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Le triomphe de la vérité

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Editorial: Et si on arrêtait tant de pitreries


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Olivier ALLOCHEME, Editorialiste-Secrétaire de Rédaction

Je me rappelle ce scandale volontairement provoqué par l’un de mes confrères à la suite d’une conférence de presse donnée par les responsables en charge du pilotage du Plan décennal de développement du secteur de l’éducation (PDDSE). A la suite des explications (longues) des cadres qui se désolaient du retard criard enregistré dans la mise en œuvre de ce plan vital pour l’éducation au Bénin, il s’est emporté contre eux.

Loin de la courtoisie de nous autres qui avions sagement posé les questions d’usage sans autre forme de procès, il a littéralement rué dans les brancards, critiquant l’immobilisme de l’administration, déversant une série d’épithètes injurieux sur les cadres et leur incapacité à développer le pays.

Puis, il se leva, saisit la porte et la claqua violemment. Au passage, répondant à l’un des responsables qui lui demandait d’attendre pour écouter au moins les réponses des conférences, il hurla : « Je sais déjà ce que vous allez me répondre : lenteurs administratives, lourdeurs des circuits financiers, etc.

 Chaque année, c’est ce que vous ne cessez de répéter. Eh bien ! moi, vous me fatiguez ! Vous m’entendez ! J’en ai marre ! » Et il est parti, insultant presque le directeur de cabinet du ministère des enseignements maternel et primaire, le coordonnateur du projet et tous les cadres assis et subitement groggy devant un tel déchaînement. Le silence assourdissant qui a suivi son départ tumultueux nous a rendu à l’évidence : il y a quelque chose de pourri dans la république. De quoi s’agit-il ?

Le plan décennal de développement du secteur de l’éducation (PDDSE) est né d’un constat qui crève l’œil. Classes surpeuplées, mobiliers branlants, salles de classes insuffisantes dont bon nombre sont dans un état piteux, enseignants peu motivés et non formés dont au moins 70% n’ont jamais mis pieds dans une école normale pour y apprendre le noble métier…En clair, un système décadent et totalement défaillant est en train de former les citoyens de demain.

 Et c’est en face de ce danger que le Bénin a mis en place le PDDSE financé par les fameux Partenaires techniques et financiers (PTF) ainsi que le gouvernement béninois à hauteur de 50 milliards de FCFA. Ce document est à ce jour le document de référence du secteur de l’éducation au Bénin. Il fait suite aux États Généraux de l’Éducation de 1990 et aux engagements pris par le Bénin au plan international, en particulier au forum de Dakar en 2000 pour l’élaboration d’un Plan d’Action National pourl’Éducation Pour Tous (PAN/EPT).

Du reste, la mise en place du PDDSE était une conditionnalité pour l’élection du Bénin à l’initiative FastTrack, une initiative de mise en œuvre accélérée de l’atteinte de la scolarisation primaire universelle à l’horizon 2015 conformément aux Objectifs du millénaire pour le développement (OMD).

Il a permis au pays de bénéficier de ressources additionnelles pour réaliser des progrès significatifs sur les plans quantitatif et qualitatif au niveau de son système éducatif. Couvrant la période 2006-2015 subdivisée en trois phases, le PDDSE est arrimé aux Objectifs du Millénaire pour le Développement(OMD) et à la Stratégie de Croissance pour la Réduction de la Pauvreté 2007-2009 (SCRP).

Mais depuis le démarrage de l’exécution de ce plan, les acteurs impliqués ne cessent d’incriminer la lenteur des circuits financiers, les lourdeurs administratives au niveau des directions techniques sectorielles impliquées, et l’inadéquation des ressources humaines à certains postes. Depuis cinq ans, c’est-à-dire à quelques mois seulement de l’achèvement de la deuxième phase du plan sur les trois prévues, le Bénin n’a réalisé que 15% du projet !!!

Tant et si bien que les PTF, prévoyants, ont dû recruter une ONG pour faire le plaidoyer en direction de toutes les structures impliquées en vue de faire avancer ce qui apparait pourtant aux yeux de tous comme d’une aveuglante nécessité. Et c’est ainsi que l’ONG ALCRER s’est lancée dans une bataille médiatique pour qu’enfin nous sauvions les enfants d’aujourd’hui et le Bénin de demain d’un assassinat programmé.

Tous ceux qui ont étudié comme moi sous des paillotes, avec des bancs en brique avec des tablelaux qui menacent de tomber sur les élèves, et ceux qui ont déjà touché du doigt les misères de notre système éducatif ne peuvent que se révolter comme mon orageux confrère contre les déviances d’un système aussi aveugle. Mais alors, qui va arrêter tant de pitreries ?

Olivier ALLOCHEME

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