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Le triomphe de la vérité

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Edito du 06 mai 2013: Rébellion au parlement


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La majorité parlementaire a volé en éclats jeudi dernier. Pour quelques heures au moins, les députés, toutes tendances politiques confondues se sont adonnés à cœur joie au procès du gouvernement. Candide Azannaï conseille de « traduire les [ministres] concernés devant la Haute Cour de Justice pour outrage » et ainsi « aucun gouvernement n’osera plus jamais aussi longtemps que le Bénin existerait s’absenter de cette manière ». Hélène Aholou Kèkè s’est emportée carrément : « ce comportement du gouvernement qui dure depuis plusieurs mois, n’est que simple dédain, dit-elle. On nous dédaigne. A la rigueur on nous méprise. Parce qu’il a une majorité au parlement, on ne connait plus la valeur de l’Assemblée Nationale. » Sacca Lafia récemment élu Président du COS/LEPI y va de sa fureur : « Je crois que ce qui se passe n’est pas une affaire de relations entre deux individus ». Et Mathurin Nago de conclure : « je suis profondément désolé de constater ce que nous constatons ensemble ».

Si ce n’est pas de la rébellion, cela y ressemble beaucoup. C’est en tout cas une jacquerie inédite depuis que la sixième législature s’est installée. Depuis 2011, en effet, la majorité parlementaire s’est toujours sagement alignée sur les positions du gouvernement, hormis de très rares couacs. Le plus important, ces derniers jours, ce fut la décision délibérée des parlementaires de voter une loi de prorogation du mandat des élus locaux, alors même que le Chef de l’Etat avait clairement signifié sa volonté d’organiser les élections cette année.

        Mais l’on a vu que la majorité elle-même a multiplié des signes de fissure ces temps derniers. L’élection du bureau du Conseil d’orientation et de supervision de la LEPI a donné lieu à quelques frictions. L’on a vu comment un membre éminent de la majorité a été tranquillement éconduit dans sa volonté de briguer un poste. De nouvelles règles ont été érigées dans le but presque visible de l’écarter.

        On ne peut oublier non plus le clash de Sèmè entre Sofiath Onifadé et Sofiath Schanou et les “affrontements” au sein de la mouvance à Calavi. Dans cette commune, il n’a pas fallu moins d’un déplacement du Chef de l’Etat en personne pour calmer les tensions.  Rien ne présage en tout cas que l’action ainsi menée pourra faire taire ceux qui agissaient de façon souterraine depuis de nombreux mois.

        Tout ceci, ajouté à la colère volcanique qui s’est exprimée jeudi, vient confirmer que la mouvance parlementaire est en train de subir quelques mutations. Le plus étonnant, c’est la position du Président Nago. Contrairement à sa ligne stratégique adoptée depuis la cinquième législature, il n’a même pas tenté jeudi de défendre le gouvernement et pire encore son Chef. Le discours employé n’a même pas tendu vers l’apaisement. Il a tout simplement suivi la tendance unanime de ses collègues.

        Pour comprendre cette position, il faut se rappeler que la mouvance présidentielle est restée jusqu’ici sans véritable meneur. Contrairement à la défunte Union pour le Bénin du Futur (UBF) de l’ère Kérékou dirigée par Bruno Amoussou, les Forces Cauris pour un Bénin Emergent (Fcbe) sont une force multipolaire sans véritable marge de manœuvre. Pour preuve, elle a été incapable en 2011 de mener les arbitrages électoraux pour les législatives, du fait que c’était le Chef de l’Etat en personne qui s’en était chargé. Mathurin Nago peut bien se rallier cette force ou une bonne partie tout au moins en se hissant à la tête de cette coalition. Sa position lui donne, en tout cas, toute la latitude d’user de ses atouts pour atteindre cet objectif dans le cadre des manœuvres de 2016. Stratégiquement, il est mieux placé que tout autre candidat potentiel de 2016 pour bénéficier de la contribution des députés de la mouvance. L’incident de jeudi prouve qu’il est prêt à passer à l’offensive, même s’il faut, pour cela, heurter les susceptibilités de Boni Yayi.

        De toute évidence, la jacquerie parlementaire de jeudi n’est qu’une amorce du grand chambardement qui attend la mouvance après les élections locales prochaines, et surtout après les législatives de 2015. La perte d’influence du Chef de l’Etat, ne fait que commencer. Elle pourra s’accentuer au fur et à mesure que passent les élections et leurs cortèges d’arbitrages plus ou moins difficiles.

Par Olivier ALLOCHEME

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