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Le triomphe de la vérité

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Edito: L’industrie au fond de la fosse


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J’ai souri en lisant le titre d’un article de Jeune Afrique consacré la semaine dernière à notre compatriote Lionel Zinsou, qui dirige le Fonds d’investissement français PAI Partners : « Vers un tsunami industriel en Afrique ». Tsunami industriel vraiment ? Vu du Bénin mon pays, il s’agit certainement d’une métaphore hyperbolique, une de ces fariboles que l’on débite sur les grands foras internationaux entre gens bien-pensants, en se détachant ostensiblement d’une réalité qui crève les yeux. Je n’y crois pas du tout, à son tsunami industriel.
Bien sûr, le neveu du président Zinsou, qui s’est taillé une place à part dans le gotha politico-économique de la France, ne parle pas du Bénin. Il parle certainement du Maghreb, de la Côte d’Ivoire, du Nigeria, du Kenya, du Tchad, du Rwanda ou même de l’Ethiopie. La croissance industrielle dans un pays comme le Bénin est d’au plus 4% depuis plusieurs années et le secteur ne contribue qu’à 14% au Produit intérieur brut (PIB), alors que la moyenne africaine tourne autour de 25%.
Dans ces conditions, il n’est pas permis de parler de tsunami industriel au Bénin. Comme beaucoup, je ne cesse de rêver de ce jour où nous changerons de dynamique. Mais quelques conditions doivent être remplies avant toute chose. Oui, la croissance économique africaine d’aujourd’hui est assise sur les minerais. Malgré une baisse de croissance en 2013, il n’est que de constater que ce sont les pays exportateurs de pétrole qui sont demeurés parmi les locomotives de la croissance de notre continent en 2013, le pétrole représentant à lui seul, environ 24 % de la croissance. L’Afrique de l’Ouest reste le leader des sous-régions avec un taux de croissance de 6,6 % en 2013, grâce notamment aux investissements dans les secteurs du pétrole et des minerais. La production de minerai de fer est restée le principal moteur de la croissance dans des pays comme la Sierra Leone et le Libéria, qui ont affiché de forts taux de croissance, à savoir 14,5 % et 7,5 % respectivement.
Pour le moment, les investissements industriels sont encore embryonnaires au Bénin. Les prospections minières engagées depuis l’année dernière attendent de générer leurs premiers fruits. Le pétrole et ses dérivés ainsi que les autres minerais sont encore loin de nous procurer le bonheur que nous attendons.
Il ne faut pas se leurrer. Si les minerais font partie des sources principales de croissance industrielle, le Nigeria nous permet de découvrir depuis quelques années le rôle de l’agriculture dans un contexte où les pouvoirs publics ont décidé d’accroitre la production agricole de manière substantielle. Une production agricole intégrée aboutit à l’industrie qui donne naissance à des filières qui inondent le marché de consommation.
Le Bénin l’a si bien compris que depuis les années 1990, il a multiplié les usines d’égrenage dont certaines sont aujourd’hui au chômage technique, du fait de la crise. Mais il y a que les coûts des facteurs de production (combustibles, matières premières entre autres) dans cette filière sont prohibitifs, obligeant   certaines à fermer leurs portes.
Dans la plupart des cas, les gouvernements successifs du Bénin n’ont pas encore compris l’interaction nécessaire à établir entre pouvoirs publics et secteur privé pour donner naissance à une industrie florissante.      Chez nous, la guerre entre l’Etat et le privé n’a jamais été aussi vive que ces dernières années. Du coup, les conséquences qui nous attendent les prochaines années sont énormes. Le Bénin a ouvert ses frontières aux rares industries étrangères en croyant pouvoir compter sur la manne extérieure. Mais derrière le rideau de ces quelques entreprises difficilement installées, se profilent de nombreux compromis arrachés par les investisseurs étrangers. Tous les douaniers vous diront, par exemple, que si leur institution a enregistré un déficit de 21 milliards de FCFA cette année, c’est principalement du fait des exonérations sans nombre accordées à certaines entreprises étrangères qui en profitent à souhait. Bien malin qui pourrait découvrir ce qui se trame derrière ces facilités offertes, facilités qui privent le pays des ressources qu’il était pourtant en droit d’attendre d’entreprises industrielles profitant de nos minerais.
Disons le mot, il nous faut notre « tsunami industriel ». Il faut pour cela une complicité active entre l’Etat et le secteur privé, socle d’un renouveau de l’industrie béninoise.

Par Olivier ALLOCHEME

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