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Le triomphe de la vérité

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Edito: La route des milliards


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Il suffit de lire les bandes défilantes, ces jours, à l’ORTB. Tout le Bénin est en chantier. Un vaste chantier. Hier encore, une autre de ces informations, câblées depuis la présidence (tout le monde le sait, même si on ne dit rien), une bande défilante, disais-je, nous informait que le financement de la route Djougou-Parakou est bouclé grâce au concours de la BOAD : 52 milliards. Jubilons donc !
L’itinéraire des milliards qui se déversent sur le réseau routier national part toujours de l’extérieur. Si ce n’est pas la Chine (oui, la grande et généreuse Chine), c’est le Brésil, la BOAD ou la BAD. Nouvelle filière, la Turquie a fait une entrée remarquée dans ce cercle des bailleurs de fonds de la route béninoise. L’ex Empire Ottoman sera présent sur l’axe Kétou-Savè avec un pont longtemps attendu sur l’Okpara. Dans le même sillage, la réhabilitation de la route Savalou-Djougou comme de l’axe Djougou-Parakou constitue une remarquable avancée dans l’amélioration du patrimoine infrastructurel du pays en ces temps où nous en avons le plus besoin.
Depuis quelques mois, le petit monde des observateurs du monde économique a pu se rendre compte des bienfaits jadis méconnus de ces infrastructures dans la réduction de la pauvreté. Les chercheurs d’Afrobaromètre, un centre panafricain de recherches en économie politique, ont pu livrer il y a quelques mois les résultats de sondages pertinents sur la réduction de la pauvreté en Afrique. Le résultat est sans appel, puisque les populations les plus pauvres se sont révélées être celles vivant dans les régions sans infrastructures de base : eau potable, électricité, routes, infrastructures sanitaires, etc. Et la Banque Mondiale s’interrogeant sur les raisons faisant que des pays ayant enregistré des taux de croissance record en 2012, se retrouvent avec des populations toujours pauvres, a pu déceler que l’investissement dans les infrastructures et l’éducation sont les premiers vecteurs du mieux-être de l’économie. Oui à la croissance économique, ont semblé dire tous ces chercheurs, mais pas sans réduction de la pauvreté. C’est-à-dire, sans cadre de vie sain, sans route, sans électricité, sans écoles performantes…
En ligne de mire, il y a la fameuse méthode HIMO (haute intensité de main-d’œuvre). Elle permet d’utiliser une main-d’œuvre non spécialisée issue de tous ces déscolarisés convertis dans la débrouille et qui trouvent dans les chantiers ouverts l’occasion de se construire un nouvel horizon. Ce sont les plus nombreux sur la plupart de nos chantiers. Et c’est tout bénéfice.
Mais tout en disant du bien de ces chantiers qui s’ouvrent à tour de bras, il convient d’aller plus loin dans la réflexion. C’est en 2010 qu’ont été faites les premières annonces officielles (et tapageuses, comme d’habitude) sur le bouclage du financement de la route Akassato-Bohicon. C’était à la veille de la présidentielle cruciale de 2011. Trois ans après, il a fallu le ministre Aké Natondé pour dire que finalement la boucle est bouclée. Conclusion, rien n’était prêt avant les lancements, inaugurations et autres petites comédies de village orchestrées pour faire croire à la populace ignorante et imbécile que le Chef de l’Etat était bien un démi-Dieu capable de décrocher plus de 100 milliards à la veille d’une élection cruciale. Je ne voudrais pas faire accroire que les annonces de milliards qui pleuvent sur nos têtes chenues, ces temps-ci, se situent dans la même sauce. Il y a eu Akassato-Bohicon, et il peut y avoir Kétou-Savè ou même Savalou-Djougou, surtout si l’on sait que toutes ces annonces ont commencé subitement dès que les tourments de Talon et consorts se sont accentués. Après tout le temps passé sous le yayisme et ses méthodes, les Béninois ne sont plus dupes.
La tragédie (appelons chat un chat) de l’axe Akassato-Bohicon constitue pour les finances publiques une longue hémorragie qui sera conjuguée d’ici quelques mois au passé. Seulement, ceux qui construisent ces routes ne sont pas Béninois. Je ne me consolerai jamais du gâchis que représente pour nos entreprises béninoises la perte de ces expériences ou de ces ressources. A leur place, ce sont les bailleurs qui positionnent leurs entreprises. A bon compte. C’est à se demander quelles sont les conditions réelles d’octroi de ces financements. A se demander aussi si bientôt les Turcs, les Brésiliens et autres Indiens ne vont pas déverser sur nos marchés domestiques les produits de leurs industries. N’allez pas demander quand est-ce que nos capitaines d’industries auront les moyens de développer ici des initiatives béninoises permettant aux Béninois d’avoir leur propre label : il ne faut pas rêver de ces choses-là lorsqu’on accepte l’aide « généreuse » des autres.

Par Olivier ALLOCHEME

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