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Le triomphe de la vérité

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Renvoi des élèves pour non paiement des frais de scolarité : Apprenants, parents d’élèves et chefs d’établissements au banc des accusés


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Les élèves sortant de l’école

L’échec scolaire constaté chez les élèves du secondaire n’est forcément pas lié à des déficits de travail. Pour une bonne part, les renvois dus au non-paiement des frais  de scolarité, sont à la base de ces échecs.

Bertrand Adjido, élève en classe de 3ème au Collège d’enseignement général ‘’Le Plateau’’ de Womey, commune d’Abomey-Calavi, ne cache pas son amertume et sa désolation. « Nous étions en plein cours d’anglais quand le comptable est venu me renvoyer pour n’avoir pas soldé les frais d’inscription de 12000 francs. A l’instant où je vous parle, mes parents n’ont pas encore payé la totalité. Il me reste 5000 francs à payer, c’est pourquoi j’ai été renvoyé », confie-t-il. Ce n’est pas la première fois que comptable vient le sortir de la classe. « C’était pareil au premier semestre. Ce qui a agi sur ma moyenne, puisque je me suis absenté des cours pendant près d’une semaine. J’ai manqué des interrogations et toutes ces choses ont fait que j’ai eu une faible moyenne », a-t-il laissé entendre. Son compagnon, Isidore Hounnou, élève en classe de 1ère, est habitué aux renvois. « Je vis la même scène depuis des années, lâche le garçon, la vingtaine environ. Je suis habitué. Les parents vont payer mais je ne sais pas encore quand. Quand ils auraient fini de solder, je vais prendre les cours chez mes camarades pour me mettre à jour ». Au Ceg ‘’La Verdure’’ de Houèto, commune d’Abomey-Calavi, c’est Djibril Sadikou, élève en classe de 3ème qui nous parle. « J’ai du mal à payer les frais de scolarité et d’examen à cause  des conditions difficiles que traversent mes parents. J’ai manqué les cours durant un mois environ, j’ai une faible moyenne du fait des renvois répétés. Au moment où je vous parle, j’ai encore sept mille francs à payer », dit-il. On était le 10 mars 2022.

Les parents limités à un salaire insignifiant

La responsabilité des parents  est entière dans ces renvois. Incapables de payer 16.000F près de 7 mois après le début des cours,  ceux que nous avons rencontrés incriminent la pauvreté. Lambert Adimi, agent de la SBEE, père de deux enfants l’un en première et l’autre en troisième, pointe du doigt son salaire qui serait insuffisant. « J’ai l’habitude de payer la scolarité de mes deux enfants au début de chaque année, dit-il. Mais cette année je n’ai pas encore payé faute de moyen.  Les miettes que je reçois comme salaire à chaque fin du mois ne peuvent pas me permettre de payer la contribution, le loyer, l’électricité et surtout la nourriture qui est fondamentale », se désole-t-il. Quant à Pamphile Dossou, jardinier, il affirme avoir trouvé un moyen de régler la scolarité de ses enfants. « Pendant les vacances, ils travaillent avec moi ou bien sur des chantiers pour trouver leur scolarité ou la moitié et je complète le reste. Là pour le début de la rentrée, on paie en même temps la scolarité afin qu’ils ne puissent pas être renvoyés au cours de l’année », révèle-t-il avant de poursuivre : « Moi je n’aime pas voir mes enfants renvoyés. C’est pour cela que je prévois tout avant la rentrée. Même si la vie est chère maintenant, je fais tout pour m’assurer au moins de leur petit déjeuner et même la nourriture dans la maison ». Le renvoi des cours n’affecte pas que les élèves et leurs parents. Il agit également sur le bon fonctionnement des établissements scolaires, surtout si les concernés sont des candidats aux différents examens de fin d’année.  « L’administration a procédé à certains renvois à la reprise des cours pour ceux qui n’ont pas encore payé la contribution. Dans les classes d’examen, on a été rigoureux mais pourtant il reste des apprenants qui doivent toujours à l’école, pourtant ils ont payé les frais de dossier. Ça donne l’impression qu’ils ne veulent pas payer. Donc on n’a pas le choix que de les renvoyer », explique le directeur du complexe scolaire ‘’Magnificat Plus’’ situé à Togba dans la commune d’Abomey-Calavi. Ici, plus de 40% des élèves n’ont pas encore payé la totalité des frais de scolarité. Jusqu’en mars 2022, le CEG Zinvié, situé dans la commune d’Abomey-Calavi, n’a atteint qu’un taux de recouvrement de 80%. Selon son directeur Alain Houssou, chaque année, près de 10% des frais de scolarité ne sont pas recouvrés.

Des subventions au compte-gouttes

De fait, les établissements publics se voient contraints de renvoyer les apprenants pour avoir les moyens de fonctionner. Il est vrai, les “subventions” de l’Etat arrivent au quart à la rentrée. Mais les trois quart restants viennent généralement vers le mois de juin. Entre-temps, il faut bien que les établissements fonctionnent. Et dans les faits, lesdites subventions ne sont rien d’autre que le remboursement par l’Etat des frais de scolarité des filles au premier cycle. Depuis 2006, le gouvernement ayant décrété la gratuité de la scolarité, a insisté pour que les filles ne paient rien au premier cycle du secondaire. C’est un manque à gagner qui est comblé par les remboursements appelés subventions. Même s’il est interdit de renvoyer les élèves au cours des devoirs, les renvois de classes ne permettent à aucun élève de réellement composer. Ces perturbations sont une des causes majeures des redoublements ainsi que des échecs massifs aux différents examens de fin d’année.

Assise Agossa

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