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Le triomphe de la vérité

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Editorial: Au pays de la drogue


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Elle court, elle court la rumeur. Un Béninois aurait été arrêté puis condamné à mort en Arabie Saoudite alors qu’il accomplissait son devoir sacré en terre sainte. Motif, il détenait sur lui de la drogue. A Djeddah, c’est une hérésie que l’on ne pardonne pas. La peine capitale qui lui est appliquée est à la mesure de la farouche détermination de ce pays à empêcher que de vils individus ne transforment la terre sainte en un marché infâme. Notre compatriote l’a appris trop tard.

Ainsi donc, la drogue circule au Bénin. Dimanche, l’intervention impromptue de la police à l’aéroport a permis d’empêcher l’atterrissage d’un avion bourré de coque en provenance du Venezuela. D’ici, il était certainement prévu pour être convoyé dans l’une des grandes capitales d’Europe ou d’Amérique, en comptant sur le laxisme des services de sécurité du Bénin.

C’est du moins la raison pour laquelle le chargement a pris la direction de Cotonou avant même d’être redirigé sur Las Palmas, compte tenu de l’impressionnant dispositif policier mobilisé au sol. Il faut interroger ici le professionnalisme de nos agents en uniforme qui ont fait suffisamment de tapage pour que les voyous soient mis au courant par leurs agents sur place…

Mais ce qui est ici évident, c’est la transformation de Cotonou en une plaque tournante du trafic international de la drogue. L’action communicationnelle menée par le ministre de l’Intérieur visait précisément à montrer la vigilance de ses hommes et donc la sécurisation de l’aéroport devenu désormais imperméable aux trafiquants.

Et il est vrai que l’Etat béninois met toute sa volonté dans la balance pour éviter ce positionnement plutôt négatif de notre pays sur une arène internationale où il a perdu en prestige. Mais l’économie de la poudre a pris une ampleur qui dépasse largement les mesures cosmétiques prises pour les besoins de la démonstration.

Cette année, le Chef de l’Etat a été obligé lui-même de faire appel à l’aide française pour acquérir une équipe de chiens renifleurs censés accentuer la surveillance. Et il n’y a pas de semaine où les forces de sécurité ne mettent pas la main sur un chargement de drogue, cocaïne ou chanvre indien. Parmi nos hommes en uniforme, ce sont parfois des hauts gradés qui sont pris la main dans le sac, surpris à flirter avec les narcotrafiquants. Comme le démontrent les récentes arrestations à la Mecque, même les symboles religieux les plus sacrés comme le Hadj sont exploités pour endormir la vigilance des Etats.

La situation du Bénin est redevable à son positionnement à côté du grand Nigeria qui a acquis au fil des ans une funeste réputation au plan international. Nous sommes à côté d’un pays qui fait peur au monde entier de par sa capacité à générer des criminels dotés d’un courage inouï pour faire circuler la poudre de capitale en capitale avec une inimaginable dextérité. Leurs connexions avec les narco-Etats de l’Amérique Latine sont connues.

Colombie, Venezuela, Equateur, Argentine, ce sont des pays producteurs dont une bonne partie de l’économie est basée sur le règne de la poudre. Malgré la pression de Washington qui ne manque pas de déployer sur place son arsenal de surveillance, la drogue dicte toujours sa loi en cette partie du monde. Le cas afghan est connu : c’est un narco-Etat qui s’enorgueillit d’être le premier fournisseur mondial de drogue. Malgré, ou surtout, grâce au fondamentalisme taliban.

A dire vrai, la situation économique et sociale du Bénin n’est pas étrangère à cette mauvaise conjoncture. Les jeunes ne trouvent pas d’intérêt à se battre pour un bonheur qui fuit sous leurs pas à mesure que se multiplient les chiffres du mal-vivre. Ils préfèrent risquer leur vie pour devenir riche d’un coup à la perspective maussade des jours de misère sans fin.

A ces jeunes audacieux, osons (enfin !) ajouter des nationalités bien connues. Les déboires d’une certaine société étrangère détectée par les services de sécurité des Etats-Unis il y a quelques mois, ont permis de lever un coin de voile sur les transactions douteuses qui se mènent chez nous sous le grossier couvert de l’investissement étranger.

 La facilité avec laquelle leurs sociétés-écrans sont constituées pour blanchir les fonds issus du trafic, détruit la compétitivité des vrais commerçants. Les industriels n’en peuvent plus. Et nous attendons encore le jour où le Bénin pourra enfin se doter d’une politique véritable de lutte contre le fléau.

Olivier ALLOCHEME

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