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Le triomphe de la vérité

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Edito: Il ne comprend rien à votre affaire de démocratie


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Soyons clairs. Aucune marche antigouvernementale n’en vaut la peine. Seules sont autorisées les marches et manifestations allant dans le sens de l’émergence et de la dictature du développement. Et pour cela, depuis samedi, la télévision gouvernementale nous soûle des déclarations des ministres passées en boucle, ainsi que celles du chef de l’Etat.
On l’a dit et répété ici : Boni Yayi ne comprend rien à la démocratie. La seule certitude qu’il en a, c’est qu’elle n’est qu’une lutte à corps perdu permettant de remporter coûte que coûte de pseudo-élections et de gérer le pouvoir à sa guise. C’est tout. Cette compréhension de béante lacune s’est cristallisée ce week-end avec les déclarations de Sèmè-Kpodji. Le chef de l’Etat s’est vu contraint de réagir à la prochaine marche de l’Union fait la Nation. Et d’affirmer qu’il compte demander à son ministre en charge des relations avec les institutions d’inviter les partis protestataires à expliquer pourquoi ils veulent marcher contre lui. Là encore, nous entrons dans l’univers tout à fait curieux de Yayi. Toute marche qui ne fait pas ses éloges est une hérésie orchestrée contre sa personne. Les élucubrations folkloriques du maire de Parakou disant aux femmes leaders qu’il est impossible d’encadrer leurs propos dans une salle close de la ville, trouvent ici leur sens véritable. Il n’est pas humain de contester le chef de l’Etat.
Dans la tête du président de la République, il est dangereux de faire quelque manifestation que ce soit pour affirmer le besoin d’élections libres et transparentes. L’existence même de l’opposition est une horreur : il ne la supporte que très peu. S’il n’y avait pas la loi qui protège ces gens, il aurait même trouvé des subterfuges pour les faire exiler. Ou les liquider. « Ils disent qu’ils veulent la paix et manifestent contre moi », a-t-il dit en substance à Sèmè-Kpodji. On aurait pu croire à des propos d’un président surmené par des jours de travail harassant. Non, il est parfaitement maître de ses facultés, au point de convoquer illico un conseil extraordinaire des ministres sur le sujet le plus brûlant de l’heure. Et je suis curieux de savoir s’il y a eu un ministre pour placer un seul mot lors de cette séance. On imagine une assemblée silencieuse, écoutant religieusement les diatribes du chef en transe. Il fallait voir le compte rendu qu’en a fait la télévision nationale. Veste déboutonnée, sur un t-shirt blanc un peu comme s’il rentrait tout droit d’une visite de campagne, le président de la République était comme révulsé, ulcéré et scandalisé : comment peut-on marcher contre un chef d’Etat ?
Et six ministres ont été dépêchés pour aller le dire directement aux médias. Six ministres flanqués bien sûr de l’inusable Amos Elègbè qui a prouvé par sa présence qu’il s’agit bien d’une grave urgence, la nation étant en danger. Puisque le ridicule ne tue personne sous les cieux du changement, c’est leur séance de plainte collective que l’ORTB a été mandaté pour diffuser et rediffuser à l’envi. Nous en aurons certainement jusqu’à mercredi. Imaginez dès lors de quoi parle le chef de l’Etat lors de ses audiences de ces derniers jours. Tout visiteur a droit à sa part d’explication kilométrique avant même de poser son problème. Il faut que la terre entière soit informée qu’en organisant sa marche inopportune de mercredi, l’opposition béninoise montre qu’elle ne mérite pas d’exister. Si jamais l’objet de tout ce délire se confirme et que Bruno Amoussou et les siens ne faisaient pas demi-tour, il est fort à parier que les chars seront déversés dans les rues mardi.
Pendant ce temps, tout le pays se couvre de manifestations pro-Yayi, des plus inutiles aux plus imbéciles. Hier dimanche encore, le sieur Saka Kinan Bio Guera a tenu un meeting de remerciement dans l’enceinte de l’Ecole primaire publique de Kassakou dans la commune de Kandi, juste pour remercier le chef de l’État d’avoir nommé le ministre Issa Azizou à l’Agriculture, Issa Azizou qui l’a nommé à son tour Assistant du ministre. Assistant du ministre !!! Bientôt, les plantons aussi vont s’y mettre.
Béninois, votre président ne comprend rien à votre affaire de démocratie. Il s’y perd et s’y mélange les pédales dans une kermesse qui nous ridiculise tous. Editoriaux et chroniques ne servent plus à rien : vous êtes pris au piège.

Par Olivier ALLOCHEME

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