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Le triomphe de la vérité

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Déclaration de Guillaume Attigbé, Président du CNDS : « La paix d’aujourd’hui est relative à la satisfaction des revendications»


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A l’instar de plusieurs pays africains en voie de développement, le Bénin se veut confronté à des défis majeurs dont la résolution reste en grande partie tributaire d’une situation sociale apaisée. C’est dans ce cadre que le gouvernement béninois a approuvé la signature au Bénin, le 30 août 2016, d’une Charte nationale du dialogue social par l’ensemble des parties prenantes à savoir, le gouvernement, le Conseil national du patronat du Bénin et les organisations syndicales des travailleurs, et la création du Conseil national du dialogue social (Cnds), par décret n°323 du 28 juin 2017. Après un an d’exercice, le Cnds présidé par Guillaume Attigbé a présenté le rapport sur l’état du dialogue social 2018. Un document dont il présente les différents axes ainsi que les  défis à relever pour le maintien du dialogue social, au détour d’une interview accordée le vendredi 24 mai dernier au siège de l’institution.

 

L’Evénement Précis : De quoi relève le rapport sur le dialogue social publié il y a quelques jours ?

Guillaume Attigbé : Le Cnds a été créé grâce à l’accord tripartite entre le gouvernement, les employeurs et les travailleurs, en 2016. Il y a eu la publication d’un décret qui rend obligatoire la publication d’un rapport sur le dialogue social. Ledit rapport est celui de 2018. Comme c’est notre première année, nous avons essayé de nous organiser et d’imaginer un changement et un rapport qui puisse retracer un certain nombre d’éléments à mettre à la disposition du gouvernement, des partenaires tripartites, pour apprécier la situation sociale. Dans ce premier rapport, nous-nous sommes appesantis sur les organes du Cnds, les éléments d’analyses ayant permis de faire le rapport, les revendications, les secteurs concernés par ce rapport, le fonctionnement des structures du dialogue social au plan national que ce soit dans le public que dans le privé, les revendications des travailleurs et points de négociations ayant abouti aux accords, les lois intervenues dans cette période, les difficultés liées au fonctionnement des organes du Cnds ainsi que des perspectives et recommandations pour un meilleur fonctionnement du Cnds.

On a tendance à confondre le rôle du Cnds à celui du Conseil économique et social. Quel est votre champ d’action ?

Le champ d’actions du dialogue social se trouve dans le domaine du travail. Notre champ d’action ne s’étend pas au domaine politique. Notre première préoccupation, c’est le monde du travail. Le dialogue social est une terminologie qui s’apparente au monde du travail. Mais, on l’extrapole en l’étendant à tous les domaines. Le dialogue social a donné naissance aux autres formes de dialogue, à savoir : le dialogue interreligieux, dialogue politique, le partenariat public-privé et autres. Mais, ces formes de dialogue ne sont pas structurées. Pour pratiquer le dialogue social, il y a des préalables, des valeurs, une démarche à suivre. Ce qu’on ne retrouve pas dans les autres formes de dialogue. Le dialogue social a des repères. La communication, la recherche d’informations, la confiance, le respect de l’autre sont autant d’éléments de valeurs que porte le dialogue social mais qui ne sont pas des préalables aux autres formes de dialogue. C’est pour ça que les autres formes de dialogue vont dans tous les sens. Il y a des préalables à établir et qu’on ne retrouve pas dans les autres formes de dialogue. C’est une affaire de concept. Nous ne sommes pas chargés du dialogue politique, même si la politique influence notre dialogue. C’est pour cette raison que nous ne sommes pas tellement vus dans la crise sociopolitique actuelle. A l’une de nos sessions, j’ai même invité les politiciens à s’inspirer des expériences du dialogue social parce qu’il y a des préalables pour se lancer dans un dialogue, si on veut que cela aboutisse à des résultats. Quand on parvient à un accord partiel, dans le cadre du dialogue social, cela permet d’aller de l’avant et dans une suite logique. Beaucoup de gens interpellent la Cnds sur son silence vis-à-vis de la situation actuelle, mais, ce n’est pas dans notre cahier de charge.

Quel est aujourd’hui l’état des lieux du dialogue social au Bénin ?

Nous avons été installés dans une situation de crise qui a commencé depuis décembre 2017. Depuis cette période, les travailleurs ont décidé de bloquer leurs rapports avec le gouvernement et le Cnds. Les négociations ont été bloquées alors que nous avions été installés en août 2017. L’état des lieux n’était pas des plus reluisants au moment où on intervenait. On frôlait déjà la catastrophe par rapport à l’année blanche qui pointait à l’horizon, les travailleurs du secteur de la santé observaient une grève sans service minimum, c’était la paralysie dans le secteur de la justice où les audiences ne se tenaient plus. Tout était bloqué au niveau national. C’est dans cette ambiance que le Cnds a évolué et nous avons essayé de conseiller les différentes parties pour trouver des approches qui peuvent tenir lieu de consensus, amener les travailleurs à reprendre leurs activités au niveau de la grande commission composée des centrales syndicales et du gouvernement. Au niveau du Cnds, c’était beaucoup plus une déclaration que des activités. Nous avons eu une première rencontre en avril, avec le Chef de l’Etat. Ce qui a permis de décrisper la situation, de relancer le dialogue dans la commission centrales syndicales-gouvernement présidée par le premier ministre d’Etat Abdoulaye Bio Tchané. Cette commission a formulé de très belles propositions de sortie de crise. Ces concessions ont permis de dégeler un tant soit peu la situation, favoriser la poursuite de l’année scolaire, même si la crise persistait toujours. A l’une des sessions du Cnds, nous avions pris trois résolutions au nombre desquelles nous avons dit au gouvernement  d’anticiper sur les grèves au lieu de les subir, afin de passer une année scolaire 2018-2019 sans grève. Nous constatons que le gouvernement a suivi cette recommandation car, l’année scolaire actuelle est pratiquement terminée et a été une année scolaire plus apaisée.

Cela n’est-il pas lié à la loi sur la grève ?

Non. Il y a eu la loi sur la grève mais il y a eu aussi l’accompagnement qu’il faut pour apaiser les tensions. Quand vous prenez les revendications de l’époque où il y avait le problème du statut des enseignants, la prise des arrêtés d’application,  le gouvernement a non seulement réglé les statuts mais aussi payé les incidents qui découlent de ces statuts. Dans le même temps, il y a eu la nouvelle loi sur la grève mais, le gouvernement a procédé à la satisfaction aux revendications des travailleurs. Les travailleurs ne cherchent pas à aller en grève, plutôt une réponse aux revendications. Si on ne prenait que la loi qui ramène la grève à 10 jours et qu’on s’arrêtait à ce niveau sans prendre d’autres mesures pour répondre à leurs revendications, on ne connaitrait pas la même situation. C’est parce qu’il y a eu un certain nombre de solutions apportées aux revendications qui ont aboutis à une année scolaire apaisée. La satisfaction aux points de revendication a été poursuivie cette année, et sera mentionnée dans notre prochain rapport. Si nous voulons une paix relative à l’année scolaire 2018-2019, il faut continuer sur cette même lancée et cultiver cette paix. La paix d’aujourd’hui n’est pas relative à la loi sur la grève. C’est la conjugaison des deux qui donne l’accalmie que nous avons aujourd’hui.

Quelles sont les difficultés liées au dialogue social ?

Parler des difficultés liées au dialogue social, c’est parler de celles du Cnds. C’est une institution qui n’existait pas. Les difficultés sont surtout liées à l’organisation des élections professionnelles pour régler le problème de la représentativité. Le Cnds n’est qu’à Cotonou or, nous avons pour mission d’étendre nos bases dans les communes afin d’avoir un impact réel en matière de dialogue social. Mais, nous avons des problèmes avec les employeurs et les travailleurs. Ces derniers n’ont toujours pas de structures qui couvrent ces zones géographiques. Pour installer nos bases dans les communes, on doit avoir  les représentants des travailleurs et des employeurs. Depuis 2010, il n’y a plus eu d’élections professionnelles et cette année, on devrait être à la cinquième édition. C’est un frein au dialogue social. Si nous devons continuer de travailler, il nous faut régler la question des élections professionnelles. Il y a aussi la question des moyens tant au niveau du Cnds que des organes. Il est prévu que ces organes tiennent des rencontres trimestrielles mais certains le tiennent une fois dans l’année. Nous avons aussi besoin de personnel professionnel au Cnds. Pour faire le travail, à notre niveau, nous avons demandé à avoir un statut social auprès des ministères et autres structures. Certains membres de ces structures vont nous représenter en tant qu’observateurs, même si les statuts d’autres structures ne le permettent pas. L (‘accès aux structures et à l’information posent un grand problème au niveau du Cnds. Mais, l’Etat a fait de grands efforts au niveau de la contribution budgétaire.

Etes-vous satisfaits des actions menées ?

Nous sommes sur la bonne voie. Au-delà de l’état des lieux, le rapport pose un certain nombre de diagnostic. Tous les problèmes relevés dans le rapport sont résolus à travers un plan triennal pour la promotion du dialogue social. C’est notre boussole. C’est la réponse au rapport et elle contient les perspectives. Le plan de travail annuel du Cnds sera tiré du plan triennal élaboré. Le rapport sera le plan de travail avec le gouvernement et nous travaillerons avec les partenaires qui nous accompagnent sur le plan triennal. Ce document vient mettre fin au pilotage à vue et les deux prochaines années vont nous édifier à partir du document.

Rastel DAN

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