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Le triomphe de la vérité

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Edito: Un signal très fort


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27 agents de la police républicaine radiés. La décision du Conseil des ministres de ce mercredi 02 mai a pris tout le monde de court. On s’attendait à tout sauf à cette mesure radicale que la plupart des Béninois peinent encore à comprendre. Pourquoi une violence aussi brutale et inhumaine ?
Ce sont en effet des pères de familles qui se retrouvent subitement sans emploi. Et la vraie douleur, c’est que dans nos traditions les revenus d’un seul individu n’impactent pas seulement sa famille proche. La chaîne de solidarité construite autour du salaire impacte directement au moins trois à quatre autres personnes. De sorte qu’en privant 27 policiers de salaires, c’est au moins 27 foyers de trois enfants et trois autres cousins, neveux, tantes, pères ou mères qui en recevront les contrecoups directs. Que deviendront leurs enfants ? Et leurs épouses ?
Socialement désastreuse, la décision du Conseil des ministres constitue également une atteinte à la sacrosainte loi du pardon. Dieu, dans son immense miséricorde, nous recommande le pardon, disent les croyants de tout bord. On pouvait les rétrograder, les sommer de rembourser ou même faire des ponctions régulières sur leurs salaires au prorata de ce qu’ils sont censés avoir volé… Vue sous cet angle, la radiation apparait comme une décision extrême qui fait l’impasse sur l’importance sociale de l’individu chez nous. D’autant d’ailleurs que, d’après le Conseil des ministres, le conseil de discipline n’a jamais demandé une telle mesure. C’est le ministre de l’intérieur qui a fait prévaloir ses « fonctions réglementaires » pour dicter une mesure somme toute pédagogique.
Nous en sommes précisément à nous demander s’il faut couper la tête du pécheur pour sauver sa foi. Non, à mon avis, cette mesure apparait d’une violence disproportionnée. D’autant que lors du conseil des ministres du 18 avril dernier, dans des conditions similaires, 17 directeurs d’écoles accusés d’avoir détourné des vivres destinés aux cantines scolaires, ont été, non pas radiés, mais relevés de leurs fonctions. Mais il ne faut pas oublier le contexte.
Et le contexte est celui de la généralisation de la corruption dans l’administration publique. Parmi les radiés figurent des agents recrutés lors des concours frauduleux que le pays a connus. Ils sont entrés dans la fonction publique comme ils en sortent : par la petite porte. S’il est avéré que les fautes ont été commises, il y a lieu de craindre une gangrène qui rende impossible une quelconque guérison, sauf par amputation du membre atteint. C’est une thérapie saignante qui fait peur. Elle est destinée à frapper les esprits, à ôter à chacun l’idée même de la corruption dans l’administration publique, non seulement au sein des agents subalternes, mais aussi au niveau de la haute administration. Parmi les agents radiés, il y en a au moins un qui est accusé d’avoir dissipé 82.000 FCFA, pendant que certains ont détourné jusqu’à 5 millions de FCFA. Ces montants paraissent bien dérisoires au regard des milliards auxquels nous avons été habitués, ces dernières années. Milliards dont les auteurs n’ont jamais été sanctionnés jusqu’ici. Au contraire. Alors, faut-il continuer à frapper des menus fretins tandis que les gros poissons continuent à pavoiser, intouchables et impunis ?
C’est la grande question. Et c’est précisément là que se situe le signal qu’a voulu faire passer le gouvernement : si l’on tombe ainsi à bras raccourcis sur des agents ayant subtilisé des montants aussi dérisoires, les gros bonnets qui en volent davantage devraient s’attendre à des sanctions tout aussi lourdes et implacables. C’est probablement ce message pédagogique que l’Exécutif a voulu faire passer en ayant la main aussi lourde. La méthode est plutôt dure. Elle a la sévérité d’une décharge électrique administrée à un voleur de bonbons.
L’effet escompté est bien entendu de mettre un terme au règne de l’impunité mais surtout d’empêcher tout acte similaire dans l’administration publique. De la sorte, les 27 agents servent de cobayes vivants pour une pédagogie de sévérité. C’est un message transversal pour toute la fonction publique, mais aussi pour les membres du gouvernement. Ils ne seront pas pardonnés.

Par Olivier ALLOCHEME

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