.
.

Le triomphe de la vérité

.

Edito: Les institutions internationales


Visits: 1

Marcel de Souza est gouverneur de la BAD pour le Bénin depuis quelques années. Beau-frère de qui l’on sait, ministre du gouvernement par-dessus le marché, il est sans doute informé de la correspondance envoyée très rapidement par la Banque Africaine de Développement qu’il représente au Bénin. Dans cette correspondance, l’institution bancaire prend clairement position en affirmant, au cœur de la polémique : « Nous voudrions attirer votre attention et informer l’opinion que la construction de cette bretelle de même que le projet routier Comè-Possotomè-Bopa-Zoungbonou n’ont jamais fait partie de notre portefeuille de projets au Bénin. » Et de préciser à l’adresse de ceux qui doutaient encore de sa position : « Les projets que nous avons en cours au Bénin dans le domaine des transports concernent le projet de route Ndali-Nikki-Chikandou-Frontière du Nigeria financé à hauteur de 33,7 millions d’Unités de compte, et le projet de réhabilitation de la route Lomé-Cotonou et de facilitation du corridor Abidjan-Lagos pour financement de 73,1 millions d’Unités de compte.»
Et c’est comme cela qu’une respectable institution financière s’est invitée au centre de la bourrasque politique provoquée par Mathurin Nago le week-end dernier. Ce qui étonne ici, c’est tout à la fois cette participation qui tranche avec les habitudes de distance et de réserve froide de l’institution, mais aussi la duplicité qui est ici visible du fait du statut du ministre de Souza. Alors question : à quel prix cette entorse aux règles a-t-elle été rendue possible? Je veux croire qu’il s’est agi de répondre à une sollicitation du gouvernement béninois. Je veux croire aussi qu’il s’agit d’une simple clarification spontanée de la part de la banque soucieuse avant tout de ne pas laisser une confusion éventuelle se répandre dans l’opinion. Je veux enfin croire que le ministre de Souza n’en est pour rien. Mais il y a quand même de curieuses coïncidences.
La participation des institutions financières internationales aux polémiques politiques qu’allume la gouvernance du Bénin n’intervient jamais pour désavouer celle-ci. Jamais, on n’a vu la BCEAO, le FMI, la Banque Mondiale, la BOAD ou la BIDC remettre en cause les pratiques de gestion du régime Yayi. Le Bénin a beau enregistrer ICC-Service, les scandales de la Cen-Sad ou même le drame du PVI, on assiste au silence lourd et confus des institutions financières internationales, même lorsqu’elles ont financé des projets qui tombent à l’eau du fait d’un mauvais management. L’exemple de la BAD en est typique. Dans le cadre du projet PAFILAV qu’elle a financé, elle a laissé martyriser le coordonnateur du projet, Valentin Somassè, en 2012. Celui-ci avait, en effet, été jeté en prison par le régime désireux d’enlever un cadre rompu à la tâche, sélectionné par la BAD, elle-même, au bout d’un processus de deux ans, pour y mettre un homme de main. Injustement emprisonné, il n’a bénéficié d’aucun soutien de la BAD, bien que des cadres de la banque admettent sous anonymat que Somassè a été injustement emprisonné. Mais l’ancien député ne reçut jamais le soutien formel de l’institution, soutien qui eût pu changer le cours des événements dramatiques que devait vivre cet ingénieur agronome plus tard.
On ne parlera jamais assez des chiffres de la croissance du Bénin pour le compte de l’année 2012, chiffres contestés par Abdoulaye Bio Tchané, ancien directeur Afrique du FMI et financier de haut rang s’il en est. Mais ces chiffres probablement fabriqués ont été confirmés par le FMI au détour d’une audience de son représentant au palais de la présidence, sur la foi des chiffres opportunément fournis par l’INSAE. Sans aucune gêne.
Tout ceci intervient du fait de la difficulté qu’ont les responsables de ces institutions internationales à oser avoir l’audace de dire la vérité. Ils risquent d’être renvoyés, assassinés ou jetés en prison. A l’option prudentielle ici en vogue, il est largement préférable de permettre aux dirigeants africains de se regarder dans la glace : ils auraient gagné à éviter de mentir de bonne foi à leurs peuples.

Reviews

  • Total Score 0%


Plus sur ce sujet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

You cannot copy content of this page