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Le triomphe de la vérité

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Choix de Gernot Rohr comme sélectionneur national du Bénin: “Bon choix, mais le Bénin lui donnera-t-il les moyens”, dixit Mahamat Béchir


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La fédération béninoise de football a choisi de recruter au poste de sélectionneur du Bénin, le technicien Franco-Allemand, Gernot Rohr. Un choix qui ne serait pas mauvais si le Bénin pouvait lui donner les moyens qu’il faut, selon Mahamat Béchir qui est un des connaisseurs du football continent et même mondial. Lisez son l’intégralité de son analyse.

«Je ne sais pas quels sont les critères que la Fédération Béninoise de Football a mis en place pour choisir Gernot Rohr. Objectivement, je pense qu’il en a les mérites. Mais est-ce qu’il en aura les moyens, je ne sais pas. Au niveau des mérites, il a été d’abord footballeur. Il a joué dans la grande équipe de Bayern Munich des Franck Berkenbauer, Sepp Maier, Gerd Muller ou Ulli Hoeness, l’ancien Président du Bayern Munich. Il a été Champion d’Europe des clubs, en 1974, avec cette équipe du Bayern qui était l’ossature de la national Mannschaft  qui avait remporté la Coupe du Monde, la même année où l’Allemagne l’avait organisée, à domicile.

Après, il a été international, dans les catégories d’âge de l’Allemagne. Par la suite, il a été sollicité par la France pour jouer pour les Bleus. Mais il ne pouvait pas, parce que le règlement interdisait à tout joueur ayant porté le maillot d’une Nation de porter celui d’une autre Nation, quel que soit la catégorie. Il avait été pénalisé par ce règlement, à l’époque.

En tant qu’entraîneur, il avait dirigé les Girondins de Bordeaux. Certes, ils n’avaient pas été champions de France, mais le club avait  fait de très bons parcours.

Concernant l’Afrique, lors de la Can 2012, il avait entraîné le Gabon. Malgré toutes les difficultés logistiques qu’on connaissait au Gabon, il avait eu le mérite de conduire l’équipe gabonaise en quart de finale, éliminée de justesse aux tirs aux buts par le Mali qui est une équipe régulière sur le continent.

 Il a également qualifié et mené le Nigeria à la Coupe du Monde 2018, battu en poule par l’Argentine de Lionel Messi, et la Croatie de Modric. Mais ils avaient  battu La Macédoine.

 C’est lui qui avait, également, qualifié le Nigeria à la CAN 2021. Malheureusement, il avait été limogé, je ne sais pour quelles raisons. Mais on  connaît la suite. Avec Eguavon, un ancien international nigérian, les Super Eagles avaient été éliminés dès le deuxième tour de la CAN. Et du Mondial 2022 aussi.

Donc, il a les compétences pour conduire une équipe comme celle du Bénin. Surtout avec la  rigueur allemande dans laquelle il est né et a grandi. Il sera le 3e Allemand que le Bénin aura comme sélectionneur après Peter Schnittger qui avait commencé à révolutionner le football en son temps, à travers un projet de formation des jeunes à la base afin de doter l’équipe d’une base solide. Ensuite, on a eu le défunt Reinhardt Fabisch.

Maintenant est-ce qu’on a les moyens de nos ambitions ? Est-ce qu’on va accepter sa rigueur ? Est-ce que nous sommes prêts à aller de l’avant?

Moi je pense que ce n’est pas un problème d’entraîneur.

Celui qui arrive, a les moyens de mener à bien la mission qu’on va lui confier au Bénin. Mais, est-ce que le Bénin est prêt à bien jouer au football? Moi je dis non. Parce que le Bénin est l’un des rares pays, au monde, à ne pas avoir une Direction Technique Nationale (DTN ) Il se contente , seulement , d’un DTN , sans aucun collaborateur .

 Une Fédération qui n’a pas de Direction Technique Nationale ne peut pas travailler rationnellement. 

Il n’y a aucun programme de fonctionnalité du football béninois depuis la base. Pour initier un plan de structuration depuis la base de la pyramide. A travers une  formation à la base bien pensée, en direction du sommet de la pyramide que doivent être les équipes nationales de toutes catégories.

Comme pour toute  pyramide, la base doit être large pour que l’infrastructure puisse bien tenir. Or, le football béninois s’écroule. Parce qu’il n’y a jamais eu une bonne base. Comment prendre de vieux joueurs béninois, ou  naturalisés tels, pour venir défendre les couleurs nationales, simplement parce qu’ils jouent en Europe ? Sans s’imprégner du niveau auquel ces derniers jouent ?

 C’est par des critères d’éligibilité rationnels qu’on a des résultats au niveau de l’équipe nationale. La seule fois où on a eu notre meilleur résultat c’était en 2019. Celle  où l’équipe nationale était basée sur les joueurs issus des centres de formation locaux. Dans l’équipe titulaire du premier match aux quarts de finale, il y avait 7 d’entre eux issus des centres de formation du Bénin.

Mais cette politique a été laissée, juste après, pour aller en aventure vers les joueurs de l’extérieur, prétendus professionnels.

Il faut qu’on réfléchisse profondément à notre politique sportive. Ce n’est pas un problème d’entraîneur que nous avons. On peut  amener Guadiola ou n’importe qui d’autre, on n’aura pas les résultats si rien ne change.

Cette année on a la chance d’avoir des U20 qui sont qualifiés pour la phase finale de la CAN de leur catégorie, pour Egypte 2023.

Pour une fois, Le Gouvernement et la Fédération ont mis les moyens nécessaires pour leur préparation, pendant une bonne et longue période. Ils ont fait  beaucoup de stages.

Je suis sûr que cette équipe sera performante au vu de la façon dont elle joue, au vu du temps de préparation qu’ils ont mis à profit pour régler les détails et améliorer les acquis.

Déjà, au cours de ses différents  matchs amicaux, l’équipe n’a encaissé que très peu de buts, avec des résultats probants.

On devrait se baser sur ces jeunes et les renforcer par ceux qui en auraient les qualités , au lieu d’aller en chercher, uniquement sur le fait qu’ils évoluent en Europe .

Comment peut-on s’imaginer qu’on puisse demander à Stéphane Sessegnon (plus de 40ans) , de venir jouer en équipe nationale ? Ça n’a aucun sens.

Si on peut fixer à Gernot Rohr des objectifs pour 4 à 6ans, en se basant sur cette équipe des juniors, pendant que les U17 vont se rapprocher aussi, cette structuration des équipes depuis la base va lui permettre d’avoir une équipe A solide.

Quand on prend le Mali, le Sénégal la côte d’ivoire, ce sont des pays qui se basent sur la formation.

Gernot Rohr a déjà prouvé qu’il peut faire le travail sur le terrain. En Afrique, il l’a largement démontré.

La vraie question, c’est de savoir si le Bénin est prêt à lui donner les moyens pour lui permettre d’atteindre les objectifs qu’on lui aura fixés ?

Au Bénin, les supporters, les dirigeants et les politiques, tous ne connaissent que l’équipe (A) qui est le symbole même de l’échec du football béninois. A partir de là, il faudra aider Gernot Rohr à avoir une bonne équipe de base en accompagnant l’équipe junior qui, j’en suis sûr, fera une très bonne CAN en Egypte.

Nous devons finir avec nos errements en cessant d’aller chercher des gens qui n’ont pas de niveau pour constituer notre équipe nationale.

Oumar Tchomogo qui avait fait d’excellents résultats a été renvoyé. Or, il avait beaucoup cherché à forger les jeunes béninois qui sont des locaux, formés ici. On a renvoyé Dussuyer,  qui nous a qualifiés pour notre premier quart de finale, parce qu’il n’y avait pas l’organisation qui lui permette de continuer son travail.

On doit cesser avec la navigation à vue, les tâtonnements, et chercher maintenant à avancer.

Gernot Rohr va venir et on verra si on va lui donner les moyens en lui permettant de se baser sur les locaux qui évoluent dans notre championnat professionnel.

Mais tant qu’on n’aura pas une direction technique nationale, on ne pourra rien faire.

Outre cela, il faut avoir une bonne structuration et les infrastructures.

Les infrastructures existent aujourd’hui, puisque nous sommes l’un des pays africains qui disposent de plus de terrains, même s’ils sont en gazon synthétique, pour la plupart.

Le stade de l’Amitié, à Kouhounou, est l’un des plus modernes de la Sous-région. Au point que certains matchs des compétitions CAF ou FIFA d’autres pays, voisins ou lointaine, sont délocalisés au Bénin.

 Maintenant il faut que la Fédération  s’entende avec le Gouvernement, par le truchement du Ministère des Sports, pour bien réorganiser le football béninois. Cela suppose que la Fédération doit accepter que le Ministère  nomme le Directeur Technique National (DTN) qui, à son tour, va proposer à la mise en place de la Direction Technique Nationale qu’on va décentraliser, jusqu’aux  petits villages. C’est à partir de là qu’on va commencer à réfléchir et travailler, rationnellement, pour notre football. Sinon, il n’y aura aucun avenir.

Le Sélectionneur National  est proposé à nomination par la Fédération et le Ministère apporte son avis consultatif. C’est l’inverse au niveau du Directeur Technique National. C’est le Ministère qui le propose à nomination et la fédération donne son avis consultatif. Car, le Directeur Technique National est un collaborateur du Ministre des sports. Il doit même avoir ses bureaux au Ministère des sports. C’est le fondement même de la réussite. Le Directeur Technique National, avec ses collaborateurs décentralisés, mettent en place la politique de formation à la base, pour remonter vers le sommet.»

En conclusion et j’insiste là-dessus, ce n’est pas d’un entraîneur que le Bénin a besoin, en priorité. Mais d’une réorganisation,  complète et objective, de son plan d’action pour arriver à avoir de bons résultats au sommet.

Anselme Houénoukpo

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