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Le procès de Dangnivo, réouvert depuis le mardi 11 mars dernier, était à son troisième jour d’audience ce jeudi, marqué par une série de dépositions variées de prévenus et témoins. La présente session criminelle consacrée par le Tribunal de première instance de première classe de Cotonou à cette affaire de disparition mystérieuse de l’ex cadre du ministère des finances Pierre Dangnivo, voici près de 15 ans déjà, a fait défiler ce jeudi à la barre, déjà autour de 11 heures ce jeudi, un médecin-légiste au nom de Cédric Bigoh. Saisi par le juge de deuxième cabinet pour les prélèvements sur les enfants et parents de Dangnivo, sur la dépouille à la morgue, il devait également effectuer des prélèvements au niveau du laboratoire du professeur Lalayé à la Faculté des sciences de la santé, sur les parties molles qui y étaient. Ces prélèvements étaient destinés à une experte française qui était en séjour au Bénin. Ces prélèvements ont été effectués, en présence d’un huissier, d’un enfant et un parent de Dangnivo en une journée de novembre 2024. Un autre expert fera savoir lui, à la cour que les scellés posés sur les éléments conservés dans le laboratoire de Lalayè étaient des scellés fermés.
Invité à la barre pour certaines clarifications, Auguste Amoussou, frère de l’un des deux accusés principaux, Donatien Amoussou a relaté d’autres faits liés à ce dossier. Il a fait savoir, qu’à la suite de l’éclatement de cette affaire, il s’est rendu avec son frère au bureau du colonel Koumassègbo, alors chargé de la sécurité présidentielle sous Yayi. Ce dernier leur aurait dit qu’une commission d’enquête serait déjà mise sur pied. Il y aurait eu également un certain Prizo dans ce dossier qui aurait commencé à menacer Auguste Amoussou s’il ne joue pas le jeu attendu de lui. Il dit avoir appris par la suite que son frère Donatien était à la prison d’Akpro-Missérété et s’y est rendu pour le voir. Il révèle que quand il a pu voir Donatien, son frère lui a confié qu’on a voulu le tuer au niveau du Camp Guezo et que le chef service de renseignement l’a mis dans la malle arrière d’une voiture.
Un dignitaire vodoun emprisonné pour 5 ans
Était également invité à la barre hier, un certain dignitaire Thron Jérôme Tchiakpè a témoigné, après avoir passé 5 ans en prison dans ce dossier. Il raconte avoir été arrêté chez lui par une équipe constituée du gendarme Degbo et d’autres personnes. Il a été ensuite conduit à Ouidah où il a été mis en présence de Alofa qui lui devait de l’argent. Alofa l’a accusé d’être le commanditaire de l’assassinat de Dangnivo. Tchiakpè dit leur avoir demandé qui était Dangnivo. Il poursuit que son domicile a été perquisitionné. A cette occasion, à le croire, une grande peluche a été retrouvée. Questionné à propos, il rapporte avoir répondu aux agents qu’il voulait la mettre dans sa voiture. Est-ce pour la Mercedes garée dans la cour ? Il dit avoir répondu que la peluche était destinée à une autre voiture nouvellement acquise au garage pour des travaux.
Tchiakpè dit avoir été ensuite conduit au commissariat central de Cotonou auprès du commissaire Prince Aledji. Sur demande de ce dernier, ils se sont rendus au garage pour voir la nouvelle voiture. Après, poursuit Tchiakpè, il a appris son mécanicien et le soudeur propriétaire du garage ont été arrêtés. Le vendeur du véhicule lui a amené les pièces. Il dit avoir cru que l’affaire du véhicule prenait ainsi fin, mais il a été maintenu en prison. Le véhicule, confie-t-il, a disparu et n’a plus été retrouvé malgré des efforts de recherches.
Invité à la barre, Alofa répond qu’il connait Tchiakpè et révèle qu’ils avaient un contentieux de 500.000 FCFA du fait qu’il devrait faire à Tchiakpè un gris-gris. Alofa accuse Dégbo de lui avoir demandé d’impliquer Tchiapkè qui est un adepte et dignitaire du Thron surnommé Dada Gbezé.
Le colonel Sévérin Koumassègbo nie tous les faits
A la barre, le colonel désormais à la retraite Sévérin Koumassègbo, chef sécurité du président Boni Yayi au moment des faits, a indiqué qu’il connait Donatien Amoussou. Julien Pierre Akpaki (à l’époque directeur générale de l’ORTB), raconte-t-il, l’a appelé un vendredi pour demander à être reçu. Le colonel dit lui avoir donné rendez-vous pour le lendemain samedi, mais n’a pu honorer puisqu’il devait se rendre à un enterrement. Repoussé à lundi, le rendez-vous ne s’est pas tenu pour un oubli de sa part. Lundi, poursuit-il, le DG Akpaki l’a relancé lui notifiant que les personnes objet de sa demande de rencontre étaient encore revenues. C’est ainsi qu’il a décidé de les recevoir : Augustin Amoussou, Prizo et Amoussou Donatien.
Le nommé Prizo, poursuit-il dans sa déposition, leur a confié les circonstances dans lesquelles il a retrouvé un téléphone Zékédé dans un motel. Selon le récit rapporté à la barre par le colonel à la retraite, Prizo a déclaré avoir un ami Ibo qu’il l’a appelé pour lui dire qu’il a pris une chambre dans un motel. Dans l’incapacité de payer, ses effets ont été confisqués. Le motel appartenant à un Camerounais, lui Prizo a été sollicité par son ami afin d’aller lui récupérer ses affaires. Prizo leur a dit qu’une fois dans la chambre, rapporte toujours le colonel à la retraite, il a vu le livret de bord d’un véhicule et un gros téléphone. Il leur a confié avoir soustrait le téléphone des effets et l’a gardé. Prizo leur aurait précisé que la veille, il a aperçu son ami IBO dans un véhicule avec deux personnes et il appelait l’une d’elles Hounnon. Prizo dit avoir reçu un appel sur le téléphone en question et son interlocuteur lui disait que c’est le sien. Il a alors donné rendez-vous au supposé propriétaire du téléphone afin qu’il puisse le retirer. Seulement, Prizo leur aurait dit qu’il a reçu un autre appel après. Prizo aurait ajouté qu’au courant deux différents appels reçus, sa femme lui conseillé de se débarrasser du téléphone et qu’il lui créer des histoires. Pris de peur, Prizo, toujours, rapporte par le colonel, est allé déposer le téléphone zekédé à Ocean FM et a appelé après Donatien Amoussou pour l’en informer.
Poursuivant sa déposition, le colonel dit leur avoir demandé de revenir le lendemain après les avoir écoutés. Dans le déroulement des faits, lui, Prizo et Donatien se sont rendus à Océan FM pour prendre le téléphone. Le colonel dit avoir fait une décharge pour retirer le téléphone éteint. De retour à la présidence, poursuit le colonel Sévérin Koumassègbo, il a mis le téléphone à la charge et une fois allumé, il compose là-dessus son propre numéro. Lorsque son téléphone sonne, il constate que le numéro du téléphone récupéré à Océan FM était celui de Dangnivo.
Le colonel Sévérin Koumassègbo a également démenti n’avoir jamais connaissance de ce qu’un certain garde présidentiel aurait appelé l’ancien ministre Bernard Lani Davo pour qu’il remette une somme d’argent au détenu Donatien Amoussou. Il contredit ainsi les propos tenus par le ministre Lani Davi, invité mercredi dernier à la barre dans ce même dossier. Mais Séverin Koumassegbo reconnait avoir reçu une somme de 1 million de FCFA de la part du chef de l’État. En ce sens, il explique qu’il devait voyager un jour pour Parakou avec le chef de l’État. Ayant appris qu’il était chargé d’un dossier, il (le chef de l’État) lui a demandé de descendre et lui a donc remis les 1 million de FCFA. Mais il dit ne pas avoir de relation avec Enock Laourou à l’époque…
La cour exige des vérifications et convoque de nouveaux témoins
Avant de mettre un terme à l’audience de ce jeudi, le président de céans, Guillaume Lally, a demandé au Ministère public de vérifier si l’avenue de la Marina était en chantier en 2010. Il demande aussi à ce que le détenu soit extrait par une équipe pour montrer à quel endroit exactement il se serait battu avec le gendarme Lucien Degbo à l’époque à la baie des officiers. Le président de céans a également souhaité qu’il y ait une équipe qui se positionne au niveau du bureau d’Enock Laourou pour vérifier si un bruit pourrait être entendu du bureau jusqu’au niveau de la baie. Il a par ailleurs demandé à avoir le procès-verbal d’arrestation du sieur Alofa. L’ex-Directeur Général de l’Ortb cité dans cette affaire est également convoqué à la barre aux prochaines audiences. Le président de céans demande aussi de faire venir toutes les feuilles de notes d’audience du palais présidentiel à l’époque pour vérification.
Enfin sur insistance du ministère public l’audience a été suspendue ce jeudi autour de 18h30mn et sera reprise le mercredi 19 mars prochain.