.
.

Le triomphe de la vérité

.

Edito: L’intifada n’aura pas lieu


Visits: 6

logo journal« Le Benin est un pays laïc … les chrétiens pour leur chemin de croix tout comme les musulmans pour la prière du vendredi sont interdits d’occuper les voies publiques ; ceci est aussi valable pour les adeptes des religions endogènes et toutes les autres confessions religieuses. » C’est en ces termes que s’exprimait, ce dimanche 29 janvier 2017, le ministre de la justice, Joseph Djogbénou. Alors , question : croyez-vous sincèrement qu’on pourra empêcher les Oro de Sakété de « fermer la route » durant leur cérémonie annuelle ? Une autre question : croyez-vous réellement qu’un préfet pourra empêcher les Egungun de bloquer la voie à Ouidah, un 10 janvier?
En réalité, les mesures radicales du préfet du Littoral sont teintées d’illusion. Le Bénin a beau être un pays laïc, sa population s’accommode bien de certaines entorses à la loi. Modeste Toboula, en tant qu’autorité de son département, avait bien le droit, voire le devoir, de procéder au déguerpissement ainsi qu’il le fait. Le zèle débordant qui anime tout commis de l’Etat imbu de son autorité, l’a toutefois poussé sur des rivages éloignés de sa mission publique. Empêcher les fidèles de la mosquée centrale de Cadjèhoun d’accomplir leurs devoirs religieux sur la voie publique, pouvait se faire sans le tintamarre médiatique auquel il s’est livré. Il pouvait (ou il devait) organiser des séances de sensibilisation préalables avec les imams et toutes les autorités religieuses concernées pour qu’elles prennent les dispositions qui s’imposent. Le but ne sera pas forcément d’avoir leur adhésion en quelques semaines. Mais il aura eu le mérite de l’humilité et de la sagesse, face à des autorités religieuses dont l’ancrage sociologique dépasse largement les pouvoirs éphémères d’un commis de l’Etat. Il ne s’agit nullement de rabaisser la puissance publique mais de tenir compte de la sociologie prégnante des religions.
La force des religions n’est pas une spécificité béninoise. Dieu est omniprésent dans la vie de chaque citoyen qui l’appelle et le loue dans le malheur comme dans le bonheur. Les gens sont incapables de comprendre qu’il y a des athées dans notre pays, qui ne croient pas du tout en un quelconque Dieu et qui se moquent bien qu’on l’adore ou qu’on ne l’adore point.  Dans le même temps, même les croyants sont prêts à tolérer les déviances de ceux qui se réclament comme tels, pour peu qu’ils ouvrent la Bible, le Coran ou le Talmud.
Il y a quelques semaines, une église évangélique a jugé utile d’installer sa campagne d’évangélisation au carrefour situé juste en face de mon bureau. Tintamarre, films et chansons, hourras, toute la panoplie des orgies de foi y est passée. A quelques pas d’un centre de santé où l’on hospitalise des malades et juste en face d’une école dont les élèves ont besoin de tranquillité. Mais personne ne s’en est plaint. Même les policiers appelés mille fois, ont trouvé des prétextes divers pour se dérober. Il en est ainsi dans nos quartiers où les gens ne comprennent pas qu’ayant le droit légitime de  hurler leur foi dans les hauts parleurs les plus sophistiqués, ils n’ont aucunement le droit d’empêcher les autres de dormir la nuit ou de faire leur sieste à midi. Ils ne comprennent pas que les enfants ont, eux aussi, le droit d’apprendre leurs cours et de traiter leurs exercices, le soir. Ils comprennent à peine qu’il y a dans les maisons, des malades et des personnes âgées qui peuvent voir leur mal s’aggraver avec les bruits assourdissants qui se font.
C’est pourquoi il faut comprendre la réaction épidermique du député Issa Salifou qui a appelé les musulmans à marcher contre le préfet. Mais il a échoué dans sa volonté de provoquer une révolte religieuse. Il a échoué parce que tout le monde a compris qu’il a voulu récupérer les passions musulmanes à des fins bassement politiques.
Mais le problème demeure. La réaction du gouvernement qui a insisté pour annoncer l’interdiction même des chemins de croix désormais sur la voie publique, semble intenable. Je veux bien voir comment sera géré le prochain vendredi saint lorsque des milliers de fidèles envahiront les rues de Cotonou pour observer le rite millénaire qui les unit à leur messie. Je veux bien voir comment seront  gérées les deux semaines où Oro fera ses cérémonies propitiatoires dans les rues de Pobè, Kétou, Sakété, Adja-Ouèrè ou Ifangni.
Je veux le dire plus simplement : le gouvernement sera contraint à la patience et à la diplomatie sur ce dossier.

Par Olivier ALLOCHEME

Reviews

  • Total Score 0%


Plus sur ce sujet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

You cannot copy content of this page