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Le triomphe de la vérité

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Edito: Du vrai et du faux


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S’il est avéré que les entrepôts d’Atao Hinnouho ont effectivement obtenu de certificat de mise à la consommation, il faudra que la chaine de responsabilités soit tracée. Et alors se poseraient les questions qui restent suspendues depuis 2009, depuis que le Bénin a abrité la signature par les chefs d’Etats et de gouvernement de l’appel de Cotonou sur les faux médicaments. Comment la douane a-t-elle fait pour faire rentrer dans le pays des conteneurs de médicaments importés par des personnes qui n’ont reçu aucune autorisation pour le faire ? Comment les services du ministère de la santé ont-ils pu autoriser la mise en consommation de ces produits pharmaceutiques ? En fait, Atao Hinnouho a-t-il le profil requis pour importer et distribuer des produits pharmaceutiques ?
Bien entendu, il ne s’agit pas de condamner, mais de comprendre si effectivement la police s’est lancée depuis jeudi dans une chasse aux sorcières contre le député. Car le vrai problème est là. Même si le député n’avait pas été ébranlé outre mesure par l’opération PANGEA IX, il pouvait tout de même comprendre que le régime Talon est déterminé à lutter contre les circuits informels d’écoulement des produits pharmaceutiques. Il devait le savoir et prendre ses dispositions, lui qui s’est radicalisé au point de devenir un opposant farouche au régime Talon. Il savait très bien que la justice dispose des pleins pouvoirs pour saisir ses marchandises et l’emprisonner. Si le député n’a pris aucune disposition matérielle pour échapper à d’éventuelle poursuites, c’est qu’il avait foi en la solidité des autorisations dont il dispose pour écouler ses marchandises en toute tranquillité.
Je ne veux pas rentrer dans la querelle des faux ou des vrais médicaments. Tout le monde connaît la féroce guerre commerciale que se livrent les industries pharmaceutiques occidentales et asiatiques, notamment en Afrique. Chacune d’elles cherche à coups de manipulations intelligentes, à contrôler un marché africain largement ouvert à l’extérieur. Le terme « faux médicaments » a notamment été forgé pour discréditer tous les produits pharmaceutiques d’origine non occidentale, mais dont les pharmaciens africains raffolent. Et pour cause, ces produits venus de l’Inde, de l’Indonésie, de la Chine ou du Pakistan pour la plupart, coûtent moins cher que ceux importés d’Europe. Mais l’on sait de façon basique, qu’un médicament n’est pas un produit commercial comme les autres. Il est produit, transporté, stocké et vendu par des spécialistes agréés. Il est même mis en consommation suivant des procédures très précises faisant appel chaque fois à la surveillance des responsables de la direction nationale des pharmacies, en collaboration avec ceux du laboratoire central installé à cet effet. Du coup, il est permis de s’interroger. Il suffit de lire les déclarations de l’un des avocats du député, maitre Alfred Bocovo qui affirme : « La Direction nationale des pharmacies, qui est compétente pour délivrer les certificats de mise en consommation, en a délivré et ces produits ont été entreposés dans ses magasins ». Si le député a pu accumuler dans ses entrepôts des dizaines de tonnes de produits pharmaceutiques, il n’y a pas de doute qu’il a dû avoir des autorisations administratives nécessaires.
C’est donc surtout le non-respect des procédures administratives établies en la matière qui doit être sanctionné dans cette affaire. Car la grande bêtise serait de penser que les produits importés de Chine, du Maroc, de l’Inde ou de l’Indonésie sont faux du fait de leurs origines. Seuls les tests et analyses conduits par les institutions agréées en la matière devraient nous situer sur leurs qualités réelles. Car, ce qui compte, ce n’est pas de donner raison ou tort à tel ou tel fabriquant, mais d’identifier les responsabilités ayant favorisé la fraude.
Le fait est que la manipulation des industries pharmaceutiques occidentales fait croire qu’il n’y a de médicament que ce qui vient de chez elles. La Chine, l’Inde, l’Indonésie et le Nigeria ont déjà cassé ce mythe depuis longtemps. Qu’attend donc le Bénin pour promouvoir ses propres industries pharmaceutiques ? Le temps est venu pour nous d’en parler : le Bénin mérite sa propre industrie pharmaceutique au même titre que le Maroc, le Nigeria ou le Ghana. Malgré tout le brouhaha en cours sur fond de politique politicienne, le seul défi pour les années prochaines est bien celui qui consistera à fonder notre propre industrie pour exporter des médicaments made in Benin.

Par Olivier ALLOCHEME

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