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Le triomphe de la vérité

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Edito du 3 Février 2014: Au carrefour des impasses


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logoLa journée d’aujourd’hui est l’une des plus pathétiques de l’histoire récente de notre pays depuis 1990. Si les négociations de cet après-midi échouent, il n’y a pas de raison que nous ne retombions dans un chaos dont personne ne peut prévoir l’issue.
Pour la première fois depuis 1989, le pays se retrouve au bord d’une grève générale illimitée. Alors qu’on disait, la semaine écoulée, qu’il n’y a jamais rien eu de semblable aux grèves générales actuellement en cours dans le pays, cette fois-ci, c’est le caractère illimité de ce débrayage qui plane sur nos têtes. Dans certains secteurs comme l’enseignement supérieur et la justice, c’est déjà une réalité. Les praticiens hospitaliers annoncent les couleurs cette semaine pour réaliser leur opération « Hôpitaux morts » à compter de lundi prochain. Il faut s’attendre à ce que les autres secteurs déjà en grève entrent dans la spirale des mouvements illimités lorsque les négociations de ce soir en viendraient à échouer, paralysant du coup l’administration publique.
Curieusement, ceci se passe sous un régime passé champion dans les gratuités qu’il a distribuées à la pelle. Du RAMU cadeau aux microcrédits donnés en milliards, des routes dans tous les sens aux adductions d’eau sensées lutter pour l’atteinte des OMD, de l’électricité définitivement dans toutes les communes aux salles de classes construites par milliers, les réalisations sociales se vendent sur les plateaux de télévision. Le chef de l’Etat se retrouve sur tous les fronts. Il ne dort pas, et la télévision nationale est payée pour diffuser à longueur de journée à tout le pays ses grands discours. Et malgré tout cela, le pays se trouve au bord de l’explosion. Aujourd’hui, plus que jamais depuis 1989, le Bénin est menacé par une gouvernance que les citoyens ne comprennent pas.
Tout se passe comme si les Béninois du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest en voulaient à un Chef d’Etat dont tout montre pourtant qu’il travaille énormément pour eux. Qu’ils étaient devenus subitement ingrats à son égard, au point de lui paralyser le pays entre les mains. Au point de forcer chaque fois le président de la république à jurer que la barque ne chavirera pas.
La réalité, c’est que les promesses de la prospérité dite partagée ont laissé un goût amer à un nombre croissant de citoyens. Les déceptions accumulées, les engagements impossibles à tenir mais signés par l’Etat, la gouvernance inacceptable et la personne présidentielle qui fonctionne comme un éléphant dans un château en porcelaine, ont achevé de détruire la dignité du Béninois face à ses dirigeants.
A y voir de près, la situation n’explose pas parce que les agents de l’Etat qui vont en grève dénient au pouvoir d’avoir réalisé ce qu’il a pu pour venir à bout des difficultés auxquelles ils font face. Mais la crise du pouvoir provient de ce qu’il s’est rendu lui-même incapable de trouver une réponse face à de nouvelles demandes sociales et surtout face à une gouvernance devenue gangrène.
Il faut se demander comment le gouvernement pourrait bien trouver les moyens pour répondre favorablement aux revendications des praticiens hospitaliers, à l’heure où le FMI n’a de cesse d’attirer l’attention des autorités sur la nécessité de respecter les normes de l’UEMOA en matière de masse salariale. En accordant 25% d’augmentation salariale en 2011, contre toute orthodoxie financière et en dépit des conséquences évidentes que cela devait engendrer un jour, le gouvernement n’avait pas assez perçu que cela l’empêcherait de faire face aux autres revendications des travailleurs.
Un autre signe que le dégel souhaité ne risque pas d’advenir de sitôt, ce sont les revendications concernant les défalcations, le limogeage du préfet Placide Azandé et du commissaire central Pierre Agossadou. J’aimerais bien voir comment un gouvernement comme le nôtre avec un président comme nous le voyons accèdera à ces exigences. Il ne laissera pas l’impression de se faire dicter son action par les syndicats dont il a pris le temps de dire qu’ils sont à la solde des pouvoirs d’argent qui chercheraient à le déstabiliser. En fin de compte, la seule revendication à laquelle l’Etat accèdera certainement sans problème est celle liée aux libertés syndicales.
L’on voit clairement qu’une sortie d’impasse est, pour le moins, hypothétique aujourd’hui. Et Boni Yayi, lui-même, est l’artisan principal de la tension qui est à son comble.

Par Olivier ALLOCHEME

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