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Le triomphe de la vérité

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Examen du projet d’amendement de la constitution du Bénin: 2ème échec de la révision à l’Assemblée, Le Parlement opte pour la voie référendaire


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Les députés de la 7ème législature viennent de franchir le pas décisif devant conduire à la modification de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990. Après la prise en considération de la proposition de loi portant amendement à la Constitution lors de la séance plénière de ce jeudi 05 juillet, 19 députés de la minorité parlementaire ont fait échec à la voie parlementaire, ouvrant ainsi la seconde voie qui s’offre, celle référendaire.

La première phase, à savoir la prise en compte des ¾ a été un acquis. Les députés ont d’abord adopté à l’unanimité le scrutin à bulletin public à la tribune. Et au terme du vote, les scrutateurs ont dénombré 62 bulletins verts (Voix pour), 19 bulletins rouges (Voix contre) et un bulletin jaune (Abstention). La proposition de loi a été ainsi prise en considération par la majorité des ¾ de l’Assemblée nationale.

Le Président du parlement annoncera l’étape suivante en procédure d’urgence. Le second vote organisé livrera les mêmes résultats que le premier mais empêche le projet d’aboutir parce qu’il s’agit ici d’avoir les 4/5ème de voix favorables, ce qui équivaudra au moins à 66 députés votant oui, contre les 62 obtenus. Conséquence, le projet est d’office recalé et pourra éventuellement faire l’objet de référendum suivant l’article 155 de la Constitution qui dispose : « La révision n’est acquise qu’après avoir été approuvée par référendum, sauf si le projet ou la proposition en cause a été approuvé à la majorité des quatre cinquièmes des membres composant l’Assemblée nationale». Second échec en moins de deux ans pour le passage de la révision de la Constitution par la voie parlementaire. Si à la première tentative, le projet alors porté par le Président Talon avait été bloqué dès la première phase, c’est à la seconde phase que celui-ci, dont huit députés sont initiateurs, a connu son échec. Retour sur l’ambiance qui a prévalu hier au parlement.

La séance plénière convoquée sur trois points et prévue pour 10 heures, n’a démarré qu’après 13heures. Le rapport de la commission des lois s’articule autour de trois points essentiels à savoir la présentation de la proposition de loi à travers ses motifs et les différents articles à modifier, les discussions en commission ainsi que l’avis de la commission.

En effet, selon le rapport, la perspective de l’organisation de multiples élections pour les treize prochaines années impactant négativement l’économie nationale, le climat social, le climat des affaires, les finances publiques et le processus du développement du Bénin ont conduit les députés à un réexamen du calendrier des élections. Ils proposent alors un alignement de la durée de tous les mandats. Ainsi, les députés à l’instar des autres élus auront un mandat de cinq ans et des élections groupées seront organisées la même année afin d’éviter le cycle infernal de l’organisation des scrutins électoraux qui, entre autres conséquences, éprouvent les finances publiques. La proposition de loi porte également sur la suppression de la peine de mort, l’institutionnalisation de la Cour des Comptes, la possibilité d’instaurer par voie législative, une discrimination positive au profit des femmes pour leur représentativité à l’Assemblée nationale, et l’alignement du mandat des députés sur celui des autres élus en vue de l’organisation des élections groupées en 2026. Il y est, par ailleurs, introduit des dispositions spéciales qui prévoient un mandat transitoire de 07 ans pour les députés qui seront élus en 2019.

 

Débat historique et houleux !

C’est l’honorable Guy Mitokpè qui a planté le décor des interventions avec à la clé, une reconnaissance ironique à l’endroit de la Commission des lois pour la célérité qui a caractérisé ses travaux. « Les quatre points évoqués par ceux qui pensent qu’on peut enfin aider notre pays à avoir une constitution amendée, sont assez intéressants. Il y a des raisons que nous puissions aller vers la révision de notre Constitution » a-t-il indiqué à l’entame de son intervention. Il a ensuite déploré le « tapage médiatique » qui a suivi l’introduction de proposition de la loi au parlement. Pour lui, les pays qui ont réalisé l’exploit d’une meilleure représentativité des femmes dans les instances politiques n’ont pas procédé ainsi. Selon Guy Mitokpè, l’argument avancé par les initiateurs du texte ne tient pas en ce sens qu’il y a moins de femmes dans le gouvernement et au parlement. Tout en donnant l’exemple de la prouesse réalisée par le Ghana en alignant ses élections, il a fait savoir que le Bénin n’est pas encore en mesure de réduire considérablement son taux de pauvreté. Il a été appuyé par son collègue Garba Yaya qui a accentué son intervention sur la procédure de la démarche, et sa propre conviction sur le dossier en étude. A l’entendre, les mobiles avancés sont accrocheurs mais ses collègues de la majorité parlementaire ont selon lui, écourté la démarche de la recherche du consensus en s’arrogeant la paternité du projet. « Les concertations sont en cours pour une prise de décision mais vous avez choisi de programmer le dossier à l’ordre du jour. La manière de conduire cette ségrégation positive en faveur des femmes ne me convient pas. (…) C’est pourquoi nous avons des réserves par rapport au Code électoral qui est essentiel» a-t-il déclaré, avant de demander que plus de garanties lui soient données quant à la prise en compte de ses points de vue évoqués lors des séminaires ayant précédé cette étape. Après avoir partagé les couacs relevés par ses collègues dans la démarche, le député Idrissou Bako a demandé que la proposition de loi soit prise en considération pour permettre à la Commission de l’examiner à fond et de passer au vote par voie référendaire. Pour l’honorable Valentin Djènontin, la Constitution du Bénin est la loi qui incarne l’entente du vivre-ensemble. Le débat autour de sa révision, quelle qu’en soit la nature, est un débat qui doit dépasser les quatre murs de l’Assemblée nationale, et sur lequel tous les juristes et autres couches de la société doivent être interrogés. Tout en approuvant les quatre points à amender, l’élu du peuple n’admet pas la précipitation avec laquelle les choses sont en train d’être conduites. Il a de ce fait, invité la plénière à rechercher davantage de consensus autour du projet avant de revenir là-dessus.

 

La majorité parlementaire dans un rôle diplomatique

Prenant la parole, l’honorable Barthélémy Kassa a tenté d’éclairer la lanterne de ses collègues de la minorité parlementaire en énumérant les raisons fondamentales qui ont conduit à l’initiative parlementaire visant à amender la loi fondamentale avant les prochaines élections au Bénin. Dans son intervention, l’ancien ministre de Boni Yayi a indiqué que l’introduction de la suppression de la peine de mort et la discrimination positive en faveur des femmes à travers une bonification constitutionnelle n’est qu’une première étape qu’il faut avoir le courage de franchir. « … Mais les gens crient toujours à la suspicion. Est-ce les élections groupées ? Il n’y a rien de suspect dans les quatre lignes soumises à l’amendement », a-t-il lancé comme pour rassurer l’opinion publique et ses collègues en vue d’obtenir leur adhésion pour la prise en considération du projet. Avec des exemples de cas où le Bénin a été bloqué en raison du nombre très insignifiant de femmes au parlement et le coût exorbitant des élections de 2015, 55 milliards de francs CFA, André Okounlola, co-auteur de la proposition de loi, a invité ses collègues à faire œuvre utile en permettant au Bénin de franchir cette fois-ci, cette étape primordiale. « La Cour des comptes et la peine de mort sont des régulations (…) En 2021, il y aura bel et bien l’élection d’un nouveau président de la république. Je voudrais que le peuple sache qu’on a associé tous les collègues à l’initiative que nous avons prise. On a discuté et leur a remis copie d’aller lire. C’est une initiative purement parlementaire qui s’est révélée au terme de nos séminaires », a développé le député Okounlola lors de son intervention. Il a été également appuyé par ses collègues David Gbahoungba, Benoit Dègla, Nassirou Bako Arifari, Augustin Ahouanvoébla et autres qui ont évoqué par ailleurs, l’obligation pour le Bénin de respecter les directives communautaires, notamment celles de l’Uémoa qui imposent aux Etats-membres, l’amélioration de la représentativité des femmes dans les instances politiques. Au nom du groupe parlementaire « Union fait la nation » l’honorable Antoine KolawoléIdji a fait remarquer que le Bénin est en campagne électorale en permanence en raison des élections qui se suivent presque tous les deux ans. « Nous ne pouvons pas passer quinze ans de l’histoire de notre pays à faire les élections ». Sur la question de la représentativité de la gent féminine, le député IdjiKolawolé, auteur de la proposition de loi, a martelé que le Bénin ne peut jamais prétendre évoluer s’il met de côté 52% de sa population. A sa suite, l’ancien président du parlement, Mathurin Nago, a salué la clairvoyance de ses collègues de l’opposition qui ont reconnu la pertinence des quatre points essentiels à toucher. Il les a cependant invités à transcender les querelles politiques pour faire triompher l’intérêt général. « … J’ai vu des gens capables de transcender ces querelles qui sont des frontières artificielles (…) Il est question d’amender la Constitution sur quatre points essentiels. La question de la meilleure représentativité des femmes est un problème qui a été discuté notamment, au cours des 5ème et 6ème législatures. Le regroupement des élections a d’énormes avantages et tout le monde en est conscient…» a-t-il ajouté. Il faut noter que les députés pro-Talon ont évité d’attaquer leurs collègues de l’opposition dans leurs interventions. Ils ont plutôt salué leur clairvoyance et la bonne foi dont ils ont fait preuve en reconnaissant la pertinence des quatre points à amender puis tenté de les rassurer afin d’obtenir leur adhésion.

Face aux inquiétudes des députés de la minorité parlementaire, le ministre de la justice, Sévérin Quenum a rassuré la Représentation nationale qu’il s’agit de points essentiels dont l’insertion dans la loi fondamentale permettra de réformer le système politique du Bénin. « En s’associant à cette proposition de loi, le gouvernement voudrait engager l’ensemble des députés pour hisser le Bénin vers une meilleure place sur l’échiquier international», a-t-il laissé entendre.

Le parlement sous haute sécurité

A près la pluie matinale de ce jeudi qui a laissé place à un beau temps aux environs de 10 heures, les députés de la 7ème législature se sont fait désirer pendant plusieurs heures à l’hémicycle. Dans les coulisses, les conciliabules allaient bon train. Mais autour du siège de l’institution parlementaire régnait un calme plat, en raison des nombreux détachements de la police républicaine qui assuraient la sécurité des lieux. Des dispositifs sécuritaires ont ainsi été placés dans les quatre portions de rues qui encerclent l’institution, pour contrôler toute entrée. Les quelques responsables d’organisations syndicales, le président du Plp, Léonce Houngbadji et autres acteurs de la société civile et quelques citoyens curieux ayant effectué le déplacement de Porto-Novo ce jeudi se sont vu refuser l’accès à l’esplanade extérieure du Palais des Gouverneurs. Ce qui a permis aux députés de regagner en toute quiétude le siège de l’institution. Pendant ce temps, tous étaient câblés sur Radio hémicycle. En direct depuis les studios, les auditeurs pouvaient écouter la députée SofiathSchanouArouna, la Deuxième secrétaire parlementaire et M. Joël Atayi-Guèdègbé sur la procédure devant conduire à l’examen de la proposition de loi portant amendement à la Constitution du 11 Décembre 1990, introduite par un groupe de huit députés de la majorité parlementaire et qui retenait jusque-là toutes les attentions. Ce n’est qu’après plusieurs coups de sirène que la séance plénière a été reprise avec la présence effective à l’hémicycle de la majorité des députés des deux grandes tendances politiques. Le jeu en valait vraiment la peine. Lecture et adoption du compte-rendu de la plénière du mardi 03 juillet puis lecture sera donnée du rapport des travaux de la Commission des lois avant que place ne soit faite au débat.

 

Germin DJIMIDO

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