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Le triomphe de la vérité

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Edito: Entreprises sans banque


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Les banques béninoises sont bourrées d’argent, mais elles ne le prêtent pas aux entreprises. C’est aujourd’hui l’une des aberrations de l’économie béninoise.
Depuis l’avènement du régime du changement, les petites et moyennes entreprises (PME) ont des difficultés monstres à accéder aux crédits bancaires. Un mur de dispositions prudentielles est érigé pour les dissuader d’avoir recours à ce type de financement. Et pourtant, avant 2006, ce sont au contraire les établissements financiers qui accouraient vers les PME pour demander à appuyer leurs projets. En quelques années seulement, cette confiance et cette collaboration sont revenues à zéro, obligeant les chefs d’entreprises à faire recours à une foule d’astuces pour financer leurs projets.
La plupart d’entre eux vous diront que les prêts à réaliser en vue d’exécuter des marchés financés par le budget national sont pratiquement impossibles au niveau de ces institutions. La cause réelle de cette situation remonte à la perte de confiance des banques en l’Etat qui finance ces projets. S’il s’agit d’écoles ou de marchés à construire, de fournitures de bureau à acheter ou de routes à aménager, mieux vaut trouver soi-même les moyens nécessaires que de s’adresser à un banquier. Celui-ci risque fort de refuser, sauf à présenter de solides garanties que la plupart des jeunes chefs d’entreprises n’ont pas.  Financer la construction d’un lycée public qui coûte peut-être plusieurs centaines de millions de FCFA relève dès lors de la gageure pour la plupart d’entre eux. Ils sont alors obligés de laisser filer ces marchés aux mains des entreprises étrangères. Et pourtant, exécuter ces marchés leur aurait permis de consolider leur trésorerie et d’acquérir de l’expérience pour pouvoir gagner sur d’autres fronts.
Mais il faut se demander pourquoi il a suffi de quelques années seulement pour que les banques arrêtent de financer les projets publics. En réalité, elles ont été secouées par de nombreux cas d’entreprises qui n’arrivent plus à solder leurs dettes faute d’avoir été payées à temps par l’Etat, alors qu’elles ont effectivement exécuté les marchés pour lesquels elles ont sollicité le concours des établissements financiers. Aussi curieux que cela puisse paraître, notre Etat, à partir de 2006, s’est mis à ne pas payer à temps ses prestataires. Deux ans, trois ans voire plus, ce sont les délais auxquels les chefs d’entreprises font face lorsque l’Etat doit leur payer des marchés qu’ils ont exécuté en bonne et due forme. Par peur de représailles, presque personne ne peut porter plainte contre l’Etat pour les énormes préjudices subis dans ces cas.
Du fait des tensions de trésorerie auxquelles il fait face, alors qu’il y a une inflation de promesses gouvernementales, les entreprises entament les chantiers, investissent leurs ressources pour les achever et doivent attendre deux ans, trois ans ou plus pour se faire payer. Pendant ce temps, la banque calcule ses intérêts et entame des procédures de recouvrement qui s’avèrent souvent impitoyables. Résultats, les bons de commande de l’Etat ne disent plus rien aux banquiers, et les chantiers sont abandonnés faute de financement.
Résultat aussi, les entreprises nationales sont discréditées et les dirigeants du même Etat qui a manqué à son devoir fondamental de les payer, se mettent à vitupérer contre l’incompétence de nos entreprises.
Dans le même temps, les multinationales ne connaissent pas ce genre de difficultés. Il leur suffit de s’appuyer sur leurs gouvernements pour se faire payer au plus vite. Le cas le plus connu, c’est celui des entreprises françaises. C’est tout naturellement que leur Etat les couvre et exerce les pressions nécessaires à cet effet. Nous voyons alors les entreprises françaises s’arracher des marchés de construction de routes et de ponts chez nous alors que les entreprises nationales tournent les pouces ou ferment carrément leurs portes, écrasées de dettes, de loyers et de salaires impayés.
Ce système inique ne peut plus durer. Il nous faut arrêter la saignée si nous tenons à maintenir une masse critique d’entreprises de haut niveau. Cela passe bien entendu par la restauration de l’image même de l’Etat qui se doit d’honorer ses engagements. Il se doit surtout de ne pas promettre telle route ou tel pont si les moyens n’existent pas, de ne pas faire des lancements médiatiques de projets fantômes, là où il n’y a pas encore un seul copeck pour les concrétiser. Dans tous les cas, ce système d’assassinat des entreprises de chez nous mérite d’être corrigé à tout prix, et au plus tôt.

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