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Le triomphe de la vérité

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‘’Djogbé’’, le théâtre de l’identité Zéro universel à l’EITB: Un système de représentation qui rapproche l’être de son identité originelle


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Sans titre-1L’atelier Nomade a accueilli le samedi 02 novembre dernier une création, pour dire une forme nouvelle de représentation théâtrale. Il s’agit de ‘’Djogbé’’, une expression théâtrale qui met un coup de marteau dans les règles traditionnelles connues au théâtre. C’était sous la houlette de Lazare Houétin, fondateur du groupe scolaire et universitaire de théâtre les Cerveaux Noirs(1965) et un des anciens membres influents Zama Hara(1976) qui ont fait leurs preuves dans le théâtre béninois. Depuis environ 25 ans, cette théorie a été longtemps développée et présentée aux Etats Unis d’Amérique. Elle était à sa première présentation en terre africaine précisément à l’EITB.

Toute la scène s’est déroulée dans l’espace, pas sur une scène, avec à la clé les acteurs et les spectateurs qui se sont confondus. La salle de spectacle a été occupée par un décor composé d’une quantité considérable de branchages et de feuilles qui jettent l’observateur dans un univers forestier (forêt sacré) et en même temps dans le creux d’une vallée, avec l’obscurité qui prédominait, déchirée par quelques lueurs. Tout a commencé par l’introduction cérémonielle de tous les acteurs dans la salle de spectacle complètement configurée en forêt. Tous ceux qui étaient présents sur les lieux du spectacle, même les hommes de presse, ont été conviés à se mettre en costume (vêtement de scène) à leur volonté. En ce moment, il faut voir ceux qui étaient venus en spectateurs écarquiller les yeux en signe de surprise. Ils ne s’y attendaient pas et c’était ainsi le début du déroulement du spectacle ‘’Djogbé’’ (l’expression du premier matin). C’est une expression théâtrale pas comme les autres. Il fallait donner l’expression d’un MOI intérieur profond sur un fond sonore endiablé accompagné de belles et touchantes paroles (le chant de Djogbé) et quelques plages de belles mélodies. Sur les sonorités, donc, de clarinette, de gros tambours, de gongs et de castagnettes, des expressions corporelles libres et diversifiées se sont enchaînées et ont laissé admirer, dans une alternance d’espace clos et ouvert (salle de spectacle-plage, plage-salle de spectacle), c’est le voyage. C’est en condensé le contenu de l’intrigue qui n’avait laissé personne en marge de la cérémonie.

 

 ‘’Djogbé’’, un théâtre de type nouveau

La liberté, c’est le mot auquel se résume la trame de ‘’Djogbé’’ pour ne pas digresser. Et l’expression « soyez vous-même » qui revenait de façon rythmée en leitmotiv tout le long de l’intrigue, en est la confirmation. Il faut, par ailleurs, remarquer l’absence de la scène qui témoigne, d’un point de vue, de la dimension de liberté que ‘’le metteur en espace’’ a voulu imprimer au déroulement de son intrigue. Ensuite, notons que toute la scène a été déployée au minimum sur trois espaces de décors différents, la salle de spectacle qui a été transformée en une vallée, sur la plage située en face de l’école internationale de théâtre, passant la traversée de la route des pêches. Les mêmes sonorités, paroles, et gestuelles ont articulé toute la trame. L’autre aspect de ‘’Djogbé’’ qui accroche est que acteurs, participants, danseurs et chanteurs, sont harmonieusement confondus. Ce point à lui seul marque le degré zéro de la trame. Et quand on parle de degré zéro, c’est qu’il n’y a pas de personnage qui soit véritablement identifié dans telle ou telle catégorie. Là, la distanciation entre le rôle et le comédien est nulle. Et à suivre la cérémonie, dans la succession de l’acoustique, des gestuels, des paroles et le nombre non négligeable que constitue les acteurs, on remarque que tout est un. C’était un mélange parfait qui témoigne d’une liberté d’expression. Ces choix caractéristiques opérés par le dramaturge pour la réussite de son projet esthétique (objectif de la création) ne sont pas, pour le moins, gratuits. Lazare Houétin entend libérer son art dramatique de toute contrainte et rigidité liées aux lois, règles et principes traditionnellement sculptés pour faire de certains théâtres l’apanage de ceux qui en détiennent la clé. Lesquels théâtres sont à mille lieux des réalités de l’Afrique. Ainsi, sa forme de représentation scénique ramène l’intrigue à l’ambiance ordinaire qu’on vit, par exemple, lors des cérémonies de dot ou de mariage coutumier, de Zangbéto, du Sagbata, de la Gani, de Hêviosso en Afrique.

 

Au-delà de la liberté scénique

L’intrigue de ‘’Djogbé’’ vise également à mettre en relief la liberté fondamentale et originelle. Quand le dramaturge fait l’option de faire évoluer ses personnages dans des espaces ‘’immaculés’’ telle qu’une vallée ou une plage, où l’on pouvait facilement être en symbiose avec la nature, sa NATURE propre à l’état pur, cela sous entend que les hommes qui s’y retrouvent, peuvent se manifester à gré et à volonté sans se soucier de la présence de l’autre. Et dans la trame cela s’observe : «tout ce que tu fais est juste, tu t’accroupis, c’est juste – tu bouges dans la cadence, c’est juste – tu chantes, tu danses, c’est juste, n’ayez crainte de rien. Ce que nous faisons, ce n’est que l’expression de notre premier matin », a rappelé Lazare Houétin durant tout le déroulement de la trame. De la même façon, on peut entendre chacun dire ce que bon lui semble dans une polyphonie harmonieuse telle que : « ceci est l’expression de mon premier matin – Djo-Gbé, l’expression du premier matin du mouton, de la mer – je suis la terre, la terre ne ruse pas – je suis toi, tu es moi… », et quand l’acoustique commence, tout le monde se met à danser tout naturellement. C’est dans cette nature de liberté idéale que le dramaturge plonge tout le monde pour favoriser l’expression authentique du fort intérieur de chacun. Ce qui parfois rompt les liens de soucis et vide l’individu de son état comateux où il était pour l’enrichir de gaieté originelle. Des témoignages ont été donnés, à cet effet, à la fin de la scène par certains étudiants de l’école. Cette représentation, qui a été donnée à l’issue d’un séminaire de huit (08) jours avec les étudiants de l’Ecole Internationale de Théâtre du Bénin (EITB) et ceux du département des arts de la faculté des lettres arts et sciences humaines, est un théâtre de type nouveau, qui regroupe, sans frontières, toutes les autres formes de théâtres qui ont existé, qui existent et qui peut-être viendront. C’est le socle de tous les théâtres, le théâtre de l’identité Zéro universelle.

Teddy GANDIGBE

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