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Le triomphe de la vérité

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Profil: Ousmane Alédji, une pierre angulaire de la culture béninoise


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Ousmane AlédjiEcrivain et metteur en scène, Ousmane Alédji est le directeur du théâtre Agbohounkoko et du Centre culturel Artisttik Africa sis au quartier Agla à Cotonou. De façon singulière, l’homme est aujourd’hui, sans fausse modestie, une des figures non négligeables du paysage culturel béninois. Rencontré le Lundi 29 juillet dernier dans ledit centre, il a levé un coin de voile sur sa personnalité.
Il affiche un air modeste, tempéré, prudent et très réservé. Ce qui l’explique, ce sont les séquelles des « expériences de la vie », a-t-il laissé entendre avant d’avouer qu’il n’a pas été toujours comme ça. Mais enfin, on se rend compte que, par la force des choses, a-t-il poursuivi, « tout finit par se calmer en nous d’un jour à l’autre ». Parlant de modestie, le dramaturge dit ne pas l’être du tout. « Je ne suis pas humble du tout et je ne veux même pas l’être parce que je ne sais pas à quoi cela va servir de l’être surtout dans ce monde ». Tout de blanc vêtu, le directeur du théâtre Agbohounkoko est imposant par sa taille. Il est de teint clair avec les cheveux noirs et crépus coiffés avec soin. Ousmane Alédji est reconnaissant, ouvert et fidèle à l’amitié. « C’est au Béninois que je dois ce que je suis aujourd’hui », a reconnu l’acteur culturel. Imperméable à la vanité et à la prétention, il présente un visage effilé au regard poignant et pétillant d’altruisme. Sa sérénité fait de lui un homme couvert de mystère et sa lucidité dépouille son interlocuteur d’arguments et le plonge dans le silence. Il a un sourire mince, teinté d’humour et de sérieux. « Il ne sert à rien de se prendre la tête pour afficher ce qu’on n’est pas, de se gonfler la poitrine et les muscles pour se lever au dessus des autres. Je crois qu’il faut être naturel tout simplement. Il ne faut pas jouer. Il ne faut pas surenchérir. Il ne faut pas se fourvoyer », a-t-il mentionné pour montrer qu’il se situe juste à la frontière de la modestie et de la vaine grandeur. « Je prête suffisamment attention aux gens, je crois. Mais, dans le même temps, je suis très exigeant, aussi bien dans tout ce que je fais qu’envers ceux avec qui je traite », a-t-il réaffirmé. Musulman fervent, pratiquant et convaincu, Ousmane exprime son ouverture d’esprit. « Moi, je ne juge rien et je ne me fais pas de préjugées. Au contraire, je trouve que l’ouverture d’esprit est impérative et primordiale pour nous autres, acteurs culturels. C’est pourquoi, je cherche beaucoup à comprendre et à apprendre. Tout cela nous ouvre à un autre univers culturel, pourquoi pas cultuel », a-t-il révélé. Le metteur en scène est un irascible, c’est-à-dire prompt à la colère. « Je m’énerve vite, les murs tombent vite avec moi et c’est ce que beaucoup me reprochent. Je ne sais pas faire des bisous, j’ouvre les bras pour accueillir, si tant est que je vais à la rencontre de l’autre. Les bisous se présentent à mes yeux comme des grimaces », a-t-il répondu à la question relative à ses caprices. L’autre chose qui fait le défaut de l’homme est le trop grand isolement et son emmurement dans les livres. « C’est paradoxal,  je suis un homme de spectacle qui aime se retrancher. Et ça, la mère de mes enfants me l’a toujours reproché ». Ce qui le distingue des autres est qu’il aime faire savoir à son vis-à-vis ses principes de jeu avant le début de toute forme de collaboration. Il se décline donc que c’est le genre d’homme qui a en horreur la tromperie, les coups tordus, l’injustice, le manque de sincérité et la petitesse d’esprit. « On peut être pauvre et digne », a martelé le dramaturge. La lecture et les discussions sont les forts de Ousmane Alédji. De goût, la couleur blanche est sa couleur prisée. Lorsque le metteur en scène est invité à table, c’est l’akassa ou le piron accompagné du moyo sans huile (un mélange de tomate, d’oignon et de piment vert haché accompagné de poisson) qu’il préfère. « Quand je suis à l’extérieur, c’est pareil, très simple », a-t-il fait savoir. Pour ce qui concerne la boisson préférée de l’homme, c’est de l’eau plate et parfois de jus de fruit dont il s’abreuve. Quant à l’alcool, il dit en prendre rarement. Sa conviction est d’éduquer, de former les esprits et d’élever les pensées. Pour lui, l’homme doit se dépasser, se transposer, pourquoi pas se transformer. « Moi, je fais mes choses dans le futur, à rendre, de mon point de vue, l’homme meilleur. Donc, toutes ces envies m’amènent à prospecter des environnements plus élevés que le quotidien ».

Ousmane Alédji et sa carrière

Le monde artistique a vu apparaitre Ousmane dans les années 91. Tout a commencé par des déclamations poétiques auxquelles l’homme s’initiait avec ses jeunes amis de quartier à Ouidah où il avait vécu la majeure partie de sa tendre enfance. Passionné des livres et de la plume, Ousmane, à un moment donné de sa vie, pour le bagage qui l’habitait, ne pouvait plus taire l’envie d’écrire qui l’excitait et l’emportait par-dessus tout. C’est pourquoi « je suis devenu écrivain par la force des choses », a-t-il laissé entendre. Une trentaine de pièces de théâtres, dont vingt cinq régulièrement jouées ici et ailleurs, sont déjà à l’actif du prolifique dramaturge. ‘’L’amour de nos deux jours’’, ‘’Polismon’’, ‘’Traumatisme’’, ‘’Est-ce ainsi vivent les hommes ?’’ sont, entre autres, quelques titres de l’auteur. En tant que metteur en scène, Ousmane Alédji a déjà écrit et monté vingt cinq spectacles, du moins pour ce qu’il nous a confié. « Sans fausse modestie, parmi les metteurs en scène béninois, je suis celui qui vent le plus à l’international », a-t-il martelé. Le dramaturge a déjà pratiquement fait le tour du monde avec son art et son savoir faire. La France, l’Allemagne, la Belgique, la Suisse, le Brésil sont quelques pays, parmi tant d’autres, déjà visités par Ousmane en tant qu’acteur de scène et metteur en scène. « Moi, je n’ai pas trop joué. A partir du moment où j’ai découvert qu’il y a plus de meilleurs acteurs que moi, je me suis rangé du côté où je pouvais mieux me retrouver. C’est alors que je suis devenu écrivain, formateur et directeur d’acteurs », a-t-il souligné.

Etude et vie privée

« J’ai été à l’école comme tout le monde ». Originaire de Ouidah, avec Kétou comme origine éloignée, Ousmane Alédji a environ la quarantaine. Il a fait son cours primaire jusqu’en seconde dans la cité des Kpassè avant d’aller poursuivre ses études à Lomé au Togo où il obtient le pro-bac, l’équivalent du baccalauréat. Ensuite, il a mis le cap sur Dakar où il est parti fréquenter l’Institut Senghor, par le biais d’une bourse. Cet établissement sénégalais s’occupe du perfectionnement de la langue française, et c’est l’équivalent du CEBELAE ici au Bénin pour les anglophones. Là bas, Ousmane a fait jusqu’en Licence. A son retour à Cotonou, il s’est inscrit dans un institut d’art et de culture dénommé ‘’Afrique en création’’ d’où il est sorti avec un diplôme d’administrateur culturel. Ledit institut était, à l’époque, installé par les Français dans les encablures de Zogbohouè, un quartier populeux de Cotonou.  Il s’apprête actuellement à faire un master en ingénierie et management d’entreprises culturelles. Actuellement, le directeur du centre culturel Artittik Africa a en projet une thèse de doctorat sur la mise en scène de la parole qu’il envisage produire sous l’égide de l’éminent professeur Honorat Aguessy.
Elégant, galant et bien en jambe, le patron du théâtre Agbohounkoko a avoué qu’il a eu le temps d’en profiter et qu’il continue d’ailleurs de profiter de toutes ses richesses au plan physique « mais dans le strict respect du prochain ». Il se dénote donc qu’Ousmane s’est battre la mesure quand il s’agit du charnel. « Je suis de ceux qui pensent que ce que vous faites vous fait ». Marié et père de trois enfants dont un garçon dans un ménage antérieur, Ousmane a deux magnifiques filles. Son ambition actuelle est qu’Artisttik Africa, le centre culturel dont il est le directeur, étende ses tentacules sur toute l’étendue du territoire national.

Teddy GANDIGBE

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