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Le triomphe de la vérité

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Edito du 02 avril 2014: Routes et ponts


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35 milliards de FCFA. C’est le montant du protocole d’accord signé entre le Bénin et la BOAD ce lundi. Cet accord devrait permettre de financer la réhabilitation des routes Comé-Lokossa-Dogbo, Tchetti-Savalou, et Logozohè-Glazoué sur une longueur de 139,67 km, ainsi que la reconstruction de la traversée urbaine et le contournement de la ville de Parakou sur une longueur totale d’environ 17 km de voies.

        Ce projet fait partie des nombreuses idées émises par le gouvernement pour améliorer la croissance économique et lutter contre le chômage des jeunes. Ce sont les fameux investissements structurants projetés dans tout le pays avec divers partenaires, projets qui ont transformé le Bénin en un vaste chantier. Le chef de l’Etat s’appelle volontiers chef chantier et aime à se faire photographier au milieu des briques et des tuyauteries, le casque vissé sur le crâne. Plus développeur que lui, tu meurs.

        On se rend compte que la BOAD est devenue avec la Chine le bras financier des grands projets du Chef de l’Etat. Le gouvernement a confié à la Banque un mandat d’arrangement pour la mobilisation de 800 milliards de F CFA au cours des trois prochaines années. Ces ressources sont destinées à la réalisation de plusieurs projets d’infrastructures routières et portuaires, ainsi que de plusieurs projets dans l’énergie, l’eau et l’assainissement, l’éducation et la santé. Ce montant devrait être mobilisé auprès des banques commerciales et de l’ensemble de la communauté des bailleurs de fonds.

        Du 17 au 19 juin, le Bénin s’invite à Paris pour la table ronde de ses investisseurs en vue de mobiliser là aussi du financement pour ses projets. Il s’agit de financer la Stratégie de Croissance pour la Réduction de la Pauvreté (SCRP). Le pays entend ainsi imiter la Côte d’Ivoire qui a réalisé un projet similaire en septembre 2012 et récolté plus de 2000 milliards de FCFA en trois jours seulement. Auréolé par les ambitions pharaoniques des nouvelles autorités d’après-guerre, la Côte d’Ivoire s’en va vent debout vers une émergence inéluctable. Le Forum ICI 2014 organisé à Abidjan en février pour attirer les investisseurs a drainé un beau monde dans le pays avec des promesses qui se concrétisent déjà sur les bords de la lagune Ebrié. Cette imitation positive devrait attirer les investisseurs au Bénin.

Mais il est vrai que la Côte d’Ivoire n’est pas le Bénin et que la notoriété internationale d’un Ouattara n’est pas la même que celle d’un certain Yayi. La situation de crise où le pays se trouve plongé depuis des mois n’est pas non plus pour arranger les choses. L’argument du gouvernement sera de vanter les mérites de la démocratie béninoise restée dans l’imagerie internationale comme l’une des plus solides d’Afrique. Sans oublier que le pays bénéficie d’un beau parfum de paix.

        Mais ces fameux projets structurants qui drainent des milliards chez nous restent encore hypothéqués par la mauvaise gouvernance congénitale. On sait ce qui se passe actuellement sur la route Godomey-Pahou, route dont l’appel d’offre avait subi un coup d’arrêt brutal, l’Etat ayant décidé de son propre chef d’en confier la réalisation à un groupe chinois. Résultat, les erreurs techniques se sont multipliées sur ce tronçon qui n’arrête pas de soumettre les usagers à des calvaires sans fin. Autre anomalie, la route Ndali-Bembèrèkè qui se trouve dans un état inacceptable, trois ans seulement après sa réalisation. Et la route Tori-Allada reste encore hypothétique.

A peine commencé, le projet de chemin de fer ouest-africain qui sera lancé dans les prochains jours, s’est déjà enfoncé dans de profondes polémiques judiciaires qui menacent sa réalisation. Ce sont environ 3000 milliards qui seront investis dans ce projet salvateur destiné à renforcer l’intégration régionale. Derrière ces grands travaux, il y a évidemment des arrière-pensées politiques.

La présence « effective » du Chef de l’Etat aux lancements et aux inaugurations lui donne un air de développeur que n’ont pas ses opposants. Mieux, elle lui permet d’être aux côtés des populations dans les hameaux les plus reculés qui le regardent d’ailleurs comme un messie pour les avoir sorties de l’enclavement. C’est de la realpolitik, version béninoise.

        Mais personne n’est dupe. Ces projets dits structurants sont des nids de haute corruption à des niveaux insoupçonnés. Les pourcentages distribués à la pelle permettent de financer marches et coups fourrés politiques, pendant que les populations hilares, célèbrent leurs routes et leurs ponts.

Par Olivier ALLOCHEME

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