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Le triomphe de la vérité

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Enquête spéciale dans le secteur éducatif: Une année scolaire apaisée à l’actif de tous les acteurs


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Contrairement aux années antérieures, l’année scolaire 2018-2019 n’a pas été perturbée par des mouvements de grève. Ce qui a permis à bon nombre d’enseignants d’achever les programmes et de disposer du temps nécessaire pour organiser des séances de révision au profit des candidats aux divers examens de fin d’année. Apprenants, enseignants, et responsables partagent leurs sentiments sur cette année exceptionnellement calme et se prononcent aussi sur l’évaluation diagnostique des enseignants, l’une des réformes ayant marqué ce sous-secteur en 2018-2019.

« Cette année a été une année paisible, sans mouvement de grève. C’est au profit des élèves et des enseignants», lâche satisfait,  Tchisopa Sagui. Professeur de philosophie des collèges du public et du privé, l’homme ne cache pas sa joie d’avoir vécu une année scolaire paisible, sans les éternels mouvements de débrayage auxquels étaient habitués les Béninois jusque-là. Cette note de satisfaction, Tchisopa Sagui la partage avec d’autres acteurs du sous-secteur de l’enseignement secondaire, à l’instar d’Alphonse Djodohou, enseignant des sciences de la vie et de la terre (Svt) dans un collège de la place. Pour ce dernier, si l’année scolaire 2018-2019 n’a pas connu les tumultes des années précédentes, la raison est à rechercher dans la restriction des mouvements de grève au Bénin, à travers la modification par le Parlement en septembre 2018, de la loi 2001-09 du 21 juin 2002 portant exercice du droit de grève en République du Bénin. Alphonse Djodohou pense également que c’est à l’actif du gouvernement qui a voulu que les activités pédagogiques se déroulent sans anicroches, tout en mettant un accent particulier sur les revendications en cours : « Ils nous ont promis des choses et nous les exhortons à nous satisfaire, comme ils le font dans d’autres secteurs. Ce n’est pas bien de faire grève tout le temps. Dans d’autres pays, les gens ne font pas grève avant d’avoir satisfaction. Le gouvernement n’a qu’à valoriser la fonction enseignante».Alphonse Djodohou met aussi sur le compte de l’entrain des enseignants, le sentiment de trahison ressenti par moment vis-à-vis de leurs leaders syndicaux. « Les enseignants sont fatigués du comportement de certains responsables syndicaux. C’est à croire que chaque année on déclenche des grèves sur des sautes d’humeur, sans but précis.A un moment donné, on arrête le mouvement sans obtenir aucune satisfaction». Alphonse Djodohou, explique que ceci obligeait les enseignants par la suite« à courir dans les classes pour faire des bachotages afin de rattraper leurs collègues intervenant dans le privé».Ce qui n’était pas sans conséquence sur les apprenants, selon Ruth Bankolé, déléguée d’établissement. Cette dernière déclare: « les années passées, en raison des grèves intempestives, les taux de réussite étaient faibles dans les classes. Au cours de cette année on a noté une grande différence ». Abondant dans le même sens, Emma-Alice Laourou, censeur du CEG 2 d’Abomey-Calavi, renseigne qu’au cours de cette année, les résultats ont été satisfaisants dans son établissement.Du côté des parents d’élèves, leurs interventions se résument à des appels lancés à l’endroit des acteurs en charge de l’éducation et de la formation des enfants afin que, tout comme l’année finissante, les années à venir puissent se dérouler sans les mouvements de grèves.

  • Que retenir de l’évaluation diagnostique des enseignants du secondaire ?

L’évaluation diagnostique restera sans doute comme l’une des réformes ayant profondément marqué le sous-secteur de l’enseignement secondaire au cours de l’année scolaire 2018-2019. Initiée par le gouvernement pour jauger la connaissance des enseignants, cette réforme continue de susciter des réactions mitigées dans le rang des acteurs du sous-secteur.

En janvier 2019, le test est boycotté par la majorité des enseignants. Certains avancent que les raisons ayant empêché des enseignants de composer sont légions.« Je n’ai rien contre cette évaluation. Mais je n’ai pas composé. Je suis allé dans le centre, mais il faillait être là pour constater que c’était impossible de composer », confie un enseignant. A l’en croire, « il y avait un vacarme terrible. La police était là, interdisait de s’approcher.On sentait  la tension monter, il y avait une montée d’adrénaline. Je pense que les gens n’ont pas composé parce qu’ils n’ont pas cerné le bien-fondé de la chose ». Pour corriger le tir, l’homme invite le ministre à communiquer sur les mesures qu’il prend,car selon lui, beaucoup ont composé sans savoir à quoi tout cela rimait.« C’est comme si c’est pour dire que ceux qui nous ont formés dans les écoles normales n’ont pas bien fait le travail, encore que ce sont eux qui nous ont formés ou était-ce juste une évaluation de routine» se demande-t-il avant d’avouer qu’il n’a  pas composé à cause des craintes pour sa sécurité personnelle. Ceux qui sont dans le même cas que lui, demandent au gouvernement de donner une seconde chance aux enseignants du secondaire qui n’ont pas pu composer, comme il l’a fait dans le primaire avant de juger. Cependant, d’autres enseignants affirment qu’il s’agit d’une mesure mal pensée.Si on relève que l’enseignant souffre dans une matière, qu’on forme les enseignants dans cette matière proposent-t-ils, argumentant qu’en réalité, ce ne sont pas les enseignants qui ne sont pas efficaces, mais plutôt les apprenants qui n’assimilent plus ce qu’on leur enseigne.

Des approches de solutions pour rehausser le niveau des apprenants

C’est un secret de Polichinelle aujourd’hui que le niveau des élèves est relativement bas et qu’il y a lieu de mener des actions pour résoudre ce problème. Des propositions faites, il ressort que les gouvernants doivent encadrer plus l’enseignement au lieu de supprimer les cours de renforcement dans le public communément appelés TD (travaux dirigés), tandis que dans le privé, ces TD sont obligatoires. Pour apprécier les résultats des établissements publics par rapport à ceux du privé, quelques enseignants proposent aux décideurs d’interdire les TD dans le privé pour une comparaison digne du nom. « Ce sont les mêmes enseignants qui interviennent dans le privé et dispensent les mêmes cours puisdégagent et un autre enseignant vient faire les TD aux apprenants inscrits dans les établissements privés. Les enfants n’ont pas été dans les mêmes conditions, donc ce n’est pas bien de les mettre aux prises pour la même compétition avec les mêmes critères d’évaluation», selon leurs explications.D’autres ont également évoqué la construction en grand nombre de laboratoires et leur équipement, des bibliothèques et autres infrastructures censées permettre aux apprenants de mieux comprendre ce qu’on leur enseigne.

Laurent D. KOSSOUHO

 

Ruth Bankolé, déléguée d’établissement

« Les grèves nous retardent»

Cette année scolaire a été spéciale, parce qu’il n’y pas eu grève et que nous avons vite terminé les programmes pour permettre aux candidats d’aller aux  examens dans un délai raisonnable. Si cela peut continuer les années à venir, ça serait très bien. Les grèves nous retardent, car elles empêchent les enseignants de finir les programmes. Et par conséquent, cela fait reculer les élèves. A l’heure où je vous parle, presque tous les programmes sont achevés dans toutes les classes. Si après les examens nationaux, nous reprenons le chemin des classes, ça sera juste pour calculer les moyennes. Les années antérieures où il y a eu des grèves, on enregistrait un très faible taux de réussite dans les classes. Mais cette année, on note une grande différence. Même si ce n’est pas un meilleur taux, on a le minimum qu’on souhaite. Dans ma classe par exemple, la majorité va passer en classe supérieure. Seuls 2 ou 3 élèves vont redoubler sur un effectif de 39. Cette année, tout s’est bien passé, on dirait que l’actuel gouvernement a fait un grand effort. Certainement que les syndicalistes et le gouvernement ont trouvé un compromis pour qu’il en soit ainsi.

 

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Tchisopa Sagui, enseignant de philosophie

« Nous avons pu finir les programmes cette année »

Une année scolaire sans mouvement de grève, c’est au profit des élèves et des enseignants, parce que nous avons pu finir les programmes et on a commencé les séances de révision avec les classes d’examen. C’est excellent. On a parlé de l’encadrement de la grève, mais en réalité, le droit de grève a été simplement retiré aux enseignants (…). L’enseignant béninois a un problème, celui de la motivation. Je suis vacataire, je suis déjà en vacances. Quand je touche le salaire du mois de mai, je passe les mois de juin, juillet et août à la maison, et c’est peut-être en novembre qu’on va commencer par me payer pour mes prestations de septembre et d’octobre. Il faut la motivation. Ils ont pris un arrêté pour revoir le taux horaire des vacataires en hausse pour nous soulager un peu, mais ils l’ont encore annulé sans nous en donner les raisons. La solution fondamentale est d’améliorer les conditions de vie et de travail des enseignants et tout est réglé.

 

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Rock Gbeffè, enseignant-stagiaire

« Les enseignants et l’Etat se sont entendus pour que cette année soit apaisée »

Cette année n’a pas été perturbée. Les cours se sont déroulés normalement. Les programmes ont été achevés à notre niveau. D’ailleurs, lors de nos animations pédagogiques, il y a eu des contrôles et on nous suivait dans l’évolution du programme. Cela nous a évité de traîner par rapport à certains établissements privés. On était largement en avance sur certains d’entre eux. Les cours se sont déroulés comme cela se doit, et c’est une fierté, puis les élèves ont été dans les meilleures conditions. Les cours ont été dispensés et ils ont été évalués normalement. Je ne sais pas si c’est parce que les enseignants ont été contraints de respecter la loi sur la grève, ou que leurs revendications ont été satisfaites, mais j’ai fini par comprendre que les enseignants et l’Etat se sont entendus pour que cette année se déroule normalement.

 

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Trois questions à Emma-Alice Laourou Kissèzounou, Censeur du CEG 2 d’Abomey-Calavi.

L’Evénement Précis : S’il vous était demandé de donner vos impressions de l’année scolaire 2018-2019 qui tire vers sa fin, que répondriez-vous ?

Emma-Alice Laourou Kissèzounou : Mes impressions sont bonnes, car les cours se sont très bien déroulés et les programmes sont achevés. Nos résultats du premier semestre sont satisfaisants et nous sommes à pied d’œuvre pour sortir ceux du second semestre en attendant les résultats des examens nationaux (BEPC et BAC).

Comment avez-vous expérimenté l’année scolaire 2018-2019 qui s’est déroulée sans des mouvements de débrayage ?

Les grèves doivent être une exception. Cette année scolaire 2018-2019 apaisée est due à la politique gouvernementale qui a supprimé, quasi-totalement, le droit de grève en généra là travers la Loi N° 2018-34 du 05 octobre 2018 modifiant et complétant la Loi N° 2001-09 du 21 juin 2002 portant Exercice du droit de grève en République du Bénin), et aux dispositions prises par le ministre de l’enseignement secondaire et de la formation technique et professionnelle, Mahougnon Kakpo relatives aux lettres de mission remises en main aux chefs d’établissement et qui contiennent les cahiers de charges du personnel administratif et enseignant en particulier.

Que pensez-vous de l’encadrement de la grève au Bénin ?

Je suis enseignante et en toute en sincérité, je vous dis que les mouvements de débrayage dans nos rangs ont de lourdes conséquences sur l’Etat, nos apprenants et doublement sur nous-mêmes  en tant que parents et enseignants-éducateurs. C’est à nous de mettre les bouchées doubles pour rattraper ce qui peut l’être encore. J’ai alors des impressions de grand soulagement, et surtout d’assurance que les résultats de cette année où tous les programmes sont achevés et que des séances de rémédiation ont été effectives, seront meilleurs et de qualité.

Avez-vous un message fort à délivrer ?

Je félicite tous ceux qui ont œuvré, d’une manière ou d’une autre, afin que cette année scolaire soit apaisée. Félicitation à nous tous et merci au quotidien L’Evénement Précis pour avoir pris l’initiative de faire le bilan de l’année qui s’achève.

Propos recueillis par Laurent D. Kossouho (coll.)

 

 

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