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Le triomphe de la vérité

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Edito: Faut-il accuser les Pays-Bas ?


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A lire l’ordonnance du juge Rodolphe Azo, on se rend compte que l’affaire PPEA II a pris une tournure pour le moins inattendue. La décision disculpe entièrement les douze prévenus qui croupissaient en prison depuis plus de deux ans, tandis que, désormais, Barthélémy Kassa a repris du poil de la bête pour parler d’acharnement. L’ancien ministre, désormais hors de cause, est allé charger son ancien mentor Boni Yayi accusé de l’avoir livré à la vindicte populaire.
On connait la chanson. En mai 2015, au plus fort de l’affaire, le ministre avait, disait-on, remis sa démission pour se défendre dans cette nébuleuse qui l’accablait. Aujourd’hui, il est de notoriété publique que cette prétendue démission ne fut qu’une poudre aux yeux, puisque, selon de nombreux recoupements, la lettre de démission avait été inventée au palais de la Marina, le 12 mai 2015, Kassa même n’ayant été informé de «sa» lettre qu’à titre de spectateur. Ce fut un sommet de manipulations dont la consécration fut sans doute le vote par lequel le parlement refusait de lever son immunité, alors même que c’était le Chef de l’Etat en personne qui avait sollicité le vote. Et on sait bien ce qu’il fit, au moment même où il sollicitait cette levée d’immunité. On sait très bien, les Hollandais en tête, qu’en sous-main, une intense campagne a été faite au sein de l’écrasante majorité parlementaire FCBE à l’époque, pour que cette demande soit rejetée en ce même mois d’août 2015. Et l’on s’est retrouvé dans la situation paradoxale d’un régime qui s’est battu contre sa propre action parlementaire. Ce fut une manœuvre de monumentale hypocrisie qui a pu montrer jusqu’à quelle bassesse l’on était prêt à entrainer l’éthique politique. Bien sûr, Barthélémy Kassa apparaissait idéalement comme le mouton de sacrifice, en même temps qu’un homme porté par la machine Yayi. Il a échappé à la justice de son pays. Beaucoup de gens avaient soupçonné que cette démission fallacieuse n’était qu’en fait une manière de lui offrir l’ombrelle parlementaire pour le mettre à l’abri de toute tracasserie judiciaire plus tard, le pouvoir étant sur le point de changer de main en 2016. Et l’on attendait depuis lors que la justice bouge le plus petit doigt pour lui faire rendre gorge.
R
ien. Il s’en sort désormais avec une décision qui le lave aussi blanc que neige. Et la véritable question est de savoir si tout cela va se terminer de cette manière. Le PPEA II était-il un simple montage politico-administratif ? Et si les Hollandais qui étaient les premiers à soulever l’affaire s’étaient réellement fourvoyés, en accusant trop tôt ? L’ordonnance du juge le laisse penser en tout cas, puisqu’elle sous-entend que la réaffectation de crédits n’a rien d’anormal lorsqu’elle est autorisée dans les conditions requises. Derrière ces erreurs qui ont emballé le grand public, douze cadres ont été jetés derrière les barreaux où ils ont fait plus de deux ans. Mais il faut qu’un nouveau niveau de juridiction confirme ou infirme l’ordonnance du juge.
Nous ne pouvons pas nous satisfaire en effet, de cette décision. En l’occurrence, l’ambassade des Pays-Bas ne saurait se satisfaire de ce verdict. Et la moindre des choses serait que l’Etat béninois fasse appel de cette décision, ne serait-ce que pour le Programme d’Actions du Gouvernement (PAG). C’est en fait un très mauvais signal pour les partenaires bilatéraux et multilatéraux de savoir que les méthodes des années 1980 et 1990 qui ont ruiné l’aide publique au développement, se poursuivent encore sous nos cieux. Le pillage de l’aide par les élites, est aujourd’hui au cœur de la détresse de nos populations. Aucun bailleur de fonds ne veut répéter les erreurs du passé. Et aucun d’eux ne consentira à investir au Bénin les deniers de ses contribuables si les prévarications sont traitées avec complaisance.
C’est un impératif pour le PAG qui cherche des financements nécessaires à l’atteinte de ses objectifs. Il appartient donc à Patrice Talon de montrer la crédibilité de l’Etat, et lui faire enlever les mauvaises impressions du passé.
Par Olivier ALLOCHEME

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