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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le jeu des intérêts


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logo journalLe maire de Ouidah a (officiellement) quitté Sébastien Ajavon. Sévérin Adjovi, celui-là même qui a déposé le dossier de candidature du président du patronat béninois, il y a à peine un mois, a finalement tourné casaque. Il s’en va dans une autre direction, en pleine campagne électorale. Selon nos informations, il n’a pas digéré le fait de n’avoir pas été   nommé directeur de campagne du magnat des produits congelés. Mais il n’y a certainement pas que cette raison. On connait comment Dénis Sassou N’Guesso, le Président congolais, est très engagé dans la campagne en faveur de Lionel Zinsou.  Or, le maire de Ouidah possède de nombreuses affaires au Congo et il se murmure que Brazzaville exerce sur lui de douces mais fermes pressions pour entrer dans la barque Zinli. Résultats, Sévérin Adjovi a déjà quitté son « candidat de cœur » comme il appelle Sébastien Ajavon. On attend son point de chute, sans se douter vraiment de son « candidat de raison ».

Dans le même sillage, Janvier Yahouédéou. Après avoir organisé un meeting mémorable en faveur du magnat des congelés, il garde un mutisme embarrassant depuis le dépôt de candidature (raté). Sébastien Ajavon aurait piqué à son encontre une colère noire pour avoir oublié une pièce du dossier, avec le même Sévérin Adjovi. Résultat, le bruit court qu’il cherche désormais un autre point de chute. Et personne ne sera étonné qu’il aille vers un camp ou un autre.

Sabaï Katè, lui, aurait été empêché de rejoindre son Banikoara natal ce week-end, par le commissaire de Dassa sur instruction de Boni Yayi. Le Président de la République lui aurait intimé l’ordre de rejoindre Lionel Zinsou avec des menaces claires. Il faut prier pour que cette histoire ne soit pas un prétexte de plus pour refaire une volteface mémorable.

Car ce qui se passe aujourd’hui est foncièrement déprimant. Les revirements se font à la vitesse de l’éclair, à la surprise générale, un peu comme si le jeu politique n’avait pas besoin de constance, de permanence ni de solidité.  Tout se négocie sur la base des intérêts immédiats des acteurs, sans que jamais le jeu des ralliements  ne soit assujetti à un quelconque projet de société, à une quelconque conception de l’éducation, de la retraite, de la santé, de la sécurité ou même du sport béninois. Dans la balance qui préside aux choix des acteurs, la variable appelée “intérêts personnels” est de loin la plus importante dans la vague tumultueuse  des ralliements. C’est ce qui explique d’ailleurs le succès relatif des hommes d’affaires auprès d’un certain électorat, eux qui n’hésitent pas à mettre la main à la poche, face à l’indigence de la classe politique.

Mais le jeu des intérêts est dû en grande partie à la gouvernance chaotique en cours d’achèvement. Le régime Yayi a détruit le Bénin sur un plan fondamental : l’éthique et le patriotisme dans la sphère publique. La dévastation est si forte qu’aujourd’hui, toute référence éthique est perçue par le grand public comme une faiblesse. Le patriotisme est relégué au rang de niaiserie. Aujourd’hui la masse des électeurs fait peu cas du patriotisme ou même de l’éthique, chacun étant convaincu que ces deux idéaux sont dérisoires dans la conquête du pouvoir. Même les projets de société sont vécus comme des formalités inutiles. Parce que le régime Yayi a transformé le champ politique  en champ d’expérimentation de la politique du pire, le Béninois n’a pas vraiment amélioré sa perception de la chose publique. Il s’est formé l’idée, distillée par Boni Yayi et ses hommes-liges, que la politique doit être au service des intérêts individuels. « Qu’as-tu gagné maintenant en soutenant telle ou telle position ? » C’est l’une des leitmotivs d’aujourd’hui dans le champ politique. Un peu comme si faire la politique c’est d’abord parvenir à « gagner » quelque chose.

Cette conception alimentaire fait qu’aujourd’hui nul ne peut s’aventurer dans ces arènes, s’il n’est milliardaire ou s’il n’est épaulé par de riches nababs.

Nous devrons sortir de cette impasse. Et il est heureux que plusieurs candidats aient proposé de faire convoquer une nouvelle conférence nationale au sortir des élections. Nous en avons besoin pour rebâtir la structure politique du Bénin en pleine déconfiture.

Par Olivier ALLOCHEME

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