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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le CFA de Talon


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Si on était dans les années 60 ou 80, les informations livrées par Patrice Talon au cours de son interview de jeudi, l’auraient conduit à un assassinat assuré. Et pourquoi ? Parce que le Chef de l’Etat a touché un tabou incendiaire, celui du FCFA. Depuis sa création en 1945, tous les dirigeants africains qui ont tenté de faire entrevoir aux peuples africains la perspective même lointaine (comme on disait lors de la conférence de Brazzaville en 1944) d’une sortie de la tutelle française, ont été éliminés. Le premier, Sylvanus Olympio, premier président du Togo, a été abattu le 13 janvier 1963, trois jours après avoir commencé l’impression d’une nouvelle monnaie pour son pays. On sait aujourd’hui de quels soutiens ont bénéficié les soldats l’ayant assassiné. En 1968, Modibo Kéita, le premier président du Mali indépendant, est victime d’un coup d’Etat. De fait ce nationaliste avait créé le franc malien dès l’indépendance du pays. Et dès les premiers jours du franc malien, des foules manipulées, sont allées manifester devant l’ambassade de France contre cette monnaie nationale. La stabilité du pays a alors été ébranlée jusqu’au coup d’Etat d’Ali Moussa Traoré qui permit au pays de revenir au FCFA en juin 1984.
Pour citer un cas encore plus récent, l’ancien président libyen, Mouammar al Kadhafi, a été abattu en 2011 à la suite de ce qui apparait aujourd’hui comme l’une des plus vastes opérations de désinformation et d’intoxication jamais organisées pour déstabiliser un régime africain. Les services de renseignement avaient savamment utilisé les médias occidentaux pour répandre dans le monde l’information que Kadhafi faisait la guerre à son propre peuple. De vrais faux reportages montés par de grands médias ont permis de présenter le leader libyen comme un monstre assassinant son peuple avec des armes lourdes. La suite, on la connaît : Mouammar al Kadhafi a été tué par les forces de l’OTAN sous la direction d’un pays que vous connaissez. Le péché de Kadhafi avait été d’avoir tout fait pour créer le Fonds Monétaire Africain, une institution devant servir de base à une monnaie unique africaine dont rêvait le Guide libyen. Pour cela, il avait même pu rassembler suffisamment de réserve d’or pour lancer cette monnaie et la crédibiliser sur le marché mondial.
Vous l’avez compris, en annonçant jeudi dernier le retrait progressif des réserves de changes de la BCEAO logés au Trésor français, Patrice Talon a pris de gros risques géostratégiques, mais aussi pour sa propre personne. Je me suis demandé pourquoi c’est à lui que devrait revenir le devoir d’annoncer une information aussi capitale, alors que la décision, d’après ce qu’il nous a dit, était unanimement prise par les chefs d’Etats de l’UEMOA. Ses pairs lui ont laissé la sale besogne, conscients que cette formule pouvait entrainer des représailles. Ni Alassane Ouattara pourtant connu comme le plus économiste des chefs d’Etats de la zone, ni Muhammadu Issoufou président du Niger, connu pour son grand panafricanisme, encore moins le très francophile Macky Sall, n’ont osé servir la patate chaude au public. Ils savent très bien qu’il faut une dose de courage voire de témérité pour s’aventurer sur ce terrain.
Que d’ici là, les médias français déjà habitués, soient mis à contribution pour fabriquer des pièces à conviction, ouvrir leurs antennes à l’opposition, montrer la famine au Bénin…Que d’ici là des attaques terroristes s’enchainent dans le pays, que des pirates viennent rendre le port de Cotonou infréquentable ou que des associations de la société civile deviennent subitement assez fortes pour organiser des marches contre les « crimes » imaginaires de Talon, cela ne m’étonnerait guère. C’est du déjà vu et déjà fait. Il est même possible, comme ce fut le cas dans la Guinée de Sékou Touré, que des faux billets de FCFA inondent tôt ou tard nos Etats, pour détruire nos économies afin de démontrer par là que sans le parapluie français, nos économies ne valent rien.
La conception erronée qui prévaut jusqu’ici, c’est qu’il faut affaiblir les Etats africains pour mieux servir les intérêts de l’Hexagone. C’est une tragique erreur qui sert aujourd’hui à affaiblir la puissance française elle-même. Qui détruit ses alliés se détruit lui-même, tôt ou tard. La question est alors de savoir quelles mesures ont été prises en amont par le Chef de l’Etat pour prévenir les représailles presque inévitables contre lui et son pays.

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