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Le triomphe de la vérité

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Edito: L’escalade en vue


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logo journal« Tout ce que je demande, c’est que la justice fasse son travail et que les têtes tombent ». La fureur du patron de Cajaf-Comon est probablement à son paroxysme. Il réclame des têtes. L’interview qu’il a donnée au quotidien français Le Monde en dit long. Il ne tolère pas que jusqu’ici Pamphile Zomahoun, le directeur des renseignements et très proche du Chef de l’Etat, soit maintenu en poste, alors qu’il serait selon Sébastien Ajavon, au cœur de la « machination » ayant conduit à son arrestation et à sa garde-à-vue. « Tant qu’on n’aura pas sanctionné ceux qui ont monté cette cabale pour ternir mon image, je ne serai pas content. C’est le président de la République seul qui peut sévir », a-t-il précisé toujours dans l’interview. Mais le président du patronat ajoute : « Nous avions de très bonnes relations. Si nous n’étions pas d’accord sur certains dossiers, je le lui disais. Parfois, il en tenait compte. C’est lui le président de la République. C’est lui qui prend les décisions en dernier ressort. Tout se passait bien… » En voilà pour tous ceux qui laissaient entendre que les deux hommes entretenaient de très mauvaises relations. S’il y avait eu brouille, elle ne pouvait tenir que sur le nombre de postes ministériels concédés par Patrice Talon. « Nous avons un accord formel et bien écrit qui n’a pas été respecté : nous devions obtenir le tiers des postes ministériels. Nous n’avons eu que TROIS PETITS MINISTERES [agriculture, enseignement secondaire, économie numérique], qui sont gérés depuis la présidence. » Là où le PDG de Cajaf-Comon fait l’estocade, c’est bien ici : « Je m’éloigne de la gestion du pouvoir. Je ne sais pas s’il faut appeler cela de l’opposition. Je me mets à l’écart. Cela ne veut pas dire que je vais critiquer systématiquement tout ce que Patrice Talon fera. Si ce sont de bonnes choses, je le dirai, sinon, je le dénoncerai. »
Concrètement et sur le terrain du droit pur, Sébastien Ajavon n’est pas encore opposant. Il n’en a pas fait une déclaration officielle enregistrée au ministère de l’intérieur. Encore faudra-t-il qu’il crée son parti ou une alliance de partis pour avoir ce privilège reconnu par la loi sur le statut de l’opposition. De plus, « ses » ministres sont toujours dans l’équipe gouvernementale . Toutefois, les ministres qui se réclament de lui, ne peuvent plus se sentir à l’aise depuis le déclenchement de l’affaire cocaïne. Aujourd’hui plus qu’hier, après les déclarations sans ambages de l’homme d’affaires, ils ne peuvent que se sentir abandonnés par leur mentor. Alors, de quoi parle-t-on ?
Les tensions entre les deux alliés risquent de fragiliser pour longtemps le pouvoir Talon. Avec une accumulation presque inattendue de réformes dans tous les secteurs, celui-ci a pourtant besoin du soutien politique d’Ajavon. Le plus immédiat de ces besoins se fera sentir lors du vote du budget, fin décembre. Si les députés pro-Ajavon lâchent le gouvernement, la loi des finances sera adoptée par ordonnance, sauf à recourir au PRD et à la RB dont les exigences en guise de compensation ne seront certainement pas des sinécures. Mais il y a surtout les réformes politiques, notamment le référendum constitutionnel dont on connait les faiblesses. Si la tension actuelle perdure, Talon ne pourra plus faire « son » référendum qu’il a promis au peuple. Sinon, il aura alors en face de lui toute la classe politique, en dehors des ténors comme Abdoulaye Bio Tchané et Pascal Iréné Koupaki déjà au gouvernement. Il ne pourra pas compter sur les FCBE qui ont déjà marqué leur opposition de principe aux idées de réformes soutenues par le Chef de l’Etat. Et bien évidemment, les députés pro-Yayi seront très heureux de faire échec à Talon sur le terrain des réformes pour lesquelles il a été élu.
Le problème, c’est l’avenir. Pour Ajavon, ce sera très douloureux de supporter cinq années d’opposition. Dans un contexte politique où les populations sont facilement manipulables, il risque d’être éreinté trop tôt. Et si le Chef de l’Etat respecte son engagement de quitter le pouvoir en 2021, son combat anti-Talon pourrait être un handicap à son ascension. Il est rare au Bénin qu’une opposition au long cours surprenne un Président lucide qui tient encore les leviers du pouvoir.

Par Olivier ALLOCHEME

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