Edito: Malédiction

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Destruction de traces de  documents administratifs et comptables, passation de marchés publics en violation du code des marchés publics,  primes de représentation pour le maire passant  de 2000.000 à 10.000000, vente illégale de domaine public, distorsion de ressources…Les griefs contre le maire de Cotonou sont lourds. Mais il n’y a rien à dire d’autre qu’à constater l’innocuité de toute la procédure enclenchée contre lui.  Il sortira nimbé d’un non-lieu que la précipitation actuelle laisse entrevoir.

La clameur publique ayant accompagné l’action menée contre le premier citoyen de la ville, renforce l’axe de la victimisation. Sur ce terrain, ce qui émerge, ce n’est ni les parcelles illégalement vendues, ni la destruction illégale de documents administratifs et  comptables, encore moins les primes du maire qui ont bondi de façon vertigineuse, selon le ministre Dassigli. Ce qui émerge dans une certaine opinion, c’est que Talon veut se venger de Rosine Soglo en s’en prenant à son fils. C’est réussi et les explications du ministre de la justice n’ont convaincu que quelques indécis. L’affaire est entendue. Léhady est victime d’un harcèlement sauvage parce que sa mère a refusé de voter la révision de la constitution. Peu de gens se demandent s’il n’y a pas eu abus de biens sociaux, personne ne se soucie de savoir si les dizaines de millions de primes hallucinantes sont réelles ou pas, et ils sont encore moins nombreux à se demander si les règles de passation de marchés publics ont été violées ou pas. Personne ne se demande avec l’argent  de qui le maire s’est ainsi amusé, on ne s’interroge pas de savoir combien de salles de classes pourraient être construites ou réhabilitées, combien de rues pourraient être assainies, encore moins combien de centres de jeunes et loisirs pourraient être construits en utilisant ces dizaines de millions soustraites aux caisses de la mairie pendant des années. Il est vrai qu’à la place de la clameur publique, je me serais posé des questions sur l’origine de la richesse qui a permis au maire d’acquérir telle villa de la CEN-SAD, tel ou tel bien. Mais le plus important, selon les commentateurs qui s’indignent sur les réseaux sociaux, c’est que les pouvoirs publics n’auraient pas respecté les droits de la victime, Léhady Soglo.

L’écrivain Olympe Bhêly-Quenum qui vit à l’extérieur depuis plus de cinq décennies, s’est bruyamment indigné, en signant une violente supplique contre le Chef de l’Etat. Il y laisse entendre une confidence que lui aurait faite feu le cardinal Bernardin Gantin : « To o gbà … Olympe, je te connais, je sais que tu ne baisseras jamais les bras. » (« le pays a été brisé… ») lui aurait dit le prélat. Dans son « avertissement à Patrice Talon », l’homme de lettres le menace d’un coup d’Etat : « Si le président Patrice Talon veut un coup d’Etat, il s’y prépare », fulmine-t-il. Radieuse de colère, Rosine Soglo a déjà menacé le Chef de l’Etat de le tuer aussi : « Ou il me tue, ou c’est moi qui le tue», a-t-elle averti, ce vendredi. Je vous épargne la réaction hystérique de Bertin Coovi qui demande aux Béninois de boycotter les célébrations de la fête de l’indépendance parce que le ministre a posé un acte contre un maire qu’il soupçonne après quatre audits successifs, de faits tout à fait graves.  Et là encore, je ne suis pas sûr qu’on ait franchi les limites du tolérable, tant ce déchainement de haine surnaturelle, s’est mué en passion anti-Talon.

Imaginez un seul instant que l’affaire atterrisse effectivement sur la table d’un juge. Au Bénin, presque aucun politicien d’envergure ne va en prison. Jamais. Même s’il a pu commettre des crimes gravissimes, il faut un juge d’une autre planète pour le condamner. Je ne m’attends à rien d’autre qu’à un non-lieu qui laverait blanc le maire incriminé. Dans le cas où les soupçons du ministre seraient avérés, nous connaissons très bien notre pays.  Connaissez-vous des juges béninois capables de cracher sur un château généreusement offert sur la Côte-d’Azur en France ? Pensez-vous que nos magistrats sont des êtres lunaires au point de refuser des frais de scolarité payés à leurs enfants qui étudient dans des universités américaines ou françaises ? Et puis, qui vous dit qu’un bon avocat de l’Etat béninois n’irait pas « négocier » avec la partie adverse pour vicier la procédure ?

Ce qui  est intéressant, c’est que la précipitation dans laquelle le dossier est géré, permettra facilement aux avocats du maire de s’en tirer. Léhady sera lavé blanc comme neige, entouré d’une couronne de gloire qui le mènera aux prochaines élections. C’est de l’acharnement. C’est tout.

Par Olivier ALLOCHEME

 

 

 

 

 

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