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Le triomphe de la vérité

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Edito: Porter Béninois


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Regardez les photos du président burkinabè, Roch Christian Kaboré, ces dernières semaines. Vous constaterez aisément qu’il est constamment en tenue locale. Plus précisément, en pagne tissé de fabrication locale. Même lors de la visite d’Emmanuel Macron à Ouagadougou, moment solennel s’il en fût, le président burkinabè a arboré son pagne tissé des artisans de son pays. Lors du récent sommet de la CEDEAO également, il n’a pas manqué de faire honneur à l’artisanat local burkinabè. Et c’est si beau à voir !
Oubliez Roch Christian Kaboré. Prenez donc le président ghanéen, Nana Akufo-Addo. Le 07 janvier 2017, lors de sa prestation de serment en tant que président de la république, il s’est joliment drapé dans un majestueux pagne Kenté assorti sur des sandales sortis des mains des artisans de son pays. Ce président cultive les valeurs vestimentaires de son pays, au point d’en faire un symbole de son régime. Il les revendique avec une fierté non feinte, surtout lorsqu’il lui arrive de recevoir ses hôtes dans son trône traditionnel ashanti tout en or massif.
Regardez maintenant le président nigérian Muhammadu Buhari. Presque jamais, il n’est apparu en public dans une tenue occidentale. On pourra même dire que ce président est un extrémiste de la tradition, en ce qui concerne la culture vestimentaire. Là-dessus du reste, les autorités politiques nigérianes sont intraitables. Les deux chambres du parlement fédéral nigérian ainsi que les assemblées des Etats de la fédération sont presque entièrement composées de représentants toujours en tenue traditionnelle. Dans le nord du Nigeria, c’est une hérésie grave d’être surpris en veste et cravate, dans une assemblée représentative par surcroit.
Tous ces exemples montrent à suffisance qu’il y a une idéologie vestimentaire liée aux fonctions les plus éminentes de la République. En recevant Emmanuel Macron, les Africains oublient toujours de rappeler que ses chaussures, ses cravates ou ses costumes sont exclusivement français. Ferait-il autrement qu’une houle de détestation populaire se serait abattue sur lui. Tel n’est pas le cas du Bénin. Le président de la République du Bénin doit se faire fort de s’habiller chez les plus grands couturiers de Paris, Rome ou New-York. Les ministres, dès leur nomination, doivent exhiber les costumes les plus rutilants des bords de la Seine. Dans la conception du Béninois moyen, il est une preuve de mauvais goût que de se promener dans les coulisses de l’administration en asho oké…
La culture administration inculquée sur les bancs de l’ENAM, de l’ENEAM ou des autres écoles les plus réputées de notre pays, laisse peu de place à nos tenues traditionnelles. De la sorte, le pays se prive d’une source potentielle de création d’emploi et de richesse. La promotion du pagne tissé national assure aux artisans du Burkina Faso une source intarissable de revenus. Il y a nécessairement un effet d’entrainement qui se crée lorsque le premier d’entre nous arbore une tenue vestimentaire.
Rappelons-nous, Kérékou I dans ses habits de révolutionnaire (avec les fameux Col Mao), II et III, dans ses habits de pasteur. Immédiatement, depuis les oligarques les plus puissants jusqu’au dernier sous-fifre de l’administration, chacun a voulu ressembler au Chef. En même temps, ce suivisme vestimentaire crée une culture qui ouvre des opportunités d’affaires aux artisans de chez nous.
Et en la matière, le Bénin possède une riche culture enviée en Afrique. Dans un quartier de Cotonou que les connaisseurs peuvent déjà identifier, débarquent chaque jour des dizaines de commerçants congolais, gabonais, camerounais, centrafricains venant s’approvisionner en tenues fabriquées par nos artisans. C’est la preuve qu’il y a une expertise locale, largement méconnue de nos dirigeants qui préfèrent s’habiller à Paris, Londres ou à Rome.
Changer de paradigme n’est plus aujourd’hui un effet de mode. C’est un impératif. Le Salon international du textile africain (SITA) qui a eu lieu en novembre 2017 à Ouagadougou, a offert une réflexion sur le port du textile africain en milieu scolaire. Au-delà de l’école, imaginons que nos corps habillés (policiers, douaniers, gendarmes et militaires) portent des tenues sorties des usines de chez nous, comme cela est le cas au Nigeria, par exemple. Ce sont des milliers d’emplois qui seront ainsi créés, des industriels du textile qui auront acquis de l’expérience et surtout de la richesse locale qui aura été créée pour les paysans. C’est ce qu’on appelle proprement une économie.

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