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Le triomphe de la vérité

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Edito: Quand l’Afrique se réorganise


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Le sujet ne passionne pas vraiment les réseaux sociaux sur le continent. Mais l’Afrique est en train de réaliser une œuvre gigantesque que peu d’observateurs pouvaient imaginer il y a à peine cinq ans. C’est seulement hier jeudi 04 juillet 2019 qu’est devenue opérationnelle la zone de libre-échange africaine (ZLEC), après les dernières ratifications qui l’ont lancée fin mai. Le douzième sommet de l’Union Africaine qui s’est ouvert hier à Niamey devrait parachever l’œuvre avec l’adhésion inattendue du Nigeria, le pays le plus peuplé du continent. Le Nigeria a annoncé en effet la semaine dernière qu’il allait ratifier le traité de libre-échange, après des années d’hésitation et après avoir consulté ses spécialistes. Quant au Bénin, il attend toujours de même que l’Erythrée…

Mais la ZLEC, c’est 1,27 milliard de consommateurs pour un PIB de 3400 milliards de dollars. La concrétisation de ce marché commun fera de la ZLEC, le plus grand marché du monde après la Chine. En même temps, elle permettra aux Africains de commercer entre eux. Le commerce intrafricain ne représente aujourd’hui que 16% environs des échanges de ces Etats, tandis que l’Asie a déjà atteint sur ce plan 51% et l’Europe 70%. Il s’agit d’aller vers plus d’intégration commerciale pour réaliser le brassage des politiques. Cette seule perspective nous fait revenir au rêve d’un certain Kwamé N’Krumah dont le grand dessein de l’unité africaine se réalise peu à peu près de 50 ans après sa mort. Nous sommes concrètement en train d’écrire l’histoire à rebours. Car, au moment où sévit la guerre commerciale entre les nations développées, l’Afrique choisit le pari de l’intégration, en fédérant ses huit régions économiques. Les esprits chagrins verront qu’on n’a pas encore résolu la question essentielle des conditionnalités.

Et oui, c’est bien là, au niveau des critères de convergence, que les premiers points d’achoppement vont apparaître. Et je vois comment les anciennes métropoles feront d’une bouchée toute cette belle construction, si au sein des Etats il n’existe pas une ferme volonté d’avancer. Si l’on se rappelle les efforts déployés par la France pour contrecarrer la CEDEAO et d’autres regroupements sur le continent, on ne tardera pas à donner raison aux pessimistes. C’est pourquoi la zone de libre-échange gagnerait à disposer en son sein d’un bon groupe stratégique destiné à réfléchir et à faire des propositions sur ce type de menace géostratégique inévitable.

Mais les pires menaces se concentreront probablement sur la prochaine monnaie unique de la CEDEAO   prévue pour 2020. Malgré tout l’optimisme qu’une telle initiative m’inspire, je ne peux m’empêcher de penser à toutes les manœuvres déployées contre la Guinée de Sékou Touré et le Zimbabwé de Robert Mugabé pour détruire leurs monnaies respectives. Sur le seul cas de Sékou Touré, l’on sait désormais que pour esquinter ce dirigeant qui avait eu tort de réclamer l’indépendance immédiate de son pays, la France alla jusqu’à fabriquer des faux billets dont elle a inondé le pays. La descente aux enfers commence là, lorsque cette monnaie, le syli, commença à perdre de sa valeur sur le marché de façon vertigineuse. L’économie guinéenne en fut frappée de plein fouet. Qu’on se rappelle aussi ce que représente le calvaire vécu par les Zimbabwéens lorsque les Britanniques ont décidé de faire payer à Robert Mugabé sa trop grande liberté. L’économie du pays a été déstabilisée, la contraignant à faire recours à la planche à billets avec toutes les conséquences qui ont suivi.

Olivier ALLOCHEME

 

La zone Eco fera face à ce type de challenge, et je suis convaincu que les dirigeants ouest-africains l’appréhendent dès maintenant. Précisément, il ne faut pas sous-estimer les réticences de certains chefs d’Etats ouest-africains qui ne font pas mystère de leur attachement au FCFA. Ce sont les prochains torpilleurs de l’Eco, ceux qui seront utilisés pour dynamiter le système de l’intérieur. Pour fragiliser l’Eco, en dehors des techniques éprouvées des faux billets, les anciennes métropoles peuvent décider de l’asphyxier en ciblant les principaux produits d’exportation de la zone CEDEAO. Il suffit d’agir sur les cours mondiaux du pétrole, du café, du cacao et du coton pour y parvenir. Avouons qu’ici ce sera plus dur.

C’est dire que la nouvelle monnaie, comme la ZLEC, n’est pas à l’abri de manœuvres de torpillage. Ces manœuvres dont chacun peut imaginer les auteurs, devraient être anticipées pour répondre à un besoin de pérennité de notre intégration économique.

 

 

 

 

 

 

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