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Le triomphe de la vérité

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Editorial:Le péril européen


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L’Europe n’a plus de leçon de gouvernance à nous donner. C’est une bonne nouvelle qui s’impose depuis le déclenchement de la vaste bourrasque de crise qui s’est emparée des pays européens. Ce n’est pas une crise économique comme les autres, c’est-à-dire, celle liée à la consommation (1929) ou aux matières premières (1973).

 Cette fois, il s’agit d’une crise d’incompétence et de gouvernance, en cela qu’elle a vu le jour de fait des mensonges des autorités grecques et italiennes. En jouant sur les chiffres de la croissance, en manipulant, volontairement les chiffres de la dette, les Grecs et les Italiens ont simplement entrainé leurs économies dans la tourmente que l’on voit.

« Je rêve de devenir un boomerang. Un type qu’on lance et qui vous revient dans la gueule », disait Oscar Dufresne, le personnage fantasque de Frédéric Beigbeder (L’Egoiste romantique, Grasset 2005). A vrai dire, les grincements de dents sont nés de cette fantaisie volontaire qui se retourne contre nos anciens maîtres européens. Il se passe concrètement aujourd’hui qu’un pays comme la Grèce, organisateur des jeux olympiques de 2004, puissance moyenne s’il en fût, est presque sous ajustement structurel, comme naguère le petit Bénin.

Avec les risques de faillite bancaire en Espagne, celui de l’insoutenabilité de la dette en Italie, la crise financière au Portugal, l’Europe solde le compte de ses propres inconduites poussées jusqu’au fond de l’abîme. J’entends d’ici quelques-uns rétorquer que les institutions financières internationales comme le FMI ont assisté à l’incurie et l’y ont même aidé. Peter Doyle, économiste sénior démissionnaire du FMI, n’en dit pas moins lorsqu’il s’en prend à l’institution qu’il accuse d’avoir dissimulé au reste du monde la gravité de la situation. « Après 20 ans de service, j’ai honte d’avoir été associé au FMI », a-t-il dit dans sa lettre de démission en juin dernier.

 Et tout cela ne pose pas seulement un problème d’éthique. Il y a de l’incompétence, de la gabegie et, pour qui connait les récents bouleversements ayant touché le FMI, on peut deviner qu’il y a pire. Les donneurs de leçon sont plus que jamais touchés par les maux qui minent ceux qui ont toujours été traités comme leurs obligés.

Il y a deux semaines, l’économiste togolais, Kako Nubukpo, s’est plu à faire le point de ce qui attend les Européens dans leur situation actuelle :

– Une politique monétaire ayant comme seul objectif la lutte contre l’inflation et ne tenant aucun compte des préoccupations de croissance économique ;

– Une politique budgétaire dite « budgétariste », avec comme objectif unique l’assainissement des finances publiques ;

– Une politique de réduction des coûts de production, en particulier, le coût du travail, donc pour l’essentiel le salaire ;

– Un ensemble de réformes dites « structurelles », au premier rang desquelles il convient de mentionner la libéralisation du marché du travail.

Il s’agit de ce que l’on nomma benoîtement « le consensus de Washington » et qui a fini par se traduire par une véritable saignée sociale au début des années 90 : gel des recrutements, licenciements massifs, réductions drastiques des dépenses sociales, etc.

Nos populations, après la longue nuit des dictatures ubuesques des années 70 et 80, avaient dû se réduire à cette violente cure d’austérité. Aujourd’hui encore, la politique économique de nos Etats en porte les stigmates. Ce qui attend donc l’Europe, et notamment la Grèce, le Portugal, l’Espagne et l’Italie risque d’être simplement une descente aux enfers.

C’est un juste retournement de l’histoire. Pour la première fois depuis de longues décennies, le monde entier s’intéresse à ce qui se passe de bien en Afrique. Le continent de toutes les plaies d’Israël est crédité cette année d’une croissance d’environ 5,5% alors qu’il faut des efforts soutenus pour que l’Europe atteigne 1%. Les investissements chinois, américains, australiens et japonais commencent à s’accroître sur le continent accompagnés de la montée en flèche des classes moyennes.

Si les vieux démons de la mauvaise gouvernance et du culte ubuesque de la personnalité, si prompte à se réveiller sur nos terres, finissent par s’éloigner du continent, on peut espérer une nouvelle ère économique en Afrique. Non pas parce que l’Europe serait en difficulté, mais parce que, pour une fois au moins, le monde nous regardera avec des yeux d’adultes.

Olivier ALLOCHEME

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