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Le triomphe de la vérité

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Edito: Si j’étais Talon


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logo journalSi j’étais Talon, je ne ferai pas le tête-à-tête avec Yayi. Pour une raison simple : pour éviter de donner le spectacle affligeant d’une hypocrisie institutionnelle inopportune.
Il y a à peine quelques semaines, le Chef de l’Etat sortant se répandait en invectives sur son successeur dans toutes les communes qu’il lui a été donné de parcourir. Les médias ont évité de relayer ses propos orduriers et d’une rare violence tenus devant des populations médusées. Les termes les plus bas et les plus vulgaires ont été employés par celui qui a été élu et payé par le peuple  pour assurer la paix sociale et la cohésion nationale. C’est lui qui a attisé le feu  de la haine et de la discorde en maudissant pratiquement celui qui se révèlera plus tard comme son successeur. Il est facile de le deviner : la seule chose qui manquait à ce déluge de médisance, c’est la guerre civile. S’il pouvait l’allumer, il l’aurait fait à cœur joie. Mais Yayi n’a pu réussir cette entreprise de guerre pour la simple raison que le peuple béninois, habitué aux délires, avait fini par banaliser  sa parole. Le peuple, y compris les populations qui le prenaient encore un peu au sérieux, s’est rendu  compte que ce genre de propos ne pouvait mener qu’à des affrontements inutiles et dangereux pour la stabilité du pays.
On peut penser que ce sont des « intrigues politiques », comme le dit le Chef de l’Etat lui-même, qui justifient cette verve de va-t-en-guerre. Mais il faut se demander pourquoi depuis toujours la même personne est constamment celle qui trouble le plus l’ordre public avant de s’en repentir bruyamment quelque temps plus tard. Pourquoi donc, c’est toujours lui qui est auteur de propos injurieux sur les autres alors que le peuple l’a élu pour incarner le modèle à suivre par tout le monde ? La réponse à ces interrogations se résume à une seule phrase : Yayi Boni est bien incapable de maîtriser ses pulsions violentes.
Peu de gens se sont demandé pourquoi le Chef de l’Etat a changé d’aide de camp depuis quelques mois. Mais à la présidence, tout le monde sait comment le remplacement s’est opéré, entre injures, coups de poing et gifles. La bagatelle des badauds. Et ce n’est pas la première fois que même des hauts gradés en venaient à se défendre physiquement face aux pulsions présidentielles.   Il en est d’eux comme des ministres, anciens comme actuels. La rumeur publique veut même que certains ministres aient été giflés devant témoins, avant d’être sortis du gouvernement quelque temps plus tard.
C’est dans ces conditions que le protocole retenu de commun accord entre les différentes parties pour ce 06 avril, admet la possibilité d’un tête-à-tête entre les deux personnalités. Oui, le 06 avril, Yayi sait qu’il n’est plus rien. Il sait que la garde républicaine serait déjà passée aux mains de son ennemi, Patrice Talon. Il n’ignore pas que tous ses pouvoirs, par voie de conséquence, ne seraient ramenés qu’à zéro, alors qu’il a lutté de toutes ses forces pour les rendre éternels.  Il sait de surcroit que pour son image personnelle et celle de la démocratie béninoise, il a intérêt à ce que le tête-à-tête ait lieu et se termine dans de bonnes conditions.
De son côté, le président nouvellement élu a déjà annoncé qu’il ne ferait pas de chasse aux sorcières. Il a même souligné que toutes les misères du passé relèvent désormais du passé.  Comment ne pas le croire, lui qui a soigneusement évité d’évoquer les sujets qui fâchent malgré la virulence de la campagne électorale. Patrice Talon a même intérêt à saisir cette occasion historique que lui offre le tête-à-tête, pour montrer à la face du monde l’image d’un homme de paix et de réconciliation, image dont il aura besoin pour réussir ses réformes. Il va du coup accroitre le capital sympathie  qui l’entoure depuis son élection. On ne le sait que trop : sa période de grâce ne s’en trouvera que plus agréable.
Mais ici, nous fermerions les yeux sur les tendances naturelles de Boni Yayi pour le spectacle. Nous fermerions les yeux sur l’hypocrisie institutionnelle pour privilégier l’utopie d’une paix des braves : la réconciliation qui n’a jamais eu lieu, ne serait ici que pur simulacre, pure façade.

Par Olivier ALLOCHEME

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