposés par le décret présidentiel, la ménagère d’Agatogbo, le banquier de Cotonou ou le plombier de Malanville vont en sentir les conséquences directes. La répercussion sera immédiate sur le coût des denrées de première nécessité. Car, les télécommunications fonctionnent comme les produits pétroliers sur l’économie.
Si le Gouvernement a pu décider de prendre ces mesures drastiques et presque antiéconomiques, c’est parce que l’état de nos finances publiques inquiète. Et la solution toute trouvée est de ponctionner les poches des consommateurs. Dans quelques semaines, lorsque les opérateurs GSM vont effectivement appliquer les mesures dictées par l’exécutif, chacun pourra apprécier l’ampleur de ce qui nous arrive.
Dans tous les cas, la correspondance du premier ministre nous montre, s’il en était besoin, qu’on ne nous dit pas la vérité sur l’état de nos finances publiques. Les chiffres volontairement maquillés qui sont donnés, même devant la représentation nationale, c’est-à-dire, devant les représentants du peuple, traduisent la gravité de la situation dans laquelle nous nous trouvons. En fin de règne, le régime du changement va-t-il laisser un pays ingouvernable ? C’est la question qu’il convient de se poser quand on regarde la facilité avec laquelle un ministre des finances transforme la réalité.
Malheureusement, il ne s’agit pas ici de politique, mais bien de la vérité crue que présentent les caisses de l’Etat.

Par Olivier ALLOCHEME

Reviews

  • Total Score 0%


Plus sur ce sujet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

You cannot copy content of this page