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Le triomphe de la vérité

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Edito: Vous aussi magistrats


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Je me suis gardé jusqu’ici d’écrire quoi que ce soit sur le droit de grève des magistrats. Maintenant que définitivement la loi portant suppression du droit de grève aux magistrats a été rangée, on peut dire quelques petites vérités à nos amis.
Ce n’est plus un secret, ils se sont trop longtemps laissés entre les mains manipulatrices de l’exécutif. Sauf à de très rares exceptions, les magistrats béninois ont fait le jeu du pouvoir. Le cas, tragique, de l’ancien procureur Justin Gbènamèto est illustratif de cette tendance. On ne parlera pas de son rôle néfaste dans la conduite désastreuse des affaires empoisonnement et coup d’Etat. Toutes les personnes indûment jetées en prison garderont son nom comme celui d’un individu funeste prêt à toutes les méchancetés pour sauver son fauteuil. On ne parlera pas du cas Valentin Somassè qui a croupi des mois durant dans la sinistre prison civile de Cotonou alors qu’il n’y avait pas eu de plaignant et que surtout tout montrait dès le départ qu’il avait été jeté en pâture dans les crocs acérés de la justice. Comment comprendre qu’un magistrat, un homme de chair et d’os, ait été capable de jeter en prison un ancien député alors même que les fonds prétendument détournés par lui ont été officiellement reconnus par l’Etat comme étant dépensés pour le compte du projet que dirigeait Valentin Somassè. C’était un stratagème cousu de fil blanc par un lobby « régionaliste » pour l’écarter du « poste juteux » de coordonnateur du PAFILAV et y mettre un des leurs. Aujourd’hui hors de prison, il ne pansera probablement jamais les multiples plaies causées à sa famille. Son épouse rendit l’âme le jour de sa libération provisoire. Personne ne peut le convaincre aujourd’hui de l’impartialité des juges béninois.
Mais Gbènamèto a payé le prix fort comme d’ailleurs son collègue Procureur général Georges Constant Amoussou. Les déclarations de celui-ci font froid dans le dos lorsqu’on imagine le degré de familiarité et de complicité qui a pu exister entre le chef de l’Etat et lui jusqu’à son incarcération.  Non, on tombe des nues en voyant comment, pour des raisons de carrière, l’on a passé des années à faire peur aux opposants et aux syndicalistes, à supprimer la liberté des autres. Lorsque l’on se souvient de ces faits, l’on se souvient aussi que certains magistrats avaient été voués aux gémonies pour avoir résisté à la puissante main du politique. Le cas le plus connu est celui du juge Angelo Houssou. Mais il n’y a pas eu assez d’Angelo Houssou. C’est lui qui défendit la toge noire avec un panache qui restera encore dans les annales de l’histoire. Les décennies à venir chercheront les pleutres de la profession et trouveront Gbènamèto qui se laissa conduire à l’abattoir, mais elles chercheront aussi les héros et verront Angelo.
Il n’y a pas assez de juges courageux chez nous, pas assez d’Angelo Houssou. Pas assez pour s’autosaisir des nombreux cas de corruption qui pullulent au Bénin du changement refondé. Et pas assez pour s’autosaisir des propos incendiaires et inacceptables de Boni Yayi un certain 1er Août 2012. Le courage d’Angelo Houssou et de tous ces combattants silencieux, du fond de leurs toges, sauvera la magistrature d’une vassalisation assassine. Et c’est ce courage qui a fait la mobilisation du peuple lors des marches contre la suppression du droit de grève aux magistrats.
Mais, parlons du présent. Actuellement, un instituteur du nom de Sidi Ganda Abou est détenu à la prison civile de Natitingou pour avoir tenu entre ses mains des tracts non signés contre un ministre du gouvernement. Diffamation, propagation de fausses nouvelles, telles sont, entre autres, les chefs d’accusation qui l’accablent. Peut-on aujourd’hui emprisonner un père de famille pour ces motifs après que les magistrats eux-mêmes ont marché pour défendre le droit à la liberté ?
Il y a une impardonnable indécence à vouloir appliquer aux autres les lois que l’on trouve liberticides pour soi même. Le plaignant ici étant un ministre, tout le monde aura compris qu’un trafic d’influence a fait jeter le pauvre enseignant en prison.
En dépit de tout ceci, il y a encore beaucoup de juges vertueux et soucieux de la sauvegarde de nos valeurs. C’est à eux que je m’adresse: Votre conscience doit être votre repère en ces temps de déconfiture.

Par Olivier ALLOCHEME

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