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Le triomphe de la vérité

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Edito: Le cancer de la corruption


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logo journalC’est donc ainsi. A cause de la corruption, le Bénin est en train de perdre le second compact du Millénium Challenge Account  (MCA). Du moins, pour le moment, puisque la décision finale reste à prendre dans quelques mois. A qui donc la faute de cette énorme catastrophe ?
En pointant du doigt la corruption, le Conseil d’administration du MCC n’est pas allé plus loin. Le coordonnateur du MCA Bénin est lui-même resté dans la  même ligne : c’est donc la corruption. Mais le gouvernement a fait entendre un autre son de cloche. Et la voix du ministre du développement Marcel de Souza a apporté un autre éclairage, accusant deux opérateurs économiques d’avoir grugé des entreprises américaines, dont l’une a  obtenu une condamnation en justice, condamnation qui n’aurait jamais été exécutée à cause, dit-il, de la corruption des magistrats béninois. La corruption des magistrats béninois. Autrement dit, et à en croire le ministre, si le Bénin est en train de perdre son compact,  ce n’est nullement le fait de la mauvaise gouvernance ayant créé dans l’appareil étatique des prévarications jamais vues auparavant, ce n’est nullement de la multiplication des scandales du genre siège de l’Assemblée nationale, turbine à gaz de Mariagleta ou encore l’attribution fantaisiste des marchés publics à des entreprises FCBE. Non, selon Marcel de Souza, il faut surtout s’en prendre à la félonie des magistrats. S’il a perdu, ce n’est vraiment pas parce que nous avons créé une Autorité nationale de lutte contre la corruption à qui aucun moyen n’est affecté depuis bientôt sept mois. Et pendant qu’elle brasse du vent, les affaires se mènent…
Je veux croire Marcel de Souza. Et le croire, c’est croire que les  Etats-Unis ne se serviraient finalement de leur programme que comme d’un moyen de chantage  pour protéger et promouvoir leurs entreprises dans les pays concernés par le MCA. Quelles sont donc les conditionnalités de cette aide américaine ? Bien malin qui pourrait le dire. Il est clair qu’elles incluent déjà des clauses non écrites qui seront déballées tôt ou tard. Et s’il faut toujours croire le ministre, le Bénin qui est un Etat souverain perd un programme américain parce que des contentieux commerciaux  n’ont pu aboutir à cause des partenaires privés américains et béninois. Si ce que Marcel de Souza révèle est bien la vérité, il nous met sur la piste d’un nouveau scandale, autrement plus embarrassant pour le Bénin et pour les Etats-Unis.
Mais il y a que tout le monde sait que les proclamations gouvernementales en matière de lutte anti-corruption sont rarement suivies d’effets. Et que l’administration béninoise a été largement corrompue aujourd’hui du fait de sa politisation outrancière qui empêche toute efficacité et rend très difficile la possibilité de sanction. Peu de gens peuvent nier qu’aujourd’hui plus qu’hier, l’administration publique béninoise est devenue le lieu où ont lieu les récompenses politiques, les promotions arbitraires basées sur des critères sentimentaux, les règlements de compte.  Quel miracle attendre lorsque les résultats des concours de recrutement sont négociés au palais de la république, au vu et au su de tout le monde ? Que peut-on attendre d’autre d’une administration publique lorsque les vraies réformes échouent toujours par faute d’un réel leadership débarrassé d’arrière-pensées politiciennes ? Et je me demande à quels résultats la lutte contre la corruption peut  parvenir quand on sait comment le Chef de l’Etat lui-même distribue des millions à ses hôtes ? Quand l’exemple ne vient pas du sommet, l’Etat se rend incapable de demander des comptes au citoyen ordinaire.
Mais il n’y a pas que le public qui soit ici en cause. Je connais des chefs d’entreprises qui ne soumissionnent à des marchés publics que lorsqu’ils ont reçu l’assurance de les avoir gagnés à l’avance. Tous ceux de leurs pairs qui n’utilisent pas le même système des dessous de table, des voyages d’agrément ou  de  voitures et villas généreusement offerts, sont appelés à disparaitre. Tout ceci rend désormais obligatoire la création d’une structure indépendante d’enquête de moralité sur les entreprises soumissionnaires des marchés publics. Mais la corruption, c’est aussi ces postes de police qui se multiplient sans vergogne sur nos axes routiers et qui font du Bénin l’un des pays les mieux lotis en matière de corruption routière. N’oublions pas non  plus que le Béninois a banalisé les pots-de-vin en en faisant une denrée  presque obligatoire de tous les services publics.
Que faut-il donc faire ? Plus que jamais, il faut donner à l’Autorité nationale de lutte contre la corruption les moyens de sa mission.  Mais alors, si le Chef de l’Etat ne lui laisse pas la main libre pour travailler, les mêmes causes produiront les mêmes effets.

Par Olivier ALLOCHEME

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