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Le triomphe de la vérité

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Edito : L’UN et le régionalisme


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Bruno Amoussou et les siens ont peut-être pris la mesure de leur énorme bévue de 2011. En visite ce week-end à Kandi, lui et les responsables de l’Union fait la Nation (UN) n’ont pas manqué de s’intéresser aux problèmes de la localité et plus généralement à ceux de l’Alibori. Une première.

         Ce n’est certainement pas la première fois que l’UN mène des actions dans le septentrion. Elle a besoin d’effacer les mauvais souvenirs laissés en 2011 où les déclarations de quelques-uns laissaient penser que ce n’était qu’un rassemblement des « gens du sud ». Il suffisait de voir la composition de son bureau directeur pour le comprendre. De n’avoir pas pu ou su y mettre une personnalité politique du septentrion, de n’avoir jamais su refléter l’unité nationale en ces temps de crise, aura servi à liguer plus de 40% de l’électorat contre eux. C’est une erreur stratégique majeure qui s’est même aggravée avec les déclarations tapageuses de certains de ses responsables désireux de « ramener le pouvoir au Sud ».

S’il est vrai que la politique au Bénin s’est fortement ethnicisée, il est faux voire dangereux de croire qu’un parti ou qu’une alliance de partis pourrait se hisser au pouvoir sur des thèmes régionalistes. En réalité, depuis toujours, personne n’a pu parvenir au pouvoir au Bénin sans réaliser un large consensus autour de lui, tout au moins dans deux grandes régions du pays. Les crispations identitaires qui se cristallisent à la veille des élections sont propices au vote ethnique, surtout lorsque l’autre camp est perçu comme une menace. Par essence, ce type de vote constitue une réaction de survie face à une menace implicite ou explicite, exprimée ou non. Pour ne l’avoir pas compris, l’UN y a payé un lourd tribut en laissant dans la mémoire l’image d’un parti sudiste décidé à prendre la revanche des gens du sud sur ceux du nord. Cette vision triviale aurait pu être enrayée par des actions concrètes. Malheureusement, elles se firent rares, ces actions.

         Pour avoir parcouru une bonne partie de nos communes en ces heures chaudes de 2011, j’ai pu constater ahuri que l’UN avait laissé le terrain du septentrion. Dans la grande métropole Parakou, on pouvait compter ses affiches du bout des doigts. Idem à Natitingou, et presque rien dans les autres villes phares du septentrion. Le seul meeting de maitre Houngbédji fut alors celui de Parakou, à trois jours du scrutin, sans éclat.

         La stratégie actuelle vise plutôt à gommer cette image suicidaire en créant une dynamique unitaire tranchant littéralement avec les anciennes grilles de lecture identitaire. Il lui faudra, pour cela, trouver des personnalités du septentrion prêtes à y entrer. Et c’est là que se pose le problème. J’ai beau chercher ce week-end quelles sont les personnalités du septentrion qui ont pu accompagner les responsables du groupe dans leur campagne à Kandi, je n’en ai pas trouvé. Ce sont des signes qui ne trompent pas. La tâche, on s’en doute, sera ardue après les erreurs du passé.

         Il se chuchote que les mois à venir verront la multiplication de ces « tournées », l’objectif final étant de créer une plus large union prenant en compte la nouvelle dynamique unitaire. Réaction tardive s’il en fut, elle intervient à quelques encablures des prochaines joutes électorales et servira à sonner le rassemblement de la troupe autour de nouveaux objectifs. Conquérir le pouvoir d’Etat au Bénin, c’est ménager les susceptibilités identitaires pour rassurer tout le monde.

         Mais 2016 sera autrement plus complexe. Avec l’exacerbation des menées centrifuges de Boni Yayi, le pays n’a jamais été aussi divisé. Clairement et sans même chercher à s’en cacher, les ministres et les cadres sont indexés par l’autorité suprême comme représentant d’abord d’une région, d’une certaine commune ou d’une certaine ethnie. Et dans la tête de tous, les refoulements régionalistes qui avaient été mis en berne sous Kérékou sont revenus au galop, aggravés même par les concours frauduleux et leurs odeurs bassement clientélistes mais convertis dans l’imagerie populaire en régionalisme primaire.

         L’UN réussira-t-elle dans ce contexte à se repositionner en parti national et non en un clan de vengeurs régionalistes ? Il lui reste encore du chemin. Au moment où le bloc national est déchiré par une gouvernance aux relents ethniques et régionalistes, c’est un pari encore difficile à tenir.

Par Olivier ALLOCHEME

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