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Le triomphe de la vérité

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Edito: La ZLECA et ses défis


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Le Bénin et le Nigeria ne figurent pas (encore) parmi les 22 pays ayant ratifié l’accord mettant en vigueur la zone de libre-échange africain (ZLECA). Les 22 pays requis ayant ratifié le document de création de cette zone, elle est entrée en vigueur il y a une semaine, le 30 mai 2019.

C’est une avancée majeure sur le continent, même si certains pays comme le Bénin sont encore à la traine.  Mais la signature de cet accord de libre-échange le 21 mars 2018 et son entrée en vigueur la semaine dernière seulement, ne sont pour le moment que des pas décisifs mais insuffisants pour la construction d’un espace commercial africain réellement intégré. Il est vrai, il s’agit d’un progrès permettant de dépasser les 13% de commerce intra-régional africain (pour les importations) et 17% pour les exportations pour les sept dernières années. On peut reconnaitre que la ZLECA constitue un pas décisif également par rapport aux initiatives similaires qui ont échoué par le passé, que ce soit le Plan d’action de Lagos de 1980 et le projet de Communauté économique africaine datant de 1991.

L’union douanière n’a jamais pu se réaliser sans accroc dans la CEDEAO sensée être la zone économique la plus intégrée du continent. De plus, la seule union douanière du continent  est celle établie il y a 109 ans, la Southern African Customs Union, réunissant outré l’Afrique du Sud, la Namibie, le Botswana, le Lesotho et le Swaziland.  Même la tentative en 2015 de créer le Traité Tripartite réunissant les pays de l’Est et du Sud du continent, n’a pu aboutir ; seul quatre des vingt-sept Etats concernés ont ratifié le traité. C’est ce que Paul Kagamé, alors président en exercice de l’Union Africaine, appelait « la crise de la mise en œuvre ».

C’est pour  tout cela qu’il faudra se méfier de cette zone, sans pour autant la repousser. Même si le Bénin n’en est pas encore membre, il convient de remarquer que toutes les balises ne sont pas encore posées pour un décollage véritable d’une intégration commerciale africaine. Nous sommes en 2019, à l’ère de ce que l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) a pu appeler la pire crise commerciale mondiale depuis 1947, au moment où s’affrontent Américains et Chinois dans une guerre dont l’issue est pour le moins incertaine.  A cela s’ajoutent les incompréhensions entre communautés au sein de la même Afrique. En Afrique du Sud, une féroce guerre se mène actuellement contre les étrangers africains accusés de prendre les emplois des autochtones. Pas plus tard qu’hier jeudi, le président nigérian Muhammadu Buhari a signé un décret-loi qui accorde la préférence nationale aux produits nationaux dans la commande publique. Il va même plus loin en excluant de visa tous les étrangers qui auraient les mêmes compétences professionnelles que les Nigérians résidents…C’est dire que la ZLECA semble sur ce point une marche à contre-courant dans une Afrique qui se replie sur elle-même et un monde où les relations commerciales demeurent difficiles.

Le challenge est grand. Parmi les obstacles à franchir pour le relever, il y a forcément les négociations sur les règles d’origine, les tarifs applicables et les concessions dans le secteur des services.  Comment les gouvernements africains pourront-ils gérer les inévitables conflits entre gagnants et perdants de cette intégration ?   Pourront-ils respecter leurs signatures quand ils sentiront que les nouvelles règles frappent leurs entreprises nationales ?  Que faire des pertes de revenus douaniers, une fois que les frontières seraient ouvertes ? Quels sont les mécanismes de compensation à mettre en place ?

Les questions sont nombreuses et les réponses difficiles. Je fais partie de ceux qui espèrent que le Bénin adhère à cette initiative, tout en ayant pris le soin d’étudier ses avantages et ses inconvénients. Car ceux qui seront les vrais gagnants de la ZLECA, ce sont les Etats industrialisés d’Afrique, ceux qui figurent notamment dans la liste des cent économies les plus compétitives du monde, selon l’indice mondiale de compétitivité publié en 2018 : l’Ile Maurice, l’Afrique du Sud, les Seychelles, le Maroc, la Tunisie, le Botswana, l’Algérie, le Kenya, l’Egypte, et la Namibie. L’adhésion du Bénin à une telle initiative doit donc être couplée à une stratégie nationale d’industrialisation dont le but devra être d’encourager les industries locales à exporter en Afrique et ailleurs dans le monde.

 

 

 

 

 

 

 

 

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