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Le triomphe de la vérité

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Edito: L’école à l’heure du coronavirus


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L’école qui vient après les longs congés du coronavirus, sera une école laminée. Déjà que les apprenants avaient du mal à assimiler les cours qui leur sont donnés, les congés forcés de plus d’un mois sont de nature à aggraver la situation. La plupart vont oublier les apprentissages qu’ils ont reçus et seuls vont s’en sortir les plus brillants. Une fois de plus, l’école est le lieu des plus grandes inégalités, et ces inégalités se creusent davantage pendant ces périodes d’oisiveté.
Il est vrai que les parents qui le peuvent ont payé des répétiteurs qui s’activent à terminer les programmes. Mais ils sont combien à pouvoir s’offrir ce luxe par les temps qui courent ? La grande majorité des apprenants se retrouve à la maison à ne rien faire, scotchés devant la télé. Beaucoup jouent dans les quartiers, oubliant royalement les cahiers et les livres. Dans les villages, ils sont tranquillement dans les champs, à la chasse ou à la pêche, au moment où les filles sont au marché…Nous sommes dans le schéma des vacances. Et puis, raisonnablement, que pourraient-ils faire d’autre que d’utiliser ces temps à des activités lucratives ou ludiques ?
Il se passe que dans le même temps, au moment où nous ne trouvons pas encore de solution à cette équation de l’oisiveté de nos enfants, certains pays utilisent l’enseignement à distance grâce à l’internet. C’est la solution utilisée à partir de ce lundi par les universités sud-africaines. Quelques universités sur place y recourent également, permettant à leurs étudiants d’occuper leur temps à travailler depuis leurs maisons. Examens et autres contrôles continus se tiennent comme en une année normale. Ceci suppose des moyens techniques que nos écoles n’ont pas, encore moins les apprenants et leurs parents. Malgré la couverture de l’internet à travers le pays, il n’est pas encore dans tous les villages. Et même alors, très peu d’étudiants disposent d’un ordinateur ou d’un smartphone. Et l’internet coûte cher. C’est une mesure impossible à appliquer dans notre pays.
On peut probablement utiliser la solution de la Côte-d’Ivoire qui a décidé d’utiliser les chaînes d’information publique pour donner des cours. C’est la solution la plus pratique aujourd’hui pour le Bénin. Selon mes informations, elle est en étude actuellement au sein des ministères en charge de l’éducation. Mais, ne nous y trompons guère. Dans ce Cotonou qui est censé être la première ville de notre pays, une bonne moitié de nos apprenants, notamment ceux des établissements publics, vivent sans télé ni radio. C’est la réalité : sans radio ni télé. Allez donc dans nos quartiers. Vous y verrez de nombreux ménages sans radio ni télé et où les enfants se battent pour survivre à la faim. Leur seul espoir, c’est que l’école les sorte de la précarité un jour, grâce à leur persévérance. Comment donc vont-ils suivre les cours dans ces conditions, avec quelle radio ou quelle chaine de télé ? Non ! Et puis dans un système d’enseignement/apprentissage/évaluation, il y a un maillon essentiel de la chaine qui fait défaut dans cette solution médiatique : c’est l’évaluation. Il ne suffit pas de débiter des savoirs du haut d’une chaire. Il faut encore, ET SURTOUT, vérifier si les apprentissages sont maitrisés, et donc évaluer. Et après l’évaluation, procéder aux remédiations nécessaires, pour être sûr que les apprenants ont non seulement compris, mais qu’ils peuvent également intégrer les apprentissages dans des situations complexes. C’est cela l’éducation.
Pour pragmatique qu’elle puisse paraître, la solution médiatique s’avère un placébo. Elle ne vaut pas grand-chose dans les conditions actuelles. Alors, sommes-nous condamnés à attendre le 11 mai, sans rien faire ?
C’est presque évident. Nous sommes obligés, au mieux des cas, de recourir à des solutions d’attente, histoire d’occuper les apprenants du secondaire public en cette période. Il en est ainsi de l’utilisation des médias. Elle pourra occuper ceux qui en ont la possibilité, sans constituer réellement une solution efficace. Appartient-il à l’Etat dans ces conditions de s’engager dans un tel bricolage ? Je ne le crois pas. Quant au primaire, il est évident que les cours en présentiel sont inévitables, dans un contexte de précarité où l’internet est un luxe et où les instituteurs eux-mêmes ne peuvent se doter d’aucun outil informatique approprié.
Le coronavirus vient aggraver les inégalités qui sévissent à l’école. Il vient nous rappeler aussi nos défaillances de parents.

Par Olivier ALLOCHEME

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