Archives de catégorie : Sous l’Arbre à Palabres

Expérience TEBE, nouveau président du parti Mouvement populaire de libération (Mpl) ‘’Sous L’Arbre à Palabre’’: «Le MPL n’a encore rien vu de social sous Talon»

Views: 32

Le nouveau président du parti Mouvement populaire de libération (Mpl), Expérience TEBE

Le « hautement social », socle de la nouvelle mandature du Chef de l’Etat Patrice Talon, peine à prendre de l’envol. C’est du moins le constat fait par le Président du Mouvement Populaire de Libération (MPL), Expérience Tèbè, malgré les efforts consentis par le Gouvernement et son chef pour alléger la crise qui sévit au Bénin. « Nous aurions voulu voir notre gouvernement réagir plus promptement avec des mesures concrètes face à cette situation. Ce que nous tardons à voir alors que nous attendons du hautement social », déclare-t-il lors de son passage dans la rubrique phare de L’Evénement Précis, Sous L’Arbre à Palabre, le dimanche 11 juillet 2021. Au cours de ces échanges avec les journalistes, l’invité n’a pas manqué de donner des nouvelles sur la santé de son parti, les raisons de son absence à la dernière présidentielle, la désignation de Paul Hounkpè comme chef de file de l’Opposition et bien d’autres sujets qui défraient l’actualité.

Et si on en parlait

Vous n’êtes pas sans savoir qu’il y a eu une vague d’arrestations il y a quelques jours à l’ANaTT. Est-ce que c’est la preuve de la lutte du gouvernement pour la bonne gouvernance selon vous ?
C’est avec un cœur serré que j’aborde en ce moment cette question qui anime l’actualité nationale, où un jeune cadre se voit plongé au milieu d’un scandale qui pousse tout le monde à l’étonnement. Mais de là à demander si c’est une preuve de la lutte pour la bonne gouvernance, je dis que cela ne suffit pas. Parce que sous le régime précédent, on a vu même des ministres, des DG, aller en prison pour des questions de détournement dans le cadre de cette lutte-là. Mais cela n’a pas suffi pour qu’on dise que ce régime a eu la palme d’or de la lutte pour la bonne gouvernance. Je ne vais pas dire que c’est un épiphénomène. Seulement, la situation précise, puisque c’est de l’ANaTT que vous parlez, me dérange un peu parce qu’il s’agit d’un jeune. Vous savez, j’interviens ici en qualité de responsable d’une formation politique qui se réclame de la jeunesse. Et de notre côté, le changement que nous souhaitons au niveau de la gouvernance dans le pays, nous voulons que les jeunes soient plus associés à la gestion de l’Etat. Nous voulons qu’aux postes de responsabilité que ce ne soit plus les mêmes personnes. Mais si l’occasion est donnée à certains jeunes qui, au lieu de montrer le bon exemple, vont s’empêtrer dans des scandales du genre, vous comprenez ma difficulté à parler de cela. Et moi je profite pour inviter tous les jeunes qui ont eu la chance d’être nommés à des postes de responsabilité qu’ils ont l’impérieux devoir de bien se comporter. Qu’ils fassent de sorte à être les meilleurs afin de permettre à d’autres jeunes d’avoir également la possibilité. C’est important pour nous et surtout pour moi personnellement. Parce que jeune, j’avais occupé des postes de responsabilité dans l’administration publique. Si aujourd’hui, je me plais dans ma peau d’opposant au régime, c’est parce que je n’ai pas de casserole. Parce que, ces questions-là, lorsqu’on est jeune, il faut être très prudent quand on vous confie la gestion. Ce qui me dérange dans cette affaire aussi, est que la structure concernée a un conseil d’administration et un ministre de tutelle. Je ne comprends pas comment on a pu laisser faire pour que la situation ait pu durer autant et soit aussi profonde. De toutes les façons, ils sont au niveau de la justice et les responsabilités seront situées. Mais pour ma petite expérience, je pense que si les structures de contrôle faisaient leur travail en amont, il n’y aurait pas autant de gap. Par exemple, ce qui choque les populations, c’est la question des 34millions de boissons. C’est certainement inscrit dans leur budget. Et ils font ça chaque année. Et le conseil d’administration n’a pas vu cette irrégularité, encore moins le ministre de tutelle et cela passait et a pu faire 5ans avant qu’on n’en parle maintenant. C’est cela qui est regrettable pour nous. Il faut qu’à tous les niveaux les structures de contrôle travaillent en temps réel pour que les situations du genre ne perdurent. Ce n’est qu’à ce prix qu’on pourra parler de bonne gouvernance.

Pourquoi le MPL a disparu juste avant les élections présidentielles ?
On n’a pas disparu. C’est que l’opinion était habituée à la fougue des jeunes du MPL, aux déclarations. Vous savez, dans la vie, il faut évaluer ce que vous faites et réajuster à temps. Sinon vous irez dans le décor. Tirant donc leçon des législatives de 2019, après les communales de 2020, pour aborder le virage de 2021, la direction du parti a défini un certain nombre de stratégies. Parce qu’on s’est retrouvé sans élu pour avoir de parrain. Donc pour pouvoir régler cette question, parmi les stratégies qui avaient été retenues, c’était d’éviter les déclarations à l’emporte-pièce et de travailler en sourdine pour aller toucher la situation de parrainage. Donc, la priorité était de travailler pour obtenir ces parrains-là. Alors, après les communales, nous avons saisi les deux partis qui détenaient les parrainages pour pouvoir entrer en discussion avec eux. Malheureusement, ils sont rentrés dans le dilatoire pour ne pas créer le cadre de discussion qu’il faut pour obtenir cela.

Cela vous a empêché d’aller aux présidentielles….
C’est ce qui s’est malheureusement passé. C’est la seule chose qui nous a bloqués. Et nous avons évité d’étaler à la place publique tout ce que nous avons fait dans ce sens. Parce que nous avons eu à discuter avec les élus individuellement. Nous avons entendu des choses.

Et qu’est-ce que ces élus-là ont dit ?
Nous avons eu des promesses de certains élus qui à la dernière minute ont tous désisté.

Par peur ?
Je ne sais pas. Vous leur poserez la question après.

Votre parti a suivi les secousses de la présidentielle du 11 avril 2021. Selon vous, y avait-il eu exclusion de certaines candidatures ?
Tout le peuple béninois dans son entièreté a vu qu’il y a eu exclusion programmée de certaines candidatures. Et ça, il faut avoir le courage et l’honnêteté de le dire. Nous avons perçu ça dès lors qu’au niveau de l’Assemblée nationale, l’opposition n’a pu participer aux élections législatives en 2019. En 2020, après cette situation de 2019, il y a eu un dialogue qui a accouché d’une révision du code électoral, de la constitution, instituant désormais le parrainage qui est une pièce maitresse pour aller à la présidentielle. C’est alors que pour anticiper sur cette situation que nous avons vécue, nous nous sommes battus des pieds et des mains pour pouvoir participer aux communales. C’est justement à ce niveau que nous n’avons pas été compris par beaucoup. Notre position à l’époque était simple. Nous avons estimé qu’on nous a déjà imposé le code électoral. La constitution l’a déjà rendu obligatoire. On n’avait plus de marge de manœuvre. La seule marge de manœuvre qui nous restait, c’était de répondre présent aux communales, avoir des maires pour pouvoir participer en toute tranquillité aux présidentielles. C’était notre position. Parce que nous avons déjà vu le mal venir. Si nous-mêmes, on ne détient pas des maires, tout peut arriver. Finalement vous avez vu tout ce qui s’est passé.

Pendant que le MPL n’a pas déposé sa candidature sans le parrainage, d’autres l’ont fait et ont été recalés après. Vous auriez pu poser l’acte et on saura que vous êtes contre les dispositions du code électoral….
Qu’il vous souvienne qu’après le dépôt des candidatures, nous avions tenu une conférence de presse au Chant d’Oiseau pour fustiger les collègues de l’opposition qui sont allés déposer les dossiers. En ce moment encore, nous n’avons pas été compris. Nous savons les dispositions qui régissent les élections à la magistrature suprême dans notre pays. Ces dispositions du code électoral précisent qu’il faut avoir des parrains. Nous (l’opposition) n’avons pas pu avoir ces parrainages. Les autres candidats ont eu le même problème que nous. Ils ont eu des promesses fermes, mais à la dernière minute les gens se sont rétractés. Maintenant que vous n’avez pas eu le parrainage, vous allez déposer un dossier incomplet. Vous rendez la tâche facile à la CENA qui a rejeté le dossier comme étant incomplet. Conséquence, vous avez validé le processus auquel vous n’avez pas réellement pris part. C’est pour cela qu’au MPL, nous avons décidé de ne rien déposer. C’est vrai que les militants tout comme d’autres nous ont mis la pression en pensant qu’en allant déposer, il pourrait y avoir un miracle après ou qu’on s’assèye et dire qu’on va enlever ces dispositions. C’était leur point de vue. Mais c’est faux. Il ne faut pas être dupe. C’est pour ça que nous avions condamné ceux qui ont fait ainsi. Si vous déposez un dossier incomplet, vous avez validé le processus. Nous avions pensé qu’il aurait été plus opportun pour l’ensemble de l’opposition de ne pas mettre pied là-bas, de laisser simplement les candidats de la mouvance y aller et à nous de nous réunir une énième fois pour dénoncer le processus, pour dire : « Voilà, nous sommes exclus, on a institué une disposition de parrainage sachant bien que l’opposition n’a aucun parrain. On nous a dit que les élus de la mouvance peuvent nous parrainer. Ils ont tous refusé, et voilà. C’est ce qui s’est passé. » Nous, nous n’avions pas déposé et nous avons dénoncé ceux qui l’ont fait.

Mais les partis d’opposition tels que FCBE et la dynamique RLC ont eu le parrainage …
C’est des questions douloureuses pour nous. Tout ça relève d’un passé que nous essayons de conjuguer et de prendre toutes nos dispositions pour l’avenir, parce que ne nous voilons pas la face. Le peuple souffre, et je sais que vous le savez autant que nous, que la situation n’est pas du tout reluisante dans notre pays, et il faudrait que nous acteurs politiques qui nous réclamons de l’opposition, qu’on se prenne un peu plus au sérieux. Il est nécessaire qu’on se prenne plus au sérieux afin de corriger le tir.

Voulez-vous dire que les candidats de la FCBE et de RLC n’ont pas été sérieux ?
Non, ça c’est vous qui le dites. Ce que je dis plutôt, je parle de l’opposition en général, sans nommer, pour dire qu’il est important qu’on se prenne plus au sérieux. Il est important que nous puissions regarder de plus près la misère du peuple que nous défendons, que nous puissions nous départir de nos intérêts personnels, de nos égos pour répondre réellement au sacerdoce de défendre les plus démunis, défendre la misère que nous observons, que de faire des jeux de mots. C’est important pour nous au MPL. Et c’est pour ça que nous sommes mal compris de nos aînés et même d’une partie de la population, parce que pour nous ce qui importe, nous croyons en notre capacité à nous organiser et à changer le cours des choses. Pour nous, contrairement à ce qui est véhiculé, la peur, tout le monde est tétanisé, la peur a réussi à gagner tout le monde, et aujourd’hui, on pense qu’il s’agit d’un régime invincible. On ne peut rien faire, il vaut mieux croiser les bras, il faut regarder, non. Nous, nous pensons que si l’opposition se prend plus au sérieux et offre un spectacle plus digne des oppositions qu’on connait ailleurs, on arriverait à changer le cours des choses. Et c’est ce que nous nous préparons à faire les semaines, les mois à venir.

Est-ce que selon vous, c’est les exclusions qui sont à la base des violences électorales ?
Lorsqu’une bonne partie de la classe politique est exclue des compétitions électorales en 2019, en 2021 couronné par ce que l’on sait, comprenez que la somme des frustrations combinée aux émotions de certains peut facilement amener des situations de violences. C’est pour ça que même à la veille des présidentielles, nous avons appelé nos militants à beaucoup de circonspections, parce qu’il ne faut pas qu’on se laisse aller aux émotions. On savait que l’opposition avait perdu d’avance, et qu’en face de la machine qu’on nous imposait, les rapports de force n’étaient pas à notre faveur. Donc, il ne fallait pas aller l’affrontement inutile.

Qui a organisé les violences selon vous ?
Dans cette situation, il est difficile d’indexer X ou Y comme étant auteur de violences. Ce que je disais tantôt, ce sont les frustrations de ceux qui se voient faibles, ceux qui se voient opprimés combinées à une mauvaise lecture de la situation qui ont provoqué ça.

Quelle est votre appréciation par rapport à la tenue de ce scrutin, trois mois après ?
Ce qu’on peut dire, c’est que nous avons perdu une bataille, et pour nous au MPL, nous n’avons pas perdu la guerre. La guerre va continuer en peaufinant nos stratégies. L’Opposition a perdu une bataille. Nous l’avons souvent dit. Ça fait mal parfois, mais c’est la vérité. Nous étant jeunes, on n’est pas dérangé de dire ce que nous croyons être vrai. Si un certain Talon était de l’opposition, et qu’on imposait cette disposition qui exclut là, pensez-vous qu’il n’aurait pas pu obtenir ces parrainages-là ? Honnêtement, nous tous, nous connaissons la vérité. Alors, si nous opposants d’aujourd’hui, on n’a pas pu infiltrer ce dispositif, on n’a pas pu faire exploser ce dispositif comme nous l’avons promis, c’est parce que quelque part, nous n’avons pas été à la hauteur de la ruse qu’on nous a opposée. Pour nous, il faut être honnête et reconnaître ça. On nous a opposé une ruse et tout, on nous a brimés, mais nous n’avons pas été à la hauteur de l’affaire. Pour nous, c’est ça et il faut qu’on tire toutes les leçons et nous organiser pour que ça ne nous arrive plus.

Qu’est–ce que le MPL pense des arrestations de Madougou, Aïvo et autres qui sont des acteurs de l’opposition ?
D’abord, dame Réckya Madougou a été arrêtée le 3 mars 2021, et déjà le 4 mars, nous sommes la première formation politique à réagir par un communiqué, fustigeant cette arrestation. Nous avons trouvé que quel que soit ce qu’on lui reprochait, dans les circonstances où ça se produisait, cela n’était pas de nature à favoriser la paix, et que ça pouvait créer des situations conflictuelles. Nous avions publié ce communiqué avant même que le parti qui voulait la présenter ne réagisse bien plus tard. Nous avions demandé que diligence soit faite au niveau de la justice pour qu’on expose les faits de façon claire, et que très vite elle recouvre sa liberté et sa famille, parce que nous on a pensé qu’on a besoin de tous les enfants du pays pour apporter leurs petites touches à la construction de la Nation. Aujourd’hui, les choses sont lancées, ça traine. Il y a eu d’autres arrestations. On évoque des faits suffisamment graves dont on n’a pas connaissance, même les avocats des intéressés n’ont pas accès au dossier. Vous convenez avec moi que nous devons prendre un peu de retenue pour aborder cette question.

C’est-à-dire que des militants MPL n’ont pas été arrêtés ?
Nous avons quelques-uns.

Que leur reproche-t-on ?
Je suis peiné de l’avouer, mais nous avons été les pionniers surtout en 2019 dans la contestation violente qu’il y a eue. La main-d’œuvre, les stratégies, tout ce qui s’est passé, c’est nous. Mais après cela, on a fait le point. Nous avons trouvé que ça a été contre-productif. Nous avons perdu en face de la machine qu’on nous a opposée. Et c’est depuis lors que nous avons pris un peu de recul par rapport aux revendications violentes. Certains parmi nous continuent de croire que c’est la voie à suivre. C’est ainsi que de façon isolée certains parmi nous ont posé des actes qui, malheureusement ont fait que aujourd’hui, nous avons des gens en détention et d’autres en exil.

Donc vous ne répondez pas de ces actes ?
Non. On ne peut pas répondre de ces actes puisqu’il s’agit d’initiatives personnelles. Parce que nous, responsables du parti avons appelé nos compatriotes à s’abstenir de poser certains actes. Lorsque nous sommes venus aux encablures de la présidentielle, nous avons saisi les autres formations politiques de l’opposition. Il y avait le Front pour la restauration de la démocratie, Les Démocrates et toutes les entités de l’opposition. On les a contactés aux fins d’échanger pour adopter une conduite commune en face de ce qui voulait se passer. A cette rencontre, le président Houdé a répondu dans les 24h. Il y avait tous les responsables des organisations. Nous leur avons dit ceci: « Nous, nous avons épuisé nos cartouches. Nous savons aussi que la solution ne peut être que dans la concertation et dans l’ensemble. Nous sommes relativement les plus jeunes. Ce que nous voulons, sans rentrer dans la stratégie de ce qui veut se passer, nous nous mettons à la disposition de l’ensemble de l’opposition pour être solidaire de tout ce qui va se passer. Donc en prenant la décision de faire quoi que ce soit, informez-nous quelques heures à l’avance. Dîtes-nous le rôle que vous souhaitez que les jeunes jouent et nous, on se met en ordre. Nous sommes prêts à tout. Mais malheureusement, on n’a pas eu de retour de ce qui est à faire. Donc la veille des élections, on a demandé à nos militants de rester chez eux. Parce que nous avons encore en notre sein, les vestiges de 2019.

Juste après les arrestations de Réckya Madougou et autres, il y a eu un calme plat dans le pays. Est-ce que ça n’explique pas que quelque chose s’est passé ?
Nous, nous ne sommes pas surpris par cette situation. Nous l’avons dit, en politique comme partout ailleurs, lorsque les rapports de forces ne sont pas en votre faveur, vous faites attention aux actes que vous posez. Si on engageait une contestation violente, est-ce que ce serait en notre avantage ? En réalité, ces arrestations ont davantage instauré la peur au sein des populations. Ce qui a amené les gens à se rétracter dans leur coin. Déjà les gens ne trouvent pas le minimum qu’il faut pour survivre. Et maintenant vous leur demandez d’aller se retrouver dans les liens de la détention ? Non. C’est ce qui explique le calme plat dont vous parlez.

Selon vous, quel a été le rôle de l’ancien président Boni Yayi dans cette affaire ?
Je ne suis pas son porte-parole. Je ne suis pas de son parti et je ne sais le rôle qu’il a joué.

Vous aviez été empêché entre temps de faire le congrès de votre parti à Tchaourou
Ce sont des questions que nous ne souhaitons plus aborder parce que l’ensemble de toutes ces choses nous a conduit à la situation que nous vivons aujourd’hui. Ce qui nous intéresse aujourd’hui au sein du parti MPL, c’est comment nous en sortir. Si nous ne trouvons pas des solutions à la situation que nous vivons aujourd’hui, d’ici à là, ce serait compliqué. Ce sera un échec pour la jeunesse parce que quand ça devient dur, c’est les plus jeunes qui doivent prendre le devant et dire non. Les ainés ont essayé de faire de leur mieux. Nous ne pouvons pas leur jeter la pierre. Maintenant, si nous ne pouvons pas être capables de nous organiser pour trouver des solutions aux maux qui nous minent, ce serait un échec. C’est ce que nous refusons de permettre et c’est pour cela que nous commençons par nous organiser.
En suivant votre développement, on a comme l’impression que le pays est en crise
Les gens vivent dans des situations de résignation où ils ne peuvent plus dire ce qu’ils veulent exprimer. Pour nous, il y a bien une crise. Il revient à l’exécutif de trouver les voies et moyens de dégel et de ramener au sein du peuple une cohésion, une harmonie et toute chose nécessaire au développement que nous souhaitons.

Que pensez-vous de la désignation de Paul Hounkpè comme chef de file de l’opposition ?
Nous avons été surpris par cette désignation, au même titre que le peuple béninois, de voir un décret pris par le conseil des ministres pour nommer Paul Hounkpè comme chef de file de l’opposition. Un chef de file de l’opposition doit se faire reconnaitre dans un travail de discussion avec les partis de l’opposition. S’il est vraiment chef de file, il doit pouvoir réunir toute l’opposition, échanger avec elle, définir les stratégies idoines pour sortir de la crise dans laquelle nous sommes.

Vous voulez dire qu’à aucun moment Paul Hounkpè n’a pris contact avec vous ?
A aucun moment mais je le dédouane d’une chose. Quand nous tenions notre conseil national il y a quelques semaines, nous avions invité tous les partis politiques de l’opposition et il s’est fait représenter.

Vous attestez qu’à la dater d’aujourd’hui, il n’y a eu aucune relation entre le chef de file de l’opposition et le MPL ?
Aucune relation.

Vous pensez qu’il n’a pas la caution de ce qu’il fait ?
C’est ce que vous comprenez. Même si Paul Hounkpè bénéficie d’une certaine légalité, nous savons tous que la légitimité n’y est pas. Qu’est ce qui lui a permis d’être nommé chef de file de l’opposition ? Est-ce que l’opposition a réellement été aux dernières élections ? C’est des réponses que nous connaissons mais pour nous, il est inutile de nous attarder sur ces questions parce qu’elles ne nous apporteront rien. Ce qui nous importe aujourd’hui, c’est les échéances de 2023. Nous sommes souvent à l’avant-garde des situations. La clé de la situation dans laquelle tout le peuple s’est empêtrée est les législatives de 2023. Et pour ça, l’opposition doit se préparer dès à présent, se donner les moyens de ne plus être brimée de quelque manière que ce soit sinon, la situation va perdurer.

Lors de son investiture, le chef de l’Etat a appelé à faire taire toutes les querelles et à faire face à l’ennemi commun qu’est la pauvreté. Qu’en dites-vous ?
Il est dans son rôle. Il lui revient de trouver solution aux problèmes que nous rencontrons. Mais, il a beaucoup à faire pour pacifier le pays, à réunir le peuple béninois toutes tendances confondues pour qu’on puisse se refaire confiance, espérer se mettre sur les rails du développement que nous souhaitons.

Le président Talon a également promis faire du hautement social
Nous attendons toujours.

Donc il n’a pas encore commencé ?
Nous n’avons encore rien vu de social. Plus encore ces jours qui passent où il y a une inflation des prix de produits de première nécessité et une cherté sans précèdent du cout de la vie. Et il n’y a encore eu aucune réaction conséquente de la part du gouvernement. Même si c’est une situation qui dépasse les frontières, nous avons vu ailleurs des actions qui tendent vers le social. Nous aurions voulu voir notre gouvernement réagir plus promptement avec des mesures concrètes face à cette situation. Ce que nous tardons à voir alors que nous attendons du hautement social.

Qu’attendez-vous à voir comme mesure ?
Il y a une panoplie de mesures

Mais il y a l’interdiction de l’exportation des produits vivriers…
C’est une mesure basique et c’est ce qui est fait à chaque situation. Nous sommes tout le temps sur le terrain. J’ai vu au niveau de certaines zones frontalières, les dispositions qui ont été prises pour éviter que les produits vivriers aillent vers l’extérieur. Mais, ce n’est pas encore ce qu’on veut. Cette mesure à elle seule ne suffit pas pour endiguer la situation que nous vivons. Nous avons quelques contributions à faire par rapport à cette situation et un comité est mis en place pour réfléchir sur cette contribution. La situation est grave, le peuple souffre réellement et il faut agir. Nous ne sommes pas au pouvoir. Il y a une équipe qui est là et qui prend les décisions. C’est sur les questions politiques qu’ils sont imperméables et il ne faut pas que nous, partis politiques de l’opposition, chantions tous les jours pour dénoncer les problèmes du code électoral, de la charte des partis. Il faut penser au quotidien des Béninois, quitte à eux d’aviser ou non. Nous avons constaté que la classe politique de l’opposition ne critique que sur les aspects liés à la politique.

On dirait que quelque chose a changé dans votre vision d’opposant ?
Cela m’amène à vous rappeler la première recommandation issue de notre conseil national : le parti reste profondément ancré dans l’opposition dans laquelle elle est née, suivant les orientations du congrès de Savè, le parti reste dans l’opposition. S’agissant des changements auxquels vous faites allusion, quand on fait quelque chose, il faut faire le point en avançant. Nous avons expérimenté des méthodes qui n’ont pas connu des résultats. Aujourd’hui, nous avons décidé d’aller plus en profondeur des situations. Ce n’est pas par la violence que nous pourrons obtenir des résultats. Une chose est sûre : nous ne pouvons rien obtenir sans dialoguer. En premier, nous avons souhaité que le chef de l’Etat discute avec toute la classe politique. Nous l’avions dit à l’époque mais il y a des chefs de partis d’opposition qui ne voulaient pas l’entendre de cette oreille parce que selon eux, on ne discute pas avec un dictateur et on ne peut aller aux élections avec lui. Maintenant que tout a pourri, il faut qu’on s’asseye pour parler. Ce que nous pensons, c’est de peaufiner des stratégies qui peuvent nous apporter des résultats.

Une fois réélu, le président a reconduit la totalité de son équipe pour aller plus loin dans les réformes. Qu’en dites-vous ?
Le Chef de l’Etat est dans son rôle. Il est dans son rôle sauf que pour nous, nous avons trouvé ça bien curieux, parce que presque partout dans le monde entier, nous sommes habitués après les élections à ce que les présidents élus recomposent leurs équipes. Parce qu’il y a des gens qui, certainement, n’ont pas donné satisfaction. Ça, c’est à son bon vouloir. Peut-être qu’ils estiment que tous ont donné de résultats, c’est pour ça qu’il les a reconduits. Pour nous, cela importe très peu. La question qui nous préoccupe, c’est le quotidien des Béninois, c’est le chômage des jeunes, c’est la misère, la précarité dans laquelle vivent les Béninois. C’est ça qui nous importe. Qu’il nous règle ces problèmes-là le plus rapidement possible, et qu’on cesse de rester dans les annonces.

A part vos quelques points critiques, est-ce que Talon a fait quelque chose de bien depuis 5 ans ?
Il n’est pas de mon rôle de venir relever ce qu’il a fait de bien. Il y a des gens dans la République qui sont payés pour ça. Et je crois qu’ils le font si bien. Moi, ma préoccupation, c’est les problèmes que je pose et qui n’ont pas encore trouvé de solution. C’est sur ça que je m’appesantis.

Donc la dématérialisation des services administratifs, l’asphaltage et tout ça vous laissent indifférent ?
Non, je ne peux pas dire que ça me laisse indifférent. Nous voulons le meilleur. Par exemple, par rapport à la dématérialisation. C’est une bonne chose. Les gouvernements précédents ont scandé ça. Mais qu’on passe des slogans aux faits, aux réalités et que tout le peuple béninois puisse vivre ces faits qu’on évoque. Par exemple, au niveau de l’ANIP, moi-même j’ai fait l’expérience. On a dit qu’on est dans la dématérialisation, on est dans la célérité, mais les cartes biométriques qu’on demande, j’ai demandé ça depuis des mois, je ne l’ai pas encore obtenue ; d’autres sont dans des rangs interminables tous les jours devant l’agence sans même avoir la chance d’être reçu. C’est de ça qu’il s’agit. C’est-à-dire qu’on laisse les slogans et qu’on passe aux actes concrets. « On a pensé ça, on a voulu ceci, on a voulu ça ». C’est bien beau. Ou « le développement, ça y est. On est en train ». Tout ça c’est beau, mais que les béninois vivent dans leur quotidien les retombées de ces slogans. S’il y a développement, il faut que tout le monde soit heureux, soit content, qu’on rencontre tous les béninois heureux dans la rue. C’est le développement. Si la résilience que le Bénin a pu obtenir en face des effets Covid-19 est effective, que cela se ressente au niveau des béninois. C’est ce que nous voulons, c’est ce que nous demandons. C’est tout.

Quelles sont les grandes recommandations issues du conseil national de votre parti ?
Au premier plan des recommandations, c’est que le parti reste profondément ancré dans l’opposition. Entre autres encore, il a été recommandé de prendre langue avec les autres formations politiques pour amener tout le monde à s’asseoir pour discuter. Il a été aussi recommandé au directoire de prendre toutes les mesures idoines pour la participation effective du parti aux législatives de 2023. Il nous a été également recommandé de demander aux institutions de la République de jouer effectivement leurs rôles. On a vu ces derniers jours le Médiateur de la République qui a commencé quelque chose. Ça fait partie de nos souhaits pour que réellement le dégel de la crise latente que nous vivons soit effectif. Que les rancœurs qui animent les uns et les autres puissent cesser, et qu’on puisse s’asseoir et discuter.

Qu’est-ce qui explique ce changement rapide à la tête du parti?
Pourquoi vous trouvez ça rapide ?

C’est le parti qui a changé le plus rapidement de tête depuis 1990 …
Peut-être oui, parce que c’est aussi le parti qui apportera beaucoup de choses à notre pays. D’abord, c’est le parti sur qui peuple compte beaucoup. Les attentes sont énormes. Et deux, nous sommes convaincus que c’est nous qui allons également apporter des solutions concrètes aux problèmes que nous vivons aujourd’hui. Retenez ceci en résumé : nous, on n’attend pas. Nous avons pris des engagements …

Monsieur Tèbè, j’ai l’impression que Monsieur Korogoné a tué le parti et vous a filé la patate chaude …
Non, pas du tout. Le MPL est plus que vivant. Nous allons continuer par vous surprendre. Tout ce que vous avez observé comme changement au niveau du parti participe d’une stratégie bien mûrie que nous mettons en œuvre. Et aujourd’hui, de façon globale sans même aller dans les détails, ce que je peux vous dire, tout ce que nous avons à faire, c’est faire en sorte qu’en 2023, vous voyez le MPL sur la ligne de départ.

Quel est le statut de Korogoné aujourd’hui au sein du parti ?
Il n’est pas sorti du parti.

Quel est son statut ?
Nous avons le même statut. Nous sommes tous des militants.

Simplement ? Quitter le poste de président pour devenir un simple militant …
Ce n’est pas exactement cela.

Quelles sont les malversations qu’il a commises ?
Non. Il n’a pas commis de malversations.

Etes-vous sûr que demain on ne va pas entendre cela ?
J’en suis sûr. Ça je peux vous rassurer. Il n’y a pas eu de malversations.

Ou il y a eu une crise à l’interne ?
Aucune crise à l’interne.

Mais vous n’avez pas attendu un congrès avant de procéder à ce changement ?
Nous avons suivi exactement les règles de notre parti. Tout ce que nous faisons, nous suivons les textes de notre parti. Nous avons fait ce changement par rapport aux possibilités que nous offrent les textes du parti.

Vous semblez miser sur les législatives de 2023. Or vous êtes un parti qui n’a aucun élu, on ne vous a jamais vu à une élection. Qu’est-ce qui vous donne autant d’assurance ?
Ce que nous regrettons le plus au MPL, c’est notre non-participation aux communales de 2020. Sinon, aujourd’hui, il y a certaines questions qu’on ne poserait plus. Quand on parle de notre participation aux législatives de 2023, c’est beaucoup plus sérieux pour nous que ce que les gens voient. C’est ce qui explique les stratégies qui sont en train d’être mises en œuvre.

C’est pour ne pas disparaître de la carte politique ?
Tout à fait. Ce que vous dites compte beaucoup. Si nous ne participons pas aux législatives de 2023, c’est que nous sommes morts. Alors, si le challenge est à ce niveau, comprenez qu’aucun sacrifice n’est de trop pour qu’on y arrive. C’est vrai, c’est pour 2023, mais ça se prépare maintenant. Vous verrez les jours à venir, nous allons dévoiler la feuille de route du directoire par rapport à tout cela.

Vous allez faire de nouveaux recrutements ?
Des recrutements massifs sont déjà en cours, et il y a de profondes mutations qui vont s’opérer au niveau du parti. Tout ça pour pouvoir simplement tenir les engagements pris depuis le congrès de Savè. Nous ne voulons pas que d’ici à là, on retrouve également ces jeunes qui ont promis faire des miracles, qu’on n’ait pas pu finalement relever le défi. C’est des questions qui fouettent aussi l’égo de certains parmi nous. Il faut qu’on réussisse.

Et s’il vous était donné de conclure cet entretien, que diriez-vous ?
Ce que je dirai surtout, c’est une adresse à l’endroit de la jeunesse de mon pays. Je leur demanderai de ne pas désespérer, de garder espoir surtout de savoir que c’est notre travail quotidien qui va nous libérer. Et qu’il n’y a aucune possibilité de laisser place à la paresse et d’espérer s’en sortir. J’ai constaté que de nos jours, nos jeunes frères s’adonnent beaucoup plus à la facilité. Moi ça me dérange et je veux que la jeunesse de mon pays prenne conscience que nous devons redoubler d’ardeur au travail et que le travail nous aide à relever les défis de notre pays. En tant que responsable d’un mouvement politique, je demande à tous mes compatriotes de s’apprêter pour qu’on se donne la main et relever notre plus grand défi. Je souhaite que la jeunesse de mon pays mette son ingéniosité en œuvre pour pouvoir faire une révolution pacifique qui va amener les jeunes valeureux qui ont des compétences à prendre les devants de la scène et montrer qu’on peut faire mieux autrement.

Carte d’identité: Un ingénieur en politique

Expérience Tèbè est né à Savalou plus précisément à Tchètti, le 12 janvier 1977. Ingénier civil de formation, il est cadre au ministère de l’enseignement supérieur depuis 2002. Tout ce parcours, il l’a fait à Cotonou. Parti de l’Ecole Primaire Nouveau Pont où il fait le CEP, pour le Ceg Godomey où il a eu le Bepc en 1994, il décroche le BAC série D au Lycée Descartes en 1997. A l’université, il fait le génie civil au Collège Polytechnique Universitaire (devenu EPAC), sous l’impulsion de son père. Cadre de l’administration béninoise, celui-ci lui a imprimé des valeurs de rigueur, d’efficacité dans le travail et de loyauté. C’est en 2003 qu’il devient ingénieur en génie civil, Plus tard, il obtient un master en économie des transports et un autre en gestion de projets. Mais il l’avoue lui-même, Expérience TEBE détestait vraiment la politique jusqu’à ce qu’il commence sa vie professionnelle. En tant que cadre au ministère de l’enseignement supérieur, il a surtout supervisé les projets financés par la BID et la BADEA ainsi que d’autres financements arabes pendant un long moment. En 2013, il devient directeur des infrastructures de l’équipement et de la maintenance au niveau de son ministère. En 2014, il entre à l’Agence béninoise des grands travaux comme conseiller technique du Président de la République. L’agence est dissolue en 2016. Secrétaire général du Mouvement Populaire de Libération à la création du parti en 2019, il en devient président en juillet 2021. Quand on lui demande quels conseils il peut donner aux jeunes qui veulent s’engager en politique, il n’hésite pas : « Moi je ne souhaite pas que quelqu’un qui n’a pas l’ambition d’aider les gens et qui n’a pas les reins solides s’aventure à dire qu’il veut prendre position dans la politique. »

Intimité: Une vie d’ascète

Marié et père de trois enfants dont l’aîné est déjà à l’ENAM, Expérience TEBE mène une vie d’ascète. Il dort très peu et mange une fois par jour. Une conséquence de ses années d’élève et d’étudiant assidu et studieux. Son plat préféré ? La pâte et la sauce.

La Rédaction

Présidentielle 2021: La Cour constitutionnelle a réalisé une économie de 21% sur son budget

Views: 17

Joseph Djogbénou, Président de la Cour Constitutionnelle

La salle d’audience Mgr Isidore de Souza de la Cour constitutionnelle a servi de cadre, ce vendredi 2 juillet, à un séminaire-bilan sur l’élection présidentielle du 11 avril 2021. Cette rencontre a été ouverte par le Président Joseph Djogbénou. Il ressort du point financier fait que la Haute juridiction a réalisé une économie de 21% de l’enveloppe financière mise à sa disposition par le gouvernement.

Jeter un regard sur les activités menées par la Cour constitutionnelle lors de la présidentielle de 2021 et tirer les leçons pour les échéances futures. Tels sont les objectifs visés par les responsables de la Haute juridiction en initiant ce séminaire-bilan. « Nous sommes habitués en ce qui concerne la Cour constitutionnelle à assurer et à assumer les responsabilités qui sont les nôtres, mais l’élection du président de la République du 11 avril 2021 n’est pas à l’image des élections antérieures sous l’empire de la même Constitution puisqu’en 2019, est intervenue la modification de la Constitution, puisqu’entre temps est intervenue aussi la modification du code électoral », a rappelé le Professeur Joseph Djogbénou qui précise que c’est donc un rendez-vous classique, mais aussi un rendez-vous nouveau. Ainsi, les participants venus des autres organes ayant en charge l’organisation des élections ont discuté de comment la Haute juridiction a assuré sa mission constitutionnelle de veille du déroulement régulier de cette élection, de contrôle et de gestion du contentieux électoral, comment elle a articulé cette mission avec les autres organes dont particulièrement la CENA, comment les rapports avec le partis politiques ont noués et entretenus, comment la communication citoyenne a été assurée, quelle est la perception des uns et des autres sur la mission de la Cour constitutionnelle. Quant au président lu Cos-Lepi, l’He. Gilbert Bangana, il a souligné que ce séminaire est utile parce que quand on a la responsabilité de conduire un processus ou d’y être impliqué, l’on est tenu de faire son bilan par rapport à la mission confiée. « La Cour constitutionnelle est en train de s’acquitter d’un devoir de reddition de comptes », s’est-il réjoui. Les participants à ce séminaire-bilan ont suivi deux communications. La Première est axée sur le bilan moral présentée par le secrétaire général, le Docteur Gilles Badet et la seconde s’est penchée sur le plan financier présentée par le Directeur administratif et financier, le Docteur Justin Lokossou. A propos de l’économie de 21% réalisée par le Cour sur l’enveloppe financière mise à sa disposition par le gouvernement, le président du Cos-Lepi a souligné que les équipes de la Cour ont été efficientes et méritent d’être saluées. Même son de cloche chez Valérie Idossou, Secrétaire générale du parti Udbn qui a indiqué que la Cour a bien fait de faire des économies pour l’Etat. Au cours des discussions, le Président Joseph Djogbénou a expliqué aux participants les raisons du non recrutement des délégués de la Cour. Cela est dû à la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid-19. Au terme des travaux, les représentants des partis politiques ont félicité le Président Joseph Djogbénou, les conseillers et toute l’équipe de la Cour pour l’organisation réussie de l’élection présidentielle du 11 avril 2021.

Laurent D. Kossouho

Le Professeur Paulin Hounsounon-Tolin, spécialiste des questions éducatives ‘’Sous L’Arbre à Palabre’’: « Talon n’est pas la cause des problèmes de nos universités, mais…»

Views: 101

Professeur titulaire de Philosophie à l’Université d’Abomey-Calavi, et dans l’espace CAMES, le Professeur Paulin Hounsounon-Tolin est spécialiste d’analyse des questions éducatives et des missions d’une université. Invité du journal L’Evénement Précis’ il jette un regard profond sur l’état de l’enseignement supérieur au Bénin. ‘’Sous L’Arbre à Palabre de L’Evénement Précis’’, l’enseignant du supérieur fait un diagnostic approfondi des maux qui plongent depuis quelques années, l’enseignement supérieur dans une léthargie et qui n’est pas imputable, selon le Professeur Paulin Hounsounon-Tolin au Chef de l’Etat, Patrice Talon : « Talon n’est pas la cause de nos problèmes, il est venu les trouver. Les problèmes énormes que rencontre le système éducatif béninois, il est venu les trouver. La question est de savoir est-ce que lui le premier citoyen dans ce pays souhaite vraiment mener les réformes qu’il faut. Ou bien lui aussi, veuille-t-il se moquer de notre système éducatif ? », s’est-il interrogé au cours de cet échange à bâtons-rompu avec les journalistes. Les réformes menées dans le secteur éducatif ont également été au menu des échanges avec le spécialiste d’analyse des questions éducatives et des missions d’une université. Sans langue de bois, le Professeur Paulin Hounsounon-Tolin s’est également prononcé sur la suspension de l’élection des recteurs des universités du Bénin, la qualité de l’enseignement, le mode de recrutement des enseignants dans les universités ainsi que les missions des universités nationales. Pour l’invité du journal, « Le doctorat est un diplôme de recherche et non un diplôme pour travailler ».

Et si on en parlait

Est-ce que vous êtes d’accord que l’enseignement supérieur est en crise ?
Tout à fait ! Il est non seulement en crise, mais en plus c’est extrêmement grave. Si rien n’est fait, on court le risque de la fermeture.

Vous êtes l’un des acteurs du système LMD. A l’évaluation, est-ce que vous êtes satisfait de sa mise en œuvre ?
Vous me traitez de l’un des acteurs du système LMD. Cela en étonnerait beaucoup parce qu’on a sur le marché des gens qui se disent spécialistes, mais en réalité vous avez parfaitement raison de me traiter de l’un des acteurs du système LMD. En effet, j’ai été envoyé en mission de formation au système LMD au service des relations internationales de l’université de Limoges en 2004 et au Ministère de l’Education Nationale de Paris en 2004 aussi au mois de février. J’ai été Chef service des Relations Internationales et de la Coopération Universitaire à Parakou. Ensuite, j’ai été ramené de Parakou à l’Université d’Abomey-Calavi où j’ai occupé les mêmes fonctions avec cette différence qu’il y a ce qu’on appelle le groupe de pilotage de la Communauté interuniversitaire francophone de Belgique où j’ai eu à piloter ce groupe. C’est à ce titre que j’avais été envoyé en mission à l’université de Limoges et au Ministère de l’Education Nationale de France et c’était du 9 au 20 février 2004. En ce moment, le Bénin avait l’opportunité de démarrer le système LMD en même temps que la France et les autres États Européens. L’Université de Limoges avait signé un accord en janvier 2003 avec l’Université de Parakou et l’Université d’Abomey-Calavi qui étaient les deux universités nationales au Bénin. En 2004 également, le Président de l’Université de Perpignan Monsieur François FERAL avait effectué une mission au Bénin à l’université d’Abomey-Calavi et il était à la tête d’un réseau de plus d’une trentaine d’universités européennes. Et il s’était engagé à aider le Bénin à entrer dans le système LMD en même temps que les États Européens. L’accueil que le Ministère de l’Education Nationale à Paris, surtout le service des relations internationales m’avait réservé, c’était formidable. Le Bénin étant ce qu’il est, en ce moment, le Vice-président des Relations Internationales de l’Université de Limoges était arrivé en mission au Bénin en 2004. Je me rappelle encore, en ce moment le Bénin avait joué un match contre le Cameroun, et le Cameroun s’était déplacé vers ici et le Bénin a été battu 2-1. Mais un but marqué là, c’était la victoire. On a transformé ça en victoire avec émotion. Le Vice-président disait : « C’est bizarre hein, vous, vous êtes engagés dans une coupe que vous pouvez remporter, c’est ce qu’on peut supposer. L’une des équipes adverses se déplace vers vous, il vous bat et vous transformez ça en victoire. Notre coopération-là, est-ce que vous allez vraiment pouvoir en profiter ? » Quelle est la logique dans tout ça ? Bref, en 2004 au mois de juin à Ouagadougou, avait eu lieu un colloque international organisé par la Francophonie sur le développement durable. Jean-Paul Lecertua et Hélène Dejoux m’avaient demandé de préparer un projet appelé « Mutualisation des moyens au niveau des universités dans la sous-région ». En marge de ce colloque, il y a eu une rencontre de tous les vice-recteurs chargés de la coopération universitaire pour nous aider à entrer ensemble dans le système LMD en même temps que les États Européens. On a tout fait, les rapports sont là. C’est de là, que par la suite ils ont commencé par parler de REESAO (Réseau pour l’Excellence de l’Enseignement Supérieur en Afrique de l’Ouest). Bref par la suite, ce sont les amis, on pense aux primes… J’ai des documents ici. On avait commencé à parler de basculement total dans le système LMD dans deux ans, dans trois ans, etc. C’était également au moment où j’étais Chef de Département, – avant d’être Chef de Filière à l’Ecole Doctorale -, que le processus du basculement dans le système LMD avait démarré et en même temps avec les débuts d’informatisation des résultats des étudiants. Aujourd’hui, des gens qui ne connaissent rien dans rien se déclarent spécialistes du système LMD. Je ne vais pas aller dans les détails parce que si je me suis intéressé au système LMD, c’est grâce à mon directeur de thèse en Sciences de l’éducation, initiateur en France des Instituts Universitaires de Formation des Maîtres (IUFM). Bref, notre mentalité de ne pas vouloir programmer et respecter les emplois du temps ne permet même pas le bon fonctionnement du LMD. Si on me programme, parce que je suis occupé (occupé à un autre poste) et que je dois négocier pour qu’on revoie l’emploi du temps, vous voyez que la semestrialisation des cours ne peut pas vraiment marcher.

Donc en bref, le bilan est négatif?
Vous pouvez tirer cette conclusion de ce que je viens de dire parce que d’autres diront que cela a marché, surtout ceux qui mangent dedans correctement. Je peux vous dire que c’est des réunions sur réunions, des commissions sur commissions et il y a toujours des jetons de présence.

Le chef de l’État a récemment évoqué le fait que certains enseignants de l’université sont mal formés. Est-ce que c’est votre avis?
Je sais que vous avez fait l’université et vous êtes Docteur en Sociologie. Comment forme-t-on les enseignants du Supérieur en France ? Est-ce différent de ce qu’on voit ici ? C’est la question. Moi, mon directeur de thèse en Philosophie à Paris I, quand il vient, qu’est-ce qu’il fait ? Ce sont ses manuscrits qu’on lit. Il lit ses cours, les livres qu’il veut publier et on pose des questions. Le problème est que le doctorat est un diplôme de recherche et non un diplôme pour travailler. Je crois qu’on va revenir là-dessus. J’ai fait une thèse sur Sénèque, philosophe de l’Antiquité tardive. Ça ne suffit pas du tout pour être spécialiste de Sénèque. Je dois continuer mes lectures et mes recherches au point de me remettre même en cause. Cette remise en cause c’est avec les étudiants. Je prépare un cours, je viens et à partir d’une question d’un étudiant, je peux remettre en cause le cours que j’ai bien préparé. Donc dans mon entendement c’est ce que je sais, c’est ce que j’ai vu dans plusieurs universités françaises, européennes. C’est après le doctorat, quand on est recruté, que l’enseignant se forme lui-même. Il s’agit de la recherche.

Qu’est-ce que c’est que la recherche à l’Université ?
Ce n’est pas le moment de cette question, mais si on oublie ça, on va dire que les enseignants sont mal formés. Quand moi j’ai été recruté en 2000, l’Etat donnait chaque année un quota pour les contractuels et c’est deux ans. La même année l’Etat donne un nombre pour les professeurs permanents. Pour être recruté permanent, il fallait avoir fait deux ans en tant que contractuel. Pendant ce temps, les professeurs nous « surveillaient ». Les aînés, les enseignants qui sont déjà plus gradés que vous, les Maîtres-Assistants, les Maitres de Conférences, les Titulaires vous notent et vous apprécient. Cela vous donne un peu de la peur au moins et si vous êtes mal noté, vous ne serez pas recruté agent permanent de l’État. Au mieux, on va vous envoyer au CBRST. Mais vous n’allez pas continuer à l’université. Qu’est-ce qui s’est passé et entre temps on a laissé ça et on recrute directement APE. Les enseignants qu’on recrute, les jeunes docteurs qu’on recrute, ils sont directement chargés de cours. Ils font des cours magistraux. Ils se comportent comme des professeurs titulaires. La faute est à qui? Aussi bien à l’État qu’à nous-mêmes acteurs. Celui qui a le doctorat, il a été formé non pas pour enseigner d’abord mais pour la recherche et c’est en partageant sa recherche avec ses étudiants qu’il pourra s’améliorer et être utile à sa nation.

Les enseignants en sciences humaines, quelle est leur utilité pour la nation ?
Il ne faut pas confondre une grande école de formation professionnelle et une université. Et monsieur Pierre G. Mètinhoué avait réalisé un document formidable qui l’expliquait bien : Guide ou Manuel de l’étudiant en Histoire et Archéologie en 1985-1986. Ceux qui sont à Porto-Novo, à l’Ecole Normale Supérieure (ENS), ont des matières que ceux qui sont à la faculté n’en ont pas. Ce qui se passe maintenant où chaque département définit les critères de passage, même dans le système LMD avec mot d’ordre « Le Jury est souverain », c’est inadmissible. C’était très clair, même les professeurs venaient s’asseoir à la délibération pour constater les résultats. Les règles étaient définies pour le passage. Allez à la FLASH, chaque département ne fait-il pas comme bon lui semble ? Pour les délibérations, on s’entend en fonction des cas de chaque enseignant, pour définir les critères de délibération en vue des rachats. Je reviendrai plus loin sur l’utilité des enseignants en Sciences Humaines et Sociales.

Le Chef de l’État pendant sa campagne électorale pour sa réélection disait que son gouvernement mettra en place une stratégie pour évaluer à l’interne les enseignants du supérieur, en dehors de ce que fait le CAMES. Pensez-vous que ce mécanisme est possible aujourd’hui ?
Bon, il est le premier citoyen de la nation. Il a bien réfléchi, je ne sais pas comment il veut procéder. Donc je ne peux pas me prononcer à priori et dire que c’est bon ou que c’est mauvais. Par contre, ce que je peux dire, c’est que s’il va le confier toujours aux mêmes acteurs, ne soyez pas étonnés demain que des maîtres assistants, des assistants parce qu’étant nommés à tel poste, évaluent des professeurs titulaires. Ça c’est possible parce qu’on pense aux rémunérations et aux perdiems. C’est ça le problème qui nous tue. Si c’est bien organisé, je ferai ça avec plaisir. Mais si on le fait à contre cœur et parce que si je ne le faisais pas on va me renvoyer et mes enfants ne vont plus trouver de quoi manger, je vais le faire à contre cœur et cela ne va pas me profiter. Je peux vous donner un exemple. Pour renforcer mes capacités un peu managériales en ce qui concerne la gestion des universités et en management, j’ai sorti de ma poche cinq cents mille francs et j’étais allé voir un cabinet à Cotonou. Il y a une dame et un monsieur. Le monsieur est docteur, mais pas enseignant (du Supérieur), la dame n’a que le DESS. Mais ce qu’ils m’ont appris c’est incroyable. J’en ai tellement appris que je suis devenu ami du cabinet et de la dame. Quel est le problème ? Quand ils vont instaurer ça, ils vont confier ça à leurs amis et qu’est-ce qu’on va faire ? On va montrer à l’autre qu’on connait. Et c’est ce qui nous tue.

Le ministre de l’enseignement supérieur que nous avons reçu ici sur la question s’est plaint de savoir que parmi ses collègues professeurs, il y a des gens qui continuent de trainer des fiches qu’ils n’ont jamais actualisées. On ne se demande jamais si on est performant face aux nouvelles réalités.
Si l’évaluation était bien organisée et qu’on confiait à des gens qui ne vont pas se prendre pour des sages et savants alors qu’ils ne connaissent pas, cela passerait. Avez-vous connu ce qu’on appelle tronc commun ? Avec le tronc commun à l’école doctorale, les gens ne traînaient que le même thème. Nous n’avons pas une mentalité de chercheur et notre mentalité ne s’y prête pas. Si je dirige une étudiante que j’ai envie de la draguer, – ou que j’exige de copeck à un thésard -, et que j’en arrive à bloquer effectivement l’une ou l’autre, comment voulez-vous que cela aille ? Or, certains ont fait l’Europe et savent qu’on ne peut pas transiger avec la vérité scientifique. C’est impossible, et pourtant ! Il faut aussi dire que notre contexte ne se prête pas convenablement à la recherche. La Ministre a donc raison de déplorer cela.

Vous finirez aussi par être évalué par vos étudiants
Il y a un doyen, dont je tais le nom, qui déplorait que des professeurs soient des démarcheurs d’étudiants. Des étudiants qui sont en connivence avec ces professeurs. Si on leur demande de noter les professeurs, n’y a-t-il pas de risque qu’ils notent mieux les professeurs avec qui ils font affaire et mal les professeurs qui sont contre cette pratique ? On doit faire beaucoup attention à ce qu’on veut faire dans le monde universitaire comme au Secondaire sinon, on aura le résultat inverse. C’est mon point de vue. Mais en réalité, toutes les propositions sont bonnes. Il n’y a pas de mauvaises propositions. Savez-vous que le Dahomey était beaucoup plus riche que la Côte d’Ivoire au moment de la création de l’Afrique Occidentale Française ? C’était grâce aux rois d’Abomey qui n’avaient pourtant pas eu à faire des réformes. Il faut de la bonne foi et de la bonne volonté. Comme l’a dit Pirithoüs, un citoyen de bon caractère vaut mille fois mieux que la meilleure constitution du monde. Les gens interprètent la meilleure constitution du monde selon leur intérêt du moment. Le président de la République peut ne même pas demander l’évaluation des enseignants par les étudiants. Si ces étudiants, les professeurs et le gouvernement veulent vraiment changer les choses, ils le feront sans tapage et sans les grands mots qu’on entend.

Dans les actes du colloque en hommage au Professeur Gabriel Boko, vous avez publié un texte sur la nécessité de clarification conceptuelle des aires, objectifs et missions d’une université. Vous pensez qu’il y a une confusion sur ces termes ?
Je pense qu’il y a une confusion à tous les niveaux. Ceux qui sont d’un certain âge savent ce que c’est que le moderne court et le moderne long. Le moderne court concernait ceux qui voulaient aller travailler. Et à ce niveau, il y avait un établissement situé à Sikècodji appelé CADMES qui s’occupait de la formation en dactylographie et autres. Mais, que se passe-t-il aujourd’hui ? La FASHS a-t-elle la même mission que l’ENS ? Une grande école de formation professionnelle est autre chose qu’une université. Je vous donne un exemple. Une université, c’est la recherche fondamentale et pour financer cette recherche, on ne peut pas demander de développer d’abord à quoi servira la recherche et le résultat auquel on doit s’attendre. Je vous donne un autre exemple. Dans les grands magasins, il existe des boites de conserve sur lesquelles il est mis : Champignons de Paris. Si un ingénieur agronome ou géographe développeur veut maintenant savoir le type de champignon qu’on peut cultiver dans le sol de Cotonou, on va lui dire de développer le résultat auquel il doit aboutir. Là, il ne s’agit plus d’une recherche fondamentale. La recherche universitaire fondamentale doit prendre le risque de l’échec et c’est l’échec épistémologique qui fait avancer la recherche. Il creuse, fouille et il constate qu’on ne peut pas cultiver tel champignon mais qu’on peut cultiver telle ou telle autre chose. N’est-ce pas déjà un résultat ? J’ai appris que ce qu’on fait à l’université en termes de notion conceptuelle, c’est pour récompenser les amis. Il y a un monsieur qui vous dira qu’on sera toujours confronté à ces genres de problèmes, si on continue avec le remplissage de l’université. Les gens doivent avoir la liberté de la recherche. Quand je vous donne des textes, vous les publiez et c’est très bien apprécié. Mais, savez-vous combien de textes que j’ai jetés ? C’est comme ce que la dame a préparé. C’est ce qui est prêt qui est servi mais vous n’avez pas idée de ce qui a été jeté. Pour écrire un article, je peux passer tout un mois à chercher les références d’une pensée. Et après publication, un étudiant peut me démontrer que je suis dans le faux. Ceci n’est pas du temps perdu. En 2010, Brice Sinsin à l’époque vice-recteur, à l’occasion d’un colloque, a fait venir un compatriote de Dassa vivant aux Etats-Unis qui est venu expliquer comment les laboratoires américains financent les professeurs d’université. Si je prends l’exemple du champignon, les chercheurs font leurs recherches dans les laboratoires, aboutissent à des résultats et vendent cela aux industriels. Et c’est comme ça qu’ils trouvent de l’argent. Il parait même qu’en France, ce sont les universités qui paient le salaire des chercheurs. Si je prends le cas des Sciences sociales, quelle contribution pouvons-nous apporter au développement du Bénin ? Commençons d’abord par savoir ceux qui sont les intellectuels des Sciences Sociales et des Lettres Modernes du Bénin qui ont apporté leur contribution au développement du Bénin. Il y a Jean Pliya qui, malheureusement, n’a été que Maître-Assistant. Mais, je crois que beaucoup d’intellectuels ne le dépassent pas. Il y a Olympe Bhêly-Quenum qui n’a que la Licence, Paul Hazoumè est un instituteur et n’aurait pas eu le BEPC. Néanmoins, pour être à la hauteur de Kant et des Jean Pliya, il faut au moins aller à l’université. Mais, allons-nous avoir des Kant avec nos doctorats ? Si tant est que le rapport entre formation et employabilité préoccupe tant le gouvernement, pourquoi ont-ils supprimé le DESS et les ingénieurs des ponts et chaussées, etc., ne sont plus considérés comme les plus hauts diplômés de notre fonction publique et on entend souvent parler maintenant de Docteur ? Dans la fonction publique et jusqu’aux années 2000, les diplômes les plus élevés étaient les DESS et diplômes des ingénieurs agronomes, ceux des ponts et chaussées. Aujourd’hui, ces derniers ne sont plus considérés. Aujourd’hui, tout le monde est docteur alors qu’il n’y a rien derrière. Au début des années 2000, on criait BTS qui était vu comme le prototype de la formation qui permet l’installation à son propre compte. Mais, combien de gens formés ont-ils pu être installés à leur propre compte ? Combien de ceux qui ont été formés à Porto-Novo ont été installés à leur propre compte alors qu’on encourage la création des écoles privées de formation des maîtres ?

Donc les universités ne forment pas pour l’employabilité immédiate ?
Mon rôle en tant que spécialiste en Sciences de l’éducation et en Philosophie n’est pas de former les gens pour un métier. Je n’interviens pas à l’ENS. Je leur apprends à réfléchir et même dans le chômage, ils pourront le faire. Je leur apprends ce que les Mathématiciens appellent une solution élégante. Et une solution élégante, c’est la solution la plus simple possible et la plus efficace en même temps. C’est la solution que les chirurgiens appliquent sur les tables des opérations chirurgicales. C’est la seule possible et capable de sauver un patient en danger de mort. Sa simplicité et son efficacité évidente ne laissent aucune place à des discussions. Une solution élégante, c’est la solution la plus simple et la plus efficace, mais il fallait être Jules César pour trouver cette solution sur un champ de bataille, – au milieu même de la mêlée et quand Rome est en danger -, pour sauver Rome. Le plus grand poète que le monde ait jamais connu s’appelle Virgil et c’est un Romain. Et c’est lui qui a redonné naissance à Rome, seulement par ses écrits. Dans le document de l’étudiant d’histoire et d’archéologie de Pierre Mintinhoué, le nombre de matières à étudier est bien indiqué. Ceux qui sont inscrits en histoire doivent suivre un certain nombre de matières. Mais ceux qui sont inscrits à l’ENS ont un bus à leur disposition, viennent suivre toutes ces matières et en plus de cela, quatre autres matières ainsi que des sorties pédagogiques. Ce qui les prépare au métier d’enseignant. Est-ce que moi je suis à l’ENS ? Je n’ai pas pour mission de former au métier de l’enseignement. J’ai pour mission de former à la réflexion et j’ai aussi pour mission de prouver à mes concitoyens que ce que je fais est utile. Pour commencer par écrire dans votre quotidien, j’ai dû l’apprendre parce que le style journalistique et le style d’un essai ne sont pas pareils. Les grands physiciens d’aujourd’hui publient des revues et des essais de vulgarisation : « Qu’est-ce que c’est que la théorie du chaos ? » N’importe quel intellectuel pourrait comprendre cela. Donc, il faut que les autorités rectorales, décanales, ministérielles et même au niveau de la présidence fassent la part des choses. C’est normal de mettre l’accent sur la formation professionnelle tout en sachant que tous ceux qui seront formés ne puissent pas se prendre en charge. J’ai un ouvrage qui prouve que la plupart de ceux qui dirigent les banques allemandes n’ont même pas le Baccalauréat. S’il y a du travail dans le pays, on va se moquer des diplômes. Vous savez combien gagne un balayeur de rue en France ?

A propos des recrutements, que pensez-vous de la note de service portant suspension de sélection des agents de l’Etat par les Conseils scientifiques des UNB, la note du MESRS pour les sélectionnés de 2017 qu’on ne voit qu’en novembre 2020 et l’arrêté rectoral reclassant des fonctionnaires pour l’UAC et qui n’ont jamais pris service ?
Je crois que vous m’avez posé la question en disant qu’une autorité du pays aurait dit que les enseignants sont mal recrutés. Comment comprendre ça là maintenant ? C’est la ministre de l’enseignement supérieur qui avait pris cette note de service suspendant le reclassement, c’est-à-dire que ceux qui sont dans les ministères, ceux qui sont au secondaire, dès qu’ils ont leur doctorat, en principe, s’ils ont eu l’autorisation d’aller préparer le doctorat, pourraient être détachés à l’université. On a mis fin à cela. Ils savent que la note serait toujours en vigueur. Mais en 2017, des gens auraient été détachés parce qu’ayant eu le doctorat pour prendre service à l’université. Mais on ne les a pas vus jusqu’en novembre 2020. Et il y a l’arrêté ministériel de 2020 qui leur demande de fournir les pièces nécessaires. Entre temps aussi, en 2019, il y a un arrêté rectoral signé par le recteur et le vice-recteur, chargé de la recherche académique, qui détache des fonctionnaires soit en service au secondaire, soit dans d’autres ministères, à l’université. A la date d’aujourd’hui, ils n’ont jamais pris service. Dans ces conditions, nous sommes tous coupables et fautifs ou pas ? Et feu Félix Iroko avait bien raison de dire ça. Nous sommes tous coupables dans cette affaire des problèmes de notre système éducatif. Ça ne va pas. Il y a l’un de mes assistants, son dossier n’a jamais été clarifié, et il gagne toujours un salaire d’instituteur, alors qu’il est à l’université depuis des années. Ça fait pleurer ou pas ? Cela n’est pas possible sans notre participation, nous-mêmes enseignants, nous-mêmes étudiants, nous-mêmes jeunes docteurs.

Peut-on alors dire que le recrutement est politisé ?
Qu’est-ce qui n’est pas politisé au Bénin ? Pour être recruté à l’université, pour soutenir sa thèse de doctorat, les conditions de direction et de soutenance restent vraiment à désirer.

Certaines rumeurs circulent sur la suspension des soutenances de thèse à l’Ecole doctorale de la Flash, parce qu’un nombre important de docteurs qu’elle forme sont au chômage. Ces rumeurs sont-elles fondées ?
D’abord, je ne traite pas des rumeurs tout en sachant que les opinions sont porteuses de significations méritant d’être psychanalysées. Je sais qu’elles cachent des vérités. Maintenant, de mon point de vue, votre question comporte deux volets. Un, les docteurs ne sont pas formés pour trouver du travail. Un docteur est formé pour réfléchir. S’il est incapable de réfléchir, ça fait son problème. Il a été mal formé, donc il ne mérite pas le doctorat et les gens se sont entendus pour lui donner le doctorat. Le gouvernement recrute pour la recherche à l’université, le gouvernement ne peut pas recruter tout le monde. Ce qu’il fallait déplorer, est-ce qu’on accorde les mêmes chances à tout le monde dans le processus de recrutement ? Si on pose le problème dans ce sens, je serai d’accord. Mais si c’est sur la base de « qui tu connais ? » et non « qu’est-ce que tu connais ? », ce n’est pas bon. Maintenant, vous parlez de rumeurs, pour fermer. S’il y a rumeurs, c’est que ceux qui devraient fermer ne veulent pas fermer. En lançant des rumeurs, c’est qu’ils demandent à la mafia de tout faire pour qu’on ne ferme pas. C’est simple ! Ceux qui ont leurs intérêts vont se mobiliser pour qu’on ne ferme pas, parce qu’il y a des intérêts en jeu. On parle de rumeurs, c’est parce qu’on ne veut pas fermer. Sinon, l’autorité réfléchit, choisit les gens qu’il faut et mûrit la question et prend une décision. Mais quand des rumeurs circulent, ceux qui ont leurs intérêts en jeu, et qui sont toujours les mêmes, ils vont tout faire pour qu’on ne ferme pas. Il faut qu’on se dise la vérité, et étudiants et enseignants, autorités décanales, autorités rectorales, autorités politiques à divers niveaux. Si le clientélisme ne cesse pas à l’université, on va tout faire, mais on ne va pas avancer. On n’aura pas des universités dignes de ce nom. Il y a un jeune professeur, il y a deux ans comme ça, qui a dit sur la Télévision nationale que le Bénin forme plus de docteurs en géographie que le Canada et la France réunis. On a entendu au niveau ministériel, au niveau rectoral, au niveau décanal, au niveau des professeurs, au niveau des journalistes, au niveau des acteurs sociaux, etc., mais ça a fait quoi à qui ? Est-ce que c’est possible ? Quelqu’un qui a plus de 15 thèses qu’il dirige en même temps, c’est sérieux ça ? Les formations doctorales coûtent 2 à 3 fois plus cher au Bénin que dans la sous-région. Curieusement, le Bénin fabrique plus de docteurs que tous les pays de la sous-région. La norme universelle ne se situe-t-elle pas autour de 5 thèses ? Un collègue vient d’évoquer le cas des études germaniques dont on refuse l’ouverture d’autorisation. On a quand même besoin de quelques docteurs ou non ? Il faut trouver un mécanisme pour former. Comment les gens arrivent à produire tant de docteurs et personne ne cherche à savoir ce qui se passe réellement ?

Visiblement, vous soupçonnez quelque chose …
Je soupçonne ou c’est compte tenu de ce qu’on dit ? Je ne soupçonne rien.

Vous êtes un acteur du système, ce n’est pas le gouvernement qui produit les docteurs …
Je vous ai toujours dit que c’est nous. Reconnaissez quand même que j’ai été honnête en disant que nous sommes tous coupables aux niveaux gouvernemental, rectoral, décanal, enseignant, etc.

Qu’est-ce qu’on doit faire pour arrêter la saignée ?
Je donne un exemple concernant le CAMES. Je crois que c’est avec la promotion de l’année 2019. C’est en février qu’on envoie les dossiers et tout le monde sait que c’est l’Etat qui prend les frais en charge. Et on sait que quand on est admis au CAMES, on connait de reclassement. On a laissé envoyer les dossiers, et après on déclare que les intéressés vont payer eux-mêmes les frais. C’était de l’injustice, mais certains ont payé eux-mêmes. Le même rectorat, l’année suivante, avait envoyé au CAMES aussi bien les dossiers de ceux qui avaient payé lesdits frais que ceux de ceux qui n’en avaient pas payé. Après, on a dit aussi qu’ils ne seront plus reclassés automatiquement. Nous sommes des universitaires. Si nous-mêmes nous nous respectons, est-ce qu’on peut nous imposer une telle décision comme ça ? Il y a des départements où il y a plus de 8 titulaires, il y a d’autres départements où il n’y en a pas du tout. Pourquoi ne pas commencer par accorder la priorité aux départements qui n’en ont pas ? C’est ce que je voudrais dire. On mûrit la décision, on la prend et on la respecte. En France, mon amie Edwige CHIROUTER, de l’Université de Nantes, qui a monté un projet maintenant pour l’Union Européenne auquel j’ai participé, elle a eu l’habilitation depuis 2 ans, mais elle n’est pas titulaire. Quel est le problème ? C’est quand un poste se libère qu’on fait appel aux candidats. Et celui qui gagne prend le poste. Mais ici on en crée en désordre. Pourquoi ne pas commencer par mettre fin à ça d’abord ? Tout se passe comme si on fait tout pour ne pas fournir les efforts qu’il faut. Si dans tel domaine, ils sont déjà 10 titulaires, il ne faut même pas chercher à savoir ceci ou cela.

N’est-ce pas ce qui a amené le chef de l’Etat à dire que le processus de recrutement des assistants à l’université n’est pas du tout concurrentiel ?
Le problème est qu’au moment où j’ai été recruté, je pense que c’était plus simple et clair que ce qui se passe maintenant …

Vous avez été recruté par cooptation ?
Non. Tout d’abord, au moment où j’ai été recruté j’avais un cousin qui est au rectorat, et qui m’avait dit que je serai directement agent permanent de l’Etat. Après il m’a envoyé vers Soumanou Toléba qui était chef personnel de l’université et président de l’« Association des jeunes docteurs ». On militait ensemble. C’était bien quand même. Madame Ladékan aussi faisait partie de l’association. C’est de là que quand j’ai été voir le Doyen Bognianho, il me disait qu’il a vu mon dossier, que c’est un excellent dossier, mais qu’il ne peut pas me promettre de me recruter, que je ne pourrais être recruté si on lui donne quatre postes, parce qu’il y a un département qui avait de problèmes. Heureusement qu’on lui a donné quatre. Et, on m’avait promis que je serai permanent en même temps. Après M. Toléba m’a expliqué que non, il fallait faire deux ans de contractuel et se faire examiner et évaluer d’abord. Et si on pense que vous pouvez vraiment, c’est de là que vous pourrez devenir permanent. Mais je dis pourquoi ils ne procèdent plus comme ça maintenant ? Est-ce que vous savez qu’actuellement il y a des assistants qui ont des assistants ? Des gens recrutés depuis 2007 sont toujours assistants ayant d’assistants officiellement ou non.

Le chef de l’Etat constate que le processus n’est plus concurrentiel. Etes-vous d’accord avec lui ?
Oui. Je sais qu’il y a de jeunes docteurs qui viennent discuter avec moi. Ils veulent qu’on les fasse composer, qu’on les interroge. Mais qui va les interroger ? C’est toujours les mêmes. Mais si on veut rendre le processus concurrentiel, ils vont faire recours à qui ? C’est les mêmes personnes ? Des gens qui ne sont pas fatigués d’occuper des postes depuis plus de 8 ans, 10 ans, 15 ans, 20 ans et qui sont dans tous les réseaux ?

Mais c’est toujours vous, les professeurs titulaires …Vous êtes sûr qu’on ne vous associe pas ?

Il y a ceux qu’on associe et il y a ceux qu’on n’associe pas. C’est un réseau et de la mafia. Tout est devenu affaire de réseau, de mafia et de clientélisme.

Pourquoi on ne vous associerait-on pas ?
Je voudrais répondre d’abord ceci. Rendre le système concurrentiel, c’est très beau, mais si on rendait le système concurrentiel et qu’on recrute les gens, s’ils viennent dans le système et se comportent comme nous qui sommes dedans, est-ce qu’on aura le résultat escompté ? Je crois que le Professeur feu Félix Iroko a raison. Le problème devrait être d’abord, comment rendre performants ceux qui sont dedans ? Si on ne les rend pas performants, et qu’on en amène d’autres, ils vont se comporter comme eux ou pas ? Quelqu’un a dit tout à l’heure que la ministre a dit qu’il y a des enseignants qui ne modifient jamais leurs fiches. S’ils veulent corriger notre système là, pourquoi ne pas commencer par exiger l’assistanat réel. Celui qui vient d’être recruté ne peut pas être autonome sur les enseignements. Pourquoi ne pas faire en sorte que ceux qui se contentent des articles d’autrui pour se faire passer au CAMES, ceux qui sont plusieurs sur le même article, pourquoi ne pas commencer par corriger par là. Si on rend concurrentiel, c’est beau. Mais ceux qui seront recrutés par un concours concurrentiel, ne se comporteraient-ils pas comme les autres qui sont déjà dans ce système ? L’aspiranat ne peut pas être la solution de mon point de vue. La solution est de commencer par ce qui est plus facile. Il y a récemment un rappel du Recteur d’Abomey-Calavi à propos de la fusion des laboratoires. Les recrues ne sont pas sous l’autorité pédagogique d’un MA, d’un MC ou d’un PT. Ils sont autonomes et dispensent leurs enseignements en se comportant comme des Profs de Rang A. On ne pense nullement régler ce problème, mais ce qui préoccupe, hic et nunc, c’est le regroupement des laboratoires. Des laboratoires sont installés en ville et dans des domiciles personnels.

Faisant déjà ses preuves dans l’enseignement primaire et dans l’enseignement secondaire, l’aspiranat dans le supérieur pourrait combler le vide du personnel enseignant. En tant qu’acteur du milieu universitaire, cette proposition du Chef de l’Etat est-elle idoine ?
Si vous dîtes que cela fait ses preuves, alors tout va parfaitement bien. Est-ce qu’on est vraiment sûr que ça a déjà fait ses preuves ? Au secondaire, il y a eu les contractuels locaux et les permanents, les vacataires… Et on ajoute encore l’aspiranat. Qu’est-ce qui prouve qu’un autre gouvernement ne va pas amener une autre réforme ? On s’amuse avec notre système éducatif. Ils ont amené dans ce pays la Lepi pour nous dire que c’est un outil de développement. Après, un autre nous ramène le Ravip pour nous dire que c’est un outil de développement. Qu’est-ce qu’ils veulent faire de notre pays ?

De plus en plus, il est évoqué le problème d’employabilité des étudiants à l’issue de leur formation universitaire. Qu’est-ce qui empêche l’adaptation des offres de formation de Licence Master et Doctorat aux exigences du marché ?
L’objectif du système LMD est de permettre que la mobilité des étudiants ne pose pas de problème dans les autres universités. Si vous étiez inscrit à l’ENS, allez-vous recevoir la même formation que celui qui est inscrit dans une faculté ? Non. Celui qui est inscrit à l’ENS se prépare pour le métier d’enseignant. Et par ailleurs, on peut être formé dans une école professionnelle, avoir un diplôme professionnel et se retrouver en chômage.

Monsieur le Professeur, est-ce qu’il est aisé de produire et de publier des travaux de recherche scientifique au Bénin ?
Pas du tout. Parce que dans notre système éducatif, nous ne collaborons pas entre nous pour pouvoir nous entraider. Quand les gens corrigent votre texte ici, ils vous embrouillent et cela ne nous favorise pas. Au Bénin ici, notre niveau de culture générale est trop faible. Il faut aussi qu’on ait des éditeurs dignes de ce nom et non préoccupés seulement par le gain facile.

Une fois ses travaux publiés, qu’est-ce qu’ils apportent réellement, en termes de plus-value, au développement du pays ?
En ce qui nous concerne, en Sciences Sociales et Humaines, c’est d’avoir des Jean Pliya, Olympe Bhêly-Quenum. Mais ceux-là ne sont pas des Maîtres de conférences, mais c’est plutôt une question de vocation dans notre domaine. On peut ne pas être diplômé et être un grand romancier. Il faut nous remercier d’abord, c’est notre contribution de publier. Ensuite, les gens vont lire. Vous ne pouvez pas dire que ce que nous écrivons ne sert à rien.

Professeur, quel regard portez-vous sur le Conseil National de l’Education ?
Si tout était bien fait, le CNE devrait être l’académie du Bénin en matière de recherche scientifique et d’éducation. En principe, un académicien devrait être quelqu’un au sommet de son domaine d’investigation. La lettre que le Président du CNE avait envoyée aux deux universités nationales du Bénin, au moment il n’était pas encore membre de cette institution, s’il pouvait mettre son contenu en pratique, il aurait réglé le problème majeur des universités. La lettre disait que durant le cursus universitaire de tous les étudiants de licence en Droit, il doit y avoir les mêmes matières. Il est question du même parcours pour tous les étudiants. Si nous mettons cela en pratique, ce serait largement suffisant. Si on fait ça au niveau de la Philosophie, des Lettres modernes, du Droit, à tous les niveaux, le CNE ne serait-il pas l’académie du Bénin en matière de recherche scientifique et d’éducation ? Cela va constituer le noyau dur de la formation.

Vous voulez dire que l’existence du CNE est vraiment indispensable ?
Je vous ai dit que rien n’est indispensable. Pourvu que les citoyens soient conscients de leur devoir civique. Il y a quelques années, Monsieur Gbaguidi Noël, le Président du CNE, a été invité en Côte d’Ivoire et il a constaté que ce qui a été proposé là pourrait servir à son pays. Il a pris sa plume, il a écrit aux deux recteurs. Ça prouve que s’il peut déjà commencer par-là, il aurait rendu d’énormes services à cette nation.

Quelle appréciation faites-vous alors des réformes universitaires que le chef de l’État a proposées depuis qu’il est arrivé ?
Je serai sincère avec vous et je dirai ce que j’ai dans mon cœur. Monsieur Talon n’est pas la cause de nos problèmes, il est venu les trouver. Les problèmes énormes que rencontre le système éducatif béninois, il est venu les trouver. La question est de savoir est-ce que lui le premier citoyen dans ce pays souhaite vraiment mener les réformes qu’il faut. Ou bien lui aussi, veuille-t-il se moquer de notre système éducatif ? Je dis se moquer parce que, avec le Ministre Bagnan, les frais d’écolage universitaires étaient à 6200F CFA. Il avait dit que c’est l’UEMOA qui exige l’harmonisation de ces frais au niveau des Etats membres et qu’il fallait porter ça à 25.000F CFA. On les avait portés à 15.000F CFA. Avec Yayi Boni, c’est la gratuité. Qu’est-ce qu’il veut faire concrètement ? Vous voyez, M. Talon a déjà fait 05 ans. Je fais partie de ceux qui ont milité pour lui. Le 20 janvier 2016, je n’ai pas mangé jusqu’à 23 h parce que je battais déjà campagne pour lui à Bohicon avec son ami personnel et particulier d’Azali d’Abomey. Je souhaite qu’il nous aide. Ce n’est pas lui le responsable ni le coupable de notre système éducatif. Avant lui, Djemba avec Yayi avaient dit que personne ne doit plus redoubler. L’arrêté existe. Il est venu, il a dit que pour passer de la 3ème en 2nde, il faut avoir le BEPC et la moyenne. Un an après, on revient sur ça.

Vous oubliez que c’est lui qui a supprimé l’élection des recteurs ?
Vous savez aussi que quand j’ai été envoyé en mission dans le cadre des LMD, c’était pour permettre à ce que le Bénin commence en même temps le LMD que l’ère de la décentralisation de l’Université (élection). J’ai suivi ça de près. J’ai préparé la mission des recteurs, comment organiser les élections. Bref, ça veut dire que j’en sais quelque chose. Le processus de l’élection des recteurs avait été engagé. Et on exhibe une note de service pour dire qu’il faut nommer. On en était là, la fin du mandat des recteurs élus est arrivée, on les a laissés. Et après on prend une décision en conseil des ministres pour dire qu’on les maintient en activité. Est-ce qu’on veut vraiment réformer ? Parmi les Doyens, Directeurs, Vice-doyens et Directeurs adjoints, il y en a qui étaient à quelques mois de la fin de leur mandat. Mais, on a laissé les uns et on a écarté le mandat des autres. Les réformes sont comme des révolutions. Un pas en avant, un pas en arrière, on ne peut plus vous croire. Le plus important, il a déjà fait 05 ans et il a entamé 05 ans, est-ce que de sérieuses réformes ont été menées et portent leurs fruits ? Ou bien, c’est pendant les 05 ans à venir là qu’il va engager les réformes et les mener à terme comme il faut ?

Vous ne savez pas clairement, ce que Talon veut faire du système universitaire ?
J’aimerais savoir davantage le fondement, vraiment la philosophie de ses réformes.

Il dit qu’il y a du bavardage à l’Université…
Moi, j’ai été formé pour faire quoi ? Pour bavarder. Et vous-mêmes les journalistes, vous faites quoi ? La parole est sacrée. Pourquoi les gens n’ont pas pu construire la tour de Babel ? C’est parce qu’ils ne peuvent plus bavarder. S’il n’y a pas théorie, si vous ne bavardez pas, la construction de la tour va s’arrêter. C’est vrai ou c’est faux ? On a dit que les Israéliens ne doivent pas manger la viande du porc. Mais voici que les mêmes Israéliens, à partir des gènes du porc, font cultiver une espèce de carotte bien succulente. Est-ce que les Israéliens ont le droit de manger la carotte développée avec les gènes du porc ? C’est la question de l’Ethique, de la Philosophie Morale. C’est notre domaine. L’homme est fait pour bavarder. Pourquoi le président au cours de sa campagne ne s’est pas contenté de ses réalisations ? Tout ce que la Rome antique, le gigantesque Empire des Césars, la Rome d’aujourd’hui, l’Occident même et le monde entier, doit à la puissance des cordons vocaux de Marcus Tullius Cicero (Cicéron), les historiens et les hommes politiques avertis le savent bien.

L’Université forme pour le bavardage, vous confirmez cela ?
Non. Quand j’ai entendu le premier citoyen prononcer la phrase du bavardage, j’ai discuté avec l’un de ses proches. Il m’a dit exactement ceci : « Il faut comprendre qu’il répond à quelqu’un. » Et il m’a donné le nom d’un acteur politique. Et il a ajouté ceci : « Toi, Paulin Hounsounon-Tolin tu bavardes ? » Ce que tu publies avec L’Evénement Précis, ce n’est pas utile ? Si ce n’est pas utile, ne perdez plus votre temps à publier des textes.

Pouvez-vous nous expliquer alors la spécificité du bavardage à l’université ?
Monsieur Docteur Gérard AGOGNON, merci de cette question. A l’université, nos différents points de vue sont des thèses que chacun défend selon son domaine de spécificité, son niveau de culture générale et ses sensibilités. De différents points de vue, jaillit la vérité. Et c’était ainsi qu’est née la Science avec les différentes réponses divergentes des Présocratiques à propos de la fameuse question « De quoi se compose l’univers ? ». C’est-à-dire quel est l’élément premier du monde, de l’univers ? Par exemple, la Science d’aujourd’hui discrédite celle d’hier, mais cela ne signifie nullement qu’elle ne lui doit rien. Evidemment, cela pourrait paraître comme du bavardage aux yeux des non-initiés. Mais, au niveau même de la cohésion d’une nation, c’est ce qui convient : le bavardage en vue d’un dialogue inclusif constructif. Car, le caractère d’« animal politique de l’homme », c’est à l’image d’autres animaux à caractère politique comme les fourmis, les termites, les abeilles, etc. C’est la capacité de se mettre ensemble avec ses congénères en vue d’un objectif commun. Et cela est possible justement grâce au fait que l’homme soit doué de la capacité de produire du son, de la parole, pour exprimer ce qui est juste et ce qui est injuste. Le langage distingue l’homme de l’animal. Et c’est pourquoi, l’absence de bavardage en vue d’un dialogue consensuel, à un moment donné de l’histoire d’une nation, entraîne toujours de sérieuses crises mettant à mal la cohésion sociale, nationale, voire l’esprit patriotique.

Vous avez dit tout à l’heure que l’Université ne forme pas pour l’employabilité. Enfin de compte, l’Université forme en quoi ?
J’ai bien répondu à la question en me référant au manuel de l’étudiant du professeur Pierre Goudjinou Mètinhoué. Comment se fait-il que les gens s’entassent à la Flash ? Pourquoi l’État ne cherche pas à comprendre les conditions de passage ? Les professeurs ne peuvent pas dire que le jury est autonome et faire racheter comme bon leur semble. Les conditions et les critères de passage devraient être, a priori, les mêmes au niveau des départements en régime d’LMD. Mais les problèmes de notre pays sur les questions de la faiblesse du niveau de culture générale, ne vous intéresse pas ? J’ai entendu une phrase des amis qui sont chargés d’étudier les dossiers du CAMES cette année. Ils ont dit qu’on a fait la promotion des médiocres qui nous dirigent aujourd’hui. C’est à propos d’un collègue. Il n’y avait rien dans son dossier et un autre collègue disait quoi ? Quand les résultats vont sortir, il sera le premier à être reçu. Vous connaissez le système. Vous savez, j’ai ici des références que je voudrais vous donner. C’est Vitruve, architecte romain qui conseille à ses collègues de faire un peu de philosophie pour ne pas exiger de gros honoraires de la part de ceux à qui ils rendent service. En France, si un ouvrage de vulgarisation sort sur les questions de développement, tous les intellectuels l’achètent pour le lire. Vous savez qu’ici les gens peuvent faire leur thèse en histoire sans jamais lire Hérodote. En philosophie, les gens peuvent ne pas avoir lu Aristote et passer leur thèse.

Vous validez ces thèses ?
Ce n’est pas ce qui me préoccupe. Et ce sont ceux-là qui sont mal formés et qui nous dirigent aujourd’hui. S’il y a élection, ils sont dans les réseaux. S’il y a nomination, ils sont là. Parce que si vous rendez service, on va vous rendre service après. C’est le grand sociologue Francis Akindès de l’Université de Bouaké qui nous disait, lors d’une rentrée académique, que si vous avez volé 100 millions, vous n’irez jamais en prison. Mais si vous avez volé 5 millions, vous irez pourrir en prison. Avec 100 millions, vous aurez le temps de bien huiler la machine et la machine ne se bloquera jamais sur vous. Et c’est ce qu’ils font. On ne peut pas tout dire. Mon ouvrage sur la question des droits de l’homme, quand j’ai présenté ça, le vice-recteur, d’alors, qui était là a trouvé que c’est très mauvais. Allez sur Google, c’est mon ouvrage le plus coté pour le moment. Le problème, c’est ceci : il (un Prof étant intervenu) et a parlé de sa demande d’ouverture de la filière à l’école doctorale en études germaniques. Je suis informé. Moi aussi j’ai un dossier de ce genre. On prend les amis qu’on met à la tête de ces institutions. Ils n’ont même pas le niveau. Voilà ce qui se passe. Si vous avez été Contrôleur une fois au Bac, vous allez comprendre. Certains correcteurs qui n’ont pas le niveau des enfants dont ils corrigent les copies. Et c’est trop délicat pour en parler, non ?

Ça veut dire que vous dites qu’il faut améliorer le niveau de culture générale à toutes les couches ?
Nous n’avons pas le choix. Monsieur Awanou Norbert, j’ai oui dire qu’il lui arrive d’écrire à des pré-rapporteurs : « Avec ce que toi-même tu as mis dans le pré rapport (de thèse Ndlr), tu ne peux pas autoriser la soutenance. » Pourquoi j’ai donné cet exemple ? On n’a pas besoin d’être agrégé en philosophie avant de savoir quand même quelques bribes de la philosophie. Mais ceux qui nous dirigent à divers niveaux n’ont pas souvent le niveau de culture générale convenable. Pour Platon, il y a nécessité de passer d’abord par une propédeutique pour tout disciple. Et la pédagogie d’Aristote exige des préalables avant l’étude de l’Analytique. C’est une question de nécessité de culture générale. Evidemment, quand un aveugle conduit un bien voyant, ils tombent tous deux dans un gouffre avec tout leur entourage. Et c’est bien ce qui nous arrive maintenant !

S’il vous était donné de conclure ?

Je vais me répéter en disant que ce n’est pas Monsieur Talon qui est la cause des problèmes de notre système éducatif. Mais la question est de savoir s’il veut vraiment réformer notre système éducatif. Quelle réforme veut-il partager avec nous ? Ou bien veut-il nous imposer des réformes ? Est-ce que lui aussi ne veut pas s’amuser avec notre système éducatif ? Si non, comment comprendre que sous Kérékou, on a parlé d’harmonisation avec l’Uemoa et de 6 200 F on est passé à 15000f pour les frais de scolarité à l’université et que sous Boni Yayi, on est passé sous la gratuité et puis à c’est à combien aujourd’hui ? Notre système éducatif, si Talon veut vraiment le réformer, il va le faire. Je crois que tout le monde le reconnait comme un grand travailleur. Au Bénin, on le reconnaît d’être le premier privé ayant le mieux réussi dans les affaires. Donc, c’est un grand travailleur. Pour dire qu’en bon travailleur, il sait que le travail appelle le repos et le repos appelle le travail. Depuis 2005-2006, savez-vous qu’on n’a plus de vacances à l’université ? Avant 2006, on a deux mois et demi de vacances. Depuis 2006, on n’a plus les congés. Qu’est-ce qui fait qu’on n’a plus de congés ? Un enseignant qui n’a pas de congé, comment voulez-vous qu’il donne le meilleur de lui-même ? En août, on nous donne un mois, mais c’est le moment pour le département de nous convoquer pour des réunions. Si ce n’est pas le rectorat qui invite, pour telles ou telles pièces, c’est la faculté qui trouve des choses à nous demander… Si Talon le veut, il peut changer les choses. Il exige que la rentrée commence en septembre. Mais, les Primaires et les Secondaires n’ont pas eu deux semaines pour les congés de Noël, de Pâques et une semaine pour les congés de détente, cette année par exemple. Certains établissements privés et Séminaires ne respectent pas les calendriers des congés et des vacances proposés par l’Etat. On doit nous serrer pour que nous puissions respecter nos emplois du temps. Mais il y a des gens qui sont à des postes juteux qui veulent qu’on revoie tels curricula, tel emploi du temps de sorte qu’on ne prenne jamais au sérieux la semestrialisation. Il y a des gens qui prennent les enseignements mais ne les assument pas et c’est des assistants par-ci, par-là, et qui devraient voir faire, qui deviennent des remplaçants permanents. Ce n’est pas bien. Je ne suis pas acteur politique mais théoricien de la politique car, quand on m’invite dans les fora, les grandes réunions pour parler ou pour présider des jurys de thèse de doctorat, c’est surtout par rapport à la Philosophie la morale et politique, – Philosophie du langage et Sciences de l’éducation -, parce que ça fait partie de ma formation. Il faut reconnaitre que chacun doit assumer ses enseignements comme il faut. Quand on parle de solidarité gouvernementale, cela ne veut pas non plus dire que chaque ministre est tenu d’approuver les erreurs de l’autre ministre. Mais ça signifie plutôt que si ça marchait au niveau d’un ministère et que ça ne marchait pas au niveau de l’autre, ça ne marcherait pas pour l’ensemble du gouvernement.

Carte d’identité: Philosophe avant tout

Le Professeur Paulin Hounsounon-Tolin est né à Bohicon le 17 novembre 1963. Issu d’une famille extrêmement modeste dans un hameau du village Hlanhonou très pauvre, il prend pourtant l’école très au sérieux. Mais il n’a dû son salut qu’au refus de sa mère qui ne voulut pas le laisser faire la menuiserie, compte tenu de son alimentation très délicate. Il obtient le CEP en 1977 à l’Ecole Publique Mixte de Zogbodomey. BEPC en 1981 et BAC Série A1 en 1985, à Bohicon, il s’inscrit en Histoire à l’université. « Quand j’étais venu à l’université, j’étais pratiquement le seul étudiant de Zogbodomey. Aujourd’hui, ils sont plus de 500 », se rappelle-t-il encore ! Après les deux premières années d’Histoire, Paulin Hounsounon-Tolin fait une double inscription en Philosophie et en Histoire. Il soutient sa maîtrise en Philosophie le 15 mai 1992. Inscrit à l’université Paris 1, Panthéon-la-Sorbonne, à l’Institut Catholique de Paris, à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, à Paris 8, Seine-Saint-Denis, au Centre Sèvres, etc., il approfondit ses recherches en Philosophie (Antiquité tardive, Stoïcisme, Sciences de l’éducation, Psychanalyse, etc.), En fait, il se découvre une soif dévorante pour les études. « J’ai préparé en 6 mois, 3 DEA (en Philosophie, en Sciences de l’éducation, etc.) et j’ai préparé aussi les certificats de latin académique (Prononciation restituée) et de grec ancien. J’ai préparé aussi le DARE (Diplôme d’Aptitude et de Recherche en Sciences de l’Education), préparé et rédigé un Doctorat en Histoire de la Médecine et Anthropologie de la Maladie, parce que je sentais mon niveau de culture générale très faible », se souvient-il. Il soutient sa thèse de doctorat en Philosophie le 21 février 2000, à Paris 1, Panthéon-la-Sorbonne. Mais il soutient une autre thèse de doctorat en 2009 en Sciences de l’éducation à Montpellier 3, Paul Valéry. Dès la soutenance de la première thèse, il rentre au pays en avril 2000. Il a la chance d’être recruté assistant. Il monte rapidement les échelons. Maitre-assistant en 2005, Maître de conférences en 2010, il est Professeur Titulaire en Philosophie depuis 2015. Ses contributions les plus significatives sont publiées dans des ouvrages comme Devoir de vérité de l’intellectuel universitaire, Droits de l’Homme et Droits de la Femme, Education et décolonisation culturelle de l’Afrique, Grammaire du Civisme et de la Politesse, Tournant utilitariste de l’Enseignement Supérieur en Afrique au sud du Sahara, Babélisme d’hier à aujourd’hui (Malédiction des langues), etc. Mais le Professeur Paulin Hounsounon-Tolin est surtout connu pour ses travaux sur l’éducation à la citoyenneté.

Intimité: Fan d’Alèkpéhanhou

Marié et père de cinq enfants dont des jumelles, le Professeur est féru de la musique traditionnelle. Il avoue son penchant pour le roi du zinli rénové Alèkpéhanhou. A table, il aime bien la pâte à la sauce gombo. En termes de boisson, il préfère de l’eau mais pour être resté au milieu des prêtres, il déguste du bon vin de temps en temps. Pour garder la ligne, il fait beaucoup de marche depuis quelques années.

La Rédaction

CHRISTIAN PARFAIT AHOYO, MEMBRE DE LA DIRECTION EXECUTIVE NATIONALE DU PRD Sous l’arbre à palabres: « Au PRD, nous avons un programme de Remontada»

Views: 30

Invité dans la rubrique ‘’Sous l’Arbre à Palabres’’ du Journal l’Evénement Précis, Christian Parfait AHOYO, membre de la Direction Exécutive Nationale du Parti du Renouveau Démocratique (PRD) s’est prononcé de long en large sur l’actualité politique nationale en générale et le PRD en particulier. Parlant du PRD, l’invité a révélé que sa campagne pour la présidentielle de 2021 a consisté à exhorter les militantes et militants à faire une parenthèse pour se concentrer sur l’essentiel, c’est-à-dire ce que le Bénin gagne en développement secteur par secteur avec le duo Talon-Talata. Le Porte-parole du PRD rappelle que plus que des moments de fête, la campagne de 2021 a permis au plus ancien parti politique du Bénin de sensibiliser davantage ses militants sur les valeurs de civisme, du vivre ensemble et de la non-violence. A la question de savoir comment le PRD se prépare pour reconquérir ses sièges à l’Assemblée nationale lors des joutes électorales prévues pour 2023, Parfait Christian AHOYO répond sans hésiter : «Nous avons un programme de la remontada. » Au cours de l’entretien ‘’Sous l’Arbre à palabres’’, l’invité a passé au peigne fin des questions telles que la retraite politique du Leader Charismatique du PRD, Me Adrien Houngbédji, le caractère exclusif ou non de la présidentielle de 2021, l’appel du Chef de l’Etat de taire les querelles, la question de la liberté d’expression et les prétendues chasses aux sorcières, etc.

Et si on en parlait

Comment se porte aujourd’hui le Prd ?
Le Prd va de mieux en mieux. Sinon le Prd se porte très bien. Je dis de mieux en mieux parce qu’on n’aurait pas posé cette question il y a cinq ans ou dix ans. Le Prd n’avait aucun problème, c’est le tout premier parti du renouveau démocratique qui a traversé toutes les réformes jusqu’à aujourd’hui. Le Prd est le premier parti inscrit au ministère de l’intérieur à la sortie de la conférence nationale avec le multipartisme. Les réformes sont arrivées entre 2018-2019, le Prd s’y est conformé et est totalement à jour. Vu sur ce point, légalement, le Prd se porte très bien. Le Prd a traversé monts et vaux, qui ont fait que certains militants ont été un peu perturbés. Mais avec la sagesse, l’expérience et le leadership du Président Adrien Houngbédji nous sommes en train de gravir marche par marche mais avec certitude les escaliers pour faire ce que nous avons déjà dit à notre université de vacances. Donc le Prd se porte bien.

Le Prd se porte-t-il très bien en étant maintenant dans la majorité présidentielle ?
Le Prd se porte très bien et se porte encore mieux en cohérence avec sa vision, annoncée depuis 2016. Au lendemain des élections présidentielles de 2016, le Prd s’est déclaré de la mouvance, afin d’accompagner le Président Patrice Talon dans les réformes. Bien sûr, nous étions dans une position de législature puisque nous n’étions pas au gouvernement et aujourd’hui, nous ne sommes pas au parlement. Mais nous sommes au gouvernement. Donc nous avons accompagné le Chef de l’Etat dans ses réformes en position de législateur et nous l’accompagnons dans la suite de ces réformes en étant membre du gouvernement.

Et qu’est-ce que vous avez gagné ?
Nous avons gagné un Bénin qui avance. Il n’y a pas d’unanimisme sur un sujet surtout quand il s’agit des réformes qui concernent nos concitoyens qui ont pris des habitudes. Nous avons pu dire qu’on peut faire des réformes en adoptant l’approche qui est la nôtre : le discours sur le patriotisme, le dialogue, de la main tendue mais en ne perdant pas de vue qu’il y a des choses dont on doit se défaire pour pouvoir avancer. Nous, nous estimons aujourd’hui, sans avoir la science infuse, que notre approche du développement de la réforme c’est de dire qu’on peut bel et bien dans le dialogue aboutir aux réformes. Donc l’option du Prd est loin d’être une option de violence, c’est une option de paix et de dialogue et chaque fois que nous pouvons partager cette option nous allons le faire. Vous avez suivi la position du Prd au dialogue politique. Nous avons fait un mémorandum pour expliquer la vision qui est la nôtre. Nous avons dit pourquoi nous devons aller autour de cette table. Nous avons dit au préalable nos préoccupations et nous avons gardé cette attitude. Donc modestement nous avons gardé cette posture et il sera difficile de nous changer de cette voie-là comme un parti de paix. Et nous n’avons demandé à personne de prendre cette option. Nous allons la garder et la maintenir.

Pour les élections du 11 avril dernier vous étiez en campagne, quel a été le rôle que vous avez pu jouer dans la victoire du Chef de l’Etat ?
Nous étions un certain nombre de partis politiques à soutenir le duo Talon-Talata. Le Prd a cette particularité que nous nos campagnes, c’est des moments de fête. Nous avons pu déployer notre expérience sur le terrain sur tout le territoire pour expliquer aux populations ce pour quoi nous soutenons le duo Talon-Talata, programme de société à la main. Nous avons pu démontrer qu’on peut ne pas être d’accord avec toutes les réformes et s’attaquer à l’essentiel pour faire décoller le pays. Nous avons dit que les Béninois doivent apprendre à faire des parenthèses et à donner à chaque étape du temps. Nous avons estimé au cours de cette campagne qu’il était question de faire une parenthèse, quelles que soient nos divergences, pour parler développement secteur par secteur, surtout qu’un duo nous a proposé des schémas de développement de notre pays. Nous nous sommes dits qu’on peut bel et bien faire en deux semaines une parenthèse pour régler la question de l’emploi, régler la question de l’eau, régler la question de l’internet, régler la question de l’électricité, parler de l’agriculture et dire : « Voilà les pistes sur lesquelles nous n’allons plus jamais reculer », et trouver d’autres occasions pour encore discuter des questions politiques, des questions de vivre-ensemble. Nous c’est notre approche du développement. Nous ne pouvons pas être indéfiniment en train de mélanger tout pour finalement ne rien faire. Que personne n’aille dire que tout va bien. Nous notre approche, c’est l’approche du temps des choses. Chaque chose a son temps. Et au cours de la campagne, nous avons beaucoup mis l’accent sur les aspects de développement, le civisme, nous avons beaucoup mis l’accent sur les notions de paix et de vivre-ensemble pour pouvoir avancer. Et c’est ça qui a fait que nous étions très à l’aise en soutenant le duo Talon-Talata, parce qu’on se retrouvait intégralement dans ce projet de société. On comprenait très bien la vision du Chef de l’Etat. On avait partagé avec lui le diagnostic et on a vu les réalisations dans certains secteurs qui étaient déjà des évidences. Nous nous sommes dit qu’en cinq ans le duo Talon-Talata va nous amener loin. C’est ça qui a été une force et qui a fait que tous les Prd étaient sur le terrain et nous avons aussi écouté les cris de certains de nos compatriotes qui estimaient que les choses ne se passent pas comme ils l’entendent. Et nous avons vu la menace venir. Nous sommes rentrés rapidement dans la danse pour dire : « Non, ce n’est pas le moment de remettre en cause encore le peu sur lequel nous avons peiné à construire. Donc nous avons joué une partition de paix, hameau par hameau, village par village, quartier de ville par quartier de ville pour que les élections soient là. Modestement, nous avons contribué à la victoire et sans dire que nous étions les seuls acteurs de la victoire.

Mais est-ce que les populations vous ont dit que l’élection est exclusive puisque le Chef de l’Etat n’a pas eu en face de lui ses principaux adversaires.
Bon la notion de l’inclusivité ou non de l’élection est un problème qu’on peut analyser de deux manières. Selon qu’on reste dans le respect des textes de la République, tous les textes ont été appliqués. Vu sur ce point, personne n’a enfreint aux textes et aux règles qui sont en vigueur au Bénin. On peut ne pas être d’accord sur le contenu des textes. Dans ces conditions, on utilise les voies et moyens légaux pour fléchir cette barre-là. On n’utilise pas la rue, on n’utilise pas non plus la violence ni les cartouches puisque je n’ai pas souvenance qu’une loi soit votée dans la rue. Lorsqu’on a fini de poser les problèmes, on va respecter la démarche pour aller les faire voter. Donc ceux qui parlent d’inclusion des élections, ils peuvent avoir raison mais nous ne sommes pas d’accord avec eux sur le fait qu’on doit parler d’inclusion à l’aune des textes qui régissent le pays. C’est comme sur l’autoroute, si vous avez loupé la sortie vous patientez pour sortir à la prochaine bretelle. Vous ne vous arrêtez pas en pleine route pour faire demi-tour. Sinon vous créez le carambolage. Imaginez le carambolage dans la situation actuelle, vous allez comprendre de quoi je parle. Et le carambolage c’est ce que nous avons failli vivre. Quand vous faites comme ça vous allez enfreindre au code de la route et forcément vous allez en répondre. Il se pourrait que ceux qui parlent d’inclusion disent que la sortie est fermée, ils peuvent le dire mais toujours est-il que si vous loupez cette sortie vous prenez patience pour reprendre la prochaine sortie ou les prochaines sorties sinon nous n’allons jamais avancer. Nos pays seront dans de perpétuels recommencements. Voilà ce qui motive nous notre proposition une fois encore. C’est une lecture qui se fait par rapport aux textes de la République. Nous avons discuté avec certains même de nos militants qui nous ont posé des problèmes. Nous avons fait des discussions en amont avant de choisir le duo Talon-Talata. Certains des militants nous ont dit que tel que les choses se passent nous n’allons pas accepter. Et nous avons pris le temps et la patience d’expliquer aux gens qu’on peut ne pas être d’accord avec les textes mais une fois que les textes sont là on est contraint dans un Etat de droit de les respecter. Si vous ne les respectez pas, vous êtes dans l’illégalité. Si désormais nous voulons faire des combats politiques, c’est de nous donner les moyens légaux, les moyens légitimes pour pouvoir faire ces combats-là. Nous avons connu le parti unique dans ce pays. Nous avons connu le régime de dictature dans ce pays, nos parents se sont adaptés. Cela a pris le temps que cela devrait prendre. Nous sommes revenus encore à la conférence nationale, nous avons fait trente ans d’expérience de démocratie, un système de réforme est en cours. Dans la vie d’un peuple ce n’est pas forcement la fin du monde.

Vous parlez des textes, des lois. Le Prd a été secoué par la mise en application de ces textes avec 0 député à l’Assemblée nationale en 2019 et 0 maire en 2020. Malgré ça, vous continuez de soutenir le gouvernement. Comment expliquez-vous cela ?
Voilà la première bonne raison pour soutenir le gouvernement. Nous avons respecté les démarches pour légiférer. Les textes ont été pris, les textes se prennent à la majorité des députés présents et représentés à l’Assemblée nationale. Nous n’étions pas indifférents, sinon nous étions des acteurs de ces textes-là. A titre d’exemple, malgré que les textes ne nous avantagent pas, nous en position de républicains, nous les acceptions en attendant la prochaine occasion pour dire notre approche. Nous ne les refusons pas dans la rue, nous ne les refusons pas dans la violence. Nous disons : « Qui sommes-nous pour refuser ce que la majorité est en train de prendre à l’instant T ? » A date, c’est ce que pensent les autres. Nous nous sommes dit : « Prenons notre temps, mais en attendant cela, est-ce que c’est tout ce qui se fait qui est mauvais ? » C’est pour cela que j’ai parlé de la notion de temps. Le Prd n’a pas été aux élections législatives en 2019. En 2020 nous étions aux élections et les textes ont fait que nous avons eu 0 conseiller pour les raisons de 10%. On prend acte de cette situation et on avance. Maintenant, en 2021 nous sommes aux élections présidentielles. Trois élections différentes, trois textes où cette fois-ci on nous parle de projet de société. On s’est dit « Donnons-nous l’occasion de discuter avec les hommes et les femmes qui sont à même aujourd’hui de retoucher ces textes-là. » Donc soutenir Patrice Talon pour nous c’est être toujours apte aux côtés des décideurs pour continuer à dire et à exprimer notre vision du développement et de la politique.

Mais vous venez de dire que l’avènement des 10% vous a recalés des élections communales. Est-ce que cela ne donne pas raison à ceux qui estiment que le Prd ne couvre pas le territoire national et que ça s’arrête au Plateau et à l’Ouémé ?
Vous avez vu que pour aller aux élections communales, il faut avoir des candidats dans tous les 546 arrondissements que constitue le pays. Et les élections communales, je n’ai pas envie de revenir là-dessus. C’est des élections en termes de Covid qui ont connu une campagne qu’on a copieusement trouvé médiatique. Vous connaissez les conditions dans lesquelles ces campagnes ont été faites. Nous avons fait le bilan de ces élections au sein du Prd et si on les reprend aujourd’hui, je vous assure que le Prd n’aurait pas ce score parce que primo, il n’y a pas Covid, secundo, les conditions ont changé, tertio, le Prd a pris les notions qu’il faut faire. Ce que je veux que ma présence sur cette émission retienne est qu’on peut bien être en désaccord dans une réforme et accepter que cette réforme continue. L’intérêt général n’est pas la somme des intérêts particuliers ni partisans. Et même si ça nous désavantage, nous avons fait l’option de mettre l’intérêt général au-dessus de l’intérêt partisan de notre parti. Il n’en demeure pas moins que nous ne sommes pas des oiseaux qui revenons prendre des pièges aux mêmes endroits que nous avions été piégés. Nous avons des universités de vacances, nous avons des journées de réflexions, nous avons des cercles de réflexion, des instances du parti qui analysent les forces et faiblesses du parti. Et gardez-le pour de bon, en politique, c’est un rapport de forces permanent qu’un autre rapport de forces permanent vise à détruire.

Lors de son investiture, le Chef de l’Etat a dit de taire les querelles, alors qu’il n’a pas encore commencé les démarches en son sein. Son appel sera-t-il entendu par la classe politique ?
L’appel du chef de l’Etat est intéressant et est à saluer de cette position, de cette tribune. Le jour de l’investiture, le père de la nation dans cette posture lorsqu’on lui a remis tous les attributs de la République, les onze millions que nous étions, étaient devenus comme un. Et ce discours est en conformité avec un discours qui veut aller de l’avant. La première chose, c’est le début. La seconde chose, c’est de l’aider à ce que ce discours se transforme en des actes. Ce n’est pas de se réfugier derrière des accusations pour dire que ce qu’il a dit, de taire les querelles, aurait échoué. Si tous nous venions boucher les trous de la jarre, personne ne serait absent au rendez-vous et à ce rendez-vous le problème de taire les querelles serait abordé autour d’une table. C’est la vision que nous avons. Le Chef de l’Etat veut aujourd’hui amorcer le développement avec les ressources humaines que sont les Béninois et d’autres compétences qui viendront du monde avec les moyens financiers des Béninois. Et il n’est pas juste que certains Béninois se sentent exclus. Le Chef de l’Etat a bien posé la question. Il reste que chacun se mette en position de récupérer cet appel et de créer les conditions pour venir autour d’une table. Nous, au Prd, nous sommes d’accord sur ce principe. Nous ne faisons pas partie de ceux qui font les querelles, mais si on nous invite nous allons appeler ces amis autour d’une table. Faisons la guerre verbale autour d’une table, saluons-nous parce que dehors, le Chef de l’Etat a dit quelque chose : « nous avons tous un ennemi, en dépit de nos querelles. Nous avons un ennemi qui ne dort pas, c’est la misère, le chômage des jeunes, la maladie ». Cet ennemi ne dort pas. Il ne connait ni opposant, ni ‘’mouvancier’’. Il frappe et si nous ne nous entendons pas, nous serons frappés par le chômage. Mieux vaut, très rapidement, nous entendre pour faire face à cet ennemi qui ne viendra pas à la table de négociation mais qui est toujours là et dans d’autres pays. Donc, il y a ce que j’appelle le temps des temps. Si nous allons prendre le temps de nous chamailler, les problèmes sont au quotidien. C’est Coluche qui disait que : « Ne pensez pas que vous allez noyer vos soucis en buvant de l’alcool. Les soucis savent nager ». C’est dire que si c’est parce que vous avez des soucis que vous allez boire pour les chasser, attention, les soucis savent nager. Il suffit de boire, de dormir, de vous réveiller et vos soucis sont là. C’est à ce niveau que nous disons qu’il faut faire la part des choses. Le Bénin sera construit par les Béninois, pour les Béninois, et dans l’unité nationale. Mais l’unité nationale n’est pas l’unanimisme. Donc, une opposition a tout à fait sa place dans la République. Les textes l’autorisent. Les gens ne sont pas obligés de dire que ce que le gouvernement fait est bon et aucun gouvernement n’a la vocation de contrôler la parole. Si un gouvernement a cette prétention, il a déjà échoué. Mais, c’est la manière de protester qui doit être une manière républicaine et une démarche de vivre-ensemble. C’est ça la nuance. La nuance, c’est la manière de protester. Vous savez très bien que dans nos familles ce n’est pas parce que papa et maman sont ensemble qu’il y a la paix. C’est parce que la manière de protester est suffisamment discrète que nous ne sentons pas qu’il y a un problème au sein de la famille. Lorsque ça ne se passe pas comme ça, c’est la violence. Et c’est cette violence qui sort de la maison, va dans la rue et de la rue, envahit la cité et de la cité, tout le pays. Si vous ne prenez pas cet exemple, vous ne comprendrez pas. 11 millions de personnes, c’est 11 millions de points de vue. Personne ne peut avoir la prétention de dire que c’est lui qui a raison. Par contre, on choisit les moyens pour faire entendre raison, pour ne pas rompre la manne et que le problème d’aujourd’hui soit une opportunité demain.

Êtes-vous du même avis que ceux qui disent que les libertés sont foulées au pied depuis 2016 ?
Je n’ai pas eu ce sentiment parce que j’ai toujours eu la liberté de m’exprimer en tant que Parfait Ahoyo et en tant que membre du PRD. Lorsque les choses n’étaient pas claires, je sollicitais toute la presse pour marquer notre désaccord en qualité de porte-parole. En plus de cela, on a fait un usage abusif des réseaux sociaux. On ne sait pas ce que c’est que le code du numérique qui n’a jamais interdit d’utiliser les réseaux sociaux pour s’exprimer, mais dit qu’il ne faut pas calomnier. L’effet multiplicateur est plus que les autres médias et donc, il est très facile de détruire à partir des réseaux sociaux. Donc, chacun doit être responsable de ses propos. Il y a donc la notion de responsabilité et la notion de liberté. Vous devez mesurer vos propos. Vous me direz peut-être qu’on n’a pas préparé tout le monde à avoir l’outil en main. C’est peut-être le rôle des partis politiques et je peux vous dire, en tant que Délégué général de la DEN/PRD en charge de TIC, j’ai mis en place une politique de formation de nos militants sur les réseaux sociaux, aucun militant PRD ne tient des propos déplacés sur les réseaux sociaux. On les a formés et je crois que c’est un travail permanent. Vous entendez des jeunes insulter des personnes sur les réseaux sociaux, comme ce fut le cas pour le président Adrien Houngbédji alors que ces derniers ne l’ont jamais rencontré, sans avoir été interpellés. Ceux qui sont souvent interpellés répondent de leurs actes et les avocats vont les défendre. La notion de liberté doit être accompagnée de la notion de responsabilité. C’est important. Je n’ai pas souvenance non plus que des hommes politiques aient été arrêtés à cause de leurs opinions. Si vous diffamez, la loi dit d’apporter les preuves. C’est ce que nos amis de la presse ne comprennent pas. Si la personne à qui vous vous adressez estime qu’elle est blessée, c’est de la diffamation. Vous regardez la personne qui a les yeux rouges et vous dites qu’il a l’air d’un soulard. Mais lui peut dire que c’est de la diffamation au moment où vous parlez de liberté. Je pense qu’il y a un travail de fond qui doit être fait. Qui a été mis en prison parce qu’il a dit qu’il est contre Talon ? Je n’en connais pas.

Donc vous pensez que Joël Aïvo et autres étaient suffisamment plongés ?
Non. Vous avez cité Joël Aïvo pourquoi vous ne citez pas le secrétaire général du parti Les Démocrates, pourquoi vous ne citez pas Eric Houndété ?
Laissons la justice faire son travail.

Il n’est pas encore interpellé à ce jour…
Pourtant, ils disent tous la même chose. C’est des exemples pour qu’on ne continue pas le débat. Il est là dans le pays et tranquille. Et pourquoi vous ne parlez pas de mon frère Candide Azannaï ? Donc il dit la même chose que Talon ?

Quelle est la différence ?
La différence est que vous ne vous associez pas à des pratiques, à des réunions, à des choses qui sont interdites sur lesquelles on peut apporter des preuves matérielles contre vous. Vous savez que devant la justice on ne dit pas ‘’il paraît’’ ? Devant un juge, c’est la preuve matérielle. Donc je continue de parler de présomption d’innocence. Tous les amis qui sont arrêtés à la date d’aujourd’hui bénéficient de cette présomption d’innocence. Mais il va falloir démontrer leur innocence à travers des preuves matérielles qui ont permis leurs arrestations. C’est ça le problème. Et comme c’est aux mains de la justice, vous et moi nous ne savons pas, mais je puis vous dire que si nous restons dans le même registre, des hommes et des femmes disant les mêmes choses politiquement se sont retrouvés en deux ou trois catégories. Certains arrêtés, d’autres en fuite, et d’autres sur le territoire national sans être inquiétés. Mais tous ont les mêmes discours. Donc à nous de chercher les raisons et de savoir pourquoi ci, pourquoi ça. Je crois que si on ne fait pas ça et si on se met très facilement dans un camp, on n’encouragera pas l’attitude des autres qui ont été exemplaires en ne se mêlant à rien du tout, tout en gardant leurs opinions. C’est pour ça qu’à l’entame, j’ai commencé par dire que je n’ai pas souvenance d’avoir écouté quelqu’un qui, à la sortie d’une émission, ait été arrêté.

Vous êtes un technicien en numérique. Voulez-vous dire qu’il y a eu des échanges à travers le numérique qui ont permis d’avoir des preuves irréfutables contre certains ?
C’est justement ça. C’est ce que j’appelle les preuves matérielles. Lorsque vous avez des audios, des échanges écrits, lorsque vous avez fait des transactions financières et qu’on vous dit : « Justifiez ces transactions-là », on viendra vous interpeler pour les justifier. C’est la justice qui nous édifiera. Si c’est quelqu’un qui a pris ta voix et a fait un montage, la technologie peut démontrer que ce n’est pas toi. Mais s’il s’est avéré que c’est toi, c’est difficile. Et c’est de ça que je parle. Le numérique nous permet aujourd’hui d’authentifier un document.

Est-ce qu’aujourd’hui, les techniques de clonage de voix permettent qu’on reconnaisse que c’est des voix clonées ?
On peut multiplier les voix, mais ce qu’on ne peut pas faire, c’est falsification de l’original. Tout original est unique même en numérique. Et il y a les techniques pour identifier le document original ou authentique. Il y a des technologies aujourd’hui dans notre pays pour l’identifier. Donc s’il arrivait que quelqu’un estime que ce n’est pas lui, on enclenche la procédure de l’authentification du document.

Voulez-vous dire qu’il n’y a pas de chasse aux sorcières ?
Pour avoir la chasse aux sorcières, il faut d’abord identifier les sorcières et les chasseurs. Je n’en connais ni de l’un ni de l’autre. Par contre, si un Béninois se sent brimé dans ses droits, il a les moyens légaux pour prouver ou confirmer son innocence. Et une fois encore en politique, il y a des positions qu’on ne prend pas selon les circonstances. En tout cas, moi je l’ai appris avec le temps. Je peux ne pas être d’accord aujourd’hui, et attendre l’occasion pour le dire, parce que lorsque vous lancez tout le mouvement d’ensemble, le pouvoir politique, surtout l’Etat a ce qu’on appelle la raison d’Etat. Vous ne pouvez pas vous opposer à la raison d’Etat. Après vous allez justifier que la raison d’Etat a tort, mais c’est après coup, c’est dans les procès. Mais ça peut vous être fatal humainement, psychologiquement. Donc la chasse aux sorcières, attention, c’est des hommes et des femmes qui sont dans nos appareils, aussi bien l’officier de police judiciaire qu’au niveau de la justice. Je ne dis pas que tout ce système est totalement infaillible, mais s’il advenait que quelqu’un est brimé dans ses droits, ayons confiance en la justice de notre pays. Ça va se faire. On a connu des cas où il y a eu de non-lieu dans ce même pays. Donc ne pensons pas forcément que ça n’arrive qu’aux autres. Si nous pensons comme ça, c’est de dire que nous ne sommes plus dans un Etat de droit. Ils auront leurs droits, leurs libertés, et tout ce qu’ils peuvent faire.

Le PRD participe au gouvernement avec un ministre sur 23. Ce n’est pas peu ?
Non, ça ne se compte pas comme ça. Il faut d’abord voir la symbolique. Aujourd’hui pour nos militants, pendant les 5 premières années, nous avons dit que nous sommes un soutien sans participation. Nous n’étions pas au gouvernement. Et nous sommes maintenant un soutien avec participation. Le ministre Akotègnon qui est au gouvernement n’est pas un ministre PRD. Il est un ministre militant du Prd, mais il est un ministre pour la République. Il est là pour servir les Béninoises et Béninois toutes tendances confondues. Le journaliste que vous êtes est un journaliste pour toute la République. Si on prend la fonction comme ça, on se rend compte que nous sommes tous amenés à une tâche républicaine. Et c’est comme ça que nous voyons la présence du PRD dans le gouvernement. Et cette présence est pour nous une note de satisfaction en termes de politique. C’est-à-dire que l’approche que je viens de décrire qui est celle du Prd est écoutée. Nous allons apporter notre vision pacifiste à l’oreille qui décide. C’est en cela que c’est une joie. Donc il ne s’agit pas du nombre. Il s’agit de l’efficacité et de pouvoir avoir une possibilité supplémentaire de contribuer au développement du pays.

Surtout que c’est lui qui commande désormais les maires et les préfets …
J’ai lu ça sur les réseaux sociaux et j’ai souri un peu. C’est de la blague. Ayons le triomphe modeste. Le ministre de la décentralisation n’est pas le bourreau des préfets et des maires. Il est le facilitateur pour que les maires réussissent leurs missions. C’est son boulot. S’il constitue un frein, il a perdu les normes, parce que dans le Programme du président Talon, c’est à partir de la base que le développement va être amorcé. Donc vu sous cet angle, je crois que le ministre Akotègnon a un grand rôle à jouer pour booster le développement de la base au sommet et avec son expérience au parlement en tant que président de la commission des finances, il a eu la chance de rencontrer presque tous les ministres. Ça lui est facile de discuter avec la plupart de ses collègues, car le gouvernement n’a pas bougé depuis 5 ans. Donc il a eu cette chance-là de discuter avec eux, de connaître presque tous les budgets de chaque ministère, les progrès et les difficultés. Il a fait cet exercice pendant 4 ans à l’Assemblée nationale. Donc c’est un atout supplémentaire qui va être au service du développement local. C’est comme ça qu’il faut voir. Mais pour nous, en tant que PRD, c’est une satisfaction morale parce que certains nous ont dit que le candidat Talon est venu au congrès du PRD pour nous bluffer. C’était presque de l’injure pour la personne du président Talon. Donc je crois que cette nomination vient mettre ça là de côté. Certains nous ont dit aussi sur le terrain que le PRD est de l’opposition. On a beau dire qu’ils se trompent de cible, ils ne nous comprenaient pas. Cette nomination pour nous vient déblayer le terrain. Nous n’avons jamais été à quelque rencontre de l’opposition que ce soit. Nous, nous sommes PRD. Nous avons gardé notre entité et nous en sommes fiers. Et c’est cette liberté qui nous permet de choisir librement le candidat Patrice Talon. C’est la différence. On ne peut pas nous faire le procès de choisir quelqu’un. Nous, nous sommes PRD et nous soutenons Talon et son programme d’action.

N’avez-vous pas le sentiment qu’il y a juste eu un semblant de remaniement pour insérer le PRD dans le gouvernement ?
Non. Vu comme le trombinoscope du gouvernement, on voit les anciennes photos, et puis on voit une nouvelle photo. Vu comme ça, on est tenté de dire oui. Mais ce n’est pas du tout ça la réalité. Nous venons de célébrer le travail des hommes et des femmes du gouvernement qui ont conduit le président Talon à avoir les réalisations positives qui sont les siennes. Et il n’a pas encore fini certains chantiers. Si vous avez bien suivi son projet de société, c’est la continuité de ce qu’il a entamé depuis 5 ans. Certains sont même restés à l’étape d’étude. Des choses réalisées par ceux qui sont là. Je crois qu’il a gardé une attitude de cohérence au niveau de l’action gouvernementale pour aller vraiment loin, pour ne pas perturber l’équilibre. On était habitué à chaque remaniement ministériel à un jeu de chaises musicales. Mais n’enlevons pas le pouvoir constitutionnel conféré au chef de l’État de former son gouvernement, de conduire la politique gouvernementale et d’en répondre devant la nation. Si nous commençons par interpréter ses choix, c’est tout comme si nous voulons nous mettre à sa place. On a vu des chefs d’État qui ont formé leur gouvernement, personne n’a dit que c’est mauvais. C’est à la fin que nous avons eu les résultats.

Avez-vous constaté la disparition du ministère de la communication ?
Je n’ai pas été surpris de la disparition de ce ministère, parce que je m’étais dit que les communications étaient retournées au niveau du ministère du numérique et de la digitalisation. Après, on a suivi en direct le chef de l’État qui a coupé la polémique en intervenant sur E-télé pour expliquer sa vision. Une fois encore, la politique gouvernementale est conduite par le chef du gouvernement. Et ce que moi j’ai retenu de fondamental, c’est qu’il a fait un diagnostic du ministère de la communication. Au moins si on reste au niveau du diagnostic, le secteur n’a pas permis au ministère de la communication de se partager. L’autre diagnostic est que la volonté de réguler, de professionnaliser la communication est affichée. Le chef de l’État a estimé qu’il faut dissocier la communication gouvernementale de la propagande. Donc en ramenant le porte-parole à la présidence, il n’y a rien d’anormal. Ce qu’il faut surtout éviter, c’est la polémique. Une fois encore, et ça c’est un appel à l’endroit des professionnels de la communication : Ne loupez pas l’opportunité. Le chef de l’État a dit : « Je veux améliorer votre secteur. » Si vous restez là à dire que Talon a supprimé la communication, nous n’allons rien faire, il vous a aidé et ainsi un nouveau paradigme de la communication va naître et peut être que lorsque vous professionnels qui vivez les choses vous allez vous mettre autour de la table en posant les actes le plus sereinement possible, une nouvelle piste des communications va sortir. Mais à la date d’aujourd’hui, la seule suppression que je vois est une opportunité pour les professionnels de la communication et de l’information de se réveiller. Dites-vous que c’est l’occasion pour que le chef de l’Etat s’intéresse à votre corporation. Faisons donc quelque chose de clean et saisissons cette opportunité pour que ça soit réglé. C’est vous autour de la table qui allez proposer une modification des textes de la HAAC pour aller dans le professionnalisme. Si c’est cette occasion qui permet d’avoir une nouvelle loi sur la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication, alors saisissez-la.

Que proposez-vous comme solution pour qu’il y ait une stabilité politique durant le second mandat du président de la République ?
Le Président Talon est un infatigable acteur de la stabilité politique. Et je crois qu’il a mis la première clé dans la porte en demandant aux uns et aux autres de taire les querelles. La deuxième étape est de franchir le palier et surtout que ceux et celles qui ne disent pas les mêmes choses acceptent le principe. Si le pays est calme, on peut faire beaucoup de choses. Le chef de l’Etat est content que le vivre ensemble existe dans certaines zones et il a totalement l’intelligence nécessaire pour atteindre cet objectif. Mais avant de dialoguer, il faut que tout le monde soit dans la même vision. Le pays n’avancera pas dans la division. Le chef de l’Etat a les moyens pour tendre la main au peuple et il doit être un infatigable dialogueur. Il ne faut pas se fatiguer de lui rappeler que c’est à lui qu’on a confié le Bénin, c’est à lui de nous représenter.

Donc vous pensez qu’il doit donner une suite favorable aux récentes demandes pressantes pour organiser des assises?
Il doit contribuer à ce que les Béninois se parlent, surtout la classe politique. Que ceux qui ne partagent pas le même point de vue que lui se parlent. Nous devons faire comprendre que nous avons intérêt à parler ensemble. Le faire ne veut pas dire que c’est un aveu d’impuissance mais au contraire discuter avec les gens qui ne sont pas du même avis que vous, c’est un acte d’humilité. Cela ne veut pas dire que vous avez pris de l’ascendance sur lui. C’est de cette discussion que jaillira la lumière. Et cette habitude est notre credo au PRD.

Comment le PRD se prépare-t-il pour reconquérir ses sièges au parlement ?
Nous avons un programme de la remontada. On a perdu 10 députés mais aujourd’hui Dieu nous a honorés d’un président qui est expérimenté. Je me souviens du lendemain des élections communales où tout le monde était dans le désespoir. J’ai dit : « Attendez ! Nous allons remonter ! » Lorsque vous êtes sur le terrain et que vous voyez les militants à la base, vous vous rendez compte qu’en réalité cette situation nous a permis de nous rendre compte que c’est un parti politique. Aujourd’hui, c’est très facile de voir les militants sur le terrain mouiller le maillot. Vous nous avez vus sur le terrain pour la campagne mais dans d’autres circonstances ça nous coûtait trois ou quatre fois plus cher. Aujourd’hui, les gens se sentent impliqués et nous voulons maintenir cette dynamique.

Ce sont les effets de la remontada qui vous amènent à reprendre le maillot de militant ?
Je vais vous dire une chose. Certains partis existent parce que les cadres y sont nommés. Parce qu’il y a des directeurs, des ministres, des députés et les gens courent pour être dans ce parti-là. Au PRD, on n’a pas eu ça. On a les militants. On est partis de 0 ministre à 1 ministre. Pour nous, c’est un gain. Et ce poste est forcément en moins quelque part sur le parti. Si vous ne savez pas vous contenter de ça, vous n’allez pas apprécier le chemin parcouru. Le simple fait d’être parmi les gouvernants, vous permet d’être avec les gouvernants. Cela permet à vos militants de ne pas être considérés comme des taupes. Nous sommes un parti de masse où les militants n’ont pas besoin forcément d’être devant. Nos militants ont besoin de marchés, des routes pour faire leur business et autre. Ils ont besoin de la sécurité et de la paix . Si vous leur offrez cela, c’est fini.

A quand la retraite politique de votre leader ?
C’est depuis 2019 qu’il s’est totalement retiré. Il y a un mandat du bureau politique qui court jusqu’en décembre de cette année 2021. Je crois que vous ne confondez pas la retraite à la mort politique? Puisque notre leader, le président Adrien Houngbédji, n’est pas mort politiquement. Nous ne lui souhaitons même pas une mort politique. Il est en train de nous orienter vers la prise en charge des problèmes du pays. Il n’est pas plus âgé que certains dont personne ne demande la retraite non plus. Il a quelque chose d’important que je demande que les uns et les autres acceptent, c’est son expérience à conduire un parti politique depuis 30ans. Donc permettez-nous en tant que militant de profiter de ce gisement d’expérience. En tant que militant, le seul Béninois ayant l’expérience de conduire un parti pendant 30ans, c’est notre président Adrien Houngbédji. Donc permettez nous de continuer à traire le lait, s’il était une vache à lait, à boire l’expérience jusqu’à la lie. Sachez donc que nous sommes dans une démarche de le maintenir encore et encore. Il a une vie privée ; il a son programme personnel ; il ne s’implique plus dans le parti comme avant. Mais nous savons qu’en cas de conflit, lorsqu’il y aura des difficultés, il constitue notre repère, une référence tant pour nous qu’à la nation. Surtout qu’il a la liberté au cœur.
Sachez désormais que c’est le noyau des cadres et des responsables de la DEN qui dirige le parti. Depuis 2019, c’est seulement à l’approche des élections présidentielles passées qu’il a fait une sortie pour dire que l’heure est grave ; qu’il y a des incompréhensions qui risquent de tromper beaucoup de Béninois. Et que quand on a son expérience, on ne laisse pas les choses pourrir. On vient à la rescousse. C’est pour ça qu’il est passé de maison en maison, en demandant aux jeunes de ne pas verser dans la violence. Il dit dans son discours de non-violence : «J’ai voulu être chef de l’Etat pour construire le pays. Dieu ne me l’a pas donné. Quelqu’un est en train de le faire, je ne vais pas l’empêcher ni par action, ni par mes intentions. Que personne ne vous mente pour que vous versiez dans la violence inutile ». C’est ce qui l’a fait sortir. Mais après cela, il s’est rangé. Vous ne le voyez nulle part. Et pendant ce temps, c’est nous qui sommes à l’exécutif. C’est nous qui prenons les décisions.
Nous ne voulons pas être orphelins très tôt (au sens propre et au sens figuré). C’est-à-dire nous ne sommes pas pressés de le voir partir. Nous voulons qu’il soit toujours là pour qu’en cas de difficulté ou de situation difficile, nous puissions dire : «Parce que notre leader est là nous pouvons oser».

Si on vous demandait de conclure cet entretien, que diriez-vous ?
Je dirai que notre nation est en développement. Tous les éléments ne sont pas encore sur pieds, le vivre-ensemble est en souffrance mais ne nous leurrons pas. Il n’y a pas encore péril en la demeure. Nous avons toutes les occasions pour nous parler. Que chacun, du plus fort au plus faible, se mette dans une prédisposition d’écoute de l’autre, parce qu’il n’y a pas de fort éternel, il n’y a pas de faible éternel. Tout est mouvant, tout bouge. Ceux qui sont fort aujourd’hui peuvent être en faible position demain. Mais comme personne ne veut subir ce sort, notre combat est de faire en sorte qu’aucun Béninois ne brime l’autre. C’est de bâtir la République. Ne construisons pas les textes sur mesure, prenons les dispositions pour le futur, pour l’avenir de nos enfants. Sur certains aspects des réformes politiques, c’est pour ça que moi je soutiens le président Talon. Mais nos expériences ne nous permettent pas aujourd’hui d’apprécier tout. Gardons l’esprit, corrigeons ce qui peut l’être, mais dans un esprit de vivre ensemble et ce vivre-ensemble est indispensable. Faire en sorte que chacun puisse s’exprimer, se déplacer librement dans le pays. Et ça, c’est le pouvoir qui a les moyens pour nous assurer cela. Il revient au pouvoir politique de nous assurer à nous tous, la liberté d’aller et de venir, la liberté de parole, et à nous autres, c’est notre attitude qui nous permet de bénéficier de ça.

Carte d’identité: 30 ans d’expérience politique

Christian Parfait Ahoyo est ingénieur en informatique. Né le 15 avril 1967 à Abomey, il a fait son école primaire à Porto Novo où il obtient le CEFEB en 1978. Il fait ensuite le CEG 2 Abomey où il décroche le BEPC en 1984 ainsi que le BAC C au Lycée Houffon. Inscrit en MP à l’Université nationale du Bénin, il fait parallèlement des études de géographie. A l’issue des études en Mathématiques et en Géographie, il part en France pour faire un troisième cycle en système de gestion de l’environnement de 1999 à 2004, à Aix-en-Provence (Marseille). Parallèlement, il fait à Orléans des études d’ingénieur en informatique qu’il juge beaucoup plus opérationnelle. Il travaille réellement en tant qu’ingénieur informatique à Air France, à la Société Générale des Banques en France, à BMP, à Total dans les groupes Axa, avant de revenir sur des missions à l’international en tant qu’expert au niveau de l’Union européenne. Et à partir de 2008-2009, il fait des missions internationales vers l’Afrique avec la Banque Mondiale, le PNUD. Il intervient ainsi sur les politiques d’informatisation, par exemple le Programme d’Appui aux Réformes de la Justice au Bénin, pour l’informatisation de la justice dans notre pays. Nommé par le Président de l’Assemblée nationale au poste de conseiller technique chargé de l’informatisation et du numérique, il a travaillé sur le code du numérique adopté par le parlement en 2015. Mais il ne faut pas oublier que depuis l’université, Christian Parfait Ahoyo était déjà un militant du Prd. Membre fondateur de l’Union nationale des étudiants du Bénin (Uneb), il a été le tout premier Directeur de publication du journal Le Révélateur, le 2ème journal des étudiants après Le Héraut. Président de l’UNEB de 1991-1992-93, il avait toujours été militant de Me. Adrien Houngbédji. Il était ainsi dans la campagne pour la présidentielle de 2001, 2006 et 2011, toujours aux côtés de son mentor. « Nous avons gagné, dit-il. On nous a vendu le ko. Nous avons accepté les chars devant nos maisons à Porto-Novo. » Durant ces heures chaudes, il avait même été arrêté et brièvement détenu. Bien entendu, 2016 a vu le soutien du Prd pour Lionel Zinsou, avant qu’à l’heure de la victoire de Talon, le parti ne bascule vers la mouvance présidentielle.

Intimité: Ancien footballeur

Marié et père de 02 enfants, Christian Parfait Ahoyo est un ancien footballeur. Il fut même sociétaire du club des caïmans du Zou (junior).Et à ce titre, il connaissait l’ancien Président de la FBF, l’emblématique Moucharaf Gbadamassi. Si vous l’invitez à table, il faudra prévoir de l’akassa couvert de feuille de teck ou de palmier. En termes de boisson, il apprécie bien le vin à table et la bière quand il est avec les amis.

La REDACTION

Bilan du Maire de la commune de Bohicon, Rufino d’Almeida Sous l’arbre à palabres à l’Événement Précis: « Bohicon sera la première ville du Bénin à avoir une régie communale »

Views: 43

9 juin 2020-9 juin 2021. Déjà un an pour Me Rufino d’Almeida à la tête de la ville carrefour, Bohicon. Interrogé sur sa première année de gestion, le Maire de la ville de Bohicon fait des aveux sur ses premiers jours à la tête de la mairie : « l’absence de ressources pour impulser le développement et donner corps à mes ambitions a été un problème majeur ». En retroussant ses manches, Me Rufino d’Almeida s’est aussitôt mis au travail et se félicite d’avoir posé avec son conseil communal des pas significatifs dans ce domaine. « Sous l’arbre à palabres » de votre quotidien l’Evénement Précis, il détaille les actes majeurs de sa première année de gestion. L’interdiction de chargement hors parc, la suspension des comités de gestion des parcs, la mise en régie imminente des infrastructures de la commune sont entre autres quelques actions posées par le maire depuis son installation. Selon son développement, ces réformes ont permis à la mairie de mobiliser des ressources nécessaires pour la réalisation des infrastructures sociocommunautaires au profit des populations. Mais la détermination de Me Rufino est plus forte et son plus grand souhait est de doubler les ressources de la commune. Outre cet objectif, le Maire Rufino d’Almeida ambitionne aussi de mettre de l’ordre dans le foncier à Bohicon. Côté politique, le maire de la ville de Bohicon, membre fondateur du parti Bloc républicain trouve logique et nécessaire la réélection du président Patrice Talon pour la poursuite des actions de développement en cours à travers la mise en œuvre du Programme d’Action du Gouvernement ‘’Bénin Révélé’’. Ce programme d’action a effet beaucoup apporté à la ville de Bohicon selon le maire qui reconnait d’ailleurs que sans le PAG, Bohicon ressemblerait à un village. Raison suffisante pour l’ancien directeur de cabinet du ministère du plan d’inviter le gouvernement à penser davantage à la ville carrefour.

Et si on en parlait

Comment avez-vous ressenti ce transfert de l’autorité centrale que vous incarniez à l’autorité décentralisée que vous êtes aujourd’hui devenue ? Comment avez-vous vécu cette mutation ?
Effectivement il y a eu une mutation brutale, mais j’ai fini par me convaincre que c’est mon destin. Vous le savez, j’étais à Paris, avocat, lorsque le candidat Abdoulaye Bio Tchané m’a demandé d’être son directeur de cabinet politique. Là déjà, c’était un grand écart. Comment peut-on être à Paris et piloter des militants au Bénin. Pourtant, j’ai réussi à le faire en venant pratiquement tous les weekends à Cotonou, pour tenir les réunions des membres du cabinet ainsi que des militants. De la même façon, lorsqu’il m’a été demandé de devenir le directeur de cabinet du ministre d’État chargé du plan et du développement, Abdoulaye Bio Tchané, j’étais encore à Paris et ça a été également une grande transition. Je suis venu à Cotonou avec une veste, ne sachant pas que je serai à ce poste. Parce qu’on m’a dit un dimanche soir, je crois : « votre dossier sera évoqué en conseil interministériel demain lundi. Vous serez nommé mercredi. Jeudi, vous viendrez au ministère pour prendre connaissance des lieux et vendredi pour la passation de charge et la prise de fonction. » Ce qui fut fait. De la même façon, je suis parti du niveau stratégique, donc du poste de DC du ministre d’Etat à la mairie. Voyez-vous, je suis un habitué des grands écarts. On dirait que j’aime ça ou bien que mon âme aime ces mutations. Sinon, c’est le destin.

Un an après, avez-vous été déçu par ce que vous avez vu concrètement sur le terrain ?
J’ai passé presque quinze ans dans l’administration privée en tant qu’avocat au barreau de Paris et plus de quatre ans dans l’administration centrale en tant que directeur de cabinet du ministre d’État. En allant au niveau communal ou décentralisé, j’étais déjà persuadé que le vrai développement, les vraies actions de développement doivent être au niveau des communes. Je suis aujourd’hui plus que jamais persuadé de ces idées que j’avais depuis une trentaine d’années.

Quels sont les grands problèmes que vous avez rencontrés tout au début ?
En devenant Maire, j’ai été rapidement confronté à des propos attentatoires à ma vie privée et mon honorabilité par des groupuscules mal inspirés et soutenus en sous-bassement par des acteurs politiques. Ensuite, l’absence de ressources pour impulser le développement et donner corps à mes ambitions a été un problème majeur. Pour finir, le cloisonnement du travail dans les services fut une surprise pour moi. La conséquence première est que deux personnes qui partagent le même bureau ignorent tout de leurs dossiers respectifs. Je rajouterai l’ignorance abyssale du fonctionnement et des difficultés des communes observés au sein des cadres de l’administration centrale.

Votre budget est de combien de millions par exemple ?
J’ai un budget d’un peu plus d’un milliard pour la commune de Bohicon. Qu’est-ce que vous pouvez faire avec un milliard ? Donc, vous êtes obligé de faire de la mobilisation des ressources votre premier défi si vous êtes un maire ambitieux. Il s’agit d’abord de fermer les canaux de perdition des ressources. A cet effet, j’ai été obligé de développer des stratégies innovantes . Ensuite, il a fallu laisser la politique de côté pour véritablement recouvrer les taxes qui reviennent à la commune. C’est être capable de contraindre les amis, parents et partenaires politiques à libérer ce qu’ils doivent à la commune. L’autre observation c’est d’améliorer la cohérence entre les documents de planification de long terme et ceux de cout terme. Le PDC, c’est notre PAG à nous et les cadres doivent prendre une part active dans sa rédaction, parce que lorsqu’un projet ne figure pas dans le PDC, c’est qu’il est difficile de le mettre dans le budget. Donc, que les cadres s’approprient davantage ce document et quand je dis « cadres », c’est le maire y compris. Il ne sert à rien de laisser ce document être rédigé uniquement par des experts, mais il faut l’implication des cadres communaux.

Un an après votre élection, quel bilan faites-vous à la tête de la mairie de Bohicon ?
Vous savez qu’il est très difficile pour un acteur de faire son propre bilan. Vous êtes des journalistes et vous pouvez venir faire mon bilan.

C’est pour dire que vous êtes parti sur un certain nombre d’ambitions, et après la première année, qu’est-ce qui a été fait ?
Les actes qu’on a posés, c’est qu’il faut déjà partir des problèmes de Bohicon. Le premier problème que je connaissais quand je traversais Bohicon, c’est que la ville est trop sale. Dans la même veine, je trouvais que les choses n’étaient pas forcément à leur place. Notamment dans ce deuxième pôle de transit de notre pays après Cotonou, les camions, les taxis se garaient de part et d’autre des voies et cela donnait le sentiment que la ville n’était pas tenue. C’était ma première observation. Et lorsque je suis venu, ce fut mon premier défi. Je peux vous dire que ce n’était pas simple du tout. J’ai déclaré d’abord interdits les chargements hors parcs. Ensuite, j’avais mis la contravention à 30.000fcfa. Mais j’ai vu qu’elle était loin d’être dissuasive. Je l’ai portée à 100.000fcfa. Et pourtant, nous peinons à éradiquer le phénomène, même si des résultats substantiels sont observés. Puisque cela faisait un manque à gagner criard pour la mairie. Vous aurez également constaté que pour la première fois dans l’histoire de Bohicon, les gros porteurs, notamment impliqués dans la campagne cotonnière, de gré ou de force, ont rejoint le parking gros porteur, en dégageant la voie inter-États. Donc en causant moins d’incidents, et en occasionnant moins de salissure. Ainsi, Bohicon montre une partie de ce qu’elle a de joli. Puisqu’il n’y a plus ces gros porteurs garés à gauche et à droite. Mais, c’est un travail de longue haleine. Parce que, autant nous étions très vigilants dans la campagne cotonnière, autant nous avons baissé légèrement la garde dans la campagne et déjà, le phénomène a repris avec beaucoup d’acuité. Et si vous êtes bien informés, depuis la semaine dernière et début de cette semaine, nous avons déclaré une guerre frontale pour éradiquer ce phénomène. Pas plus tard que jeudi dernier (jeudi 3 juin) on a eu 16 taxis arrêtés en train de faire un chargement hors parc. C’est dire que nous n’allons pas nous arrêter en chemin. Dans une cité, le politique est là pour mettre les choses à leur place. On ne peut pas accepter que dans la société, la route devienne la gare et que le marché devienne l’hôpital, etc. Nous devons mettre chaque chose à sa place. C’est notre premier défi. Le deuxième défi qui aurait pu être le premier en réalité, c’est la nécessité de mobiliser davantage de ressources. Avec le conseil communal et les élus locaux, nous avons pris ce problème à bras-le-corps. Et je peux vous dire qu’après la période d’observation de deux, trois ou quatre mois, j’ai sorti un arrêté vers le 15 novembre pour suspendre tous les comités de gestion des gares composés de 11 personnes, en y envoyant deux personnes (Un politique et un acteur de gare). A eux, j’ai joint un rapporteur et figurez-vous que sur quasiment toutes les gares, j’ai trouvé une augmentation des ressources. C’est dire que nous devons persévérer davantage. C’est un travail de longue haleine. Et tous les jours, mon livre saint à moi, c’est le point que me fait le chef service en charge des affaires économiques pour savoir combien sont rentrés par rapport aux prévisions. Et j’ai noté depuis 2 semaines une baisse. Cela veut dire qu’on doit trouver une nouvelle stratégie pour booster davantage la mobilisation des ressources. Mais, cette question devrait être définitivement un mauvais souvenir puisque nous avons décidé à Bohicon, de mettre toutes nos infrastructures économiques en régie. Actuellement, nous sommes en train de recruter les 5 cadres de la régie. Le directeur de la régie est déjà recruté. Il s’agit de Mr Saturnin GNAMBAKPO. C’est un cadre de la Mairie. Cette semaine, je vais lire le rapport produit par les autres jurys et porter mon choix sur les 4 autres cadres qui vont diriger la régie autonome de gestion des infrastructures économiques et marchandes de Bohicon (RAGIEM). Et Bohicon sera ainsi la deuxième ville du Bénin à avoir mis ses unités marchandes et économiques sous régie. Bohicon sera la première ville à avoir mis autant d’infrastructures puisque chez nous, nous aurons plusieurs marchés, 4 ou 5 gares routières, l’abattoir, tout ce qui est économique, nous les mettrons dans la régie. Nous serons probablement la première régie communale du Bénin d’ici quelques semaines. L’objectif, c’est de doubler nos recettes. Et lorsque nous aurons cette arme de guerre, nous entendons nous attaquer de manière frontale aux infrastructures scolaires. Je suis enfant d’enseignant et je n’accepterai jamais que les enfants continuent à étudier dans les classes en matériaux de fortune. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai fait lancer les travaux de construction de plus 30 salles de classe dans les écoles primaires publiques de différents arrondissements de notre commune. Et d’ici 3 mois, ces infrastructures vont intégrer le patrimoine scolaire de Bohicon. Plus ce que les partenaires vont faire, nous serons cette année à une quarantaine de salles de classe.

Avez-vous l’impression que les cadres de votre localité suivent votre mouvement ?
Ce que je peux vous dire, c’est que les cadres ont trouvé mon rythme trop rapide. L’un d’eux m’avait demandé si je pense qu’à ce rythme nous verrons l’année 2020 et après 2021. C’était le moment où j’avais décidé de faire participer la commune de Bohicon à un concours lancé par le ministère cadre de vie via le Fonds national de l’environnement et du climat. C’était un concours qui vise à mesurer la capacité économique, à faire la salubrité, à curer les caniveaux, à planter des arbres et à les entretenir, à construire les ouvrages de résiliences contre le changement climatique. Moi j’ai refusé de prendre un expert. J’ai estimé que nous devons pouvoir rédiger nous-mêmes le PV de ce que nous faisons en la matière. Donc j’ai mis en place un comité et je lui ai dit que si on travaille bien, il n’y a rien à faire, on sera la meilleure commune. C’est vrai, on travaillait tard, jusqu’à 3h du matin. Le résultat est tombé et malheureusement, nous n’avons pas été premiers. Mais nous avons été deuxièmes. Dans quelques jours je recevrai des mains du ministre Tonato 25 millions de Fcfa plus l’arsenal nécessaire pour conduire les opérations de salubrité. C’est vous dire que les cadres commencent maintenant par me connaitre. Ils prennent le pas de mon rythme. Toute ma vie j’ai travaillé. Je ne sais pas paresser. Si vous regardez mon parcours, vous le saurez davantage. Je ne sais pas paresser. Travailler pour moi c’est naturel, normal. Et je pense que depuis un certain temps, même les PTF qui passent à Bohicon commencent par sentir le frémissement de quelque chose.

Tout ce que vous faites a pour finalité d’impacter les populations. Est-ce que vous pensez que toutes ces actions résolvent quelque chose au niveau de la population ?
Oui. Forcement. Lorsque dans moins de 3 mois je vais permettre aux directeurs d’écoles d’avoir une quarantaine de salles de classe, vous comprenez que c’est moins d’enfants qui vont étudier à l’abri des intempéries. Que je lutte contre le chargement hors parc, c’est vrai que cela peut créer des désagréments à certaines personnes, mais cela évite les accidents, apporte le calme qu’il faut pour le repos et pour dormir. Lorsque je déclare la guerre à la pollution sonore, avec la police, cela permet à ce que les églises, les mosquées et autres connaissent les horaires auxquels ils doivent s’adonner à leur culte et autres. Lorsque dès mon arrivée, j’ai ouvert les voies comme jamais à Bohicon, c’est pour que ceux qui ont acheté des parcelles et qui attendent depuis des années l’ouverture des voies puissent circuler et surtout ce qui permettra à la SBEE d’étendre son réseau. Bohicon a hérité du PAG le plus grand linéaire, s’agissant de réseau de densification et d’accès à l’eau potable. Dans le Zou, nous sommes la commune qui a le plus consommé, mais il en reste encore. Tout ce que nous faisons, c’est pour les populations. On ne peut pas être maire d’une commune lorsqu’on n’a pas le sens du devoir, lorsqu’on n’a pas le sens du service, l’humilité de servir les populations. C’est ce que je fais au quotidien et c’est même un plaisir.

Quelles sont les stratégies que vous avez mises en place pour assainir la gestion communale ?
C’est très compliqué. A l’heure où je vous parle, le secrétaire général de la mairie qui vient du ministère du plan a pour objectif premier de m’élaborer un canevas de critères d’évaluation du personnel de la mairie et des critères d’évaluation de nos propres politiques publiques. Ce qui permettra à chaque cadre et à chaque agent de la mairie de savoir où il en est. Il va se noter lui-même. Sans que cela ne soit disponible, nous avons déjà commencé. Les critères d’évaluation, c’est la ponctualité. Chacun sait que les lundis à 7h45 à la mairie de Bohicon, qu’il pleuve ou qu’il neige, la cérémonie des couleurs commence. Ce n’est pas 7h46. Le Codir, c’est les lundis à 10h, pas une minute de plus. Le Cocab, c’est 8h30, la réunion de l’exécutif, c’est les lundis à 8h. Qui ne suit pas ce rythme sait qu’il est en contre-performance. Il aura la note qu’il mérite. Vous parlez de stratégie par rapport à la mobilisation des ressources. Notre stratégie, c’est de se désintéresser des gratifications habituelles. Dès lors que j’ai refusé toute gratification des gares, des marchés, vous voyez que tout le monde est obligé de suivre ma dynamique. Deuxièmement, le voleur ne vole jamais quand il est sûr qu’il se fera prendre. Pour les marchés, le personnel dédié qu’on appelle les collecteurs, j’ai décidé que plus aucun collecteur ne fera plus d’un mois dans une unité marchande. Dieu merci, j’en ai suffisamment. J’ai le marché Ganhi, Yénanwa, Kpassagon, Avogbanan et ses extensions, et puis j’ai la gare Centrale, le parc à gros porteurs, le parc à bus, la gare de Sodohomè, l’abattoir, la chambre froide, j’ai les extensions. J’ai demandé à ce que plus aucun collecteur dans une année donnée ne fasse plus d’un mois dans une unité marchande. D’autant qu’il commence par s’habituer aux bonnes dames, on l’enlève et on l’envoie ailleurs. Et le résultat est là. Et puis j’ai mis en place un comité de surveillance composé de cinq élus qui, à tout moment, peuvent débarquer dans une unité marchande sans l’autorisation du maire, rester là toute la journée, faire des contrôles, faire des observations. Et moi-même, de temps à autre, à l’improviste, je débarque au parc à bus à 4h, puisque c’est l’heure à laquelle les activités commencent. Les cars viennent du nord et prennent le départ pour Cotonou. Moi-même je viens et j’essaie de regarder quel est l’impact de ma venue par rapport aux recettes précédentes. Si je sens une brusque augmentation, alors le gestionnaire est appelé à garder ce rythme tout simplement. Mais nous irons plus loin. Les six mois à venir, nous allons définir d’autres stratégies pour augmenter nos ressources.

Quelles sont vos ambitions en matière d’urbanisation de la ville de Bohicon ?
Il faut dire que Bohicon est un centre très prisé. C’est une ville qui connait le plus fort taux de migration vers elle. Mais comme toutes les villes de notre pays, y compris Cotonou d’ailleurs, rien n’est à sa place. Tout se mélange. Vous allez à Bohicon, vous verrez les boulangeries et les scieries qui sont à côté des maisons, les soudeurs soudent partout, les menuisiers rabotent partout. Donc nous avons les mêmes problèmes que toutes les communes du Bénin. Cependant, avec l’aide du projet PAVIC financé par l’AFD, nous avons rédigé le document de planification de notre territoire pour tenter, si c’est encore possible, d’identifier les zones pour telle ou telle activité. Nous pourrons, par exemple, décider que notre zone industrielle communale soit à tel endroit et obliger tous ceux qui auront à ouvrir des usines lourdes, moyennes ou petites de nous y rendre, en mettant à leur disposition l’eau, l’électricité et autres. Donc l’urbanisation de Bohicon sera faite. Mais immédiatement, c’est la gestion des opérations de lotissement qui est en cours. Nous avons 19 opérations de lotissement en cours à Bohicon dont certaines ont commencé depuis les années 1980, mais aucune de ces opérations n’est terminée. Donc le défi majeur pour le maire que je suis, c’est d’obliger les géomètres à clôturer les opérations. La plupart d’entre eux ne sont pas payés depuis des années, pourtant ils sont toujours là à travailler. Vous voyez que s’ils sont là, c’est qu’ils y ont leurs intérêts. Et nous on entend bien mettre de l’ordre dans le foncier à Bohicon.

Quelle est la part du PAG dans les réalisations en cours à Bohicon ?
Nous devons avoir l’honnêteté de dire que sans le PAG, Bohicon ressemblerait à un village. Ce sont les projets du PAG qui sont venus donner vie à la commune de Bohicon. J’en cite simplement deux ou trois. Il y a d’abord la construction des deux plus belles et peut-être plus grandes gares du Bénin : le gros bâtiment que vous voyez à l’entrée de Bohicon, c’est notre future gare centrale, lorsque vous prenez le contournement et vous allez à Covè vers Sodohomè, vous verrez un parc à bus qui est en cours de construction. A tous ces projets, je rajouterai un autre projet qui a changé la physionomie de Bohicon et amélioré la mobilité. Il s’agit du projet asphaltage. Bohicon a d’ores et déjà eu droit à 14Km de routes asphaltées, donc goudronnées ou pavées. Nous attendons 19 autres qui devraient tomber d’un instant à l’autre. Et à cela, je dois mes remerciements au Chef de l’État et aux ministres qui ont piloté ce projet, et dire également que Bohicon a bénéficié du projet de densification et de l’extension du réseau d’accès à l’eau potable. Ce qui a permis à Bohicon d’augmenter sensiblement le nombre de populations ayant accès à l’eau potable. Il y a quelques mois, sept habitants sur dix n’avaient pas accès à l’eau potable. Avec l’effort qui est fait, nous devons d’ici une année ou deux ans couvrir les dix. Car, le Chef de l’État a tout fait pour que nous ayons accès à l’eau potable. Bohicon est déjà à une grande position. Nous devons couvrir toute la ville parce que, tant qu’il reste une seule personne n’ayant pas accès à l’eau potable, le maire que je suis ne peut pas se reposer.

En ce qui concerne l’assainissement, est-ce que la SGDS-GN est présente à Bohicon ?
Non, la SGDS-GN n’est présente que dans les huit communes qui constituent le grand Nokoué. Aujourd’hui, nous nous débrouillons avec nos propres moyens et nous espérons que le ministre Tonato viendra à notre rescousse pour organiser la collecte des déchets telle que cela se fait aujourd’hui à Cotonou. Nous faisons le ramassage avec des ONG pour ensuite déverser à Sodohomey. Mais il faut savoir que les investissements en la matière sont des investissements lourds. Et la commune de Bohicon ne pourra pas toute seule faire face à cela, il faudrait forcément que l’État vienne à notre rescousse. Je pense même qu’il faut sensibiliser les ministres concernés sur les difficultés de Bohicon et son incapacité à faire face seule à ces difficultés. Avec cela, nous allons progresser puisque nous avons deux grands projets qui nous aideront à résoudre les difficultés de la ville à savoir : le projet PAPVIRE, qui nous permettra d’assainir nos ouvrages d’eau et le second projet qui sont l’assainissement des villes qui nous aidera à construire l’autoroute entre Bohicon et Abomey. Avec la réalisation de ces ouvrages, nous allons renforcer la résilience des Bohiconois à effets des changements climatiques.

Pourquoi vous avez baissé la garde sur le phénomène d’occupation anarchique des espaces publics ?
Pas du tout, nous n’avons pas baissé les bras. D’ici la fin de ce mois, vous verrez que Bohicon mettra en place deux brigades. Une brigade économique et une brigade d’hygiène. C’est dire que nous avons mené cette lutte. A un moment donné, on s’est retiré pour réfléchir sur des stratégies avant de se relancer.

Est-ce que le Fadec est un outil performant à Bohicon ?
Je peux vous dire que le Fadec est un outil très utile pour les communes. Il y a certaines communes qui ne peuvent jamais fonctionner sans le Fadec puisque les ressources dépendent à pourcentage très élevé des fonds Fadec.

Quelle est la balance à Bohicon ?
Globalement, notre Fadec non affecté est de 250 millions. Nos ressources fiscales font déjà le double du Fadec et les ressources non fiscales ne sont pas mauvaises non plus. Il faut donc partir des communes de notre pays qui veulent vivre avec leurs ressources non fiscales et fiscales. Mais bien évidemment, le Fadec donne davantage de forces aux communes pour entreprendre des travaux.

Vous parliez tantôt de l’opposition. Est-ce les conseillers UP qui constituent l’opposition au niveau de la commune ?
Une opposition au sein d’un conseil se mesure sur le nombre de partis politiques présents dans le conseil. Aujourd’hui, sur 29 conseillers dont est doté le conseil de Bohicon, 19 sont BR et 10 sont UP. Donc, c’est dire que les conseillers UP constituent l’opposition communale

Est-ce que vous les associez réellement à la gestion de la ville ?
Ils n’ont pas vocation à être associés à la gestion de la ville en tant exécutif. Cependant, ils ne sont pas absents de la gouvernance locale. A ce jour, nous avons déjà fait voter plus de 50 résolutions à Bohicon et 99% de ces résolutions ont été votées à l’unanimité des conseillers UP comme BR. Nous respectons cette opposition. Et c’est tout ça le dialogue politique. La bienséance voudrait qu’on se rapproche du chef de l’opposition pour voir quels sont les correctifs à apporter au projet, sans dénaturer l’ambition tout en ayant l’assentiment de tous. Il n’y a pas un sujet assez sensible à Bohicon que la mise en régie. Au départ, tous les conseillers quasiment étaient contre. Mais, il m’a fallu faire de la pédagogie en sortant les textes régissant la régie que j’ai partagée à chaque conseiller. Chacun d’eux a lu et a compris que l’antidote qu’il fallait à cet instant était la régie. J’ai fait venir la SNV hollandaise, puisqu’aujourd’hui à Bohicon, la régie est financée par l’aide sous financement suisse, mais pilotée par la SNV hollandaise. J’ai donc fait venir le chef de projet adjoint pour venir faire l’exposé de la régie au conseil communal. Après les questions débats, c’est à l’unanimité des conseillers que la régie a été adopté comme un mode de gestion de nos infrastructures marchandes. C’est ça le respect de l’opposition. C’est ça le dialogue entre la mouvance et l’opposition communale.

Vous semblez avoir fait oublier l’ancien maire Luc Atrokpo aux Bohiconnois. N’est-ce pas Me Rufino ?
La gestion d’une commune n’est pas une question d’affrontement des personnalités. Le BR a gagné de façon claire et nette sans ambages, les élections et a une majorité confortable. Ce qui induit une responsabilité. Et donc, une unification de tous les membres du conseil communal pour que les résultats soient là. Le conseil communal, tout au moins le maire et les conseillers BR, sont concernés par les objectifs que je pilote. Vous me jugerez dans les prochaines années sur le nombre de voies que j’ai ouvertes, sur l’augmentation et la mobilisation des ressources, sur la célérité dans la délivrance de certaines pièces à commencer par les légalisations, les ADC. Nous serons jugés sur la propreté de la ville, sur l’absence de prévarication des deniers communaux puisque nous y sommes engagés depuis les élections. C’est sur ces choses que nous nous sommes engagés et non notre capacité à faire oublier telle ou telle personnalité. Oui, j’ai souhaité prendre sa place à la mairie de Bohicon, mais cela ne m’a pas empêché d’être à la cérémonie qu’il a organisée en mémoire de son feu père, à qui nous souhaitons un repos éternel.

Vous avez brièvement évoqué le problème d’inondations à Bohicon. La ville connait-elle encore ce problème ?
Lorsqu’il pleut, Bohicon devient une ville subitement sale avec de l’eau boueuse. C’est un vrai problème pour le maire que je suis. Comme je vous l’ai dit, nos cris de détresse ont été entendus au plus haut sommet de l’État. Nous sommes en attente d’autres projets d’État qui viendront nous soulager. Je pense qu’après l’exécution de ces projets, la question d’assainissement notamment du conditionnement des eaux pluviales sera réglé à Bohicon notamment dans le centre-ville. Je vous ai parlé du projet PAVIC financé par l’AFD et du projet d’Assainissement des villes secondaires du Bénin qui est sous financement rural.

Que devient le musée d’Agongointo ?
C’est un musée que j’ai trouvé inactif à mon arrivée. Il est aujourd’hui livré à des intempéries, notamment à des inondations récurrentes. Lorsque je suis devenu maire, je me suis intéressé à Agongointo et j’ai vite compris que les maigres ressources de la commune ne pourront jamais donner vie à ce patrimoine historique tel que je l’aurais souhaité. C’est pour cela que j’ai pris mon bâton de pèlerin. J’ai approché les ministères et je peux vous dire que nous avons déjà des projets pour lesquels les ingénieurs sont venus sonder ce qu’il y a à faire et dans les prochains mois, les travaux vont démarrer pour que vie soit donnée à cette relique de notre patrimoine culturel, avant que la marée humaine n’y rajoute sa couche.

On vous a vu très actif lors de la campagne électorale qui s’est soldée par la réélection au premier tour du Président Talon. En l’absence d’une véritable opposition organisée, n’est-ce pas une victoire trop facile ?
Il n’y a pas eu de victoire facile et l’opposition a été bel et bien représentée. Lors des élections présidentielles passées, il y a eu deux grands défis. Il y a celui du taux de participation, qui doit être apprécié avec le retrait d’argent de la campagne présidentielle qui était une donnée essentielle. Le retrait d’argent nous a amenés à plus maximiser notre intelligence sur le peu de ressource que notre parti le BR a mis à notre disposition. L’argent que nous avons eu, c’est pour confectionner les affiches, organiser les meetings, louer des chaises. On n’a pas reçu de gratification et c’est la première fois depuis 1991 que les électeurs béninois étaient confrontés à ce phénomène. L’autre défi était de faire élire le duo Talon-Talata et ça s’est passé d’une très forte belle manière.

Est-ce que vous avez une idée du résultat que ce duo a obtenu à Bohicon ?
Oui à Bohicon nous étions à plus de 90%.

Que pensez-vous du nouveau gouvernement avec le maintien de la quasi-totalité des ministres ?
La constitution a donné le pouvoir à une seule personne qui est le Chef de l’État de nommer et défaire comme bon lui semble. Il a opté pour une certaine durabilité à ce poste. Ce n’est pas trop surprenant pour moi parce que dans d’autres circonstances, il a promis faire durer les acteurs pour que ce gouvernement puisse donner le meilleur de lui-même. Puisque l’expérience s’acquiert au fil du temps.

L’opposition demande un dialogue politique. Que feriez-vous si vous étiez à la place de Talon ?
Le dialogue politique pour moi est une chose permanente. Moi, j’ai une opposition communale à Bohicon et nous dialoguons tous les jours. Je n’ai pas le sentiment qu’il y a un manque de dialogue dans le pays. La preuve, le chef de fil de l’opposition vient d’être désigné. Il est là et il va mener le dialogue. Je ne sais pas de quelle opposition vous parlez. S’il s’agit de l’opposition exilée volontaire ou exilée judiciaire, à cette opposition, je leur dis juste de rentrer. Je dis à ceux qui ont des affaires judiciaires de venir s’expliquer et pour ceux qui n’en ont pas, de rentrer dans notre pays.

Carte d’identité: Ingénieur, avocat puis homme politique

C’est dans sa ville natale que Rufino d’Almeida a fait l’essentiel de son parcours scolaire. Quand il décroche son Bac série C en 1986, ses parents l’envoient en France. Il s’inscrit en Physique-Chimie à l’Université nationale du Bénin avant de partir en 1989 en France, à l’Université d’Amiens. Après cinq années d’études, il devient ingénieur Technologue en génie énergétique, option climatisation et froid industriel. Par ce diplôme, il a d’abord enseigné en France avant que la passion de la politique ne l’amène vers les facultés de droit. « C’était au départ pour moi, confie-t-il, juste un amusement, juste pour combler mes instants perdus, les valoriser en prenant quelques notions de droit. Mais, il se trouve que ça m’a marché plus que prévu. » Né en 1967 à Bohicon, d’un père enseignant et d’une mère ……. Rufino d’Almeida fait son cours primaire à l’école urbaine centre de Bohicon. Après son BEPC et son Bac, tous obtenus dans le collège de la ville, il s’inscrit en Physique Chimie à l’Université nationale du Bénin. Mais pour cause de grèves, ses parents l’orientent vers l’extérieur. Il arrive en France, précisément à Amiens en 1989. Mais ses études l’amènent successivement à Strasbourg, Reims, Nancy, Paris puis à Versailles. Il finit par obtenir des diplômes de sciences politiques, de droit public, comme de droit privé, avant d’avoir le CAPA, le Certificat d’Aptitude à la Profession d’Avocat, qu’il décroche à Versailles en 2006. Exerçant depuis lors comme avocat au barreau de Versailles, il affirme : « J’ai bâti l’un des plus beaux cabinets d’avocat là-bas et il n’est pas possible de saborder ce qu’on a mis près de 15 ans à construire. » Avocat d’affaires de grandes personnalités et institutions, il choisit malgré tout de revenir au pays, porté par la passion de la politique. Quand on lui demande d’où lui vient cette relation à la politique, il la remonte à son enfance, quand il était presque toujours responsable de classe. Même à l’université ou encore en France, il a toujours occupé des postes de responsabilité. « J’ai toujours eu ce goût pour le militantisme, souffle-t-il. Rien ne m’importe plus que le développement de mon pays. Pour mon pays, je suis prêt à tout sacrifier. » Et depuis 2015 qu’il est retourné au pays pour la campagne présidentielle, Rufino d’Almeida n’a plus jamais passé deux nuits à Paris. « Mon bureau est encore dans l’état où je l’ai laissé jusqu’à présent », dit-il avant d’ajouter : « Ce n’est pas une passion de la politique qui m’anime. C’est la passion du développement. » Élu suite aux élections communales du 17 mai 2020, il dirige la ville-carrefour depuis le 09 juin 2020, alors que personne ne vendait cher sa peau. Conscient dès le départ des défis de sa cité, il affirme: « Mon seul souci, c’est comment faire pour changer la donne. »

Intimité: Un homme de loyauté

Rufino d’Almeida est marié, père de deux enfants. Si vous l’invitez à table, il aime bien du « atassi » et du bon dja avec du bon poisson. A défaut, faites-lui du bon « manyinyan » avec du lio. En période d’accalmie, lorsqu’il trouve son klouikloui appelé dans sa famille « maître gangbo », avec un peu de gari, il en fait son bonheur. Comme boisson, et en bon d’Almeida, il aime prendre de l’eau, si possible l’eau Kwabo qui est une eau minérale produite par un d’Almeida, ou encore l’eau Fifa. Si vous voulez être son ami, sachez bien que ce qu’il préfère par-dessus tout, c’est la loyauté.

La Rédaction

EUGENE AZATASSOU, vice-président du parti Les Démocrates, SOUS L’ARBRE A PALABRES: «Le problème du Bénin, c’est Talon»

Views: 171

Le mode de gouvernance du Bénin par le régime Talon n’est pas du goût des acteurs politiques, notamment ceux de l’opposition radicale. Le Vice-président du parti ‘’Les Démocrates’’, Eugène Azatassou a saisi la tribune de la rubrique ‘’Sous L’Arbre à Palabre’’ de L’Evénement Précis pour faire savoir sa désapprobation de la mauvaise gouvernance du pays. Estimant qu’il y a intensification de la corruption dans les institutions de la république et les administrations, que la dictature règne en maitre, empêchant d’ailleurs son parti ‘‘Les Démocrates’’ de prendre part aux joutes électorales, Eugène Azatassou note plusieurs reculs sous le régime de la rupture qui enfonce la population dans la misère. Malgré cette situation de précarité du pays, le président de la république a, selon le vice-président du parti le Démocrates, institué une politique de ruse et de rage qui fait qu’il exclut systématiquement les opposants de toute compétition électorale. Au cours de ce même entretien avec les journalistes, Eugène Azatassou est revenu sur les raisons de l’absence du parti ‘’Les Démocrates’’ aux dernières élections. Il accuse le parti au pouvoir d’achat de conscience de certains cadres ainsi que de manigances tendant à la fragilisation de son parti d’opposition. Estimant que le président sortant a tout mis en œuvre pour ne pas avoir d’adversaire en face de lui, Eugène Azatassou voit à travers les duos validés à la présidentielles, des candidats voulus par le pouvoir. C’est pourquoi, l’invité du journal estime que la présidentielle du 11 avril est simplement un coup de force au cours duquel le président Talon a usurpé le pouvoir d’Etat. L’incarcération de la candidate recalée, Réckya Madougou la nomination du chef de fil de l’opposition, le discours d’investiture du président Talon, la configuration du nouveau gouvernement et surtout l’appel au dialogue sont les autres sujets qui sont au menu des échanges d’Eugène Azatassou, ancien directeur de cabinet du président Boni Yayi avec la rédaction de l’événement précis.

Et si on en parlait

Comment se porte votre parti, Les Démocrates ?
Le parti Les Démocrates se porte bien, pour autant que peut se porter bien un parti qui a subi les affres de la répression. Toujours est-il que nos structures restent intactes. Notre volonté reste intacte. Des camarades parmi nous ont été arrêtés et sont détenus actuellement sous des chefs d’inculpation divers. Ça fait que c’est notre préoccupation actuellement et nous avons repris les activités qu’il faut pour recoller les morceaux, garder la tête hors de l’eau et maintenir le cap pour le combat. Parce que pour nous, c’est le combat pour la liberté, la démocratie et les droits de l’Homme au niveau de notre pays.

Vous n’avez pas pu participer aux dernières élections. Qu’est-ce qui s’est passé réellement ?
Nous avons subi déjà deux élections où nous avons été écartés. Vous êtes de la presse et vous savez bien ce qui s’était passé. Si vous le voulez, on peut revenir là-dessus. Aux communales de 2020, nous avons aussi été exclus. Nous nous attendions à être exclus en 2021 et ça n’a pas raté. Donc, nous avons discuté entre nous. Certains disaient que c’était certain pratiquement que notre ligne, notre posture, nos exigences de démocratie et de liberté, ne plaisent pas au pouvoir et que le pouvoir ne voudrait pas qu’on aille à des élections et qu’on soit élu. Donc, il vaut mieux continuer le combat autrement, sans donner dans le jeu du pouvoir. Ce qui l’a emporté finalement, c’est qu’il fallait que nous testions jusqu’au bout le pouvoir et c’est pour ça que nous l’avons fait jusqu’au bout. Nous avons désigné notre duo de candidats et nous avons déposé leur dossier. Effectivement, ça ne pouvait pas être complet puisque, nous n’avons aucun député, nous n’avons aucun maire et c’est les autres qui devraient nous donner des députés et des maires et ça n’a pas raté. On en n’a pas eu…

Puisque vous n’en vouliez pas. Vous avez dit clairement que vous ne vouliez pas du parrainage.
Oui, c’est vrai qu’il y a eu cette déclaration de certaines bouches. Mais en réalité, le problème, c’est quoi ? Au niveau du parti, nous avons dit que nous respectons la loi jusqu’au bout, mais qu’il n’est pas question pour nous de faire des démarches vis-à-vis de nos adversaires politiques pour que ce soit eux qui nous autorisent à aller aux élections. Respecter la loi jusqu’au bout, c’est respecter la loi jusqu’au bout de nos possibilités et nos possibilités, c’était ça. Certains d’entre nous qui avaient fait preuve de candidature avaient commencé les démarches avant que le parti ne sélectionne ses candidats. C’est ainsi que notre candidate Réckya Madougou, avant que le parti ne la sélectionne, avait déjà fait des démarches et avait même été sollicitée par des députés qui lui ont : « Présentez-vous, nous allons vous soutenir. » Quand nous avons décidé, nous, de présenter notre duo, nous avons demandé à tous nos camarade qui étaient déjà dans la posture d’être candidats, de venir plancher pour un entretien. C’est tous ceux-là qui se sont rassemblés au niveau du parti, qui se sont portés candidats puisque j’ai présidé la commission de candidature. C’est parmi eux qu’on a trié notre duo. C’est pour ça que Mme Réckya Madougou a dit qu’elle avait fait des démarches et c’est avant d’avoir été candidate des démocrates. Mais, dans la mesure où elle a été portée candidate des Démocrates, elle ne pouvait plus faire des démarches, écrire, solliciter et avoir des parrainages. C’est pour ça qu’il y a eu cette discordance. Regardez vous-même, on nous a exclus littéralement. Je peux vous expliquer comment ça s’est passé aux communales. Nous avons travaillé à proposer une liste mais ils ont pris le temps de gommer de la liste tous les candidats qui pouvaient gêner. C’est cet acte qui a amené le clash qui a achevé de diviser Fcbe.

Comment est-ce qu’on fait tout ça, et on dit maintenant que c’est les maires, les députés qui vont nous donner leurs parrainages ?

Mais vous le saviez depuis 2019 puisque la loi l’avait déjà prévu
C’est la loi électorale, et elle a été votée après que le pouvoir a eu les 83 députés sur les 83. Ça fait 83 sur les 160 déjà et elle a été appliquée après que nous avons été empêchés de participer aux communales. Donc, on a les 83 députés, on vous empêche d’aller aux élections communales et vous dites maintenant : « Venez nous demander de vous parrainer. » Le fait que l’opposition a été plurielle, n’a pas été une mauvaise chose. Je le dis parce qu’au sein de l’opposition, des partis ont fait la démarche. Nous, on a dit qu’on ne fait pas de démarche parce que c’est incongru en matière de démocratie, que ce soit nos adversaires qui nous autorisent. Effectivement, les partis d’opposition qui ont fait la demande ont constaté que c’est incongru puisqu’ils n’ont pas réussi à l’avoir. Il y a l’un d’eux que les chefs de la mouvance ont reçu en entretien. Ils ont approché les députés, les députés ont dit : « voyez nos chefs de parti. » Ils ont écrit aux chefs de parti, ils ont reçu l’un d’eux en entretien. On leur a parlé et on a dit, « Retournez voir maintenant les députés » et ces derniers ont répété : « Non c’est les chefs qui doivent donner le mot d’ordre. » Et, dans ce jeu de ping-pong, ils sont restés en l’air. Ce n’est pas possible. Aucune norme de démocratie ne prescrit cette procédure. C’est impossible.

Vous le dites mais en France, il y a le parrainage et le Front National a toujours bénéficié du parrainage des autres.
Oui, mais c’est incongru. Le Front National n’ira pas demander au Parti Socialiste de l’autoriser à participer à une élection. Pour les parrainages en France, le nombre n’est pas aussi restreint. C’est large. Lorsqu’un élu dans son coin peut porter l’idéal du Front National dans l’évolution de la situation politique, il le fait. Ici, c’est 160 et la pression a été faite sur les maires et les députés pour qu’ils ne donnent pas les parrainages individuellement. Donc, ne faites pas le parallèle avec la France. Là-bas c’est plus large et c’est les individus, les élus eux-mêmes qui font leur choix.

Vous connaissez la loi. Vous êtes un cadre universitaire et quand on dit respecter, c’est respecter. Pourquoi vous avez choisi de… ?
Non. Quand une loi est inique…

Est-ce que le mot respecter à de limite ?
Oui, ça a de limite. Quand vous ne pouvez pas, c’est que vous ne pouvez pas respecter. Je vais vous dire pourquoi. Quand vous roulez d’ici à Porto-Novo, le pont péage a été augmenté. Si vous avez les moyens, vous passez. Si vous n’avez pas les moyens, vous restez à Cotonou. La loi a dit que c’est ça. Il faut que vous puissiez appliquer la loi. Donc, c’est incongru que ce soit des partis qui autorisent leurs adversaires à venir les combattre. C’est incongru et il n’y a aucun débat là-dessus. Dans ces conditions, des partis de l’opposition ont fait la preuve de ça. Eux, ils sont allés jusqu’à écrire, ils ont été reçus en entretien comme si c’était un entretien d’embauche. Parmi les questions qu’on leur a posées, puisqu’ils sont venu nous en parler, il y a une qui dit : « Comment vous allez faire pour battre notre candidat ? » Vous comprenez, vous voyez l’incongruité ? Est-ce que moi je vais aller dire ou expliquer mon plan de campagne à un parti adversaire ?

Mais pendant ce temps, les Irénée Agossa ont eu le parrainage. Comment ont-ils fait et comment cette division s’est-elle instaurée en votre sein ?
Je vais vous le dire. Depuis avril 2019 avec les législatives, le Président de la République avait compris que c’était trop grossier de laisser les deux seuls partis de la mouvance aller aux élections et qui ont ramené 83 députés sur 83. Ça a fait effet à l’intérieur et à l’extérieur. Beaucoup ont commenté ça et il a voulu corriger. Donc, pour changer sans nécessairement abandonner son option, il a voulu prendre des opposants à lui, conformes à sa vision de l’opposition. C’est ça qui a été fait d’abord avec les Fcbe et les Hounkpè ont été pris. Ils ont été au dialogue, ils ont révisé la constitution, on leur a offert des choses et, ils sont allés aux communales. Quand on devrait faire les communales, qu’est-ce qu’on s’était dit ? On s’était dit que la ligne qu’ils ont suivi là, ce n’est pas la nôtre. Mais, des sages nous ont appelés ensemble et nous ont dit : « Très bien, on comprend que vous ne soyez pas d’accord. Mais mettez-vous ensemble, allez à ces élections et après vous allez discuter, faire un congrès et décanter la situation. » Les sages nous ont conseillés ça et nous avons suivi ça. S’il vous plait chers amis. Nous avons suivi ça et c’est pour ça qu’ensemble, nous avons mis en place une commission et que nous avons préparé tous les dossiers ensemble. Chacun de nous avait convoyé les dossiers et nous les avons préparés ensemble en discutant. Et on a réussi à faire une liste. Le jour du dépôt, nos camarades ont pris la liste unilatéralement, sont allés quelque part se cacher, on les appelait, ils ne prenaient pas, on a appelé par quelqu’un qui les connait et ils ont décroché et la personne dit : « Restez là, je vais les retrouver et vous allez venir. » Vous comprenez ? C’est des méthodes qui ressemblent à des méthodes de la Rupture. Donc, ils se sont cachés et ils ont enlevé les noms de ceux qui pouvaient gêner la mouvance et qui appartenaient à notre groupe.

Donc…. Dans votre camp…
Ne dites plus dans votre camp. On a financé puisque cela ne pouvait pas se faire sans argent. Je n’ai pas vu la couleur de l’argent mais…

Vous voulez dire que Paul Hounkpè, Théophile Yarou et consorts ont été achetés ?
Je ne suis pas certain que cela se passe comme vous le dites puisque je n’ai pas vu la couleur de l’argent. Toujours est –il qu’une dissension a éclaté en notre sein. Certains camarades ont pris fait et cause pour une ligne plus proche du pouvoir et nous ont amenés à ça. Nous on a dit non. On a voulu faire les choses ensemble mais malgré ça, ils ont enlevé nos dossiers. C’est ça qui a achevé le cas Fcbe. Dans la mesure où ça a été fait, nous on a dit, on ne peut plus accompagner ça. Notre président d’honneur ayant appris ça, a démissionné, et nous-mêmes, nous l’avons suivi en démissionnant. Donc, c’est comme ça que cela a été orchestré.
En ce qui concerne Irénée Agossa et Kohoué, Irénée Agossa, on l’a vu venir. En fait, on a préparé la création du Parti les Démocrates ensemble. Mais il n’avait pas déposé son dossier pour être membre fondateur. On ne comprenait pas pourquoi mais c’est après qu’il est venu faire son adhésion avec une cérémonie d’adhésion. Il est ensuite monté sur le terrain en commençant par dire qu’il est candidat des Démocrates. Et lorsqu’il arrive quelque part, il laisse les responsables à la base et prend les militants. On a perçu ça. Mais chat échaudé craint l’eau froide. On était déjà sur le qui-vive par rapport aux manipulations qu’il pourrait y avoir en notre sein, parce qu’on a déjà subi ça. On l’a appelé et on l’a mis en garde pour lui dire : « Attention, le parti n’a pas encore choisi de candidat. Ne te fais pas passer pour un candidat du parti. Deuxièmement, si tu veux parler aux militants à la base, approche les responsables, ne va pas directement voir les militants. » On l’a averti. Il a continué. On l’a suspendu. D’autres aussi étaient sur le terrain. Puisque c’est les présidentielles, chacun courait selon son bon vouloir. On les a appelés et on les a tous avertis : « Attention, vous pouvez faire tout ce que vous voulez mais ce n’est pas le parti. » C’est au dernier moment, quand nous on voulait prendre notre duo, que la commission de candidatures a appelé tous ceux qui étaient sur le terrain, dont Iréné Agossa pour dire maintenant : « Venez nous dire comment vous comptez être candidats des Démocrates. » Et c’est là où nous avons eu deux duos, mais dans la mesure où il n’a pas été choisi, normalement il devrait rentrer dans les rangs. Ça ne s’est pas fait. Il a pris un autre camarade et il a fait œuvre de candidature en déposant le logo du parti. Ainsi, on a notre duo, mais eux ils ont déposé le logo du parti. Heureusement pour nous, notre duo avait déposé sa candidature à la CENA avant eux. Et il y a eu au sein de la CENA des gens qui ont été assez lucides pour dire « Voilà le même logo avec deux candidatures différentes, on prend celui qui a déposé le premier. » C’est comme ça que le logo nous est revenu. Si on n’avait pas déposé le duo, le logo serait maintenant pour Agossa comme le logo Fcbe est resté avec Hounkpè. Ça veut dire que c’est la même méthode qui a été utilisée et avec des personnes différentes. On ne pouvait plus utiliser les Hounkpè qui n’étaient plus avec nous, mais on a utilisé d’autres qu’on nous avait infiltrés. Tout ça, c’est la politique de la mouvance, sa façon de gérer les organisations politiques qui est en œuvre.

Pourquoi avez- vous choisi des gens qu’on ne vous connait pas comme militants au détriment du président de votre parti, par exemple ?
Je ne peux pas faire un point ici, mais ce que je sais, c’est que nos textes disent clairement que la position au sein de la Coordination nationale du parti n’implique pas automatiquement qu’on est candidat du parti à n’importe quel moment.

Réckya Madougou était-elle militante du parti ?
Elle était militante du parti. C’est vrai qu’elle n’est pas membre fondateur du parti, mais dans un parti il n’y a pas que les membres fondateurs.

Comment elle était militante, puisqu’elle était hors du territoire et ne participait pas aux activités du parti …
On n’a pas des militants que sur le territoire national.

Comment vous l’avez recrutée comme militante, ou elle est sympathisante ?
Comment est-ce que vous définissez le militantisme ? Vous êtes en train de raisonner comme le président de la République qui dit qu’il y a le président du parti qui est un ancien premier vice-président de l’Assemblée nationale, et qu’on le laisse et on prend une inconnue qui arrive avec des valises d’argent. N’allez pas dans ce sens. Les Démocrates sont libres de choisir le candidat qu’ils veulent. Et la position au niveau de la direction ne dit pas automatiquement qu’on est nécessairement candidat. Et celui qui nous fait cette critique est le militant de quel parti ? Il est UP, il est BR, il est UDBN, il est MOELE-Bénin ? Il n’est militant d’aucun parti. Ensuite, quand lui il arrivait en 2016, il n’y avait pas d’anciens présidents de l’Assemblée nationale ? Je ne parle même pas d’ancien vice-président de l’Assemblée. Il y avait des anciens présidents de l’Assemblée nationale qui pouvaient être candidats non ? Pourquoi lui il n’avait pas laissé en ce temps ? Et les valises d’argent ? Qui a le plus traîné les valises d’argent ici ? On va dire que je n’ai pas vu des valises d’argent que lui il avait traînées. Mais vous savez que l’He. Augustin Ahouanvoébla ne peut pas mentir. Il a pris 400 millions au nom de son ancien parti chez l’homme d’affaires Patrice Talon. Il a dit ça. 400 millions, ça peut rester dans au moins deux valises. Donc lui aussi il trainait des valises d’argent. Pourquoi je vais prouver que Réckya Madougou est militante ? Elle pouvait même ne pas être militante, ce n’est pas grave. Où est le problème ? On n’a pas dit que les partis doivent prendre les militants de leur parti. Sinon l’homme d’affaires Patrice Talon n’aurait jamais été candidat à l’élection de 2021. Donc je ne veux pas mener ce débat parce que c’est un non-débat.

Quel est le critère qui a prévalu à l’exclusion de certaines candidatures et à la primauté d’autres ?
Ça là aussi, ce n’est pas ici que je vais faire le point.

Nous sommes Sous L’arbre A Palabres …
Mais L’arbre A Palabres n’est pas le congrès du parti Les Démocrates ni son Conseil National. Je sais que nous avons eu une douzaine de candidats. On les a écoutés, on les a interrogés et parmi eux, le comité a retenu un certain nombre, avec un certain nombre en réserve. Et il y a eu des discussions pour les classer. Si c’était à une instance du parti, j’aurais pu donner les critères qui ont milité en faveur de tel ou tel autre.

Nous avons appris que les arguments financiers ont prévalu …
Non, on a demandé à eux tous …

D’avoir 1 milliard et demi …
Non, on n’a pas fixé de plafond.

C’était combien alors ?
On choisissait ces candidats quelques heures avant la clôture du dépôt des dossiers. On a demandé à tous : « Si on vous choisit est-ce que vous avez les ressources, les relations pour payer les 50 millions de caution ? » Eux tous ont dit oui. Donc ça ne peut pas avoir été le critère d’élimination. On ne leur a pas demandé de nous apporter les chèques, les relevés bancaires, rien de tout ça. On a dit : « Mais si on vous choisit, est-ce que vous pouvez assurer dans une certaine mesure votre campagne ? »

Combien par exemple ?
Non, on n’a pas donné de montant. Tous sans exception ont dit : « Si vous nous choisissez, nous sommes candidats du parti, nous sommes certains que le parti va engager un certain nombre d’accompagnement et puis nous-mêmes on a des relations. » Tous ont répondu comme indiqué ci-dessus. Donc aucun argument financier n’a été un critère qui ait départagé les candidats. Il y a eu effectivement d’autres critères qui ont départagé.

Quels sont ces critères ? Il faut avoir mangé avec Faure Gnassingbé ?
Mais le duo qu’on a fait, tous n’ont pas mangé avec Faure Gnassingbé. Si on avait dit ça, ce ne serait qu’une seule personne. Et comment elle a mangé avec Faure Gnassingbé ? Elle a travaillé au Togo. Yayi Boni aussi avait travaillé au Togo avant d’arriver. Donc, elle a travaillé au Togo, nous on ne sait que ça. Elle a été conseillère à la micro-finance, je crois. Elle a impulsée la micro-finance au Bénin. Donc elle a les compétences que le Togo a voulu utiliser. Ça ne nous amène pas à dire qu’elle est Togolaise, qu’elle n’est pas Béninoise, donc qu’elle ne peut pas être candidate. Considérez que le parti Les Démocrates avait la liberté totale de choisir qui il veut. Le parti a choisi qui il veut et les conditions de choix sont multiples. Je ne peux pas vous faire le point, mais tout ce qui a été raconté après, c’est parce qu’on sait bien entendu que si ce duo du parti Les Démocrates se présentait à l’élection, ça peut faire mal. Donc, il faut l’attaquer sous tous les angles. Et il faut absolument détruire les chances de ce duo. C’est ça qui a continué jusqu’à maintenant, lui tomber dessus sur le pont de Porto-Novo et aller l’interner à Missérété. Tout ça, mettez sur le compte de la forme de combat que mène le pouvoir, c’est-à-dire une forme dictatoriale.

Vous n’avez pas été à l’élection et on vous accuse d’avoir incité les populations à la violence. Qu’en dites-vous ?
Ce n’est pas nous qui sommes violents, parce que la politique d’exclusion est une politique de violence. Quand vous faites de l’exclusion, vous allez à la violence. C’est ce qui s’est passé en 2019. Ça a été atténué en 2020, parce que c’est les élections communales, les gens ont choisi en fonction de leur proximité. Mais la présidentielle est une élection majeure. En faisant l’option d’exclusion mécanique à tout prix, on a fait l’option de la violence. Ce n’est pas nous. En plus, il y a un autre facteur. A partir du 6 avril 2021, le pouvoir de Patrice Talon qui s’est maintenu a été un pouvoir usurpé.

Comment ça ?
Parce que la révision de la Constitution qui s’est faite en novembre 2019, c’est cette révision qui a amené le prolongement du mandat. Mais cette révision ne peut pas amener le prolongement de ce mandat en cours, même si la révision était acceptée. Le mandat aurait été prolongé pour l’équipe qui serait élu sous cette révision.

Mais la Constitution sous laquelle vous avez envoyé vos candidats dit que le président élu prend fonction le 23 mai …
Mais la Constitution ne dit pas que c’est l’ancien président qui viendra.

La Constitution a spécifié ça …
Non, la Constitution n’a pas spécifié que c’est l’ancien président qui prendra fonction le 23 mai.

La Constitution a dit que le Président en exercice reste là jusqu’au 23 mai où le nouveau président élu sera investi …
La Constitution a dit ça ?
Bien sûr !
D’accord, mais cette Constitution elle-même, vous savez qu’il y a une décision de la Cour africaine des droits de l’homme sur ça. En réalité, l’imbroglio qui a été là, peut être aussi facteur de violence. Les protestations, c’était par rapport à ça. Normalement, le premier mandat du président Talon devrait finir le 6 avril 2021. Et c’est le nouveau président élu qui devrait prendre fonction. La Constitution elle-même ne peut pas prolonger de cette manière le mandat du président en exercice. Dans ce pays, il y a eu jurisprudence. Les députés sous la forme requise avaient prolongé leur mandat ici et la Cour constitutionnelle avait cassé. Donc il n’est pas possible que le peuple béninois puisse accepter de gaité de cœur cette manière de faire les choses.

Est-ce que cela justifie le fait que vos militants aient saccagé des maisons, brûlé des biens publics, etc. ?
Non. Il y a déjà eu des manifestations les 1er et 2 mai 2019. Et les manifestants ont été massacrés. La dame Prudence Amoussou et d’autres compatriotes a été tués, ça n’a pas ému grand monde du côté de la mouvance. Quand c’est comme ça, les nouveaux manifestants savent qu’on peut venir les tuer. Nous on n’a pas dit d’aller brûler ou casser les choses.

L’un de vos militants, en l’occurrence Komi Koutché, a demandé aux pseudo-chasseurs de Bantè de descendre sur Cotonou dans une vidéo qui a fait le tour du monde …
En tout cas, le parti n’a pas demandé aux chasseurs de Bantè de descendre sur Cotonou. Je vous dis que l’exclusion qui est faite plus l’usurpation du pouvoir qui a été faite, sont des facteurs de violences, plus la façon dont les événements précédents avaient été gérés. Tout ça est facteur de violences. Et c’est ça qui a engendré ces événements. Et si c’est mal géré maintenant, personne ne peut juger de ce qui va arriver par la suite. C’est pour ça que la démocratie claire et transparente est une bonne chose, parce que c’est un élément qui permet de révéler les contradictions et de les résoudre. Tout le peuple béninois n’a jamais été du même bord, mais on a fait des élections, et c’était des fêtes. Les gens de bords différents se croisaient lors de la campagne. Les élections se font et chacun rentre dans les rangs. C’est ce qui s’est toujours passé, mais quand vous faites l’option de l’exclusion, d’usurpation du pouvoir, vous allez vers la violence. Et la démocratie permet que chacun s’exprime, et que la voix de la majorité prime. Mais quand vous faites l’option d’exclusion, d’usurpation du pouvoir, vous allez vers le désordre. Il y a deux façons de considérer cela. La démocratie permet que chacun s’exprime et que la voix de la majorité passe. Mais lorsque l’élection est étouffée artificiellement, la voix de la majorité ne peut pas passer et chacun se sent exclu, ça peut exploser. Et quand ça explose, plus personne ne peut rien contrôler.

Les Démocrates refusent de reconnaître leur responsabilité d’avoir appelé à la violence.
Les démocrates n’ont pas appelé à la violence. Vous avez suivi ce qui s’est passé dans la nuit du 06 au 07 avril, avec tous ces désordres. C’était clair. Même à Calavi, un étudiant a dit que c’est la milice qui l’a arrêté. Avec ça on ne sait plus qui est à la base des violences.

Et à Bantè, Tchaourou et Savè, on sait que c’est les chasseurs qui ont tiré. Même Amadou Djibril a dans un message public demandé aux gens d’aider les chasseurs.
Est-ce que des miliciens ont été mêlés? Quand ces choses-là éclatent, ça devient difficilement incontrôlable. C’est pour cela qu’il vaut mieux ne pas en arriver là. Et moi je pense que le premier responsable, c’est celui qui a fait qu’on en est arrivé à ce stade parce que après ça on ne contrôle plus rien.

Pendant que vous désapprouvez l’évolution du processus électoral, des organismes internationaux et régionaux dont la CEDEAO et l’Union africaine, lui ont donné carte blanche à travers leurs observateurs respectifs déployés sur le terrain. Qui a la bonne lecture de la situation entre vous et eux ?
Moi je considère que la position de l’Union africaine et de la CEDEAO n’est pas la position du peuple béninois. Si le peuple béninois est en dictature, c’est à lui de résoudre son problème, pas à l’Union Africaine. Puisque les désirs de liberté sont irrépressibles, partout où ça se fait, ça finit toujours. Il vaut mieux pour nos Chefs d’État, surtout le nôtre ici, de se classer positivement dans l’histoire. Le président Mathieu Kérékou l’a aussi fait mais à un moment donné il a lâché prise sous certaines conditions et il est revenu faire 10 ans. Il est maintenant sorti par la grande porte. Il vaut mieux cela que de se dire « j’ai raison à tout prix et d’aller dans le décor. »

Votre ex-parti Fcbe y a pris part ainsi qu’un autre duo issu de l’opposition. Cela ne suffit-il pas pour parler d’une élection inclusive contrairement à vos appréciations ?
Non. Ni les communales ni les présidentielles encore moins les législatives n’ont été des élections inclusives. Les personnes en question sont juste des accompagnateurs qui ont été choisis pour accompagner le président Patrice Talon. Par exemple au cours de la campagne, Patrice Talon demande à ce qu’on donne un peu de voix à Kohoué. Ce n’est pas une élection ça.

Donc vous n’avez pas voté?
Ah non je n’ai pas voté. Ça c’est une élection pour que moi j’aille voter ? Je vais voter pour qui? J’ai exprimé ma position par rapport à cette élection en n’allant pas voter.

Votre candidate Reckya Madougou qui a été recalée par la Cena est incarcérée depuis plusieurs semaines par la justice qui l’accuse d’avoir commandité des actes terroristes pour perturber le processus électoral. Comment le parti Les Démocrates vit et gère cette situation critique ?
Reckya Madougou n’est pas une terroriste. Et moi je vais prévenir le gouvernement. On n’appelle pas un malheur. Le pouvoir s’est trouvé un créneau. Ce n’est plus la drogue, mais le terrorisme. Et pour ça, il a voulu attiré la sympathie de la sous-région et au niveau international parce que tout le monde est mobilisé contre le terrorisme. Mais les vrais terroristes sont juste à côté au Burkina, au Mali, au Nigeria. Si les vrais terroristes viennent dans le pays, c’est le pouvoir qui les aurait appelés. Alors que ce sont eux qui les auraient appelés.

Le leader du parti Les Démocrates Boni Yayi se mure dans un silence étonnant depuis peu, contrairement à ses habitudes face à tout ce qui arrive à cette nouvelle formation politique. Comment l’expliquer ?
Boni Yayi a fait l’option à un moment donné de ne pas intervenir directement dans le parti. Boni Yayi suit concrètement ce qui s’est passé et ce qui se passe. Vous savez que le pouvoir tente toujours de ramener les problèmes du Bénin aux conflits Talon-Yayi. Alors que ce n’est pas ça. Le problème du Bénin c’est la gouvernance de Talon. Moi je ne peux pas être aussi engagé si c’est juste une querelle. Il est le problème du Bénin avec l’accaparement de toutes les institutions économiques du pays.

Comment expliquez-vous le fait que vous n’ayez pas été emprisonné par le pouvoir en place malgré vos critiques?
Pour moi, le meilleur apport que l’on puisse faire à nos camarades détenus et exilés, c’est de maintenir le combat. Peut-être que dans l’agenda du pouvoir je ne suis pas encore programmé. Et ça ne fait pas d’eux des gens qui ne sont pas dictateurs.

Le président élu a été installé le dimanche 23 mai dernier où il a appelé à taire toutes les querelles pour faire face à l’ennemi commun qui est la pauvreté. Qu’est-ce que vous en dîtes ?
C’est unilatéral. Il a dit que les querelles sont du passé. Mais pour se quereller, il faut être deux au moins. On ne se parle pas et tu dis que les querelles sont du passé, comme si mon point de vue ne compte pas. Il faut régler les incompréhensions avec ceux qui sont concernés. Ceux avec qui il s’est querellé et qui ont des incompréhensions ont-ils déjà compris au point où c’est du passé ? Donc non. Ça c’est une autre technique pour évacuer ce qui s’est passé en disant « moi j’ai déjà oublié, c’est du passé » et c’est eux qui continuent de ronchonner. En réalité, ce n’est pas une élection qui s’est déroulée. Il y a eu des votes multiples, il y a toutes sortes d’actes qui ont prouvé qu’on tente de duper le peuple béninois. Pris la main dans le sac le pouvoir met ses actes sur le compte de l’opposition. C’est moi qui ai demandé au député Hazounmé de dire qu’il a voté dans 12 carnets ? En démocratie, quand le peuple boude une élection, ce n’est pas une élection parce qu’une élection, c’est le fait d’exprimer la voix du peuple.

Donc on peut dire qu’il n’y a pas de président de la République ?
Non il y a un président de la République et c’est Patrice Athanase Guillaume Talon. Parce que même quand vous êtes en période régulière, et qu’il y a un coup de force, l’auteur de ce coup de force est considéré comme peut être considéré comme détenteur du pouvoir jusqu’à ce que la situation revienne à la normale. Ce qui s’est passé en avril, c’est un coup de force. C’est dans ce sens que Talon est encore président de la République mais par usurpation.

Donc clairement on peut dire que vous le reconnaissez comme président de la République ?
Le pouvoir du président de la République est un pouvoir usurpé. Il est là-dessus en tant que usurpateur de pouvoir et à ce titre-là, il n’est pas légitime ni légal. Parce que la constitution par laquelle il s’est fait élire a déjà été abrogée par la Cour africaine des droits de l’homme dont notre pays était membre.

La Cour africaine a déjà rendu une décision contre l’État de Côte D’Ivoire et le Sénégal, sans suite.
Les bonnes causes produisent les bons effets. Si vous voulez que ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire se passe ici, ça ne va pas marcher parce que c’est des choses qu’on doit gérer et qu’il faut reconnaître fermement. Nous avons pris l’engagement de nous soumettre aux décisions et nous ne nous sommes pas soumis.

A cette même investiture, il y a eu la présence remarquable de Robert Dossou, avocat conseil de Joël AÏvo. Étiez-vous aussi étonné de le voir à une telle cérémonie après ses critiques acerbes contre la gouvernance Talon?
Je ne peux pas réellement donner de jugement de valeur sur cela parce que je n’ai pas échangé avec Maître Robert Dossou. Au niveau de l’opposition, nous n’avons déjà pas toujours les mêmes points de vue. Je ne peux pas dire qu’une personnalité comme Robert Dossou doit avoir forcément mon point de vue. Cette position de Maître Robert Dossou n’empêche pas de dire que, nous avons adhéré à la cour, nous ne nous sommes pas soumis à la décision de la cour et par conséquent, nous sommes un état voyou.

Il a dit qu’il est parti en tant qu’ancien président de la Cour constitutionnelle
C’est possible.

Paul Hounkpè, un de vos anciens camarades est le chef de l’opposition. Comment avez-vous accueilli cette nouvelle ?
J’ai considéré que la nomination de Paul Hounkpè est une récompense pour services rendus. Il a accompagné le Chef de l’Etat dans les élections communales. Il est entré dans le jeu des élections présidentielles et il a été récompensé pour cela. Personnellement, je pense que FCBE et Paul Hounkpè ne sont pas dans la véritable opposition. Eux-mêmes disent qu’ils sont membres de l’opposition constructive, ce qui ne veut rien dire. Je crois qu’ils ont pu faire des choses en se rapprochant de la dictature.

Vous pensez que c’est le cas de Dénis Oba, Yaya Garba, Théophile Yarou et des autres ?
Quelle réelle critique du pouvoir aviez-vous déjà vu de Paul Hounkpè, si ce n’est que dernièrement ou on a senti une critique feutrée ? Les FCBE et Paul Hounkpè ne sont pas de l’opposition. Ils accompagnent le pouvoir.

Quelle est votre opinion du nouveau gouvernement ?
J’ai deux choses principales à dire. Le fait de composer ce gouvernement en reconduisant la totalité les ministres, veut dire que l’option ne changera pas. Donc, on va continuer avec la même gouvernance, la même publicité, la même ruse. Et si on ne fait pas attention, on se fera couper. Deuxième chose, ça illustre de façon claire, ce que nous reprochons aux réformes du régime Talon. Sous le président Talon, les réformes veulent dire : « Nous on fait tout, vous n’avez pas besoin de vous en occuper, c’est moi qui fais. » Les réformes ne sont pas participatives et on ne se permet pas de regarder ce qui ne va pas c’est cette attitude qui a conduit à la destruction de l’école. Si on devrait faire disparaitre le ministère de la communication, cela ne méritait pas une évaluation ? Devrions-nous nous attendre à ce que le ministre soit surpris ?

Il vous a dit qu’il était surpris ?
Il n’a encore rien dit. Le ministre est tonitruant au point où s’il était informé d’une réforme qui ferait disparaitre son ministère, on l’aurait su de lui. Mais, c’est le Chef de l’Etat qui l’a expliqué sur E-Télé.

La constitution a donné le pouvoir au chef de l’Etat de nommer et de gouverner.
L’esprit de la famille donne l’autorité à Dah de décider. Une maison où le chef a toujours raison, ne tient pas. Si Dah n’écoute pas l’enfant qui parle, il aura des problèmes. Notre tradition fait les réformes de façon participative. Lorsqu’il y a des réformes dans la collectivité familiale, on consulte le Fâ, le vodoun et les personnes avant que la décision ne soit prise.

Vous disiez que cet esprit a détruit l’école béninoise ?
Oui, c’est l’esprit de « moi je sais tout », qui a détruit l’école béninoise. Tout ce que les travailleurs ont reproché à Mahougnon Kakpoion lors de sa passation de service est dû à la stricte application par lui de la politique du pouvoir dans le domaine de l’éducation. En réalité, les railleries s’adressent à Talon. Ce dernier pensera qu’il est protégé parce que les gens s’en prennent seulement à ses ministres qui ont quitté le gouvernement. C’est sa politique qu’ils ont défendue. Le jour où le président Talon va quitter le pouvoir, les mêmes diront qu’ils remercient Dieu.

Si vous pouviez donner quelques conseils à Talon pour sa gouvernance, que diriez-vous ?
Toutes mes critiques comportent des conseils. Ce n’est pas seulement quand je dis que Talon a bien fait que je fais de l’opposition constructive. Quand je dis que ce n’est pas bon de mettre la main sur les fleurons de l’économie nationale, cela veut dire qu’il faut lever la main, qu’il faut remettre en place les sociétés qui ont été détruites pour former son camp. C’est dans l’agriculture que cela s’est fait ressentir (la Sonapra), également au port et dans les structures de l’Etat. Quand je dis qu’il fait de l’exclusion, cela veut dire qu’il ne doit pas faire de l’exclusion. Mais, le fait de dire que ce n’est pas bien est pris comme une injure, comme de la haine. Il y a toujours un conseil sous-jacent dans nos critiques.

Qu’est-ce que Patrice Talon a pu faire de positif à vos yeux, depuis 2016 ?
Quand on me posait cette question, il y a quelques années, j’évoquais la désignation des préfets, des chefs-lieux. Je trouvais que c’était bien. Mais malheureusement, j’ai constaté que c’est pour mieux encadrer nos communes. C’est après ça que nous avons assisté à la destruction des petits producteurs aux abords des voies. Mais aujourd’hui, je me dis qu’il y a la facilité avec le numérique. Les services en ligne se sont développés. Toutefois, C’est maintenant que l’on peut avoir ce genre de services en ligne. On ne pouvait pas demander à Maga d’avoir des services sur portable cela n’existait pas en son temps. Normalement les coûts de ses services devraient plus réduire qu’avant. Or, ces coûts ont augmenté. Je ne sais pourquoi. En, dehors de ça, un président est élu pour faire des routes, pour que l’agriculture marche. Mais sur le plan de l’agriculture, je constate que les statistiques sont annoncées très bonnes. Il faudrait regarder de près. Un pouvoir dictatorial se soumet tout : il se soumet les économies, la politique et même les cadres. L’exemple le plus probant est qu’un médecin assermenté dit que dame Prudence Amoussou et consorts sont morts de maladie alors que les corps ont reçu des balles. Cela paraissait tellement gros que le président de la république a dit que c’est des balles. Mais que c’est des balles de chasseur, comme s’il a fait une étude balistique. C’est ça la dictature. Elle se soumet tout.

730.000 tonnes de coton
Je n’ai pas pesé.

A la date d’aujourd’hui, aucun pays n’a contesté que le Bénin est le premier en coton
Qui pourra contester quoi ? Ce n’est que quand ceux-là vont partir que les autres qui viendront nous diront la vérité.

Récemment à Paris, Romuald Wadagni a été fortement salué par le président Emmanuel Macron qui reconnait les efforts économiques du Bénin.


Laissez tomber

Vous constatez que depuis 2016, plusieurs routes ont été construites
Le président est élu pour faire aussi les routes. Tout ceci est bien fait mais j’ai un problème par rapport à cela. Je suis passé dans d’autres rues que celle-ci. Le pays n’était pas comme il était quand Adam et Eve était sur la terre. Quand je prends la zone Houéyiho-Fidjrossè-Agla, si le président Soglo n’avait pas fait la route Fidjrossè plage-Houéyiho, tout président allait le faire avant autre chose. Donc, c’est une continuité. Si le président Kérékou n’avait pas fait la voie du carrefour Adjaha à Godomey magasin, c’est d’abord ça qu’on aurait fait avant autre chose. Si le président Yayi n’avait pas fait l’autre côté, on aurait fait les rues avant toute autre chose. Certains font et d’autres continuent. C’est ça la vie. Un président ne peut jamais dire qu’il a fait toutes les rues du Bénin. C’est la révolution qui a tracé la place de l’Etoile Rouge.

Il parait que la différence se fait au niveau de la qualité des routes
La différence se trouve au niveau de la surfacturation. Ça a été beaucoup surfacturé. La qualité, c’est plus tard qu’on verra. Parce que là maintenant, on n’a pas d’élément pour véritablement apprécier.

Ce sont les techniciens qui le disent.
Moi je vous ai dit ce que c’est que les cadres et les techniciens sous une dictature. Ils sont tous soumis et disent ce que l’on veut entendre. Ce qui fait la propagande. Bref, ça peut être mieux et tout, mais c’est clair que c’est surfacturé. Je le remercie pour la route d’Agbangnizoun. Les tractations pour cette route qui ont été initiées depuis que Madame Adidjath Mathys était encore ministre de l’économie et des finances. C’était mon combat personnel et si cela s’est achevé aujourd’hui, je ne peux qu’applaudir.

Yayi Boni vous avait dribblé…
Non. S’il ne l’avait pas porté à ce niveau, les autres seraient encore en train de faire les études maintenant. Parce qu’une route ne se fait pas en deux temps trois mouvements. Donc comprenez, une fois encore, que la vie, c’est « tu fais jusqu’à un niveau et d’autres viennent poursuivre. » Mais croire que les autres n’ont rien fait et que c’est maintenant eux qui ont poussé à là où on est aujourd’hui, c’est de la propagande. Et cette propagande n’est pas bonne.

D’aucuns disent qu’il y a une lutte efficace contre la corruption que sous les dix années que vous avez passées où il y avait eu une marche verte contre la corruption.
Vous savez qu’il y a eu une marche verte sous Yayi. Il y a eu beaucoup d’éléments de corruption sous Yayi… c’est vrai. Mais il y a eu deux choses sous Yayi : la loi contre la corruption et les infractions connexes qui a été votée quand Yayi était là. Vous savez, sous Yayi, quand un scandale éclate, les plus proches de Yayi même ne sont pas épargnés. C’est-à-dire que quand le scandale Icc-Services a éclaté, les premiers frappés, je ne sais pas si c’est à tort ou à raison, c’est par exemple le ministre Zinzindohoué qu’on ne peut pas dire était opposé à Yayi, et même des parents de Yayi, ont répondu devant la justice. Ici maintenant, la corruption existe aussi. Pour les opposants, on cherche la petite bête jusqu’à monter de faux dossiers. Mais quand ce n’est pas un opposant, c’est le contraire. A titre d’exemple, on a vu dans ce pays, qu’au ministère du cadre de vie, une moto devrait être vendue entre 5 et 6 millions. Jean Baptiste Elias, en sa qualité du président du FONAC a eu la puce à l’oreille et a écrit au ministre pour dénoncer. Sa dénonciation a été classée et le dossier a suivi son cours jusqu’à ce que les motos soient livrées. C’est en ce moment que Jean Baptiste Elias a bondi dans les médias. Et quand il a fait ça, le dossier a été ramené, on a refait le marché. Et chose étonnante, c’est le même fournisseur qui devrait vendre à 5 ou 6 millions qui a maintenant vendu à 1,5 million. C’est à dire que normalement, si les choses devraient être faites dans les règles, si la brutalité qu’on observe quand il s’agit d’un opposant devrait être de mise, ce fournisseur ne devrait être plus autorisé à compétir. Et depuis, il n’y a rien. Ce n’est pas digne. Par la suite, la structure de Jean Baptiste Elias dont était turbulente, remuante vis-à-vis de tous les pouvoirs qui sont passés, a été sèchement assommée. Elle a été confiée au ministre secrétaire général du gouvernement.

Son mandat est fini…
Mais quand on a confié à Koupaki, en n’entend plus rien. Donc ne comparez plus jamais le pouvoir de Yayi au pouvoir de Talon par rapport à la Lutte contre la corruption. Vous pouvez continuer pour la propagande. Mais quand vous allez finir la propagande, dites-vous que c’est de la propagande.

Les Démocrates ont manqué le rendez-vous de 2021. Quelles sont les perspectives pour le parti ?
Avec ce qui s’est passé pour ces élections, nous sommes encore d’autant plus convaincus que c’est une dictature qu’on a en face. Ce qui se passe avec ce pouvoir est qu’il est impossible de prévoir à l’avance ce qu’ils vont utiliser pour vous empêcher d’aller aux élections. Au niveau des législatives, c’était le certificat de conformité. Au niveau des présidentielles, ce sont les parrainages. Donc, il y a toujours un élément qui ne dépend que d’eux et dont ils se servent pour bloquer. Par conséquent, nous sommes sous un pouvoir dictatorial et nous continuons de dire que ce n’est pas possible que le Bénin soit géré comme ça. Il faut que le pays soit géré autrement. Si en disant cela, le peuple béninois peut trouver les moyens de nous faire participer à une élection, on y participera. Si le peuple béninois trouve les moyens de se défaire de cette dictature, et de faire en sorte que chacun puisse aller aux urnes pour exprimer sa vision, que la meilleure vision soit choisie, ce serait très bien.

Quels sont les rapports qui existent aujourd’hui entre Les Démocrates et le mouvement Résistance nationale ?
Je ne sais pas ce que vous appelez mouvement Résistance Nationale. La Résistance Nationale qu’on avait animée et dans lequel se trouve maintenant Restaurer l’Espoir de Candide Azannai ? Non. Maintenant que tout est passé…

Vous voulez dire que la Résistance est déjà du passé ?
Non. Vu que nous sommes dans cette situation, nous allons poursuivre l’effort que nous avons toujours eu à faire … Le tout ne suffit pas de parler d’une même voix. Mais, le fait que l’opposition ne parle pas toujours des mêmes choses dans les détails, notamment dans le détail des tactiques, je ne parle pas de l’appréciation du pouvoir, mais comment on fait, je dis que ce n’est pas très grave. C’est une richesse. Je vous ai dit ce qu’on en a tiré tout à l’heure. C’est-à-dire que des gens, pendant que nous on disait qu’on ne va pas négocier pour le parrainage, les gens ont écrit pour négocier et nous ont apporté les résultats qui ont montré qu’on avait raison. Mais que c’était bien aussi de faire cette expérience pour éclairer les sceptiques. Donc, le fait que l’opposition soit plurielle n’est pas le problème. Nous allons entreprendre de nous mettre ensemble pour effectivement faire en sorte que nous menions en commun la lutte pour que la démocratie soit restaurée dans notre pays. Que les libertés aient droit de cité.
Comment notre vision pour le Bénin peut passer si le peuple n’est pas à même de choisir la vision qui l’intéresse ? Donc, c’est faire en sorte que le peuple soit à même de choisir la vision qui l’intéresse qui est primordial. C’est par rapport à ça que nous allons nous retrouver.

Carte d’identité: De l’amphi à la politique

Après ses études primaires à Abomey, à Toviklin, à Houégamè, à Pénéssoulou, Eugène Azatassou obtient son CEPE en 1963 à Pénéssoulou. Il entre ensuite au cours secondaire Mgr Steinmetz à Bohicon en 1964. Quatre ans plus tard, il décroche son BEPC puis s’inscrit au Lycée Béhanzin où il obtient un Bac série C. Après trois ans d’études en Mathématiques-Physiques à l’Université nationale du Bénin (UNB), il obtient une bourse qui lui a permis de faire une Maîtrise et un DEA en France. En 1979, il passe un court séjour au Bénin avant de retourner en France en 1982 pour faire une thèse en mathématiques appliquées, option mécanique générale à l’Université de Toulouse. De retour au Bénin en 1985 où il a été recruté à l’UNB en tant que professeur assistant, il s’engage aux côtés du Parti communiste de Dahomey (PCD). Arrêté, il passe quatre ans à Ségbanan avant d’être relaxé à la faveur de l’amnistie accordée en 1989. En 1992, il quitte sa formation politique et initie des associations de développement dans sa commune, Agbangninzou. Mais il reste animé par un fort désir de s’engager en politique. A quelques mois du départ du président Mathieu Kérékou, Eugène Azatassou et certains de ses camarades dont Rigobert Azon créent un parti dénommé Mouvement pour le développement et la liberté (Model), courant 2003-2004. Il sera ensuite désigné Secrétaire général dudit parti. Depuis lors, il consacre sa vie à la politique au détriment de sa carrière académique. Dans le cadre de la présidentielle de 2006, il dirige la campagne pour le candidat Boni Yayi dans la commune d’Agbangninzou. En 2008, il est élu maire de cette commune sous la bannière du parti Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe). Au congrès de refondation dudit parti tenu en 2008, il est élu Coordinateur national. Nommé Directeur de cabinet du ministre de la décentralisation en 2011, il devient Directeur de cabinet du président de la république en 2015, à quelques mois de la présidentielle de 2016. Depuis l’année dernière, ce très proche de Boni Yayi est membre du bureau directeur du parti Les Démocrates.

Intimité: Un féru des plats locaux

Marié et père de quatre enfants, Eugène Azatassou est retraité depuis une dizaine d’années. A plus de 70 ans aujourd’hui, il continue d’aimer les mets locaux comme l’igname pilée. Il prend quelques sucreries et le panaché, mais ne fait pas trop de sport, à part la marche quelquefois.

PROFESSEUR VICTOR TOPANOU RAPPORTEUR GÉNÉRAL DU DIALOGUE POLITIQUE SOUS L’ARBRE À PALABRE: «Je dis aux opposants de rentrer dans la dynamique»

Views: 123

Le bon déroulement de l’élection présidentielle du 11 avril 2021 consacre selon le professeur Victor Topanou, le rapporteur général du dialogue politique de 2019, le couronnement des réformes politiques. Invité du quotidien L’Evénement Précis, le professeur Victor Topanou a, dans la Rubrique « Sous l’arbre à palabre » du journal, exprimé sa satisfaction du bon aboutissement du processus électoral: « cette élection a été une réussite puisque les objectifs de la réforme du système partisan ont été atteints », soutient-il avec enthousiasme. Saisissant l’occasion du décryptage de l’actualité politique nationale, il a, au cours de cette entrevue avec les journalistes, noté en dépit des violences qui ont émaillé le processus électoral par endroits, que « l’accouchement a été très difficile, mais le bébé est né vivant ». L’ancien ministre a abordé plusieurs sujets parmi lesquels la réforme du système partisan, l’arrestation de certains acteurs politiques et a d’ailleurs condamné les appels aux marches lancés par certains leaders de l’Opposition, et qui se sont transformés en des manifestations violentes à la veille de la présidentielle du 11 avril 2021. L’invité au cours des échanges à bâtons rompus sous «Sous l’arbre à palabres» a par ailleurs présenté les mérites des réformes opérées de même que les leçons à tirer pour corriger les dérives de la conférence nationale et pérenniser les acquis démocratiques.

Et si on en parlait

Vous voici à nouveau sous l’arbre à Palabre, au lendemain de la présidentielle du 11 avril 2021. Quelles sont vos premières impressions au vu des résultats issus des urnes après cette élection ?

Je pense que l’accouchement a été difficile, très difficile. Mais le bébé est né et il est né vivant. C’est l’essentiel, c’est le plus important. Donc, il faut juste continuer à l’entretenir, afin qu’il ne meure pas d’une mort prématurée.

C’est un KO. On n’est pas allé au second tour. Qu’est-ce que cela vous dit ?

Depuis qu’on a commencé notre jeune démocratie en 1991, on a eu quatre (4) Présidents de la République. Et parmi les 4, il y a un seul qui n’a pas pu renouveler son mandat : c’est le Président Nicéphore Dieudonné Soglo. Et sur les 3 qui ont réussi à renouveler leur mandat, deux l’ont renouvelé dès le premier tour, c’est-à-dire par KO, puisque c’est la formule retenue. Un seul l’a fait au deuxième tour, il s’agit du Président Mathieu Kérékou (paix à son âme). Si sur trois, il y a deux qui l’ont fait au premier tour, cela peut laisser subodorer qu’au Bénin, il est plus difficile d’obtenir un premier mandat que de le renouveler. Après, que le KO se fasse à 55% ou à 80%, peu importe : le principe, c’est le renouvellement du mandat.

Ce scrutin qui s’est déroulé le 11 avril dernier a la particularité d’avoir expérimenté pour la première fois les nouvelles lois électorales auxquelles vous avez beaucoup contribué. Quelles appréciations vous en faites et quels sont les grands enseignements que vous en tirez ?

Je pense que les objectifs fixés à ces lois ont été globalement atteints. Pour la première fois, on n’a pas eu une pléthore de candidatures. Avec les réformes, il n’y a de place que pour dix candidatures au maximum. C’est-à-dire que dès l’instant où nous avons dit que « pour être candidat, il faut avoir 10% du collège des parrains constitué des Maires et des Députés », il ne peut plus arriver qu’on ait 33 candidats. On aura au maximum 10 candidats. Pour cette première application, au lieu de 10, on en a eu 3. Peut-être à la prochaine présidentielle, on aura 4, 5, voire 6 ou les 10. En tout état de cause, on ne dépassera plus 10 candidats. Et parce qu’il y a une limitation des candidatures, les discours des candidats sont plus audibles. En effet, quand vous n’avez que 3 candidats sur 10 possibles, leurs discours, leurs programmes s’entendent : on les entend. A 33, on ne peut pas entendre les discours et c’est l’une des raisons pour lesquelles les présidentielles depuis 1991, ne s’organisaient pas autour de programmes. Ensuite, pour la première fois, on a fait une élection sans la fameuse opération porte-à-porte dont beaucoup disaient qu’elle était déterminante dans la victoire électorale. Or, ce qu’on ne dit pas, c’est le montant approximatif qu’il fallait investir dans cette opération. Si vous devez faire le porte-à-porte sur toute l’étendue du territoire, distribuer de l’argent à tous les citoyens, même si ce n’est que 500 francs CFA, cela fait tout de même beaucoup d’argent qui aurait pu, s’il avait été judicieusement utilisé, apporter beaucoup plus de bonheur à beaucoup plus de gens.

Aujourd’hui, il est tout à fait possible que si vous êtes un opérateur économique et que vous allez vers un candidat pour lui proposer de mettre 500 millions à sa disposition pour sa campagne, il puisse vous répondre : « gardez les 500 millions, à la fin des élections, on réalisera des œuvres sociales (centres de santé, marchés, centres de loisirs, etc…) sur lesquelles on marquera en lettres d’or, DON DE …ET DE ». Cette approche représentera une nouvelle façon de voir les choses ; elle incarnera une campagne enrichissante plutôt que la campagne appauvrissante qu’on a connue jusqu’ici. Je pense que ces objectifs-là ont été globalement atteints ; il faut le reconnaitre et s’en féliciter.

Mais le taux de participation en a pris un coup….

En effet, c’est le risque qu’il fallait prendre et il en valait la peine. Maintenant, le problème, c’est de savoir si cette abstention deviendra structurelle ou si elle restera conjoncturelle ? Mais pour qu’elle ne soit que conjoncturelle, il faut absolument l’adhésion de tous les acteurs politiques à ces réformes et qu’ils éduquent leurs militants et les électeurs dans ce sens. Car s’ils ne le font pas, évidemment, on risque d’aller vers une abstention structurelle, ce qui serait préjudiciable à notre démocratie participative. On va donc croiser les doigts pour qu’on n’arrive pas là.

Au dépôt des candidatures, vous n’avez pas senti qu’il y a déjà des couacs dans les réformes ?

Des couacs ? Non. Vous savez, on ne peut pas tout interdire. Si non, on va immédiatement vous taxer de dictateur. Comme vous le savez, l’un des objectifs des réformes était le renforcement du système partisan car aussi paradoxal que cela puisse paraître, aucun parti politique n’avait jamais gagné une élection présidentielle au Bénin depuis 1991.

Tous ceux qui avaient été présentés par un parti ont toujours échoué. Je pense au Président Amoussou. Je pense aussi au Président Houngbédji et même au Président Soglo qui, comme par hasard, quand il a été élu en 1991, n’avait pas de parti. Mais il a suffi qu’il crée un parti en 1993 pour perdre aussi bien l’élection de 1996 que celle de 2001. Bref, c’était une de nos « anomalies démocratiques ». C’est comme si vous allez aux Etats-Unis et vous remportez les élections en étant un candidat indépendant.

J’attire votre attention sur le fait que les candidatures indépendantes n’ont pas été interdites, mais qu’elles ont juste été rendues difficiles et que c’est pour cela que nous avons encore eu une vingtaine de dépôts de dossiers de candidature même si au finish, seuls trois ont été retenus.

Avez-vous le sentiment que la réforme du système partisan a permis d’élire un président issu des entrailles des partis ?

C’est la première élection présidentielle et elle peut avoir donné l’impression d’une insatisfaction. Mais je pense, qu’on le veuille ou non, qu’elle est en marche. Pour cette fois-ci, cinq partis se sont mis ensemble pour soutenir un candidat. Il est à souhaiter qu’à l’avenir ces cinq partis fusionnent pour donner un parti unique. J’ai vu d’ailleurs pendant la campagne les activités d’un mouvement dénommé « Dynamique Unitaire ». On va juste espérer qu’il soit prémonitoire et que sa finalité soit la fusion.

Dans une récente interview à une radio étrangère, l’ancien Président de la cour constitutionnelle, Robert Dossou a comparé la présidentielle de 2021 à une pièce de théâtre où chaque acteur avait été préparé à un rôle précis. Avez-vous eu la même impression ?

Non. J’ai écouté cette interview-là. J’ai également écouté l’interview-réponse du directeur de la communication de la présidence. Je n’irai donc pas vraiment sur ce terrain. Mais ce que je voudrais dire, c’est que le Président Robert Dossou a trois casquettes.

Lesquelles ?

Il est Avocat, homme politique et universitaire. Donc, selon qu’il parle avec la casquette d’Avocat, d’homme politique ou d’universitaire, le discours est différent. Car comme vous le savez, l’Avocat défend, , l’homme politique justifie et l’universitaire explique. Et je crois que dans l’interview à laquelle vous faites référence, il a été présenté comme Avocat de deux candidats recalés. Il est donc dans son rôle de dire ce qu’il a dit car un avocat a toujours raison même lorsque son raisonnement est faux car il doit pouvoir défendre y compris un criminel pris en flagrant délit de meurtre. Ma conviction est que s’il devait prendre la parole dans ce dossier en tant qu’homme politique, il tiendrait un discours totalement différent.

Par contre, il y a une autre partie de l’interview qui m’a un peu amusé ; c’est quand il parlait de la fraude par la loi. Cette déclaration vient jeter un regard nouveau sur le KO de 2011 qu’il avait proclamé en 2011 au profit du Président Boni Yayi. La réélection de Boni Yayi fut donc une « pièce de théâtre » puisque la fraude par la loi avait été préparée bien en amont par la loi sur la LEPI. Si vous vous souvenez, lorsque la LEPI avait été adoptée par les députés, une partie de la classe politique s’est remobilisée dans la mouvance de l’Union fait la Nation (UN) pour adopter une loi abrogative que la Cour avait cassée prétextant que même si le vote de la Loi était une prérogative exclusive des Députés, ils n’avaient pas le droit de voter une loi qui constitue un recul. Il estimait alors que la LEPI qui n’était même pas encore appliquée serait nécessairement meilleure à la liste manuelle utilisée jusque-là dans les élections en République du Bénin. Mais en réalité, c’était le K.O de 2011 qu’il préparait.

Ce que je pourrai dire pour finir avec cette question, c’est qu’il ne faut pas être naïf non plus. Lorsqu’un gouvernement en place opère des réformes ce n’est pas pour avantager son opposition. C’est pour en tirer au moins un léger bénéfice. Regarder ce qui se passe actuellement aux Etats-Unis avec les deux réformes politiques que veut engager Joe Biden, celle de la Cour Suprême et celle de Washington DC. Dans le premier cas, il souhaite augmenter le nombre de Juges afin de pouvoir en nommer quelques-uns pour rééquilibrer à son avantage les rapports de force au sein de cette vénérable Institution. De même, en transformant Washington DC en Etat, il s’assure un avantage au Congrès puisque les populations de Washington ont toujours été majoritairement des démocrates. Au total, il y a toujours des intentions politiques derrière une réforme politique ; ce n’est pas nouveau et ce ne sera pas la dernière fois : l’essentiel c’est que cela se fasse dans les règles de l’art.

Que pensez-vous du recul de la démocratie?

Je n’ai jamais compris pourquoi on parle de recul démocratique au Bénin . Est-ce parce qu’un régime élu démocratiquement utilise les ressources que la Constitution et le jeu démocratique lui confèrent pour faire des réformes ? Ou bien c’est parce que le droit s’applique désormais aux acteurs de la classe politique sonnant ainsi le glas de l’irresponsabilité pénale des acteurs politiques ? Ou enfin parce qu’il y aurait un standard unique de modèle démocratique que le Bénin appliquait si bien et qui contre toute attente subit des modifications injustifiées et inacceptables ?

À mon avis, il n’y a pas au Bénin de suppression des libertés, mais une réorganisation des conditions de jouissance de celles-ci. C’est le cas par exemple du droit de grève. Il n’a pas été supprimé, la Cour constitutionnelle s’y était opposé. Mais il a été réduit à sa plus simple expression, deux jours par mois, lui enlevant ainsi toute capacité de nuisance. En soi, ce n’est donc pas un problème démocratique ; le vrai problème démocratique, c’est de voir des acteurs politiques contester, au point d’en arriver à la violence, des réformes engagées légalement par un pouvoir démocratiquement élu sur la base d’un programme.

Joël Aïvo, votre collègue a fait l’option de respecter une partie de la loi en constituant un duo et en refusant de souscrire au parrainage, Réckya Madougou l’a fait également comme d’autres candidats. Comment appréciez-vous ces attitudes ?

Joël Aivo est plus qu’un Collègue ; c’est un ami et un frère. Je regrette cette attitude que lui et Madougou ont eue, mais ce fut une option politique que je n’ai pas d’autre choix que de respecter. Je regrette encore plus ce qui leur arrive actuellement.

Les cas de violences enregistrés lors du scrutin ne sont-ils pas la conséquence des nouvelles lois électorales qualifiées de facteurs d’exclusion pour les opposants ?

Pour moi, c’est une question de principe. Rien, absolument rien ne justifie la violence surtout quand on se dit en démocratie. Ni même la modification d’une loi électorale. Toutes les fois que quelqu’un fait appel à la violence, c’est qu’il n’est pas démocrate ou qu’à tout le moins sa culture démocratique doit être questionnée.

Mais ils se sont sentis exclus …

Ce n’est pas parce que vous vous sentez exclus que vous faites recours à la violence. Nous n’en sommes pas au premier cas de sentiment d’exclusion dans notre vie politique. J’en vois au moins deux, une plus ancienne et une plus récente. La plus ancienne, c’est en 1990 lorsque le projet de constitution avait limité à 70 ans l’âge plafond pour être candidat aux fonctions de Président de la République. Les anciens Présidents Ahomadégbé, Maga et Zinsou ont vite fait de dénoncer une disposition exclusive, mais pour autant, ils n’ont pas fait recours à la violence ; ils ont appelé à voter « oui, mais ». Ils ont perdu et ils se sont alignés. Plus récemment et près de trente ans après le premier cas, c’est le Ministre d’Etat Komi Koutché qui a été victime de l’âge plancher fixé à 40 ans pour être candidat aux fonctions de Président de la République. Il a eu le sentiment d’être exclu, mais pour autant il n’a pas fait usage de la violence ; au contraire il a fait saisir la Cour constitutionnelle aux fins d’obtenir une interprétation de cette disposition constitutionnelle. La décision de la Cour quoique scandaleuse ne lui a pas permis d’être candidat ; sinon, peut-être serait-il le Président de la République actuel. Lui non plus n’a pas fait recours à la violence ; au contraire, il s’est aligné. 

Au total, il n’y a aucune raison de faire recours à la violence dans un régime démocratique. La démocratie nous enseigne le respect du temps long. Laurent Gbagbo, Alpha Condé et Abdoulaye Wade nous ont montré qu’on pouvait faire l’opposition trente ans avant d’accéder au pouvoir ; ils l’ont fait sans jamais user de la violence. Mais, organiser, ainsi que cela a été fait, le boycott systématique des élections dans trois communes, Tchaourou, Bantè et Savè n’était encore jamais arrivé au Bénin.

Visiblement, votre doigt accuse quelqu’un ?

Non, pas du tout. Je n’accuse personne. La Justice fera son travail et mon souhait est qu’elle innocente certains qui croupissent aujourd’hui préventivement en prison.

Mais, le chef de l’Etat avait rassuré qu’il maitrisait la situation.

Il a pu le dire, mais quand la violence est réduite à son plus petit dénominateur, c’est-à-dire le niveau individuel, il est très difficile à n’importe quel Etat de la combattre. Par contre, l’Etat a l’obligation a posteriori de chercher à situer les responsabilités et c’est bien cela que l’Etat fait en ce moment. C’est ne pas le faire qui serait irresponsable, voire coupable de la part de l’Etat. Vous avez vu les gilets jaunes en France et l’invasion du capitole aux Etats-Unis ? dans les deux cas, l’Etat Français et l’Etat américain ont situé les responsabilités en procédant à des arrestations et en condamnant au besoin. C’est donc tout simplement normal qu’après ces événements-là, l’Etat cherche à savoir. Quand l’Etat aura fini de savoir et aura fini de situer les responsabilités, s’il plait à cet Etat-là, d’effacer l’ardoise, le cadre juridique actuel lui permet de le faire. Mais, vous ne pouvez pas dire d’un Etat qui cherche à savoir les origines, les causes, les acteurs, les commanditaires de violences aussi systématiques qui empêche depuis 1991, trois communes du pays, de voter qu’il est dictatorial.

Vous étiez membre du présidium lors du dialogue politique de 2019 après les violences des législatives et les lois issues de ce dialogue ont permis l’organisation de cette présidentielle qui a connu également des violences. Avez-vous le sentiment comme beaucoup que le dialogue politique n’a servi à rien ?

Vous me donnez l’occasion de répondre à un collègue et ami, le Professeur Amoussou Yéyé qui a écrit sur sa page Facebook : « Est-ce que les professeurs Sossa et Topanou sont fiers d’eux » ? Ma conviction, c’est que ce n’est pas le dialogue qui est en cause. Nous avons eu dans notre pays une conférence nationale, mais toutes les dérives de ces trente dernières années ne peuvent être imputables à cette conférence nationale-là. De la même manière, la situation actuelle ne peut être imputable au dialogue politique. Il faut distinguer entre l’esprit et la pratique que font les hommes des lois et institutions qu’ils se donnent. C’est pourquoi, quand je vois certaines personnes prendre la conférence nationale comme le levier de notre démocratie, je me dis qu’ils se trompent d’analyse.

Les réformes n’ont pas été faites pour susciter la violence, ni pour exclure d’ailleurs. Elles ont été faites pour tenter de corriger les dérives constatées ces 30 dernières années et notamment replacer les partis politiques au cœur de la vie démocratique. Pour y arriver, on a corrigé les conditions de création des partis, on a revu le statut de l’opposition, on a décidé du financement public, on a décidé que les partis doivent avoir une dimension nationale et pour cela, pour les communales tout parti doit avoir au moins 10% des suffrages exprimés sur le plan national pour être éligible au partage des sièges. Il en est de même pour les législatives. Et pour la présidentielle, il faut réunir au moins 10% du collège des parrains constitués des Maires et des Députés. C’est vrai que cette fois-ci, ce système a profité au Président en exercice, mais il profitera bien à quelqu’un d’autre en 2026.

Vous en êtes sûr ?

J’en suis certain. Le Président Talon n’a pas l’intention de faire plus de deux mandats. Et la Constitution ne l’y autorise même pas. Et si le Président voulait faire plus de deux mandats, il aurait pu faire sauter le verrou de la limitation des mandats à l’occasion de cette révision ; il en avait les moyens. Au lieu de cela, il a plutôt corsé cette limitation. Il faut que nous sortions de cet état de suspicion permanente qui caractérise notre société.

Puisqu’il a une majorité écrasante à l’Assemblée !

Il aurait pu faire ce qu’il veut, changer les textes comme bon lui semble, mais tel n’a pas été le cas. Pourquoi voulez-vous qu’il fasse en plusieurs fois ce qu’il peut faire en une fois ? Je fais donc bien le pari qu’à partir de 2026, ces dispositions profiteront bel et bien à d’autres acteurs un peu comme la Lépi de Yayi a profité à d’autres acteurs jusqu’en 2021.

Avec les violences, les arrestations et tout ce qui a entouré cette élection, n’avez-vous pas l’impression qu’il faut une assise nationale afin de véritablement réconcilier tout le peuple ?

J’ai déjà entendu ça plusieurs fois, mais je ne vois toujours pas ce que l’on met dans les assises nationales. Si c’est pour remettre en cause les réformes, je pense que ce serait un énorme gâchis. Si c’est pour faire un remake de la conférence nationale, je n’y suis pas favorable ; nous ne sommes pas dans la situation de 1989. Si c’est pour amnistier ceux qui ont maille à partir avec la justice alors salut les dégâts : ce serait l’instauration du règne de l’impunité pour les acteurs politiques car la liberté va de paire avec la responsabilité. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé avec la Conférence nationale. Et si enfin, c’est pour conférer une nouvelle légitimité aux acteurs politiques en mal de légitimité démocratique comme ce fut le cas avec la conférence nationale, alors ce serait à désespérer de notre capacité collective. A ce propos, j’ai entendu le professeur Holo dans une interview sur la Deutch Welle qui disait que les problèmes de la composition actuelle de la cour constitutionnelle, c’était, d’une part, qu’il n’y a pas de constitutionnaliste et, d’autre part, qu’il n’y a plus personne qui ait participé à la conférence nationale comme si nul ne peut parler de la seconde guerre mondiale s’il n’y a pris part.

Le système partisan est-il protégé ?

Comme je le disais tantôt, il y a la réforme et il y a la pratique. Je pense que pour l’instant, on a essayé de protéger au mieux le système partisan. Il n’y a pas de démocratie sans un système partisan fort. Chez nous, on n’avait pas de système partisan. Un système partisan, c’est à la fois le financement public, le statut de l’opposition, c’est le cadre partisan comme cadre unique du choix des responsables du mandat électif. C’est un ensemble de jeux qu’on n’avait jamais véritablement construit, mais qu’on a essayé de construire à la faveur de cette réforme. Malheureusement, certains acteurs continuent de développer des résistances à son égard. Et c’est pourquoi pour moi, le principal effort à faire, c’est de continuer d’expliquer l’esprit des réformes afin que les réticents d’aujourd’hui finissent par y adhérer. Je reconnais qu’il n’y a pas eu assez de pédagogie, mais il n’est jamais trop tard pour bien faire.

ll faut avoir tous les partis derrière un candidat… ?

Je crois que j’en ai parlé plus haut. C’est probablement la phase transitoire qui nous a permis d’assister à ce phénomène. Car vous ne pouvez pas continuer de dire que vous supportez la même personne et en même temps soutenir que vous ne pouvez pas travailler ensemble. Imaginez qu’après cette présidentielle, ils se déchirent à nouveau pour les prochaines législatives de 2023. Ils vont encore se retrouver avec des partis qui n’auront pas les 10% sur le plan national et qui n’auront pas de députés. Par souci de cohérence, ils sont obligés de rester ensemble.

Pour rendre acceptables les dispositions acceptées…?

Ma conviction, c’est qu’il faut continuer d’expliquer, aux acteurs, aux populations et aux partenaires. Il faut expliquer que les réformes ne sont pas faites pour exclure et qu’au contraire, elles sont faites pour renforcer le système partisan et qu’en conséquence elles profiteront aussi à leurs partis politiques.

Le Bénin était quasiment le seul pays où l’on peut gagner une élection présidentielle sans être un acteur politique connu, sans avoir été militant ou adhérent d’un parti. Ce n’est possible dans aucun des pays qui nous entourent et a fortiori dans les pays de vieille démocratie. Les conséquences sur la gouvernance politique et économique sont suffisamment bien connues pour souhaiter l’inversion d’une telle situation. 

Écoutez, moi j’ai travaillé avec le Président Boni Yayi. En 2007, il y a eu les premières législatives du premier mandat de Boni Yayi. Il a eu une majorité relative et il a dû trouver des alliés pour construire une majorité absolue. Mais un an plus tard, en 2008, il a encore perdu cette majorité. Pour tenter de reconstruire une nouvelle majorité, il a fallu donner des gages de mauvaise gouvernance aux Députés qui acceptaient de le soutenir. Ainsi par exemple, pour obtenir le soutien du Député Justin Agbodjèté, il a fallu consentir à son parti, l’UTD de Barnabé Dassigli le poste de Ministre de la Jeunesse et des sports, un poste de chargé de mission et un poste de Chef d’arrondissement à Calavi. Il en est de même du Député Kindjanhoundé qui n’a accepté de soutenir le gouvernement qu’à condition d’obtenir un poste de Ministre, un poste de Préfet et des marchés publics. Pour bénéficier du soutien d’un député à l’Assemblée nationale, un Président de la République était obligé de faire tout ça. Sans compter que plus de 80% des Députés sont des opérateurs économiques et que la seule chose qui les préoccupe, ce sont les marchés publics. L’exemple le plus illustratif en même temps qu’il est symbolique, c’est la construction inachevée depuis quelques années du siège de l’Assemblée nationale, le lieu où bat le cœur de notre démocratie à Porto-Novo.

Et pourtant, tout le monde a conscience que cette situation ne pouvait durer plus longtemps. Kérékou dénonçait déjà les intellectuels qu’il qualifiait de « tarés » et en appelait à la construction du Bénin du futur. Yayi Boni quant à lui, a parlé du « changement » au cours de son premier mandat avant de parler de « refondation » au cours de sen second mandat pendant que le Président Adrien Houngbédji parlait de « rectification ». En 2016, on s’est retrouvé avec deux grosses tendances, le « nouveau départ » et la « rupture ». Au total, le besoin existe, il est réel. Le seul reproche que l’on peut faire au Président Talon, c’est de n’avoir pas accompagné ces réformes d’une bonne pédagogie. Mais il n’est pas trop tard pour rectifier et mieux faire.

Il a perdu sa légitimité

Non, pas du tout. La légitimité n’est pas donnée par le taux d’abstention ou le taux de participation à une élection. Au Bénin, la loi a prévu que le vote soit un droit et non un devoir. Si vous décidez le jour du vote de ne pas aller voter, c’est votre droit. On ne peut pas dire qu’un taux de participation faible fait perdre à un élu sa légitimité ; ce n’est qu’une vue de l’esprit.

 Le Bénin sera désormais dirigé par un duo présidentiel, même si les pouvoirs de la vice-présidente élue sont très limités. Comment entrevoyez-vous cette nouvelle ère de gouvernance qui s’ouvre dans la vie démocratique de ce pays ?

Il faut retourner à l’esprit de cette réforme. On a prévu un poste de vice-Président parce qu’il a été décidé d’organiser les élections générales afin de mettre un terme au cycle perpétuel des élections au Bénin ? Désormais, en six mois, de janvier à, Mais de l’année électorale, toutes les élections (présidentielle, législatives et communales seront organisées). Mais pour y arriver, il y avait deux questions techniques et préalables à régler, la première c’est l’harmonisation des mandats et la seconde la vacance des pouvoirs. Pour la première, il a fallu faire passer le mandat des députés à cinq ans. Pour la seconde, pour éviter de reprendre les élections en dehors de la période des élections générales, il a fallu créer un poste de Vice-Président pour faire comme aux Etats-Unis, au Ghana et au Nigéria entre autres. Au Bénin, le Vice-Président devient d’office le Grand Chancelier de l’Ordre. 

Lorsque le Président de la République décède, et que la vice-présidente élue, prend le pouvoir et devient présidente de la République, que devient le poste de la chancellerie ?

En fait le poste de la chancellerie est directement lié à la vice-présidente donc lorsque le vice-président devient président, il y a un mécanisme pour désigner le nouveau vice-président. Le nouveau président propose un vice-président qu’il soumet pour approbation à l’Assemblée nationale.

On a également appris que le Président de la République peut démettre la Vice-Présidente

Oui, en effet.

Des opposants soupçonnés d’être instigateurs des récentes violences électorales sont interpellés et mis sous mandat de dépôt par vague depuis peu par la justice. La stabilité nationale tant souhaitée n’est-elle pas davantage éprouvée ?

Non. S’ils ne sont pas coupables ils vont être libérés. Vous imaginez si l’Etat ne faisait rien à la suite de toutes ces violences pré-électorales ? Vous imaginez que l’État soit là les bras croisés ? Pour la première fois on a organisé le boycott systématique des élections dans trois communes. Ce n’est même pas que certains ont voté et que d’autres n’ont pas voté. C’est que personne n’a voté. C’est quand même un acte suffisamment grave. Donc un État sérieux a l’obligation de chercher à comprendre, à situer les responsabilités et après une fois les responsabilités situées, s’il faut aller vers l’effacement, il le fera. Mais ne rien faire du tout serait est un mauvais signal.

Pour un second mandat, si on demandait à Victor Tokpanou de donner des conseils au Président Talon, que lui diriez-vous ?

Je lui dirai de poursuivre les réformes pour lesquelles le Peuple béninois l’a élu, mais de les accompagner d’une bonne pédagogie ; il sera applaudi à la fin de son mandat.

Aux opposants, je leur dirai simplement de rentrer dans la dynamique et d’arrêter de penser que le Président ne pourra pas faire deux mandats, que s’il venait au second tour en 2021 ce serait la fin du monde. Que personne n’oublie qu’une élection est aléatoire et qu’on peut la gagner ou la perdre.

Et au Président Talon qui a serré la ceinture au premier quinquennat, quel conseil avez-vous à lui donner ?

Moi je suis fonctionnaire et mon salaire a toujours été payé. C’est vrai que l’histoire de ceintures serrées est une image politique. Ce sont des réformes qui ont été faites et si ces réformes sont légitimes et pertinentes il faut faire avec. Le problème est au niveau des primes des fonctionnaires qui ont été supprimées. Certains avaient même fait des crédits à la banque et quand la décision de suppression des primes a été prise, ils se sont retrouvés dans une situation délicate. Déjà du temps de Boni Yayi, une commission avait été mise en place pour étudier la question des primes, mais elle n’avait jamais déposé son rapport.

Puisque nous parlons de votre ancien patron, pensez-vous qu’il a fait du pire pour les résultats en 2016?

Ce n’est pas les mêmes cas de figure. En 2016, l’étranger était vraiment étranger. En 2021, l’étrangère n’était pas si étrangère que ça.

Elle est étrangère au parti Les Démocrates…

Oui, peut-être au parti, mais en 2016, ce n’était pas au parti. Il était quasiment étranger à la classe politique. Je ne suis pas capable de vous expliquer les tractations internes du parti Les Démocrates qui ont abouti à la désignation de Réckya Madougou. Mais j’ai pu entendre dans certains éléments audios sur WhatsApp que les critères de désignation de leur candidat étaient essentiellement financiers. Il fallait avoir la capacité de payer la caution, la campagne et la tournée d’information et d’explication.

C’était la même chose en 2016 …

C’est possible puisque sous réserve de vérification, l’affaire des 15 milliards entre Ebomaf et le candidat de 2016 montre très bien que le candidat lui-même n’avait pas d’argent. Sinon, il n’allait pas faire ça. J’aurais dû même lever les réserves puisque pour ces motifs, il a été condamné par un tribunal. Ça veut dire qu’il n’avait pas les 15 milliards avec toute la réputation qu’il avait sur le plan international, en France etc. Et pourtant, la loi avait prévu deux milliards de dépenses électorales. Donc pour moi, ce n’est pas les mêmes dynamiques en 2016 et 2021.

On a vu votre ancien patron présent à la 6ème investiture du président congolais, alors qu’il s’est battu pour que celui qui est là ne fasse pas deux mandats. Quelle est votre appréciation ?

Il n’y a aucun problème. Il n’est pas allé imposer au Congo les règles du Bénin. Au Bénin, nous sommes dans un jeu démocratique. Il y a un candidat qui rempile. Comme en 2011, l’Union fait la Nation était contre le renouvèlement de son mandat. Mais si les Congolais décident de désigner quelqu’un 6 fois, il ne revient pas à un Béninois d’être contre ça. S’ils sont des amis et qu’il l’invite à son investiture, sincèrement moi je ne trouve pas ce qu’il y a de gênant à cela. L’essentiel, c’est qu’il ne vienne pas nous dire au Bénin de faire comme au Congo.

Le Président Talon a dit qu’à l’université, il y a beaucoup de bavardage…

Il n’a pas dit que ça. Il a aussi dit que beaucoup de professeurs d’université ne sont pas bien formés.

Vous vous êtes senti blessé ?

Non, puisqu’il a pris la peine de faire la nuance en disant « beaucoup ». Il n’avait pas dit tout le monde. S’il avait dit tous les enseignants à l’université sont mal formés, là tout le monde se serait mis vent debout. Donc je pense que la nuance valait la peine. Moi je ne me sens pas mal formé. Donc je ne me sens pas concerné par cette stigmatisation. Maintenant, s’il y en a qui sont mal formés, qu’ils réagissent. Je pense d’ailleurs que notre Intersyndicale a déjà réagi, parce qu’au moins l’Intersyndicale est là pour défendre tout le monde.

Comment avez-vous vécu la suspension des élections rectorales et la désignation des responsables universitaires ?

Je pense que c’était une erreur qui mérite d’être corrigée rapidement.

Quel est selon vous le mode de recrutement et d’avancement des enseignants approprié ?

Le Président a promis recevoir les enseignants pour leur expliquer son plan. Quand nous prenons le mécanisme mis en place par le CAMES, il y a trois programmes : la maîtrise d’assistanat, la maîtrise de conférences, et la titularisation. Est-ce qu’il faut instaurer un mécanisme domestique complémentaire ? Dans beaucoup de pays, le double système existe. Au Cameroun par exemple, n’a adhéré qu’à un seul programme, celui de la maîtrise de conférence. Les Camerounais ne passent pas par la maîtrise d’assistanat et la titularisation du Cames. C’est quand ils vont au concours d’agrégation et échouent à la 3ème épreuve que le CAMES fait d’eux automatiquement des maîtres assistants.

Le même système mixte existe au Niger. Donc si le Président dit qu’il veut faire comme les autres pays, moi j’attends de voir puisqu’il a promis qu’il invitera les enseignants. J’imagine que ce sera les représentants syndicaux. Mais l’idée en elle-même n’est pas révolutionnaire, puisqu’elle existe ailleurs.

Madame la ministre de tutelle nous a informés qu’il y a un processus en cours qui consiste à opter au niveau de l’enseignement supérieur pour un système de contrôle ?

Moi je veux bien le voir. Je n’ai jamais été hostile aux idées nouvelles. L’essentiel est que le porteur des idées nouvelles soit lui-même disposé à l’évaluation, parce que le tout ne suffit pas de dire qu’on a des idées nouvelles. Je ne pense pas qu’il soit juste et opportun de comparer le système d’enseignement des trois ordres. Au niveau universitaire, ce n’est pas du tout la même chose qu’au niveau secondaire. Est-ce que le ministre sera en capacité de nous proposer comme au primaire ou au secondaire des salles de 50 étudiants maximum ? Parce que quand on est dans la pédagogie, il faut des groupes restreints. Or à l’université, en première année, nous avons au moins 1000 étudiants devant nous. Si on veut faire la comparaison, il faut aller jusqu’au bout et transformer de façon systématique les classes de cours en des groupes de 50 personnes. Les problèmes ne sont pas les mêmes. Il faudra faire très attention. C’est pourquoi je dis que sur le principe, moi je n’ai rien contre les idées nouvelles, mais à condition que le porteur lui-même soit disposé à faire sa propre évaluation. J’ai enseigné dans le système canadien pendant une dizaine d’années. Je connais le système d’évaluation qui est là-bas aussi. Je ne sais pas si c’est ça qu’on veut importer ici. Si c’est ça, il faudrait qu’on s’asseye pour discuter des avantages et des inconvénients. Parce que dans le système canadien, vous faites évaluer les enseignants par les étudiants et on se rend compte que les enseignants pour éviter de se faire mal juger, donnent systématiquement 18 à tous les étudiants, peu importe leur niveau. Et quand vous donnez 18 à un étudiant, vous lui demandez de vous évaluer, il ne dira que vous êtes le bon professeur. J’intervenais dans un programme à Sherbrooke, qui a fermé parce que les enseignants évaluaient les étudiants à leur juste niveau, et quand on leur a demandé de les évaluer, ils ont donné de mauvaises notes. Et le programme a fermé, parce que là-bas, quand les étudiants vous évaluent mal, on ferme votre programme. Donc c’est un problème que les Canadiens essaient de régler parce qu’ils sont allés très loin dans la libéralisation de l’enseignement supérieur. En fait, c’est pour ça qu’ils ont privatisé l’enseignement supérieur. Et donc toutes les formations sont devenues coûteuses. que 10 étudiants, ça veut dire que chaque étudiant paye 5 millions de dollars. Si c’est vers ça qu’on va, qu’on nous le dise. On va y aller. Si au bout de quelques années, on se rend compte qu’on est allé droit dans le mur, on va rebrousser chemin. Ce n’est pas compliqué du tout !

Carte d’identité : Maître de Conférences de sciences politiques, pas politique

De la classe de 5ème jusqu’à l’université, Victor Topanou vit au Togo où il a décroché son Brevet d’études du premier cycle (Bepc) en 1981, le Probatoire en 1983, le Bac en 1985 puis en 1989, il obtient à l’Université de Lomé, une Maîtrise en Histoire, option  Relations internationales. Il part ensuite à Paris pour des études de stratégie et de défense à l’Ecole des Hautes Etudes Internationales qui abrite le Centre d’Etude et de Défense Stratégique (Ceds). C’est ainsi qu’il rencontre le Général Charles de Lambi, qui l’encourage à faire un doctorat à la Sorbonne. Après quelques années, Victor Topanou obtient son doctorat avant de revenir à l’Université nationale du Bénin en 1998 où le Professeur Nouréini Tidjani-Serpos s’est battu pour le faire recruter. Lors de la campagne pour la présidentielle de 2006, il est nommé Directeur de Campagne de Célestine Zanou qu’il a connue le 27 décembre 2005. Proposé avec d’autres, sur demande de l’ancien président Boni Yayi pour travailler avec le nouveau Chef de l’Etat, il a été nommé Conseiller technique juridique du Chef de l’Etat le 26 mai 2006. En 2008, il devient Secrétaire général du Gouvernement puis Garde des Sceaux, Ministre de la justice, de la Législation et des Droits de l’Homme, porte-parole du Gouvernement d’alors. Sorti en Juin 2010 du Gouvernement, il se présente aussitôt à la présidentielle de 2011, sans succès. Annoncé pour être candidat à la présidentielle de 2016, l’homme s’est finalement désisté. Avant de jeter son dévolu sur Sébastien Ajavon, il avait prévenu qu’un homme d’affaires ne ferait jamais un bon président pour le Bénin. Et quand on lui dit qu’il est inconstant, il précise : « J’ai écrit un long papier, de près de douze pages de journal, relayé dans près de 21 journaux, à la suite de la position du clergé. J’ai attiré l’attention sur les dangers qu’il y a à élire un opérateur économique. Je l’ai fait, je l’assume. Je continue de penser que j’avais raison. Quand j’ai dit ça au peuple, et que le peuple ne m’écoute pas, décide, malgré mes avertissements relayés dans autant de supports, de porter près de 50% de ses suffrages sur les deux opérateurs économiques, qui suis-je à ce moment-là pour m’y opposer ? Au contraire, j’accompagne ! » Mais est-il toujours de l’opposition ? Il nous repose la question : « Est-ce que je l’avais été ? Quand je me battais pour des élections législatives non exclusives, cela profitait à l’opposition sans que je ne demande aucun poste dans leurs organes et même sans que je ne marchande aucun positionnement pour les législatives si elles avaient été inclusive. Mieux j’ai prêté ma plume, mon temps et mon énergie dans la perspective, bien vite abandonnée, de la création d’un grand parti unifié de l’opposition ». Et d’ajouter : « J’avais choisi de ne plus faire la vie politique. Je l’avais même annoncé sur certains médias. C’est l’une des raisons pour lesquelles, j’ai retiré ma candidature de l’élection de 2016 et que plus tard, nous n’avons pas fait de congrès de mise en conformité du parti Fur qu’avec d’autres nous avions créé ».  L’homme qui se dit prêt à aider le Chef de l’État à sortir le pays de la morosité ambiante indique se positionner désormais en enseignant plutôt qu’en acteur politique. Maître de Conférences de sciences politiques depuis 2012, Victor Topanou a récemment croisé le fer avec certains de ses collègues qui ont fini par être sanctionnés par le Cames. « S’ils ont été sanctionnés à trois niveaux, à savoir la commission d’éthique et de déontologie, le comité des experts et le Conseil des ministres, c’est que leur dossier n’était pas si vide que ça », affirme-t-il.

Intimité : Amateur de gombo

Père d’une fille, Victor Topanou a connu l’expérience du divorce. Il a retrouvé l’amour depuis quelques années et avoue être heureux avec « une très belle femme de cœur », dit-il. Grand amateur de football, il rate rarement l’entrainement avec ses amis de quartier avec qui il joue tous les samedis et jours fériés. Au vrai, c’est un homme qui aime la simplicité. A table, il mange du Gombo aussi bien avec de la pâte blanche qu’avec du riz. « Je connais pratiquement tous les bons coins où l’on sert  du bon gombo à Cotonou », avoue le gourmet.

Rédaction

Dr Eric ADJA, Président de l’Agence Francophone de l’Intelligence Artificielle (AFRIA), SOUS L’ARBRE A PALABRE: «Le Bénin a les atouts pour devenir leader de l’intelligence artificielle en Afrique»

Views: 16

Directeur de l’Agence francophone de l’intelligence artificielle (Afria) depuis 2019, Dr. Eric Adja est l’invité de la rubrique Sous l’arbre à palabre du quotidien L’Evénement Précis. A cette tribune très prisée, le Directeur de l’Afria a exposé aux journalistes les grands enjeux de l’intelligence artificielle, fait le point des actions menées par l’Afria pour accompagner les jeunes dans la recherche de solutions. Dr. Eric Adja a par ailleurs dévoilé ses propositions pour maintenir la dynamique engagée depuis 2016 pour le développement du numérique au Bénin, les défis à relever pour une meilleure politique du numérique au Bénin et les perspectives de l’Afria.

Et si on en parlait

En 2019, vous avez été nommé à la tête de l’Agence francophone de l’intelligence artificielle. Qu’est-ce que l’Afria ?
L’Agence francophone de l’intelligence artificielle est une Fondation internationale basée à Genève, en Suisse, avec des bureaux en France, au Bénin et prochainement à Montréal (Québec), Libreville (Gabon), Abidjan (Côte d’Ivoire) et Hanoi (Vietnam). Le but de l’Afria est de promouvoir l’Intelligence artificielle au service du développement durable. L’Intelligence artificielle c’est de l’informatique avancée. On pense souvent aux robots qui prennent la place des humains et qui deviennent menaçants, comme on le voit dans certains films. En réalité, quand on parle d’intelligence artificielle, on parle du traitement des données grâce à des algorithmes ; il s’agit tout simplement de programmes informatiques avancés, permettant aux ordinateurs d’aider les humaines à traiter de grandes masses de données et à prendre des décisions sur cette base. C’est un type d’informatique poussée à un niveau tel, que les ordinateurs sont considérés comme « intelligents ». Ils arrivent donc à décoder un certain nombre de réalités avec un minimum d’intervention de l’humain. C’est de l’informatique avancée pour le traitement de grandes données pour faciliter un certain nombre d’interventions dans tous les domaines. Vous pouvez, grâce à l’intelligence artificielle, programmer l’arrosage de votre jardin ou de votre ferme. Ainsi, les programmes sont conçus pour que la machine puisse vous remplacer pour accomplir des tâches que vous n’avez pas le temps de faire. L’Afria a pour mission de voir ce qui se passe dans le monde avec l’intelligence artificielle et d’essayer de le proposer aux pays francophones, notamment africains. L’Afria s’informe de ce qui se passe dans le domaine, forme les jeunes et informe les pouvoirs publics afin d’adopter une politique de l’intelligence artificielle, au service du développement économique et social des populations locales.

Quels sont aujourd’hui les grands enjeux liés à l’Intelligence artificielle ?
Il y a trois enjeux : la sécurité, la vie privée et le développement durable. Au niveau de la sécurité, nous remarquons qu’aujourd’hui, il y a déficit de sécurité en ligne. Nous observons de nombreux cas de fraudes au niveau des banques surtout dans les transactions en ligne. L’intelligence artificielle peut aider les pays à sécuriser les banques pour compliquer la tâche aux cyber-délinquants. Mais, cet enjeu entraine celui de la confidentialité. L’intelligence artificielle fonctionne avec de grosses masses de données qui détiennent des informations sur chaque individu. Dans ce cas, on se demande comment protéger la vie privée des personnes. Pour exemple, la Chine a développé un système où, avant de rentrer dans certains établissements publics ou privés, c’est l’ordinateur qui capte votre image et fait une reconnaissance faciale. Ce qui fait que l’accès à cet établissement peut vous être interdit, si nécessaire, notamment pour des raisons de sécurité. Ce qui est grave est que ces données peuvent être utilisées pour contrôler vos déplacements. On a déjà votre visage dans le répertoire et on peut suivre vos déplacements dans des pays comme la Chine où le respect de la vie privée est considéré avec d’autres systèmes de valeurs.
Le respect de la vie privée et de la confidentialité est l’un des enjeux de l’Afria. Il y a principalement trois modèles de pensée autour de l’IA. Les modèles chinois et américains d’une part et le modèle européen de l’autre. Pour les Américains et les Chinois, il n’y a pas de frontière étanche entre la vie privée et les enjeux de sécurité nationale ; nous l’avons remarqué au cours de cette période de la Covid. Les données des malades du Covid sont enregistrées, ce qui fait que dans un quartier, on sait si tel ou tel est atteint du Covid. Comme inconvénient, on peut rapidement vous cibler et vous exclure de la société. L’école américaine essaie de respecter la confidentialité ; la voie européenne, plutôt humaniste dit qu’il est important de respecter la vie privée des citoyens. Ce que défend aussi l’Afria. Le troisième enjeu concerne le développement durable. C’est de faire en sorte qu’il ne s’agisse pas que de technologie, mais comment mettre l’IA au profit de la population et c’est tout le rôle de l’IA. C’est de voir ce qui se fait et ce qui peut être utilisé pour les populations. C’est-à-dire, par exemple, comment rendre plus fertiles nos sols, assurer la bonne gestion des déchets, la reconnaissance vocale ou aussi la création d’applications utiles à l’agriculture. Dans le domaine de la santé par exemple, on peut utiliser l’IA pour la distribution des vaccins et pour beaucoup de choses encore. Le rôle de l’Afria, c’est de travailler sur les enjeux et de pouvoir les mettre au profit du développement des peuples.

Parlez-nous un peu des actions menées par l’Afria pour accompagner les jeunes dans la recherche de solutions
Depuis 2019, nous avons organisé trois types d’activités. Le premier type d’activité qui concerne notre axe prioritaire, c’est la formation. Le deuxième type d’activité, c’est l’accompagnement, nous allons en parler et le troisième type, c’est la communication et la diffusion d’activités que nous menons ici. En termes de formation, nous avons organisé une série de webinaires et de séminaires pour former les personnes, surtout les jeunes. C’était le cas par exemple en septembre 2020 avec la Fondation Adrien Houngbédji pour le numérique, avec laquelle nous avons formé plus de 500 jeunes dans cinq villes du Bénin (Abomey-Calavi, Porto-Novo, Abomey, Lokossa, Parakou) sur ce que c’est que l’IA et sur le principal langage de programmation (appelé Python). Il s’agissait d’une tournée de sensibilisation et de formation, pour pouvoir former les jeunes dans le domaine. En termes de renforcement des capacités, le Bénin a été choisi comme pays pilote et c’est pourquoi en lien avec GSMA (association internationale des opérateurs de télécoms), nous avons accompagnons le ministère de la santé sur les données mobiles massives (mobile big data), pour aider à l’établissement de tableaux de bord pour la lutte contre le Covid 19. C’est une action pratique qui en fait est classée dans l’accompagnement des gouvernants et nous avons commencé avec le gouvernement du Bénin, notamment en partenariat avec les ministères de la santé, de la communication et du numérique. L’enjeu est de conseiller efficacement les pouvoirs publics.
Le troisième aspect, c’est la sensibilisation. Beaucoup ne savent pas ce que c’est que l’intelligence artificielle, ses enjeux. Donc, nous organisons des webinaires, justement pour leur apprendre les notions de base. Le dernier en date a été consacré à comment promouvoir l’emploi dans les secteurs du numérique, notamment le lancement d’une plateforme de recrutement (afria.incognitorh.com), en partenariat avec une entreprise polonaise dénommée Incognito HR.

Au regard de ces activités, dites-nous si votre rôle consiste uniquement à faire la promotion de l’Intelligence Artificielle ?
Notre rôle est de faire la promotion de l’IA comme outil de développement. Comme je l’ai expliqué, nous essayons de voir comment l’IA peut être un facteur de développement, en mettant en valeur les potentialités de l’IA et les mesures pour en réduire les risques. Parce qu’il y a des risques, il faut être objectif ; mais on ne peut pas considérer uniquement les risques et laisser de côté les avantages pour nos pays. Donc il est question de sensibiliser, de former et d’accompagner les gouvernements à se doter de politiques nationales en matière d’IA. Donc, nous pensons que le Bénin peut beaucoup gagner en étant l’un des premiers pays de la sous-région et en Afrique à se doter d’une politique nationale en matière d’intelligence artificielle pour accompagner les efforts qui se font actuellement dans le domaine du numérique. Le Bénin dispose des atouts pour être un leader dans ce domaine, ainsi qu’en matière de cybersécurité, d’internet des objets, etc. Ces atouts peuvent permettre au Bénin d’aller plus loin et pourquoi pas se lancer dans la conquête de l’espace, à l’image d’autres pays comme le Ghana, l’Algérie ou récemment la Tunisie ?

Quelles sont selon vous, les perspectives de l’Afria ?
Trois perspectives principales. La première, est de renforcer ce qui a déjà commencé, c’est-à-dire le renforcement des capacités, la formation, la sensibilisation, la mobilisation des décideurs. Deuxième perspective, nous l’avons déjà commencée, c’est d’accompagner les gouvernements africains en particulier et francophones en général à se doter de politiques nationales en matière d’intelligence artificielle. Notre troisième perspective est de penser à comment l’IA peut participer à la création d’entreprises et d’emplois.
Ainsi, nous envisageons d’installer prochainement au Bénin un incubateur d’entreprises dans le domaine de l’IA en particulier et dans le domaine du numérique en général. Comment accompagner les jeunes qui créent les entreprises ? Dans ce domaine comment trouver des prestataires au niveau international parce que vous pouvez rester au Bénin et avec votre intelligence, et vos capacités, rendre service à des entreprises américaines, françaises, canadiennes et créer de la richesse depuis votre pays sans forcément émigrer. Notre philosophie, c’est d’équiper les jeunes dans ce domaine, qui créent des services et qui deviendront des prestataires à des entreprises à l’international. Voilà en fait quelque chose qui va aider à créer de l’emploi, des entreprises pour des jeunes béninois. Il faut cependant reconnaitre que les jeunes béninois ont d’excellentes capacités en informatique, pour capter rapidement les opportunités et se développer. On doit donc exploiter cette matière grise propice à l’informatique pour que le Bénin ait davantage d’ingénieurs. C’est un peu ce que l’Inde a fait.
Voyez un pays comme l’Inde; ils se sont donné une période de 5 à 10 ans pour former beaucoup de jeunes ingénieurs, afin de les envoyer dans le monde. Ils ont lancé le pari et ils ont formé beaucoup de jeunes Indiens dans tous les domaines de l’informatique. Pendant que la jeunesse africaine essaie de trouver des solutions pour émigrer vaille que vaille, au prix parfois de leur vie, certaines entreprises des pays développés négocient avec le gouvernement indien pour que chaque année, il y ait un contingent de jeunes qui puissent venir dans leur pays. C’est dire que là, ils sont demandeurs. C’est une politique d’immigration intéressante où ce n’est pas l’Inde qui expose ses jeunes aux aléas d’une immigration irrégulière et dangereuse ; mais au contraire, ce sont les acteurs économiques des pays occidentaux qui demandent à recevoir les jeunes dans tel ou tel domaine ; il ne s’agit pas ici de fuite de cerveaux, mais d’une politique d’immigration concertée et innovante, qui consisterait à former les jeunes dans les domaines où les autres sont demandeurs. Ainsi, les pays d’accueil feraient ce qu’il faut pour mettre nos jeunes dans de meilleures conditions et ces jeunes pourraient aller et revenir comme ils le souhaitent, selon une formule de migration dite circulaire.

Quelle appréciation faites-vous de tout ce qui se met en place pour le développement du numérique au Bénin et quelles sont les actions que vous pouvez apporter pour maintenir la dynamique ?
Depuis 2016, effectivement, nous constatons que le gouvernement fait beaucoup d’efforts dans le domaine du numérique. Des efforts innovants dans un contexte de réformes mises en place. Je voudrais rappeler qu’il y a déjà quelques années que nous accompagnons les efforts du Bénin dans sa transformation numérique. Ainsi, j’étais Directeur du numérique au sein de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), lorsqu’en 2016, nous avons accompagné l’Assemblée nationale du Bénin dans la rédaction et le vote du code du numérique, notamment à travers un séminaire que nous avions organisé pour sensibiliser et informer les députés sur les enjeux juridiques et législatifs de l’économie numérique. C’est ainsi une fierté que le Bénin soit devenu ainsi l’un des premiers pays au niveau de la sous-région à se doter d’un code du numérique. Il faut le souligner, c’est le résultat des réformes.
Par ailleurs, beaucoup d’efforts ont été faits en matière d’infrastructure haut débit, de fibre optique, d’administration électronique, de numérisation de l’administration. La délivrance d’actes en ligne et autres sont autant de réussites. Mais comme on le dit, tant qu’il y a à faire, c’est que rien n’est fait et il y aura toujours à faire. L’un des domaines où nous souhaitons encourager le gouvernement c’est de faire en sorte que le numérique soit créateur d’emplois, parce qu’une chose est de mettre en place les réformes pour faciliter l’émission d’actes d’Etat civil et d’éléments électroniques, mais il faut faire en sorte que le numérique favorise l’égalité des chances d’emploi et de réussite au sein de la population. Nous plaidons donc pour le volet social, pour que les jeunes et les étudiants aient un peu plus d’opportunités à travers le numérique. Et l’AFRIA, à travers nos discussions avec le gouvernement, contribuera à ce volet de transformation numérique, mais aussi de transformation. Par ailleurs, le volet social concerne la transformation numérique, mais aussi la plupart des secteurs qui doivent être pris en compte dans la gouvernance actuelle du Bénin.

Est-ce qu’on peut ainsi dire que notre pays dispose de moyens nécessaires pour une démocratisation de l’Intelligence artificielle ?
Sur la base des fondements que nous venons d’évoquer précédemment, nous pensons que le Bénin peut construire le numérique comme une maison et en élever progressivement les murs. Le Bénin dispose des atouts nécessaires pour développer une stratégie efficace d’intelligence artificielle. La preuve, nous avons appris que le ministère du numérique est en train de s’organiser pour commencer les études en vue de l’adoption d’une politique nationale en la matière. L’AFRIA est disposée à accompagner le ministère et le gouvernement béninois dans l’adoption de cette politique nationale de l’Intelligence Artificielle.

Le Bénin envisage de créer une école numérique et même de la fibre optique. Vous pensez que l’AFRIA peut fortement aider le gouvernement dans ce cadre?
Nous félicitons d’abord le gouvernement pour cette initiative parce que la formation demeure la base. Et l’AFRIA a effectivement travaillé avec des partenaires qui ont des projets dans ce domaine. Nous avons actuellement un projet dans ce domaine dont nous avons discuté avec l’Agence de Développement du Numérique (ADN). C’est un projet de formation en entrepreneuriat numérique pour créer une école afin de former 300 jeunes par an. Surtout une école qui ne demande pas grand-chose à ses apprenants et qui vous permet d’être formé à partir du niveau où vous êtes. Nous vous mettons à niveau pour que vous puissiez effectivement rejoindre cette école de l’entrepreneuriat numérique, qui pourrait être un excellent complément de ce que fait le gouvernement dans ses projets afin que le Benin soit un pays pilote de l’AFRIA. Nous travaillons avec le ministère, nous travaillons également avec la Fondation Adrien Houngbédji pour le numérique et ce qui reste à faire c’est de signer des conventions de partenariat, pour que cette collaboration dynamique se matérialise de façon substantielle et juridique.

Et selon vous, quels sont les défis à relever pour une meilleure politique du numérique au Bénin?
Nous avons trois défis. Le premier défi est de faire en sorte que la politique numérique du Bénin ait comme base la jeunesse pour qu’il y ait de l’emploi et des opportunités, quelque chose auquel tous ont accès, sans distinction d’origines sociales et de genre. Il faut que le numérique contribue à l’égalité des chances pour que l’enfant dont les parents n’ont pas assez de ressources puisse accéder au numérique, aux opportunités et créer ses propres emplois et s’enrichir. Cela permet l’ascenseur social. Il faut que le Bénin gravisse les échelons économiques, technologiques et sociaux grâce au numérique et c’est ce que nous voulons contribuer à faire du Bénin.
Donc l’un des défis est de démocratiser le numérique en le rendant accessible aux personnes qui n’ont pas assez de ressources. Le deuxième défi est juridique. Dans ce sens, nous souhaitons que le numérique puisse permettre aux populations d’accéder à leurs droits. C’est-à-dire que le numérique permet aux femmes de se révéler et aux jeunes réussir. Grâce au numérique, il faut que chaque Béninois connaisse les lois de son pays, notamment à travers le code du numérique parce que beaucoup n’ont pas accès aux lois (droits et devoirs). Le troisième défi est celui de l’alphabétisation. Dans les villages, des femmes et des hommes sont encore analphabètes. Nous souhaitons que le numérique règle complètement ce problème d’alphabétisation. Nous pouvons utiliser le numérique pour éradiquer l’analphabétisme en moins de 5 ans dans ce pays, car cela se fait ailleurs et c’est cela la puissance du numérique. On ne peut pas être au XXIème siècle et parler d’Intelligence Artificielle alors que nous avons encore des villageois analphabètes, et que le numérique peut aider à résoudre ce problème.
Est-ce que l’Intelligence Artificielle peut se mettre au service de nos institutions chargées d’organiser l’élection au Bénin?
Il y a des exemples aux États-Unis où l’Intelligence Artificielle permet de faciliter certaines situations comme celui du vote à distance ou à domicile. Avec des logiciels, vous pouvez rester chez vous et exprimer votre suffrage de façon sécurisée sans forcément vous déplacer sur le lieu du vote. Ce sont des programmes en expérimentation, mais en le faisant il faut en même temps avoir les lois qui l’accompagnent pour que cela soit validé. Vous pouvez voter chez vous avec une application. Donc avec l’Intelligence Artificielle, les potentiels sont infinis.

A l’occasion des dernières élections professionnelles au niveau des syndicats, comme les élections consulaires, les élus consulaires ont fait un vote électronique où même les syndicats ont mené une forte résistance, mais finalement ce sont ceux qui s’opposaient à ce vote qui sont sortis vainqueurs. Pensez-vous que cette expérimentation peut être implémentée dans le domaine politique avec les élections communales ou présidentielles au Bénin ?
C’est possible. Nous devons d’abord féliciter la Chambre de Commerce et d’Industrie du Bénin (CCIB) qui a testé avec succès cette expérience de la digitalisation. C’est une étape vers la numérisation des élections au Bénin. Donc l’élection par les voies électroniques paraît inévitable et se généralisera progressivement dans le monde politique. Il suffit d’adapter la loi pour dire que le citoyen depuis chez lui avec son smartphone peut exprimer son suffrage et cela arrive dans les serveurs pour être comptabilisé comme un vote normal. Cela doit réduire les déplacements des populations surtout en période de crise sanitaire, la célérité dans le traitement des résultats et même la fraude.

Est-ce qu’un politicien au lieu d’être sur le terrain, peut, à travers les réseaux sociaux accroitre sa popularité en période électorale ?
En fait, il ne faut pas confondre le virtuel et le réel. Comme l’a dit l’autre, «la politique ne se fait pas en haut ». De la même façon, le développement, ne se fait pas uniquement sur WhatsApp. Le politicien doit être sur le terrain, poser des actes, impacter sa base ou ses populations pour plus de visibilité. Il y a le fait qu’on puisse exprimer ses opinions sur les réseaux sociaux, passer des informations, mais le vrai travail se fait sur le terrain avec l’électorat. A travers les groupes WhatsApp, certains se montrent très actifs ; mais il faut également convaincre le citoyen avec un projet de société. Il faut travailler sur le terrain pour que les populations soient convaincues. Il faut aussi remarquer que sur les réseaux sociaux, il y a des incitations à la violence. Le code du numérique est clair là-dessus et il faut éviter les propos injurieux, invitant à la violence, les propos racistes, le régionalisme, les propos séditieux etc. Juste pour dire que le numérique est un support, mais l’humain reste humain. Maintenant, il faut que l’humain utilise le support à bon escient pour que l’outil qu’est le numérique contribue au bien public plutôt qu’à la destruction.

Le Bénin investit dans le numérique et souhaite que cet outil accompagne son développement à une période où son économie est essentiellement basée sur l’agriculture encore à l’étape traditionnelle. Comment opérer ce changement ?
C’est une excellente question et pour vous répondre, je vous dirai que le Bénin n’a pas le choix. Avec le numérique, le monde est devenu un village planétaire. Le numérique intervient dans tous les domaines aujourd’hui même dans l’agriculture. Donc nous ne pouvons pas rester indéfiniment dans l’agriculture traditionnelle et ignorer ce qui se fait au niveau du monde, au risque de laisser nos enfants et petits-enfants démunis. C’est comme le développement industriel. Nous avons raté la révolution industrielle et aujourd’hui, nos populations sont considérées comme sous-développées parce qu’on n’a pas su créer la richesse au moment de la révolution industrielle. L’électricité est un fruit de la révolution industrielle, ainsi que l’eau potable, les appareils électroménagers, les voitures, etc. Donc, nous sommes des consommateurs parce qu’au XIXème siècle, nous n’avions pas pu prendre le pas. Ce sera pareil si nous ne prenons pas le pas maintenant avec la révolution numérique du XXIème siècle. Nous courrons le risque de rester d’éternels consommateurs, alors que nous ne sommes pas moins intelligents, mais moins bien organisés, moins entreprenants, moins méthodiques, etc.
Donc, c’est maintenant que nous devons prendre le pas et ce qui est intéressant, c’est qu’avec le numérique, pas beaucoup d’investissements nécessaires. Vous pouvez en ligne, suivre la même formation dans une université qu’une autre personne en France, aux Etats-Unis, au Canada, etc. Par exemple, il suffit d’aller sur internet, de cliquer sur Google et beaucoup d’informations et de formations apparaissent, en fonction de votre recherche et de vos centres d’intérêt. On peut avoir aujourd’hui des méthodes de formation pour lesquelles avant, il faudrait d’abord prendre un avion, aller s’inscrire dans une université à Harvard, faire neuf mois, un an, plusieurs années, alors que maintenant, depuis chez vous, avec une bonne connexion internet, vous pouvez sur internet chercher et trouver ce que vous voulez. Donc, nous n’avons pas le choix si nous voulons évoluer avec le monde.

Quels sont les moyens de l’AFRIA pour accompagner les jeunes aujourd’hui dans la formation sur le numérique ?
Les moyens existent. C’est d’informer, de sensibiliser les élèves et les étudiants de ce que l’information est à leur portée. Que tout est en ligne et que l’intelligence artificielle n’est plus un secret. Comme je le disais tantôt, la formation n’est plus seulement dans les quatre murs d’une salle ou d’un amphithéâtre. Aujourd’hui, c’est ce qu’on appelle la formation tout au long de la vie. En Anglais, on parle de « long life learning ». Vous pouvez être à Agbangnizoun, à Savè, Parakou etc., une fois que vous avez une connexion internet, vous pouvez vous former au même niveau que l’étudiant de l’université de Harvard parce que les universités maintenant mettent leurs cours en ligne et c’est à la portée de tous. On doit alors s’estimer heureux de vivre pendant cette période alors qu’avant, il fallait beaucoup de formalités, beaucoup d’argent alors qu’actuellement, pour la même formation, on peut l’avoir gratuitement. Vous allez constater que beaucoup de jeunes sont devenus des spécialistes dans certains domaines sans suivre une longue scolarité. Ils ont appris des choses complexes par internet.

Faut-il faire les mathématiques pour être intelligent en intelligence artificielle ?
C’est une excellente question. On n’a pas besoin de faire les mathématiques. C’est vrai qu’aujourd’hui il y a de moins en moins d’étudiants en mathématique. Mais, il y a un langage de programmation qu’on appelle Python. Ce langage n’a pas besoin d’un grand niveau en mathématique. Par contre, celui qui veut enseigner la programmation doit bien entendu avoir de bonnes notions en mathématiques. Celui qui veut juste utiliser n’a pas besoin de toutes ces formations parce que ça a été déjà préprogrammé. C’est comme la création de sites internet, qui demandait autrefois la maîtrise des langages et du codage HTML. Aujourd’hui, vous n’avez pas besoin d’être spécialiste avant de créer une page ou un site web. On parle de la société de l’information et de la connaissance. La connaissance n’est plus un problème de nos jours. Mais, nous devons nous organiser pour puiser ces connaissances. Grâce à internet, on peut mettre en place des centres technologiques pour créer des applications, des jeux… Même pour créer des usines, il y a des plans et stratégies en ligne. Il suffit d’avoir la volonté et un peu de ressource. Un étudiant en fin de formation en agronomie peut créer sa propre usine de transformation de tomate ou de noix de cajou tout en ayant les informations et plans sur internet. C’est comme ça que certains pays qui ont vite compris sont devenus meilleurs en technologie. Il faut avoir de la vision.

Vous êtes rentré au pays tout récemment. Qu’avez-vous remarqué à votre descente à l’aéroport et dans le pays ?
Le pays se développe. J’ai remarqué qu’il y a un vrai changement en matière d’infrastructure. Il serait honnête et équitable de féliciter le gouvernement pour l’effort qui est fait. Surtout dans les rues secondaires des quartiers réputés pour être des lieux d’inondation. Je veux citer par exemple, Agla, Akogbato etc. Il faut être objectif, il y a de façon visible du progrès, des résultats et aussi des défis à relever.

Vous êtes un Béninois de la diaspora. Mais ce n’est pas ce qu’on entend dire à Paris….
Nous les invitons à prendre l’avion pour venir constater et se faire leur propre opinion.

C’est de la politique que vous faites ou bien c’est la réalité ?
Le changement est visible. C’est vrai que, de mauvaise foi, certains vous diront que les routes et les pavés ne se mangent pas, mais il ne faut pas oublier qu’on a besoin de routes et de pavés pour rentrer chez soi en sécurité et en bonne santé.

Vous avez suivi de loin la gouvernance du Président Talon. Quelle appréciation faites-vous de ce quinquennat qui s’achève ?
Dans l’ensemble, comme je viens de le dire, les progrès sont appréciables. Il y a des réformes qui portent leurs fruits et d’autres pas encore. De façon objective, nous pouvons suggérer que ces réformes puissent contribuer à davantage de création de richesses et de répartition en faveur du panier de la ménagère. Je sais que c’est aussi une préoccupation du Président de la République et de son gouvernement. En effet, ce dernier a voulu d’abord assainir les recettes publiques et instaurer une gestion plus rigoureuse des finances publiques. Maintenant, le souhait des populations est que le résultat de ces réformes puisse être de plus en plus largement partagé par les Béninois, notamment les plus pauvres. Nous souhaitons que les prochains mois puissent donner l’occasion de la mise en œuvre d’une politique économique plus généreuse, pour que les Béninois sentent que les sacrifices consentis commencent à porter des fruits dans leur vécu quotidien et dans la satisfaction des besoins fondamentaux des familles.

Ça vibre fortement dans les réseaux que nous sommes dans un pays de dictature. Vous êtes venus faire le constat ?

Nous sommes en démocratie et c’est normal que les gens expriment leur point de vue. Ils expriment leur état d’âme. Aujourd’hui, il est clair qu’il y a une nouvelle façon de gouverner le pays, plus rigoureuse et plus cartésienne. Il y a une nouvelle façon de conduire les affaires de l’Etat à laquelle les gens n’étaient pas habitués. Et cette nouvelle gouvernance peut être diversement appréciée. Nous pensons que pour qu’un pays se développe, des réformes, des sacrifices et des efforts sont nécessaires, de la part des populations et des dirigeants. Les pays développés ont dû faire ces efforts pour se retrouver là où ils sont. Cependant, une fois que ces efforts ont été consentis, il serait juste et équitable qu’ils bénéficient au plus grand nombre.

Carte d’identité: Un militant et un professionnel

Décembre 1973. Eric Adja naît dans une petite localité de l’ouest de la Côte-d’Ivoire, de parents béninois émigrés là-bas. Il passe ainsi l’essentiel de son cursus scolaire en terre ivoirienne. CEP en 1985, BEPC en 1989, Bac C en 1992. De 1992 à 1996, il poursuit ses études au Département des sciences du langage et de la communication (DSLC) de l’Université d’Abomey-Calavi et soutient en 1997 son mémoire de maîtrise à cheval entre la Belgique et le Bénin, grâce à une bourse de l’Agence universitaire de la Francophonie. Mais avant, en avril 1996, pendant son année de licence, il est élu président de la Fédération nationale des étudiants du Bénin (Fneb), le principal syndicat universitaire d’alors. Après la maîtrise, et toujours grâce à la Francophonie, il est retenu en 1998 pour un Diplôme d’études approfondies (DEA) en Information scientifique et technique (IST) en co-diplomation entre Genève en Suisse et à Marne-la-Vallée en France. Recruté en 2001 comme directeur d’une Organisation internationale non gouvernementale dénommée Innovations et Réseaux pour le Développement à Genève, il y travaille tout en préparant sa thèse de Doctorat décrochée en novembre 2005 à l’université de Paris 7 Denis-Diderot en France. Elle portait sur une étude ethnolinguistique de la transmission des savoirs par la médiation des proverbes chez les Fon du Bénin. L’année suivante, en 2006, Docteur Eric Adja est appelé à travailler à la Fédération internationale de la Croix rouge à Genève et au Bureau de Cotonou. Quelques mois plus tard, en juillet 2007, l’ancien Chef de l’Etat lui fait appel au Palais de la Marina comme Assistant du Président de la République avec rang de Conseiller technique, président du Comité de suivi des recommandations du Forum national sur l’emploi des jeunes et point focal Diaspora à la Présidence de la République. Ces responsabilités l’ont amené à préparer à distance un Master en Gouvernance et développement international (GODI) obtenu en 2010 à l’Université Pierre Mendès-France de Grenoble. C’est en décembre 2011 qu’il a été nommé Directeur général par intérim de l’Observatoire international des transferts de fonds des migrants (OITFM), un organisme rattaché au Bureau mondial de coordination des pays les moins avancés (PMA) auprès des Nations unies à New-York. A partir de 2007, il donne des cours en tant qu’enseignant-chercheur à l’Université d’Abomey-Calavi et intervient également au CNRS (Paris). Nommé au poste de Directeur de la Francophonie numérique en novembre 2014 par Abdou DIOUF, il a travaillé pendant plusieurs années à mettre en œuvre la stratégie de la francophonie numérique adoptée par les Chefs d’Etat au sommet de Kinshasa, en 2012. Intitulée « Horizon 2020 : Agir pour la diversité dans la société de l’information », cette stratégie visait à rénover la vision francophone dans le domaine des technologies de l’information et de la communication, notamment à travers l’innovation de l’économie numérique, de la jeunesse et de l’entrepreneuriat. En mars 2017, il est nommé par l’ex-Secrétaire Générale de l’OIF, Michaëlle Jean, Directeur du Bureau Régional pour l’Afrique de l’Ouest à Lomé (BRAO). Le BRAO couvre 12 pays (Bénin, Burkina Faso, Cap Vert, Côte d’Ivoire, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et Togo.). En 2019, il prend la tête de l’Agence Francophone de l’Intelligence Artificielle (AFRIA). Mais ce riche parcours professionnel a été entrecoupé d’un engagement politique. Elu Conseiller communal de Toffo et Chef de l’Arrondissement de Sèhouè en 2008 sous la bannière des FCBE, il conserve un ancrage dans sa commune, malgré ses responsabilités internationales. « J’ai eu la grâce de rencontrer sur mon chemin des hommes et des femmes qui ont eu confiance en moi et qui m’ont aidé », déclare Eric Adja, reconnaissant, avant d’ajouter : « J’ai connu également de grandes difficultés et des échecs. Mais par la foi, la prière et le travail, je les ai surmontées. » Quand on lui demande les raisons de son engagement politique, il rappelle ses longues années de militantisme au sein d’associations de jeunes, dans le scoutisme, à la Croix Rouge et au sein de la FNEB. Et d’avancer : «Pour moi, s’engager en politique, c’est apprendre à aider davantage son prochain, parce que j’aime servir les autres.»

Intimité: Père attentionné au goût culinaire sobre

Marié et père de trois enfants, Docteur Eric Adja apprécie surtout chez son épouse sa forte conviction. « C‛est vrai qu‛il n’y a pas que cet aspect qui m‛a séduit, mais cela a compté pour moi », affirme-t-il tout sourire. Athlétique, il dit tenir sa forme de feu son père qui fut chef d’une exploitation forestière en Côte-d‛Ivoire. Ses goûts de table sont simples : igname pilée avec sauce d’arachide, accompagnée d’un bon jus d‛ananas frais et d’eau gazeuse. « Pour ce qui est de la bière, du vin ou du champagne, je me contente du service minimum », dit-il.

LA REDACTION

La Ministre de L’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, Eléonore Yayi Chikani Ladékan « Sous L’Arbre à Palabre » à L’Evénement Précis : « Beaucoup de réformes courageuses et indispensables ont été faites »

Views: 19

Eléonore Yayi Ladékan, Ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique

La Ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique, Eléonore Chikani Yayi Ladékan était Sous l’Arbre à Palabre ce 03 avril 2021. Les échanges ont permis de faire le bilan des avancées enregistrées dans ce sous-secteur au cours du quinquennat de Patrice Talon. Les questions liées aux conditions de vie des étudiants, aux élections rectorales et à l’adéquation de la formation avec les demandes des entreprises n’ont pas été occultées.

Et si on en parlait

Madame la Ministre, qu’est-ce qui peut nous permettre aujourd’hui de dire que l’enseignement supérieur et la recherche scientifique se portent mieux qu’il y a cinq ans ?
Nous sommes dans un secteur stratégique pour le chef de l’État, le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique. C’est un secteur qui forme les cadres de l’administration. Il occupe le pilier 2 et l’axe 5, le pilier 2 qui est la restructuration de l’économie à travers la formation des ressources humaines de qualité. Il faut aller méthodiquement pour voir ce qu’on a fait. Nous avons deux domaines : le domaine de l’enseignement, l’autre la recherche scientifique et les innovations. Dans l’enseignement, nous avons quatre programmes. Le premier est celui qui s’occupe du pilotage du secteur, le deuxième de l’enseignement, le troisième de la recherche et le quatrième le social (la vie de l’étudiant).
Beaucoup de choses ont été faites. C’est un secteur vaste au point où tout n’est pas visible.
La première réforme est celle de la restructuration de la carte universitaire publique faisant ainsi passer le nombre d’universités publiques de sept (7) à quatre (4). C’est la première réforme qui n’a pas du tout été facile. Chacun selon ses intérêts, selon sa région veut quand même une université dans sa région. Parce qu’effectivement, il faut le reconnaître, l’université est un pôle de développement. Lorsqu’une région reçoit une université, la région là peut se développer très rapidement. C’est normal qu’il y ait des réticences au niveau des régions dans lesquelles on devrait fermer ces universités. Ça n’a pas été facile avec les élus, les députés, les parents, les apprenants et même les enseignants. Nous avons désormais quatre universités : Deux universités pluridisciplinaires (Abomey-calavi au Sud et l’Université de Parakou au Nord) et deux universités thématiques (l’Université nationale des sciences et technologies industrielles et de mathématique à Abomey et l’Université nationale d’agriculture). Ainsi les recrutements sont faits au profit des universités pour mieux stabiliser le mouvement un peu coordonné des enseignants d’une université à une autre sans nécessairement épuiser les quotas horaires. Cela générait également des frais de missions assez colossales sur les ressources limitées des universités.
En dehors de ça, nous avons des produits qui sortent du système et qui aujourd’hui sont de plus en plus critiqués par les entreprises. Elles estiment que ces produits ne sont pas suffisamment qualifiés pour leurs besoins. Cela nous amène à faire des réformes pour arrimer le type de formation aux besoins des utilisateurs de nos apprenants.
Nous avons aujourd’hui et grâce à la vision éclairée du chef de l’Etat, un Conseil National de l’Education rénové, une structure transversale aux ministères en charge de l’éducation ; une instance qui a des missions d’orientation, d’organisation, de suivi évaluation et de décision. Ça également, a été une grande bataille. Nous sommes partis du constat qu’à chaque ordre d’enseignement, ses pratiques et en même temps ses conséquences qui ne restent pas nécessairement au niveau de cet ordre d’enseignement mais qui se répercutent sur d’autres. Il y avait un conseil de l’éducation bien avant. Ce conseil a fait ce qu’il pouvait dans le temps, mais était confronté à des difficultés de taille. Avec l’avènement de la Rupture, il y a eu une restructuration afin que ce conseil ait des missions précises et les moyens de pouvoir assurer correctement ses missions. Le CNE est installé et travaille correctement. À partir de ce moment-là, il n’est plus question de prendre des textes isolés. Aucun texte ne sera pris dans un ordre d’enseignement sans que cela ne reçoive la validation du CNE. Pareil pour le mouvement des personnes, c’est-à-dire les nominations de cadres. On peut aussi ajouter qu’au niveau de la gouvernance, le CNE aura un œil sur les responsabilités au niveau des entités, l’application des textes. Il y a tellement de réformes que je peux continuer à en citer.
L’autre réforme importante, c’est le mode de recrutement. En effet le mode de recrutement a connu une modification et s’est ouvert à tous les Béninois où qu’ils se trouvent. Une phase de présélection suivie d’un entretien devant un jury. Ainsi, 279 assistants recrutés dont 95 en 2016 et 184 pour le compte des années 2017 et 2018. Le processus enclenché en 2018 pour le compte de 2019 a été rattrapé par un certain nombre d’irrégularités qui expliquent la revisitation de tout le processus pour le débarrasser de toute subjectivité et opacité. Dès lors que le processus est transparent, les ressources seront aisément mobilisées avec un impact plus important.

Chaque année il y a des départs massifs à la retraite dans les universités publiques mais les recrutements d’enseignants se font rares depuis 2018. Ne craignez-vous pas une asphyxie de nos universités avec des formations bâclées ?
C’est vrai que les départs massifs à la retraite créent un problème de formation de relève de qualité et en même temps de projections mal faites en vue d’une bonne anticipation. Cependant les diligences ont été faites avec la décision de reclassement des enseignants promus au CAMES en 2019 et en 2020 afin de les maintenir un peu plus au poste en attendant la mise en place très prochainement de dispositifs structurant pour le recrutement d’assistants et la constitution d’une base de ressources humaines à consulter en cas de besoin pour éviter de telles déconvenues à l’avenir.

Et c’est ça qui amène à l’aspiranat?
L’aspiranat est destiné à identifier ceux qui aspirent réellement à cette fonction d’enseignant. C’est pour dire qu’il adresse ceux qui aiment réellement l’enseignement et qui ne veulent pas l’exercer de façon accidentelle. On ne devient pas enseignant du supérieur parce qu’on a son doctorat mais plutôt parce qu’on aime enseigner car c’est un sacerdoce et une grande responsabilité de former quelqu’un ! Préparer son cours, l’actualiser régulièrement en se documentant n’est pas chose facile surtout avec le développement des TIC et le faire pour le rendre intéressant pour les apprenants est une chose extraordinaire qui n’a pas de prix. On le fait parce qu’on aime la chose.

Quelles sont les autres réformes que vous avez menées ?

Aujourd’hui, grâce à une bonne gestion des perturbations créées par le COVID19 dans le déroulement du calendrier académique, nous avons mis en place la plateforme e-learning qui a été d’un grand recours durant la période critique. Inutile de vous rappeler que le Bénin est l’un des rares pays africains à avoir pu organiser les examens et finir l’année universitaire en beauté.
Je pourrai aussi vous ajouter que depuis que nous sommes là nous avons procédé:
au renforcement du dialogue social entre les différents acteurs et à la définition d’un cadre cohérent et équitable pour la gestion des affaires disciplinaires ;
à la mise en place des organes de contrôles et d’orientation tels que des conseils d’administrations (UNSTIM, UNA,) ; comité interministériel d’audits et des gestions des risques ;
à la revue du processus de recrutement des assistants et de promotion des enseignants admis au CAMES ;
à la construction et à l’équipement d’importantes infrastructures administratives et pédagogiques et laboratoires au profit des quatre universités publiques (8 amphis, 8 laboratoires, 7 blocs administratifs, et 03 écoles types) . Au total plus de 7 110 places assises déjà mises à dispositions dont 1650 à l’UAC, 1160 à l’UP, 3300 à l’UNA et 1000 à l’UNSTIM.
la connexion de 10 centres universitaires grâce au Réseau Béninois d’Enseignement et de Recherche RBER, avec l’appui du Ministère du numérique et de la digitalisation, et l’adhésion du Bénin au réseau WACREN qui permet d’être en liaison avec les grandes universités au plan mondial en rendant facile la consultation des bases de données, les bibliothèques numériques, etc.
la mise en route de trois centres d’excellence sur financement du Bénin et de la Banque Mondiale après une compétition internationale ;
la transformation digitale (dématérialisation et numérisation) de plusieurs services et procédures pour l’office du BAC, les examens et concours au niveau de la DEC , etc.
C’est dire que beaucoup de choses prouvent à suffisance que l’enseignement supérieur se porte mieux qu’en 2016.

Vous avez institué les examens nationaux de Licence et de Master pour les établissements privés d’enseignement supérieur. Pourquoi une telle option ?
Nous avons fait cette option parce qu’avant c’était la co-signature, et à un moment donné on a estimé qu’on prenait trop de risques. On ne peut pas continuer à cosigner ce qu’on ne maitrise pas. D’où l’idée d’organiser les examens nationaux pour pouvoir contrôler désormais la qualité des apprenants formés par les EPES. Et aujourd’hui ça marche. Après trois ans de mise en œuvre desdits examens, nous sommes passés à leur pérennisation, tout en continuant d’accompagner les établissements privés performants à aller à l’homologation de leurs diplômes.
Il faut aussi préciser que nous avons procédé à :
la prise des mesures institutionnelles pour la pérennisation desdits examens
l’actualisation de l’architecture des «Diplômes Nationaux» en conformité avec le LMD et pour la sécurisation ;
la poursuite du processus d’assainissement des établissements privés de l’enseignement supérieur (EPES) notamment
Signature de 19 agréments aux EPES ;
Signature de 9 502 attestations dont 8 635 pour la Licence et 867 pour le Master pour les années académiques 2016-2017 ; 2017-2018 ; 2018-2019 au profit des candidats admis pour les examens nationaux ;
15 EPES ont reçu un avis favorable pour l’agrément et pour lesquels l’enquête de moralité est en cours.

Le privé intervenait également pour accompagner le public. Depuis longtemps ces universités privées travaillent de façon isolée. C’est-à-dire que le ministère central n’a pas un œil assez critique dans ce qui se fait dans les privés. Mais il faut reconnaitre que certains établissements privés disposent de matériels et équipements plus importants que ceux des établissements publics, et par contre les enseignants proviennent en général des universités publiques : d’où la complémentarité de qualité qu’il faut rechercher entre le privé et le public. La recherche de qualité qui motive l’organisation de ces examens sera étendue aussi aux établissements publics.

Quelles sont aujourd’hui les grandes conclusions qu’on peut tirer de ces examens ?
Les examens ont été un succès parce qu’ils ont permis à beaucoup de Béninois d’avoir un diplôme reconnu. Avec ce diplôme, ils ont pu passer des tests et concours sans que rien ne leur soit reproché. Avant, les diplômes des EPES sont soumis à l’équivalence de diplômes, ce qui créait beaucoup de désagréments. Maintenant une fois que c’est un examen national reconnu par l’Etat central, vous n’avez plus besoin de recourir à une équivalence. Cette réforme a permis de déceler des établissements clandestins ou irréguliers qui délivrent des attestations qui ne seront jamais reconnues par l’Etat, alors que les parents n’en savent rien. Maintenant la publication des établissements agréés est faite pour éclairer les parents dans les choix des établissements à leurs enfants. Il faut reconnaitre le travail important et complémentaire que font ces privés aux côtés des établissements publics qui ont une capacité d’accueil assez limitée.
En termes de grandes conclusions, nous pouvons dire que les EPES ont compris l’enjeu de ces examens et accompagnent très bien le processus.

Avec la pandémie du Coronavirus, le E-Learning s’est accéléré. Comment a été conçu le projet ?
La pandémie n’a pas pu écarter le secteur de l’éducation. Le gouvernement a permis aux étudiants de terminer l’année et ceux qui ont fini très vite ont pu bénéficier des opportunités de bourses. Nous avons pu mettre en place ce dispositif grâce au leadership et à l’appui du chef de l’Etat son excellence le président Patrice TALON qui a instruit le Ministre du Numérique et de la digitalisation et moi aux fins de procéder dans un bref délai à la mise en place de cette plateforme pour permettre la poursuite des cours à distance pour les entités à gros effectifs afin d’éviter la propagation du virus. Nous avons réussi à installer ce dispositif qui nous a beaucoup aidé. Cependant les gouvernement grâce à l’appui de l’AUF se penche déjà sur la recherche des poches d’exclusion que cet outil pourrait induire dans sa mise en œuvre. Cela nous permettra de trouver des solutions durables aux difficultés d’accès des bénéficiaires.

Mais les étudiants ont organisé des grèves !
Ils ont effectivement fait des grèves sur un mois. La communication et le dialogue n’étaient pas difficiles à établir. Nous avons donné des instructions aux autorités universitaires et aux enseignants pour s’asseoir pour se comprendre. Ce n’était pas uniquement le E-learning qui était le problème. C’était un ensemble de malaises. Il s’agit également du retard dans la délivrance des actes administratifs, les frais de sorties pédagogiques…Ils n’étaient pas informés eux-mêmes. Avant, on n’avait pas autant d’étudiants. A l’UAC, on avoisine 80000. Quand on prend toutes les universités, c’est autour de 100.000. C’est normal que les grilles des tarifs pratiqués connaissent de modification mais cela ne devrait pas se faire à l’insu des bénéficiaires que sont les étudiants.

Néanmoins, sa mise en œuvre a été confrontée à beaucoup de difficultés, notamment l’indisponibilité de la connexion internet à haut débit. Comment y avez-vous remédié et quels sont les défis liés à ce service ?
Oui vous savez le début de toute chose est difficile. Il fallait tenir compte de ce que tous les apprenants ne disposent pas de moyens pour se connecter tout le temps. Tous n’ont pas d’ordinateurs ou de smartphone pour pouvoir suivre ses cours à distance. Bref ils n’étaient pas tous habitués à suivre les cours par visioconférence. Les enseignants non plus n’étaient pas tous suffisamment outillés pour faire les cours à distance. Nous avons compris très vite cela, et avec la collaboration des réseaux GMS, nous avons mis en place le zéro rating pour les apprenants pour leur permettre de se connecter à zéro franc. Le Ministère du Numérique et de la digitalisation à ouvert ses points numériques communautaires aux étudiants de certaines localités pour leur de se déplacer pour suivre les cours dans ces centres. Toujours pour faciliter les échanges, nous avons initié plusieurs formations à l’endroit des enseignants et des points focaux ceci pour leur permettre de mieux exploiter la plateforme.
Mais nous sommes conscients des difficultés actuelles des étudiants et des enseignants et c’est pourquoi la décision de revenir au cours en présentiel dans le respect des mesures barrières est prise par le gouvernement afin de s’assurer que les étudiants reçoivent la formation équitable. Cette mesure a été suivie d’un accompagnement du gouvernement à travers la décision du gouvernement de payer les heures supplémentaires dûment générées par la constitution de plusieurs groupes pédagogiques du fait du respect des mesures de distanciation dans les amphi.

Votre département a organisé récemment une réflexion sur le problème de l’inadéquation entre la formation et l’emploi. Quelles sont les pistes d’actions qui en sont issues ? Le système LMD qui professionnalise la formation impose que des professionnels eux-mêmes viennent animer ces formations. On les implique dans les curricula de formation.

Effectivement les 25 et 26 février 2021, nous avons organisé au Novotel Orisha de Cotonou, la table ronde de réflexion entre universités, entreprises et décideurs sur le thème : « Formation et employabilité au Bénin et dans la sous-région ». Le principal objectif de cette grande rencontre est d’évaluer l’efficacité externe des offres de formations universitaires béninoises et de la sous-région. Plus spécifiquement, il s’est agi de :
identifier les causes liées à l’inadéquation formation-emploi au Bénin et dans la sous-région ;
sensibiliser les acteurs des Universités sur les besoins et les priorités du secteur privé et des décideurs ;
inventorier les nouveaux métiers à l’ère du numérique et des grands projets prioritaires du gouvernement.
Pendant les deux jours, il a été clair pour tous les participants, qu’apporter des réponses aux questions de formation et d’employabilité serait une construction d’ensemble et qu’il est primordial et urgent que les trois catégories d’acteurs travaillent en synergie face aux nouveaux défis de développement. Pour cela, il va falloir définir des passerelles de collaboration très précises. Ainsi des séries de recommandations ont été adressées aux universités, aux acteurs du secteur privé et enfin aux décideurs.
Pour que les universités béninoises jouent pleinement leur rôle dans le nouveau paradigme et face aux nouveaux enjeux de développement, elles ont fortement besoin d’être accompagnées par les décideurs et les acteurs du secteur privé. Ces universités doivent, entre autres :
oser remettre en cause la mise en œuvre de certaines filières (faire une pause ou les améliorer) ;
donner la priorité aux formations techniques et professionnelles en qualité et en quantité ;
concevoir les curricula de formation en tenant compte des besoins de main d’œuvre de notre économie ;
être impliquées dans le système d’orientation des élèves au niveau du secondaire, tout au moins ;
promouvoir des formations à la carte et des formations en alternance ;
intégrer des valeurs dans le système éducatif pour la transformation de l’être en s’inspirant du modèle « Déprogrammation-Reprogrammation et connexion à l’intelligence et à l’innovation entrepreneuriale de l’UAC ;
mettre en place des offres qualifiantes de court terme sous forme de certificat ;
développer des incubateurs pour former les jeunes à l’auto-emploi ;
renforcer toutes les stratégies et dispositifs d’accompagnement des apprenants pour leur insertion professionnelle et en rechercher d’autres plus innovants ;
promouvoir des offres de formation pour les métiers du digital ;
promouvoir l’intelligence artificielle, big Data, E-Learning, etc. dans le monde qui utilisent des profils tels que les littéraires, les mathématiciens, juristes, sociologues, responsable du système d’information etc. ;
opérer un choix de financement innovant (les entreprises ont un grand rôle à jouer) ;
organiser une table ronde ou un séminaire entre universitaires et les autres acteurs pour le partage d’expériences afin de construire un modèle de formation plus performant, plus dynamique et surtout en phase avec les exigences des entreprises et les orientations de l’économie nationale ;
faire un plaidoyer auprès du gouvernement pour accompagner les universités à faire face à ce changement de paradigme (financement des laboratoires, du plateau technique, des infrastructures, etc.) ;
renforcer l’intégration des universités aux réseaux internationaux de la qualité ;
ouvrir les formations universitaires aux structures nationales et internationales qui œuvrent dans le domaine du développement technologique.

En ce qui concerne les acteurs du secteur privé, nous avons noté que la création d’emploi leur incombe beaucoup plus. Pour qu’une main d’œuvre qualifiée soit disponible pour une économie de création de richesse, les acteurs du secteur privé doivent :
mettre en place des dispositifs permettant de compléter la formation initiale des diplômés issus des universités (les entreprises sont tenues de faire cette formation complémentaire, afin que cette main d’œuvre soit adaptée à leur appareil productif) ;
promouvoir la formation continue pour les employés ;
créer et développer des emplois dans les domaines prioritaires;
promouvoir les métiers du digital ;
procéder à la restructuration du secteur privé pour répondre favorablement au changement de paradigme (numérique, digital, tourisme, BTP, Energie, agriculture, etc.) ;
développer les métiers de proximité pour les jeunes (utiliser par exemple les TIC pour promouvoir le tourisme et en faire un métier, etc.) ;
œuvrer pour la formation des employeurs afin de les doter des capacités de négociations avec les partenaires internationaux ;
développer le marché des industries culturelles et créatives qui utilisent également une diversité de compétences (psychologie, informatique, etc).

Les décideurs (Etats, structures publiques parapubliques, les collectivités locales, les partenaires techniques et financiers, etc.) ont un rôle privilégié à jouer aux côtés des universités et du secteur privé dans la lutte contre le chômage et le sous-emploi. En effet, pour un système adéquat de formation et d’employabilité, il faudrait transformer l’économie de redistribution en une économie de création de richesse.

Pour y arriver, les décideurs doivent :
créer un cadre de concertation regroupant tous les acteurs chaque année, par exemple avant la fête du 1er mai (A l’ occasion de ces rencontres, il sera question d’identifier des besoins des universités et des entreprises compte tenu du dynamisme de l’économie) ;
capitaliser toutes les stratégies de réussite au Bénin et dans la sous-région en termes d’employabilité des diplômés d’enseignement supérieur (approches par le développement local, centre d’affaire des jeunes, les chaines de valeur, les incubateurs, Leadership Talk Séries, etc.) ;
promouvoir l’investissement dans l’enseignement supérieur et spécifiquement dans la recherche & développement et les formations professionnelles et techniques ;
repenser le système d’orientation des élèves depuis le secondaire
capitaliser l’existant en termes de formations professionnelles et techniques dans les universités (SEME-CITY, Universités thématiques, les écoles, etc.) ;
créer un cadre institutionnel (Conseil d’Administration, observatoire National de l’emploi et de la formation, plateforme, etc.) de collaboration dont les modalités de création et de fonctionnement seront définies ;
promouvoir la transformation digitale ;
renforcer et améliorer (capitaliser) tous les dispositifs existants dans les universités;
mettre en œuvre un système d’information sur le marché du travail ;
mettre en place un plan Marshall pour l’enseignement supérieur ;
poursuivre et renforcer la mise en œuvre des politiques et programmes de développement du gouvernement pour régler les problèmes de main-d’œuvre qualifiée (financement des infrastructures de formation, de la formation des formateurs, etc.) face au changement de paradigme ;
mettre en place des stratégies ou des dispositifs pour la reconversion des stocks de diplômés, non encore utilisés par l’appareil productif de notre économie.

Les participants ont souhaité que le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique (MESRS), en collaboration avec les autres acteurs, élabore un plan d’actions et de suivi des recommandations de la table ronde.

Depuis votre nomination en septembre 2019, vous avez mis un accent particulier sur la valorisation des résultats de recherches. Quels sont donc les résultats et les perspectives de votre action à ce niveau ?
Effectivement nous avons dans le domaine de la recherche entrepris de nombreuses actions telles que :
l’élaboration des textes statutaires de création de l’Agence Béninoise pour la Recherche et l’Innovation ;
la finalisation du processus d’élaboration de la politique nationale de la Recherche Scientifique et de l’Innovation (en instance d’adoption en Conseil des Ministres) ;
la mise en place d’un comité d’experts dans le cadre de la gestion de la lutte contre la COVID -19 ;
la construction et l’équipement des laboratoires à l’UP et à l’UAC ;
la mise à disposition d’un centre de calcul de haute capacité à l’IMSP de Dangbo pour l’exécution rapide des opérations scientifiques complexes (avec l’appui de la Banque Mondiale) ;
l’installation d’une bibliothèque de référence en sciences mathématiques et Informatiques à l’IMSP de Dangbo pour combler le déficit lié à l’accès aux ouvrages modernes scientifiques (plus de 1000 livres et des abonnements en ligne de plus de 70.000 ouvrages) ;
l’amélioration de la capacité d’innovation des inventeurs par l’Agence béninoise de valorisation des recherches et de l’innovation.
le financement par le Fonds national pour la recherche scientifique et l’innovation des projets au profit des laboratoires de recherches pour un montant d’environ huit cent millions de francs CFA.

En 2020, certains enseignants béninois ont été privés de leurs diplômes à cause du non-paiement des frais d’inscription au CAMES qui s’élevaient à 1.400.000FCFA. Pourquoi le Bénin contrairement aux autres pays veut-il faire payer aux enseignants chercheurs les frais de leurs évaluations ?

Vous savez chaque Etat membre du CAMES paye les frais de solidarité en fonction des effectifs. Le Benin en le faisant affiche son soutien de taille à la promotion de ses cadres au CAMES. Pour le concours d’agrégation, depuis l’année 2019, les frais de séjour et de voyage sont également payés. Il ne reste que les frais d’inscription qui soient imputés au candidat individuellement depuis deux ans. Mais après échanges, on s’est rendu compte de quelques incompréhensions qui ont tendance à démotiver les enseignants. C’est pourquoi il a été pris une décision pour clarifier la position du gouvernement, à savoir que l’état prend en charge une fois le candidat pour chaque grade, en espérant qu’il réussira. Aucun gouvernement dans le souci de l’évolution de ces cadres, ne va jamais bloquer la promotion aux grades de ses cadres.

A quand le retour des élections rectorales dans les universités ?
Très prochainement, on aura une bonne connaissance des modalités d’organisation ou d’encadrement de ces évènements dans les universités. Les statuts des universités le préciseront.
Les activités académiques ayant été lancées vaillamment par les équipes rectorales actuelles dans le contexte assez contraignant de la COVID-19, la décision de leur maintien au poste pour cette l’année en cours s’en est suivie.

Quelles sont les actions sociales faites en faveur des étudiants ?
Toutes les réformes précitées, ont pour finalité de favoriser les conditions de travail des étudiants. Le transport pourrait connaitre un décollage avec le secteur privé que le gouvernement a voulu impliquer dans ce domaine. Il faut confier certaines prestations aux spécialistes pour avoir une meilleure efficacité en temps et en impact. Quant aux allocations, elles ont connu un succès puisque qu’elles sont payées par le Trésor public au même titre que les salaires. Cela prépare mieux les étudiants à l’auto-entreprenariat puisqu’ils disposent leurs comptes pour d’autres opérations bancaires. Dans le domaine de la santé, avec l’appui des partenaires : UNFPA, Croix rouge, etc, les étudiants sont mieux pris en charge. Parlant des résidences universitaires, il faut mettre les étudiants dans de bonnes conditions. Les échanges sont assez poussés avec les partenaires chinois, turques et arabes pour la constructions des nouvelles résidences universitaires respectueuses de normes telles que cela s’observe dans les pays anglophones.

Qu’en est-il des organisations estudiantines ? Elles sont dissoutes ou suspendues ?

Là également, ça n’a pas du tout été facile de choisir l’organisation qui est à même de parler au nom des étudiants. Nous avons deux organisations les plus représentatives, l’UNSEB et la FNEB. Et la troisième qui n’a pas pu réunir le taux, c’est l’UNEB. C’est une façon de renvoyer les organisations estudiantines à leurs responsabilités. Et là il y a quelques jours que nous leur avons remis des matériels sportifs et culturels pour le bon fonctionnement de leurs activités. C’est dire que lorsque le jeu est transparent et responsable on est tous gagnant. Chacun joue sa partion.

Madame le ministre, le président talon est-il populaire dans le monde universitaire ?
Il est inévitable que c’est l’un des Président qui aura marqué toute la communauté universitaire car incompris au départ, il devient résolument l’homme de toutes les attentions ; C’est un homme d’engagement, un réformateur. Il est adulé par les jeunes qui épousent son ambition pour eux à travers la qualité de la formation à leur donner pour une insertion de qualité. Puisqu’ils ont compris qu’il n’y a plus d’autres alternatives de développement que ce que nous avons. Il est ouvert à tout le monde. Personnellement, je n’ai pas eu de difficultés en milieu universitaire compte tenu de l’écoute que je leur fais et de ma détermination à rechercher les solutions aux problèmes. Et quand les acteurs voient que la ministre est accessible, ils font un peu plus confiance à tout le gouvernement, notamment à son Chef.

A quel chantier le prochain Chef d’Etat doit-il s’attaquer pour relever les défis du secteur ?

Les chantiers sont nombreux tout en reconnaissant que la plupart ont été déjà visités et lancés par le Gouvernent sous le leadership du Président de la République. Toutefois, nous pensons qu’il faudra :

La mise en place et la fonctionnalité des organes de gouvernance administrative, académique et financière ;
La poursuite de la mise en place des infrastructures administratives et pédagogiques et de recherche au profit des universités ;
L’achèvement des négociations pour la mobilisation des ressources nécessaires à la construction des résidences universitaires au profit des étudiants, et l’implication du privé dans les œuvres universitaires et sociales pour un impact plus grand.
Le repositionnement de la recherche scientifique et de l’innovation technologique à travers l’Agence béninoise pour la recherche et l’innovation ; et la validation de la politique nationale de la recherche scientifique et de l’innovation ; 
la mise en route des Instituts universitaires d’enseignements professionnels ( IUEP) dans le cadre du développement des filières de formations professionnelles de courte durée 
la poursuite de l’accompagnement des EPES pour un partenariat performant et durable ;
La poursuite de la digitalisation des opérations de service à la communauté et l’interconnexion des universités du Bénin ;

Que diriez-vous pour conclure cet entretien ?

Je ne peux que vous remercier parce que vous m’avez permis de passer un merveilleux moment. Ça fait longtemps que je n’ai eu le temps d’être écoutée comme ça, de répondre à toutes les questions qui viennent de partout. J’ai passé de bons moments et je dois dire que notre pays le Bénin est un merveilleux pays. Nous sommes très riches en matière de culture et de réflexions. Ce qu’il nous faut, c’est un peu plus d’acceptation des uns et des autres, que nous puissions nous faire un peu plus confiance. Faisons-nous confiance, pour renforcer le patrimoine commun, et en faire vraiment un pôle de développement. Au niveau du ministère de l’enseignement supérieur, je peux dire que c’est un très bon ministère qui mérite d’être bien accompagné. Je ne dis pas que les autres ministères sont moins bons, au point de susciter d’autres débats mais je veux simplement relever son caractère stratégique résidant dans sa mission de former des ressources humaines de qualité qui seront capables de trouver des solutions durables aux problèmes des populations. C’est ce que le Président Patrice Talon a bien compris en le positionnant à une place de choix dans son gouvernement et en nous appelant à de profondes réflexions pour nous sortir de nos pauvretés. Sa rigueur et sa fermeté face à la résolution d’un grand problème font de lui un grand homme. C’est un homme d’engagement, de défis et d’ouverture. C’est pour cela que j’appelle les uns et les autres à lui faire confiance.

Dr Marie AKPOTROSSOU, Déléguée nationale chargée des Structures Décentralisées de l’UDBN, SOUS L’ARBRE A PALABRE: «A l’UDBN, on a de bonnes raisons de renouveler notre confiance à Patrice TALON»

Views: 41

La Déléguée nationale chargée des structures décentralisées du parti UDBN, Dr. Marie Akpotrossou

Mois de mars abondant pour les femmes Sous l’arbre à palabre à l’événement précis. A la suite de l’Honorable Chantal Ahyi, première femme politique invitée au titre de l’année 2021 dans la rubrique Sous l’arbre à palabre, une autre femme, représentante personnelle de la présidente du parti UDBN prend place le jeudi 11 mars 2021 au siège du journal dans la rubrique très prisée sous l’arbre à palabre.. Il s’agit de la Déléguée nationale chargée des structures décentralisées du parti UDBN, Dr. Marie Akpotrossou, Enseignante à l’Université de Parakou. A bâtons rompus, Dr. Marie Akpotrossou, représentante de la présidente Claudine Afiavi Prudencio a abordé avec les journalistes de la rédaction plusieurs sujets d’intérêt dont notamment les idéaux du parti, la gouvernance du Président Patrice Talon et la présidentielle d’avril 2021. Dr. Marie Akpotrossou, qui a saisi l’occasion pour faire des aveux à l’événement précis sur son engagement politique : « Grâce aux bonnes capacités managériales de Mme Claudine Afiavi PRUDENCIO, je suis à l’UDBN ». Satisfaite du bilan du président Patrice Tolon, l’invité de l’événement précis est convaincue que le prochain président du Bénin au soir du 11 avril, sera sans aucun doute le candidat du parti UDBN, Patrice Talon.

Et si on en parlait

L’Evénement Précis : Nous sommes dans le mois de mars. Le 08 mars est passé il y a quelques jours et nous continuons de vivre la ferveur de la Journée Internationale de la Femme. Selon vous, quel est le symbole de cette célébration?

Je pense qu’il est avant tout utile de situer la Journée Internationale de la Femme du 08 mars dans son contexte. Parce que la JIF est une journée de diagnostic, de l’évolution de la situation de la femme. Comment est-ce que les textes et les conventions sont appliqués ? Est-ce qu’il y a eu un ascendant par rapport à la situation de la femme ? Je pense que l’essentiel est que la journée du 08 mars n’est pas une journée de folklore pour se retrouver et manger, mais c’est une journée de réflexion. Et c’est cette compréhension que l’UDBN avait depuis toujours. C’est cela qui nous a amenés à faire un atelier de réflexion au cours duquel nous avons essayé de répartir les femmes en sous-groupes et par corporation où nous avons demandé aux femmes d’exprimer librement leurs besoins et de dire les maux qui entravent leur épanouissement. Les femmes se sont exprimées et nous avons ensemble identifié les stratégies et les moyens que nous devons adopter pour sortir la femme de l’ornière, de la conception et des préjugés qu’on fait de la femme et qui maintiennent toujours la femme dans l’asujétion totale.

Vous avez organisé un atelier au cours duquel il y a eu des réflexions sur la condition de la femme. Est-ce que de façon particulière vous avez un message à l’endroit des femmes béninoises ?
Je dirai aux femmes de cesser de passer pour des passagers clandestins. Les femmes ont de belles idées au fond d’elles, mais compte tenu des pesanteurs sociologiques selon lesquelles on dit que la femme doit être soumise et qu’elle n’a pas droit à la parole, cela fait que quand bien même elles ont de belles initiatives elles n’osent pas s’extérioriser. Donc je voudrais dire aux femmes d’avoir confiance en elles, d’être fières de leur situation de femmes, de continuer par se battre pour se hisser au plus haut tel que le fait notre Présidente Madame Claudine Afiavi PRUDENCIO que je tiens à remercier très sincèrement pour son dévouement et son endurance.

Pourquoi Madame Claudine Afiavi PRUDENCIO est la seule femme, Chef de parti politique au Bénin ?
Une femme-chef de parti politique est un cas d’école. Aujourd’hui à travers le monde, nous avons une dizaine de Chefs d’État qui sont des femmes. Même si au Bénin, nous n’avons pas encore atteint ce stade, je me rends compte que de grands pas sont en train d’être franchis. Une femme Présidente de parti ne peut donc être qu’une source de fierté, de confiance en la lutte pour l’égalité et l’équité menée par des femmes depuis les temps immémoriaux. Contrairement à ce que pense le commun des mortels, l’UDBN n’est pas un parti des femmes, mais un parti de la jeunesse, des hommes et des femmes dirigé par une femme. Le choix de Madame Claudine Afiavi PRUDENCIO comme Chef de parti politique, n’est pas anodin. Ce choix n’est pas dû au hasard ou à sa condition féminine. Madame Claudine Afiavi PRUDENCIO cumule en elle, les qualités de leadership, de management. Ayant développé sa capacité d’écoute qui fait d’elle la femme la plus proche des aspirations du peuple, des militants quelle que soit leur catégorie, elle cumule donc les qualités intrinsèques et extrinsèques qui ne sont plus à démontrer. Je ne peux qu’être fière d’appartenir à l’UDBN et d’avoir une Responsable de cette envergure. Elle a su s’imposer par sa bravoure et son endurance dans un monde fait de femmes et d’hommes.

Quel est l’idéal politique de l’UDBN ?
L’idéal politique de l’UDBN est de promouvoir le bien-être commun, le respect des droits de l’Homme, l’égalité des chances pour un développement équilibré du territoire. L’UDBN part des besoins et aspirations du peuple pour mettre en œuvre des stratégies appropriées qui permettront une croissance économique soutenue dans un environnement socio-économique et politique de paix, de justice pour un avenir meilleur.

Vous étiez dans l’arène politique depuis des années. Comment avez-vous vécu la réforme du système partisan ?
Il n’est de secret pour personne que le système politique, avant l’avènement du régime de la Rupture présentait de nombreux maux dont le plus dangereux était la création tous azimuts des clubs électoraux basés sur le sectarisme, le régionalisme et des intérêts égoïstes de quelques-uns. La réforme du système partisan s’impose alors comme une solution d’assainissement de l’espace politique. Une telle initiative ne peut que recevoir l’onction, l’accompagnement et la bénédiction de tout acteur politique épris de justice et d’unité nationale. L’objectif poursuivi n’est pas la « disparition des partis politiques », mais une mutualisation des forces sous la bannière de grands regroupements d’envergure nationale. Ce sont ces nouvelles entités organisées qui peuvent s’arroger le titre et la qualité de parti politique. Le parti UDBN a bien accueilli et d’ailleurs approuvé ces réformes. A titre illustratif, c’est l’un des premiers partis à s’y conformer.

Pourquoi avez-vous refusé en 2018-2019 de vous fondre dans l’un des blocs de la mouvance présidentielle ?
L’UDBN est un parti de la mouvance présidentielle. C’est l’un des grands partis de cette mouvance au sens de la nouvelle Charte des partis politiques. Donc avec une envergure nationale reconnue comme telle par les structures compétentes. L’UDBN au plan technique n’a donc plus besoin de se fondre dans les autres blocs dont vous parlez. Ce n’est donc pas le sens de la réforme du système partisan.

Avez-vous le sentiment aujourd’hui d’avoir eu raison ?
Nous avions la conviction que nous sommes dans le champ d’application de l’esprit et de la lettre de la réforme du système partisan. L’évolution de la situation politique actuelle vient nous conforter dans cette conviction. Vous n’êtes pas sans savoir que l’un des participants surprise au troisième congrès ordinaire de l’UDBN, son Excellence le Président Patrice TALON, leader charismatique de la mouvance présidentielle a affirmé, je cite : « j’ai [dans ce rôle] œuvré au changement de l’arène politique. Et j’ai fait avec beaucoup de détermination ce qu’en mon âme et conscience j’ai jugé bon pour réformer le pays en vue de son développement réel. J’y ai cru, en toute sincérité, j’y ai cru avec foi […]. Mais Amazones que vous êtes, soldats que vous êtes d’une cause, celle du Bénin nouveau, vous avez pensé que dans votre singularité vous pouvez contribuer à l’émergence d’un Bénin nouveau. C’est tout à votre honneur. Je n’ai pas abandonné mon idée, je n’ai pas abandonné la cause, je n’ai pas abandonné l’objectif de la réforme. Mais je sais que l’objectif peut être atteint différemment. Je sais que reconstruire la classe politique béninoise, œuvrer à son regroupement d’un autre genre peut s’opérer sans que tout le monde soit forcément dans la même maison. Je sais prendre acte de ce qui s’impose à moi. Et comme je sais aussi que je ne peux avoir la vérité absolue en toute occasion et en toute chose, et que je ne peux pas prétendre avoir tout le temps raison […] je n’ai pas seulement pris acte, j’ai fini par adhérer ». Cette affirmation du Chef de l’État en dit long.

Vous avez réussi à participer aux élections communales de 2020, mais vous n’avez pas pu avoir de conseiller, et ceci, du fait des 10% exigés par le code électoral, comment le parti a-t-il vécu cet échec ?
Le défaut des 10% aux élections communales en ce qui concerne l’UDBN n’est pas un échec, mais un point d’encrage pour des victoires retentissantes. Nous sommes sur le terrain politique et rien n’est définitivement acquis ou perdu. J’ai espoir que le meilleur reste à venir.

Aujourd’hui, vous êtes en campagne pour TALON alors que l’UDBN a des leaders qui ont la carrure de candidater. N’avez-vous pas le sentiment que la réforme du système partisan devrait permettre à tout le monde de se porter candidat ?
À la date d’aujourd’hui la campagne n’est pas officiellement lancée. Ce que vous assimilez à la campagne électorale n’est rien d’autre que l’animation de la vie politique. La réforme du système partisan est un ensemble de règles, d’obligations à respecter. L’UDBN étant un parti de développement qui poursuit la satisfaction de l’intérêt général, a porté librement son choix sur la personne de Patrice TALON. Ce choix est le résultat d’un processus. Dans une approche participative, les délégués et cadres de l’UDBN ont fait le bilan de la gouvernance actuelle, c’est-à-dire celle du régime de la Rupture au cours de l’Université d’été du 21 août 2020. Il ressort de ce bilan, que la quasi- totalité des actions prévues dans le Programme d’Actions du Gouvernement (PAG) ont connu une exécution très satisfaisante. Eu égard à ce bilan, l’UDBN a opté pour la continuité en portant son choix sur le candidat du développement conformément aux idéaux et aux textes du parti. Ce choix a été entériné par le 3ème Congrès ordinaire de l’UDBN. La réforme du système partisan n’empêche personne d’être candidat. Il suffit de remplir les conditions au regard des textes en la matière.

Parlons de la gouvernance du Président Patrice TALON, cinq ans après son accession au pouvoir. Quel bilan faites-vous ?
Le document phare qui gouverne les interventions du régime de la Rupture est le Programme d’Actions du Gouvernement (PAG). Faire le bilan du quinquennat en cours revient à mesurer les résultats obtenus par rapport à ce qui est prévu, de dégager l’écart et pondérer la performance au regard des indicateurs pilier par pilier, domaine par domaine. Il convient alors de se demander :
Qu’est-ce qui est prévu ? Qu’est-ce qui est fait ? Qu’est-ce qui est en train d’être fait ? Et qu’est-ce qui reste à faire ? Lorsqu’on répond à toutes ces questions, on constate qu’on a de bonnes raisons de renouveler sa confiance au Chef de l’État. Ainsi, au niveau du Pilier 1 : Consolider la démocratie, l’État de droit et la bonne gouvernance, en matière de bonne gouvernance, la lutte contre la corruption est aujourd’hui une réalité. Au plan politique, des réformes certes difficiles, mais salutaires sont opérées : le découpage territorial, les préfets sont désignés, etc. Il existe aujourd’hui beaucoup d’effectivité et des actes de courages sont posés. Au niveau du Pilier 2 : Engager la transformation structurelle de l’économie. Les différentes performances réalisées au plan économique, reconnues par des institutions sous régionales, régionales et internationales en disent long. Malgré la crise sanitaire, la longue durée de la fermeture des frontières du Nigéria, le contexte économique peu favorable, le Bénin réalise des performances. En ce qui concerne le Pilier 3 : Améliorer les conditions de vie des populations. La réalisation de la carte biométrique avec ses avantages, le soutien financier fait aux entreprises dans le cadre de l’atténuation des effets de la Covid-19, les microcrédits accordés aux femmes, les performances au plan sportif (la qualification des Ecureuils en quart de finale de la dernière CAN), la construction des infrastructures routières, des stades, des marchés, des écoles, des hôpitaux, des ponts, l’aménagement des berges lagunaires, les réformes du secteur de la santé, le vote des lois de protection de l’environnement, etc., font partie des nombreuses réalisations du régime de la rupture.

Qu’est-ce qui au contraire n’a pas bien marché durant ce premier quinquennat ?
C’est essentiellement le déficit d’information. Et ça, c’était au début du quinquennat. Le fait, pour le Chef de l’Etat, de ne pas vouloir beaucoup communiquer autour de ses réalisations, avait fait croire à une certaine opinion que rien ne se faisait. Cela a été corrigé. Ce déficit n’a pas permis de faire comprendre tôt le sens des réformes au plus grand nombre. Aujourd’hui, avec les nombreuses réalisations dans tous les domaines, le peuple est convaincu que le régime de la rupture est sur le bon chemin.

Certaines candidatures ont été recalées. Ne pensez-vous pas que la démocratie béninoise est menacée par la question du parrainage ?
La question du parrainage découle de la volonté du peuple à travers le vote de la loi électorale par la représentation nationale.
Même s’il est vrai que certains citoyens ont la perception que le parrainage vient déranger les habitudes, il n’en demeure pas moins vrai que l’instauration du parrainage est la suite logique du vote de la Charte des partis politiques. Il témoigne de la dynamique politique et de la vivacité.

Ne pensez-vous pas que les candidatures féminines comme celle de Réckya MADOUGOU devraient être soutenues au-delà de toute appartenance politique ?
Je ne veux pas personnellement me prononcer sur la candidature de Réckya MADOUGOU et les événements subséquents. Cependant, j’aimerais rappeler que cette candidature n’est pas validée par les structures compétentes pour défaut de parrainage comme la candidature de beaucoup d’autres citoyens et citoyennes. Aussi, la condition féminine ou le genre n’est pas le critère retenu par le législateur pour être candidat.

Comment l’UDBN compte-t-elle faire campagne, seule ou en coordination avec les autres forces de la mouvance présidentielle?
L’UDBN est un parti de la mouvance. Son candidat, c’est le Président Patrice TALON. Il se fait que le même candidat est soutenu par d’autres partis politiques. En tant que parti politique, l’UDBN a ses stratégies propres à elle pour convaincre l’électorat et susciter l’adhésion du peuple. Mais je peux vous assurer que l’équipe de campagne du duo Talon-Talata est très bien structurée. Les partis soutenant le Président Talon y sont représentés. Vous verrez qu’il y aura une belle synergie d’action sur les aspects qui relèvent d’actions transversales. Mais l’UDBN a son équipe de campagne du niveau national jusqu’aux structures décentralisées. Les Amazones et Soldats UDBN sont prêts pour assurer la victoire dès le premier tour à notre duo Talon-Talata. L’UDBN est prête à mettre ses compétences, toutes ses structures, toute son énergie et son expérience au service de la réélection du Président Patrice TALON au premier tour, avec un taux de participation élevé le 11 avril 2021, sous la direction de l’équipe de campagne mise en place par le Chef de l’État avec la présence remarquable de deux cadres de l’UDBN, sans oublier les équipes nationales, départementales, communales que nous avons mises en place.