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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le naïra dans tous ses états


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logo journalLa messe est donc dite. La monnaie nigériane, le Naïra a été finalement dévaluée ce lundi 20 juin 2016.  Après moult tergiversations depuis l’année dernière ainsi que des déclarations choc, les autorités d’Abuja se sont vues contraintes de laisser fluctuer une monnaie qui est toujours un instrument de la puissance nigériane.

Il est vrai qu’en raison de la baisse des cours du pétrole, le pays était déjà entré en récession. Fin mars,  le Fonds monétaire international (FMI) a abaissé ses prévisions de croissance pour le pays en 2016 à 2,3% contre une précédente prévision de 3,2% annoncée en février. En 2015, le premier producteur de pétrole en Afrique avait enregistré une croissance économique de 2,7%, la plus faible enregistrée depuis près d’une décennie par le pays.  Malgré tout, vers fin janvier 2016, le gouverneur de la Banque centrale (CNB), Godwin Emefiele, avait écarté   une dévaluation du naira, maintenu à 197-199 pour un dollar, maintenant l’interdiction de ventes directes de dollars aux bureaux de change pour conserver ses réserves. A sa suite,  le Président Muhammadu Buhari  avait indiqué qu’il n’a pas l’intention de « tuer » le naira, estimant que les Nigérians « ordinaires » n’avaient rien à y gagner.   Ce fut finalement annoncé    le 15 juin dernier avec pour premier effet dès ce lundi.  C’est un retournement de situation  dérivant d’une crise économique et financière sans précédent. Celle-ci provient de la chute des cours mondiaux du pétrole, qui représente pas moins de 70 % des revenus de l’Etat et 90 % des réserves de devises étrangères du pays. Ce qui avait amené à la rareté des devises étrangères, avec comme conséquence la chute du naira au marché noir.  Godwin Emefiele, avait prévenu en mai dernier que la récession était “imminente”, au vu du ralentissement de la croissance au premier trimestre 2016, l’inflation ayant atteint 15,6 %, son plus haut niveau en six ans. Depuis un an, les investissements directs étrangers (IDE) au Nigéria sont tombés à leur plus bas niveau, et ceci, depuis la crise économique mondiale de 2007-2008.

L’accumulation de ces mauvaises nouvelles ne pouvait que conduire à ce qu’on a vu, c’est-à-dire à la dévaluation du Naira. En même temps, ses effets sur notre pays sont immédiats. La baisse tendancielle des recettes d’exportation se fait déjà ressentir. Etant donné que 95% des véhicules d’occasion  vont sur le territoire nigérian, les recettes fiscales  liées à cette activité  s’effondrent. Selon des statistiques obtenues auprès du Directeur Général d’un des parcs de vente de voitures d’occasion, le trafic au mois d’avril 2016 est de 45.925 véhicules comparativement à 2015 où il était de 280.959  véhicules.  Le nombre de véhicules vendus dans ce même mois d’avril 2016, est de  12.548 contre 278.877 en Avril 2015.    Comme disent les ivoiriens : il n’y a pas match.

Les réexportations vers le  Nigeria étant tributaires de l’arrivée des Nigérians chez nous, on comprend  que ceux-ci ont commencé à devenir rares sur nos marchés. Il n’y a pas que le marché Dantokpa qui soit frappé par le phénomène. Il y a surtout les marchés frontaliers qui sont désertés par les Nigérians à Kraké, Ikpinlè, Oké-Owo ou encore  Sakété. Tous ces marchés sont tenus par des femmes aux revenus modestes dont le niveau de vie sera immanquablement touché par la nouvelle situation.

Mais le fisc va surtout sentir les effets au niveau de la société Cajaf-Comon qui paie annuellement  au moins  30 milliards de FCFA à l’Etat béninois. Ce sont des revenus qui sont en train de fondre comme neige au soleil.

Mais il faut se demander si le marché domestique béninois est protégé contre l’invasion des produits nigérians. Les chefs d’entreprises nigérians, notamment les industriels se frottent bien les mains. Ils vont pouvoir exporter et en masse vers les pays comme le nôtre, en profitant d’une monnaie moins forte. Il faut saluer les autorités qui ont commencé par prendre des mesures pour arraisonner les produits de brasserie nigérians sur nos marchés, produits arrivant pour l’essentiel par la contrebande. Mais le produit le plus trafiqué ici, ce sont les hydrocarbures que le gouvernement a décidé de taxer désormais. Cette mesure fiscale devrait permettre de compenser quelque peu le gap qui se creuse aujourd’hui, sans autre issue que celle des ajustements à petites doses.

Comme on peut le constater, il s’agit pour les autorités béninoises de rester en symbiose avec Abuja pour ne pas subir dans les semaines à venir les effets pervers d’une conjoncture défavorable.

Par Olivier ALLOCHEME

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