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« Il est important de notifier que les producteurs doivent prendre à chaque mouvement de produit une fiche de convoyage qui est gratuite au niveau des services de douane. Même quand le producteur veut sortir le produit du champ pour la maison, même si c’est un sac, il est obligatoire que ce producteur prenne une fiche de convoyage. » Ainsi s’exprimait la semaine dernière la directrice départementale Zou-Collines du ministère de l’industrie et du commerce, Rachidath Adégoké, lors d’un atelier d’appropriation organisé au profit des acteurs de la filière. Ce n’est pas exactement ce que disent les textes, précise le secrétaire permanent de l’interprofession, Hassane Ibrahim N’Guatado. Pour lui, il ne faut pas confondre les fiches de convoyages et les fiches d’évacuation. Les fiches d’évacuation sont délivrées par les coopératives dans les villages pour amener les productions vers les magasins de stockage que ces coopérations détiennent. Quant aux fiches de convoyage, elles sont délivrées par les services douaniers entre les magasins de stockage et les usines de transformation. « L’exportation est interdite » a-t-il martelé. En réalité, a-t-il assuré, les fiches en question sont totalement gratuites et ne donnent pas lieu à des contraintes particulières. Il s’agit de sécuriser les productions entre les lieux de stockage et les usines de transformation. De fait, les dispositions d’une note de service du DG-Douane en date du 28 avril 2023, stipulent que « tout chargement de soja ou de cajou doit être accompagné d’une fiche de convoyage ».
Des mesures inopportunes
Ces dispositions édictées en période de crise, jettent de l’huile sur le feu s’il faut les appliquer actuellement. Pour Bertin Koovi, acteur politique investissant dans l’agriculture, l’instauration d’une fiche de convoyage est de nature à éliminer les commerçants collecteurs dont le rôle clé est indéniable car ils permettent de préfinancer les producteurs, « en assurant la logistique, et en facilitant la vente aux usines. » Leur disparition pourrait créer ce qu’il a appelé « un vide logistique et financier. » Mais il met l’accent sur les lourdeurs administratives que la fiche de convoyage pourrait engendrer. « L’exigence de l’autorisation douanière pour transporter même une petite quantité de soja ajoute un frein bureaucratique qui décourage les petits producteurs », dit-il. A cela s’ajoute une autre difficulté qu’il a identifiée : la concentration des pouvoirs économiques entre les mains des usines qui deviennent les seuls acheteurs, imposant indirectement des conditions qui désavantagent les producteurs. Selon lui, il convient de « réintégrer le commerçant collecteur dans la chaîne de valeur ». Selon Bertin Koovi, le commerçant collecteur est le pont entre les paysans et les usines. De ce point de vue, il faudra les autoriser à acheter directement aux paysans, tout en les enregistrant auprès des autorités locales.
De son côté, l’ancien ministre Valentin Agossou Djènontin actuellement en exil trouve que cette mesure constitue « une décision d’une rare absurdité ». « C’est facile, dit-il, de décider du sort des paysans souffrant sous le soleil et la pluie, à partir des bureaux climatisés sans jamais avoir vécu les réalités des travaux. » Comme Bertin Koovi, il trouve la décision inopportune, car elle élimine les commerçants de la chaine, alors que c’est eux qui achètent les récoltes auprès des paysans.