.
.

Le triomphe de la vérité

.

Edito du 22 mai 2013: Au pays des crises farfelues


Visits: 2

La marque de fabrique du Bénin depuis quelques années, ce sont les crises à répétition. Elles surgissent presque toujours dans les arcanes du pouvoir et mobilisent l’attention de la nation à un niveau paroxystique, proche de la crise de nerfs, avant de se dégonfler comme un ballon de baudruche. Non, je connais le mot de Finkielkraut : « Notre époque ne remplace pas ce qu’elle désagrège: la crise est son destin » (Au coin de la rue, l’aventure, 1979). En clair, les temps où nous vivons sont tapissés d’épisodes critiques où la solidité des Etats est interpellée.  Je sais aussi la capacité des crises à  fertiliser l’action. Pour ainsi dire, toute crise porte en elle le germe d’une élévation. Mais la multiplication effrénée des crises est une menace pour la stabilité du pouvoir dans une jeune démocratie  comme la nôtre. La gestion par crises est toujours une gestion de l’inconnu.

        Hier, en effet, c’était la crise du PVI avec son cortège de déclarations tapageuses du Chef de l’Etat face à la résistance des douaniers. On se souvient qu’il avait promis sanctions et radiations, tant et si bien que tous les douaniers sont entrés dans les rangs. Au passage, une loi fut votée pour empêcher ces trublions d’aller en grève. Mais, le PVI se solda par un échec que personne n’oubliera.

        Il y eut aussi  l’interview du 1er août 2012 et son avalanche de marches de soutiens. Elles ont mobilisé la classe politique sur près de cinq mois, avant de s’estomper, minées par l’usure du temps. Certains « petits » ont fini par se ranger, toute rage dehors, furieux de devoir se taire pour ne pas provoquer la bourrasque présidentielle. Beaucoup ont crié leur dégoût. Et c’est tout.

        Il y eut aussi la crise de l’ORTB avec le limogeage retentissant de Julien-Pierre Akpaki. Depuis lors, peu de gens s’en souviennent encore et l’affaire a été probablement noyée. Elle a été emportée par la fumée des autres coups d’éclat. Comment oublier la crise née des soupçons de pots-de-vin dans le cadre de la construction du port sec de Tori. Limogeages, enquêtes de la Brigade économique et financière (BEF), fuites de quelques prévenus, puis plus rien. Après la tempête, tout est rentré dans l’ordre.

        Il en fut de même des scandales successifs nés à la  SBEE,  de la crise à la SONAPRA et de ce florilège étourdissant d’alertes qui nous viennent de la filière coton. Il y a désormais une “affaire SONACOP” dont certains disent déjà qu’elle n’aura pas d’autre destin que celui des  autres, si l’on doit en juger par la curieuse stratégie consistant à indexer un syndicaliste dans tout un conseil des ministres, au point même de donner une autre tournure à l’affaire.

En pleine affaire empoisonnement et tentative de coup d’Etat, la peur de tout le monde, c’est que la tendance pyromane n’enfante à nouveau quelque chose de pire, une espèce de monstre encore plus monstrueux ( !!!) que tout ce qui a été vu et entendu jusqu’ici. Allons-nous finir par vaincre la fatalité ?

Je l’espère vivement, comme tous les Béninois de bon sens.   « Dans toute crise, apparaissent des leaders qui savent ce qu’ils ont à faire », disait Xavier Emmanuelli. Autant dire que les crises sont des périodes d’éclosion de nouveaux leaderships permettant à la communauté de faire des pas d’envergure dans l’édification de la cité. Seulement, les crises qui surgissent par dizaines chaque année ne laissent pas aux décideurs le temps  de l’expérience. Sans  compter que les décisions précipitées et folles qui se prennent se paient cash. Dans le cas de l’affaire empoisonnement, il aurait fallu patienter un peu pour prendre les prévenus en flagrant délit, la main dans le sac, au lieu de faire tout le spectacle que l’on a vu. Les amalgames entretenus à travers une médiatisation excessive de l’affaire ont tenté de gommer la précipitation initiale qui a semé la crise et provoqué le tollé que l’on sait.

        Le management des urgences assure une gouvernance peu lucide dictée par les nécessités du moment. Ici, les échecs sont faciles et la propension à n’écouter personne, dégénère en culte de la personnalité.

Par Olivier ALLOCHEME

Reviews

  • Total Score 0%


Plus sur ce sujet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

You cannot copy content of this page