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Le triomphe de la vérité

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Edito: L’emploi au secours de la politique


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Les emplois pleuvent depuis le palais de la Marina. Conviés lundi à faire leurs vœux au chef de l’Etat, les jeunes et leurs organisations faîtières se sont confondus en remerciements devant Boni Yayi. Ils se sont entendus promettre qu’environ 16.000 emplois directs leur seront offerts cette année. Très précisément, l’administration publique va créer 15.876 emplois au titre de cette année, dont plus de 8.000 dans la Fonction publique.
L’Agence nationale pour la promotion de l’emploi (ANPE) a été sommée de reprendre 1.500 stagiaires ayant achevé un an de stage au sein de l’administration publique depuis décembre 2014.  L’Agence prévoit le recrutement de 3.750 nouveaux stagiaires. Ce sont des mesures sociales dont personne ne peut contester la justesse. Dans un contexte où les recrutements au sein de l’administration publique ne se font qu’à petite dose homéopathique, le lot des  chômeurs et des débrouillards a grossi pour atteindre des seuils critiques ces dernières années. Trouver de solution à ces fléaux est dès lors d’une urgence républicaine. Le problème est donc connu. Ce sont les solutions proposées qui peuvent porter à caution.
Car, derrière la magnanimité enjouée du locataire de la Marina, se cachent deux nécessités absolues. La première est d’ordre politique. Il ne vous aura pas échappé qu’à la veille des élections présidentielles de 2011, plusieurs centaines de nominations ont été effectuées au sein de l’administration publique. Les cadres ainsi postés ont été vertement sommés d’aller faire campagne pour le chef de l’Etat dans leurs villages. Ce fut un coup de génie que personne n’a vu venir. Le cadre béninois qui rêve de nomination, depuis son coin de bureau, sent comme une main divine se poser sur ses épaules dès qu’il entend son nom au soir des conseils des ministres. A l’époque, ils s’étaient répandus dans les villages, en néophytes zélés, bavant et écumant du yayisme à temps et à contretemps. Le K.O est venu parachever le travail. Ce qui se passe aujourd’hui, à la veille des prochains scrutins, ressemble étrangement à l’opération d’alors. Imaginez des dizaines de milliers de désespérés à qui une lueur d’espoir est subitement miroitée, et vous pourrez mesurer l’ampleur du coup politique qui a été fait ce lundi.   Même si quelques-uns verront bien qu’on instrumentalise leur misère, la grande majorité verra que Yayi est un messie descendu droit du ciel pour sauver ce pays. Voilà donc pour le premier facteur.
La deuxième nécessité à laquelle répondent les mesures sociales de lundi dernier est d’ordre purement économique. Je m’explique.
On peut légitimement s’étonner qu’au moment où la plupart des pays dans le monde réduisent la voilure de leur fonction publique, le Bénin navigue à contre-courant.  Mais en réalité, le Fonds National des retraites du Bénin (FNRB) est en crise. L’audit actuariel de ce fonds qui s’occupe de payer les retraités béninois,  un audit réalisé en septembre 2009 par le cabinet Actuaria, a conclu depuis lors que si rien n’est fait, le solde financier du FNRB va se dégrader régulièrement et fortement. Il devrait passer de 12 milliards en 2008 à 23 milliards en 2015,    30 milliards en 2020 et finalement à 40 milliards en 2058. En clair, c’est un déficit qui se creuse chaque année et menace directement les retraités de notre pays.
A la base de ce problème se trouve en fait le gel des recrutements observé au Bénin depuis 1987, gel rendu obligatoire par la crise des années 80 et notamment le programme d’ajustement structurel (PAS). Depuis lors, on observe un déséquilibre notoire entre le nombre de nouveaux retraités et celui des agents nouvellement recrutés. Selon les résultats de l’audit déjà cité, le FNRB a vu, sur les années récentes, ses effectifs de bénéficiaires augmenter d’environ 6% par an, pendant que les cotisants alimentant le système n’augmentaient, eux, que de 1% par an. C’est une évolution divergente   qui creuse le déficit et l’aggrave d’année en année.  Tout ceci oblige l’Etat à recruter non seulement pour combler les départs massifs à la retraite, mais aussi pour résorber un déficit devenu inquiétant.
Les annonces de lundi, pour fracassantes qu’elles puissent paraitre, étaient nécessaires au double plan politique et économique. Il ne nous reste plus qu’à plaider maintenant pour que l’Etat s’occupe d’encourager la création d’emplois dans le secteur privé par des mesures concrètes. Car, on l’oublie souvent, le secteur  privé est, de loin, le premier pourvoyeur d’emplois, le seul en tout cas qui mérite d’être promu dans une nation moderne comme le Bénin.

Par Olivier ALLOCHEME

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