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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le rempart à reconstruire


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Il y a 25 ans, naissait la Cour Constitutionnelle. Au fil de ce quart de siècle d’existence, elle est apparue comme la colonne vertébrale de la démocratie béninoise. La prééminence institutionnelle que lui reconnaît la Constitution l’a déjà revêtue d’une puissance d’action qui ne s’est jamais démentie au cours de ces vingt-cinq années. « Les décisions de la Cour Constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours », nous dit l’article 124 de la loi fondamentale qui ajoute, en son dernier alinéa : « Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités civiles, militaires et juridictionnelles ».

Cette autorité dite de la chose jugée est sans doute l’arme la plus puissante aux mains des sept sages. A bien des égards, elle aura sauvé le pays, lors des impasses électorales notamment.  Et donc, qu’on le veuille ou non, le consensus réalisé autour de cette institution est la preuve que les acteurs publics au Bénin sont conscients que seul ce compromis librement consenti peut nous faire avancer.  Compromis, parce que l’article 124 pose le principe non pas de l’infaillibilité de la Cour, mais celui de son inattaquabilité. Disons-le simplement : même si la Cour commet des erreurs, vous ne pourrez rien contre ses décisions. Vous devez les appliquer.

C’est en cela que l’article 124 constitue une arme nucléaire déposée aux mains de sept personnes qui peuvent en faire ce que bon leur semble. A des moments clés de notre marche démocratique, il a permis de lever des impasses, de juguler des crises, de tracer la voie, même si elle est apparue tordue. Il en est ainsi lorsqu’en 2001, il a fallu respecter à la lettre les deux semaines nécessaires entre le premier et le second tour de l’élection présidentielle. Les désistements en cascades de dernière heure, auraient pu constituer un blocage irrémédiable au respect de cette exigence constitutionnelle. La fermeté de la Cour a conduit à un second tour de toutes les controverses. Aujourd’hui, parmi les questions que soulève cette jurisprudence imposée par la Cour, une seule devrait faire douter de l’efficacité de cette décision : Combien de temps devrait durer la campagne entre les deux tours ?

En la matière, la mandature finissante de la Cour soulève encore plus de questions. En dépit de tout ce qu’on peut dire de bien sur la Cour Holo, certaines de ses décisions  risquent fortement d’être remises en cause par de nouveaux revirements jurisprudentiels. Ainsi en est-il de l’âge minimum pour être candidat à une élection présidentielle. La décision d’accepter les candidats ayant 39 ans plus une seconde, équivalant selon la Cour à 40 ans, heurte toutes les évidences.  Ce fut une décision taillée sur mesure pour favoriser un candidat à l’époque. Le tollé qu’elle a pu soulever a amené la Haute juridiction à des contorsions rhétoriques qui n’ont convaincu personne. Elle s’était fourvoyée et il faut une nouvelle mandature pour dire et juger clairement qu’il faut au Bénin, en l’étape actuelle de notre Constitution, avoir 40 ans révolus pour être candidat à une élection présidentielle.

On n’oubliera pas non plus l’énorme chape d’incertitude que la Cour Holo fait peser actuellement sur le droit de grève au Bénin. La DCC 18-003 du 22 janvier 2018, qui octroie le droit de grève à tous les agents de l’Etat, y compris aux policiers et aux militaires fut une grave erreur. Je continue de dire que nulle part au monde le droit de grève n’est intégral et que nous n’inventerons pas le fil à couper le beurre. C’est une chape d’incertitude sur le Bénin, parce que le jour où les militaires décideront de bénéficier de ce cadeau empoisonné de la Cour, il faudra se préparer à une mutinerie dans nos casernes. On ne peut octroyer le droit de grève à tout le monde.

La Cour Holo ouvre concrètement sur l’avenir une ère d’incertitude. Elle a fait penser que les sept sages ne sont pas en fait impartiaux et qu’en réalité leurs décisions sont guidées par des considérations éloignées de la Constitution, qu’elles sont taillées à la mesure des intérêts et des humeurs du moment. C’est la pire régression que la haute juridiction ait enregistrée depuis 25 ans. Qu’attendre pour demain ?

On attend concrètement une Cour qui redressera la barre. Elle devra donner espoir aux Béninois qui pensent dans leur immense majorité, que cette institution est la seule à même de garantir une saine protection de notre démocratie contre les abus de toutes sortes.

Par Olivier ALLOCHEME

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