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Le triomphe de la vérité

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Edito: Les hommes neufs


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S’il n’en tenait qu’à Victor Prudent Topanou, personne ne sera élu en 2016 sans avoir fait école dans un parti politique. Cette position, le président du Front Uni pour la République (FUR) l’a encore réaffirmée ce week-end lors du congrès du Parti Social Démocrate (PSD).
Ce samedi, voilà ce que disait l’ancien Garde des Sceaux : « Nous sommes probablement le seul pays au monde qui se veut démocratique et qui n’a jamais réussi à porter à sa tête depuis un quart de siècle le président d’un parti politique ou un homme politique tout court. Et nous sommes le seul pays dans lequel tous ces présidents de partis sont capables de se réunir pour appeler à voter pour quelqu’un qui n’a pas de parti politique. Vous ne pouvez pas être président de la République au Nigeria si vous n’êtes pas président de parti ! Ce n’est pas possible ! Vous allez au Togo, c’est impossible ! Vous allez au Ghana, c’est inenvisageable ! Vous allez en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Niger, au Mali…c’est impossible ! Au Bénin, vous débarquez de nulle part et vous êtes président. Et toute la classe politique comme un seul homme se réunit pour dire ‘’votons pour celui-là’’. Je trouve cela particulièrement désespérant. Si par extraordinaire, en 2016, le président Golou n’est pas au second tour de la présidentielle, et il venait vous demander de voter pour quelqu’un qui n’a pas de parti, laminez-le ! Pendant 25 ans, on a voté pour des gens qui n’ont pas de parti politique. A partir de 2016, il faut que cela cesse ! »
Victor Topanou trouve dans cette apparente aberration l’une des causes de la situation politique difficile du Bénin depuis neuf ans. L’adresse de l’ancien ministre est, bien entendu, un coup de pied à l’élection de Boni Yayi en 2006, élection dont lui, Topanou, est l’un des bénéficiaires. Il ne s’en cache guère. Pour avoir été conseiller technique du président de la République, secrétaire général du Gouvernement puis ministre, alors qu’il n’avait jamais été associé à la  campagne du candidat Boni Yayi, il fait partie des ouvriers de la vingt-cinquième heure ayant été élevés aux hautes fonctions de la République aux côtés de Yayi. Mais il fait aussi partie de ceux qui reconnaissent humblement qu’il s’agit-là d’une aberration, étant donné qu’il n’avait pas participé à l’élaboration du projet de société du candidat Yayi. Et que surtout, il le connaissait à peine.
Il ne le connaissait pas, et la plupart de ses collaborateurs d’hier comme d’aujourd’hui, ont à peine connu leur président avant de prendre des responsabilités ministérielles avec lui. Entre 2006 et ce jour, le changement a « usé » près de 200 ministres dont la plupart ont été amenés au Gouvernement ou en sont débarqués, sans jamais  avoir lu les grandes lignes du programme de Yayi. Tout se joue sur l’autel des appartenances religieuses, politiques, régionales mais aussi des flagorneries déguisées en messages de soutien.
Le vide idéologique que déplorent Topanou et bien d’autres observateurs est remplacé par ce que Rachidi Gbadamassi a appelé « le concret ». C’est-à-dire des bassines d’eau aux femmes, des frais médicaux pour les malades, des feuilles de tôles et des tables-bancs pour les écoles,   etc. Un parti politique est allé jusqu’à placarder sur les places publiques qu’il a offert 125000 cadeaux de fin d’année aux enfants. Ainsi donc, les nobles idées construites sur la base des préoccupations passeraient mal, face à la force vitale du dieu argent.
Dans la plupart des chapelles   politiques, de vénérables intellectuels sont écartés pour de parfaits analphabètes qui en ont les « moyens ». Leur seule carence, ici, est celle de l’argent qui remplace toute dignité, toute idéologie ou tout débat d’idée.
Il ne faut pas chercher plus loin les raisons de la désaffection des Béninois pour les partis. Les jeux qui s’y jouent sont  aux antipodes de la conception idyllique des jeunes sur la politique. Ils sont aux antipodes des standards  enseignés dans les écoles  et les universités et tendent même aujourd’hui à la perversion profonde de la démocratie béninoise, devenue une « démocratie CFA », pour utiliser le mot de Florent Couao-Zotti.
Les Béninois avaient rêvé d’un nouveau modèle politique incarné par un nouvel homme. Neuf ans après, ils déchantent. Ont-ils soif en 2015 de cet oiseau rare venant du ciel pour nous sauver ? Rien n’est moins sûr.

Par Olivier ALLOCHEME

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