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Le triomphe de la vérité

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Opinion/Révélations de l’ONG GASVIE: Les vérités historiques sur l’affermage à la santé


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L’Organisation non gouvernementale Groupe d’action pour la santé et la vie (ONG GASVIE), par la voix de son président, Adrien Hounsa, réagit à la décision gouvernementale relative à la mise en affermage des hôpitaux de zone de Covè, Djidja et Djougou. Tel un historien, Adrien Hounsa remonte dans le passé, et jusqu’à la genèse des zones sanitaires, pour justifier sa totale et entière approbation de la décision du gouvernement de Patrice Talon de confier la gestion des trois hôpitaux de zone à des privés. Le président de l’ONG GASVIE met en garde toutefois l’Etat contre les démons ayant œuvré à l’échec constaté aujourd’hui des autres zones sanitaires. Lire l’intégralité de sa réaction.  
L’Ong GASVIE protège les droits des usagers des Centres de santé et assimilés, puis se bat pour la promotion des soins de qualité au Bénin.

Le présent article explique l’histoire de l’évolution de notre système sanitaire en toute objectivité. Les documents originaux en constituent la référence.
Au commencement, les soins étaient gratuits. Les récessions économiques, les dévaluations économiques et autres priorités des pays africains, surtout au sud du Sahara, ne pouvaient plus continuer d’assurer cette gratuité des soins à leurs peuples.
Le besoin de participation de la communauté à sa dépense de santé a commencé entre 1981-1982, au temps de feu le Ministre Issifou Bouraïma. J’étais alors chargé de la Circonscription Médicale de Dangbo. Les centres de santé étaient autorisés à confectionner des carnets de soins vendus entre 10 et 15 francs CFA. Les consultations coutaient entre 15 et 25 francs CFA. Juste de petits sous pour régler le quotidien des centres de santé : fil de suture pour attacher le cordon ombilical des nouveau-nés, remplacer une ampoule électrique, etc.
Depuis des années, de nombreuses stratégies ont été élaborées pour tenter vainement d’améliorer l’accès aux soins de santé ainsi que leur qualité.
Les gouvernements des pays  en  développement ont porté leurs doléances à la connaissance de l’Organisation mondiale de la santé (Oms) qui a organisé une Conférence internationale sur les soins de santé primaires à Alma Ata en URSS, le 12 septembre 1978.
Deux résolutions sont issues d’Alma Ata: différencier le schéma de soins entre pays développés et pays pauvres; adopter les soins de santé primaires aux pays en développement, et la santé pour tous d’ici à l’an 2000.
Dans le processus d’opérationnalisation des résolutions relatives aux soins de santé primaires :
– En 1981: La conférence de Hararé a été organisée pour harmoniser la conduite africaine des résolutions d’Alma Ata ;
– En 1987 : la 37ème session du Comité Régional de l’Oms a eu lieu au Mali avec les ministres de la santé des pays africains pour adopter l’Initiative de Bamako qui provient des expériences de Pahou et de la Guinée Conakry ;
– Trois mois après la réunion du Mali, Lusaka (Zambie) a abrité la réunion sur l’opérationnalisation de l’Initiative de Bamako
Quelle est la part contributive de notre pays, le Bénin?
1. La prise de la loi 88-444 du 18 novembre 1988 portant autorisation de la vente des médicaments et matériels de soins et la rétention de ces recettes dans la formation sanitaire pour renouveler les stocks et un taux d’amortissement pour les matériels lourds comme les véhicules, les motos et la chaine de froid ;
2. L’augmentation  du budget de santé pour la prise en charge des personnes vulnérables et celles qui habitent les zones éloignées ;
3. L’association stricte de la communauté à la gestion, aux prises de décision dans la gestion des fonds mis à disposition par les bailleurs de fonds. Ces structures sont appelées Comité de gestion de santé (Coges) et sont mises en place par la communauté à la suite d’une élection. Chaque arrondissement avait le don IDA de 1.500.000 francs de médicaments divers. Le centre de santé avait un magasin de gros avec deux cadenas. Les clefs du magasin de gros sont réparties entre l’agent de santé et le président du Coges, de telle sorte qu’aucun des deux ne peut avoir accès à ce magasin de gros sans la présence de l’autre. Par exemple, les clefs du cadenas du haut sont gardées par le président Coges, et celles du bas par le chef de poste du dispensaire. Ou vice versa.
Mais la pharmacie de détail est gérée librement par le chef poste qui ne se ravitaille que périodiquement sur invitation du président Coges. La sécurité était garantie.
4.   La prise du décret 97- 321 du 17 juillet 1997 créant un fonds des indigents pour favoriser leur accès aux soins ;
5. La réorganisation de la base de la pyramide sanitaire par le décret 98-300 du 20 juillet 1998 portant création des 34 zones sanitaires.
Liste des principaux bailleurs de fonds  pour la construction, l’équipement et le fonctionnement des zones sanitaires :
Banque mondiale
IDA
Coopération Française
Coopération allemande
Banque africaine de développement
Banque islamique de développement
Coopération suisse
Pays Bas
Chine
FED
OMS
PNUD
USAID
FNUAP
UNICEF
Etat Béninois à travers ses budgets y a mis 129 milliards 215 millions
Apres tous ces investissements, la question fondamentale qui se posait était : quelles procédures adopter pour mieux gérer ces zones sanitaires ?  Il fallait bien confier leur gestion à quelqu’un. Mais à QUI?
Aux agents de santé ?
Réponse : cela n’inspirait pas confiance !

A la Communauté ?
Réponse : ce n’était pas rassurant !
A un groupe d’opérateurs économiques ?
Réponse : oui,  mais associés à des représentants actifs de la communauté pour veiller sur leur patrimoine.
Un débat s’est instauré entre les bailleurs de fonds et les médecins en poste au Ministère de la Santé en ce moment. Les médecins de ce temps ont estimé qu’ils sont des cadres capables de gérer. Les bailleurs de fonds n’étaient pas du même avis. Ce débat risquait  de paralyser le processus et pour débloquer la crise, les bailleurs de fonds ont dû céder à la pression en faisant deux propositions :
1. Mettre des représentants de la communauté impliqués dans le Financement Communautaire (COGEC, COGES et consorts) à tous les niveaux de la pyramide sanitaire,
2. Créer des Centres pilotes d’expérimentation à confier à des personnalités morales d’obédience religieuse : ce sont les zones sanitaires à statut particulier :
– zone sanitaire de Mènontin à l’Archevêché de Cotonou
– zone sanitaire de Tanguiéta
– zone sanitaire de Banikoara
– zone sanitaire de Boko à Parakou etc.
Les partenaires du Ministère de la Santé ont accepté ces dernières propositions des bailleurs de fonds.
Le top était donné pour le démarrage des activités dans les zones sanitaires publiques et celles à statut particulier :
Aujourd’hui,  le bilan est sans équivoque : les 34 zones sanitaires publiques sont presque toutes mortes pendant que l’hôpital de Tanguiéta fait la fierté de notre système sanitaire avec les autres zones sanitaires  à statut particulier.

Des indicateurs de performance qui font honte
– Dans les zones sanitaires : de 1998 à 2012, presque tous les indicateurs de performance sont en berne parce que les objectifs ne sont pas atteints, les activités tournent au ralenti et les fonds sont épuisés ;
– les formations sanitaires sont déficitaires en médicaments ;
– le matériel de travail est obsolète et le défaut de rétention des frais d’amortissement ne permet pas leur renouvellement ;
– le fond des indigents obtenu difficilement par les organisations de la société civile pour résoudre l’exclusion n’a pas intéressé nos médecins autoproclamés gestionnaires. Sur 1.158.000.000 de francs CFA de crédit prévu pour venir en aide aux indigents, 78.093.050 étaient dépensés, soit une consommation de  6, 74 %.
– En 2006 un bailleur de fonds a réalisé une enquête des dépenses de santé au titre de l’année 2003. Le résultat est le suivant:
52, 1% des dépenses de santé viennent de la poche des familles ;
69% de consommation médicale ;
76% des frais de consommation de produits pharmaceutiques sans passer par la consultation des agents de santé ;
– pour le développement des services sanitaires avec 4 composantes, 32 millions de dollars ont été affectés aux activités par les bailleurs. 10,9 millions de dollars affectés pour réaliser l’amélioration  de la qualité et l’efficacité des services de santé prioritaires, mais rien n’a été fait ; 12,1 millions de dollars  pour le renforcement de la gestion et de l’amélioration sectorielle. Je ne sais pas si c’est demain que cela sera fait ; 900.000 dollars pour le renforcement du partenariat, la coordination et l’évaluation du programme de santé. RAS jusqu’à ce jour ;
– malgré les tableaux portant les prix officiels des médicaments et des prestations aux malades, la disparité est à un niveau jamais atteint.
– etc.
L’affermage refait donc surface
Parmi les bailleurs de fonds pour la construction et l’équipement des 34 Zones sanitaires publiques massacrées, la BAD et la BID ont eu le courage de recommencer l’expérience avec les 3 nouvelles zones sanitaires. Chasser le naturel et il revient au galop. L’argent et le désir de le gérer ne doivent pas être la préoccupation de notre nouveau choix professionnel.
Les avantages de l’affermage sont  sans équivoques :
– L’affermage n’est ni une privatisation, ni une gérance libre, mais une variété spéciale de délégation de pouvoir à une ou plusieurs personnes physiques ou morales qui sont présumées s’en occuper mieux que nous-mêmes.
– Il n’y a pas d’astreinte entre les différents acteurs et une contrepartie est versée au titulaire qui est censé créer des facilités pour ne pas pénaliser les malades dans le cas de la santé.
– Ils sont liés par un contrat synallagmatique de réciprocité pour sauvegarder les intérêts des différentes parties.
– L’affermage nous fera éviter les pénuries de médicaments qui ne sont pas toujours utilisés pour les malades, mais parce que nous les prenons comme notre patrimoine
– L’affermage permettra un accès facile aux soins, à l’IRM, au scanner, à la radiologie qui seront fonctionnels, parce qu’il y aura des gens qui s’occuperont non seulement de leur acquisition, mais aussi et surtout de leur maintenance.
– L’affermage nous évitera la gestion opaque des fonds alloués, la désinvolture, le laxisme, les nombreuses gymnastiques entre les privés et les prochaines  zones sanitaires.
– L’affermage règlera la question de la gestion morale et éthique de nos formations  sanitaires, le problème d’accueil, d’affluence de la clientèle,
-L’affermage augmentera la crédibilité juridique de nos formations sanitaires qui pourront faire des prêts bancaires, nouer des partenariats avec les bailleurs, et équiper harmonieusement le secteur santé.
Mais ATTENTION !
Si l’Etat politise les différents cheminements qui vont conduire à cet affermage, les malades seront exclus involontairement de l’accès à notre système sanitaire. Les deux banques doivent avoir leurs représentants au sein du comité de pilotage.
A ceux qui craignent la montée des frais, je répondrai que cela ne se justifie pas. A titre d’exemple consultez ce tableau de disparité des prix :

Disparité des coûts

Au regard de ce tableau, on s’aperçoit de la grande disparité des coûts de traitement dans le même département du Mono/Couffo, et dans une zone sanitaire de l’Atlantique qu’est Ouidah. Le constat montre que l’Hôpital de zone de Comè coûte plus cher que les autres formations sanitaires, malgré le soutien de la Coopération belge à ce dernier.
L’expérience du Financement Basé sur les Résultats (Fbr) en cours est applaudie par les populations dans un système sanitaire à double vitesse. Le Régime d’assurance maladie universelle (Ramu) en gestation depuis fort longtemps est demeuré un embryon parce que confié à des cadres non compétents en Gestion ou économie de santé.
Au total, il est souhaitable de procéder à l’affermage de toutes les anciennes zones sanitaires et de certains hôpitaux de département qui s’essoufflent financièrement.

Adrien HOUNSA
Administrateur Gestionnaire des Hôpitaux

(Le Président de l’ONG GASVIE est un agent de santé qui a servi aux niveaux périphérique, départemental et national avec un cursus d’Infirmier Diplômé d’Etat au départ, et est titulaire d’un Diplôme de 3ème cycle en Administration et gestion des hôpitaux obtenu au CESAG à Dakar)

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