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Le triomphe de la vérité

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Editorial:Tout est coton


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La bulle cotonnière, comme toutes les autres, a commencé par monter de façon vertigineuse. Le Chef de l’Etat est définitivement engagé sur ce chantier comme naguère sur celui du PVI, en faisant monter les enchères : ce sera 400 000 tonnes ou rien. Même lorsque les emblavures annoncées disent clairement qu’il faut être moins optimiste, Boni Yayi remue ciel et terre pour trouver son coton rêvé. La machine gouvernementale a été mise en branle pour trouver coûte que coûte les 400 000 tonnes.

Huit ministres originaires des zones cotonnières sont mobilisés pour tourner dans le bassin cotonnier afin de pousser les producteurs (leurs parents présumés) à s’engager à fond. Les micro-crédits sont mis en place et la BOAD a été sollicitée pour fournir 115 milliards de F CFA. Et le Chef de l’Etat, lui-même, s’est jeté dans la danse, labourant son champ, visitant les champs de coton où, à force de démonstrations télévisées, il s’évertue à montrer qu’il est le plus grand des planteurs.

Nous connaissons malheureusement le destin de toute cette bruyante démonstration. Elle finit généralement par une pantalonnade gigantesque sanctionnée par des camouflages titanesques, des mensonges grotesques et un pan entier de l’économie à rebâtir après le feu follet. Ainsi, en a-t-il été du PVI qui a fait sombrer le port dans un profond gouffre.

Aujourd’hui, les publicités qui passent en boucle sur les chaines de télé, tendent à servir l’image d’un port dynamique et en pleine reconstruction. Ce qui est vrai. Mais, il est aussi vrai que l’agitation qui a servi à mettre en place le PVI a débouché sur la désaffection du port de Cotonou au profit des ports concurrents de la sous-région. Tous ceux qui fréquentent le Port de Cotonou ces jours-ci peuvent témoigner que malgré les coups de PUB (et les coups de bluff) la façade maritime n’est plus ce qu’elle était il y a un an. Quelques rares navires marchands, les porte-conteneurs ont dévié vers d’autres destinations et une morosité visible à l’œil nu.

 Et pourtant, l’Etat béninois a injecté des milliards pour relever l’image de marque de l’institution portuaire, sans compter les investissements du MCA, de COMON-SA et de MAERSK. Tout ça pour ça… Que dire aujourd’hui du PVI, sinon qu’il a réussi à faire fuir les armateurs et les importateurs et à laisser dans les caisses de l’Etat un gouffre angoissant ressenti par tout le monde ?

Ne cherchons donc pas loin. La course vers le coton ressemble à s’y méprendre à celle vers le PVI comme à celle vers l’émergence. Comme la bulle, elle finira par se dégonfler d’elle-même lorsque les illusions entretenues à force de déclarations hasardeuses, vont se tasser face à la réalité. Non pas que le Bénin n’a pas besoin du coton.

Nous en avons plus que besoin pour gérer les flux démographiques en provenance des campagnes. Nous en avons surtout besoin pour renflouer en devises les caisses de l’Etat qui ont largement souffert de la longue tension entretenue sur elle par les engagements sociaux exorbitants du gouvernement, les salaires politiques hors de proportion ainsi que les nombreuses infrastructures en construction.

Cependant, il est à reconnaitre que le tapage présidentiel autour de la matière première peine à camoufler les véritables questions qui taraudent nos esprits : Pourquoi maintenant ? Pourquoi les 115 milliards de FCFA de la BOAD en pleine campagne ? Comment sauver une filière lorsque les agents d’encadrement ne sont pas opérationnels sur le terrain aux côtés des agriculteurs ?

Nos pourquoi et nos comment ne peuvent trouver leur réponse que lorsque la campagne se soldait par l’atteinte des objectifs fixés. Il y a encore quelques années, Boni Yayi avait fixé, à lui tout seul, et en dépit de tout bon sens, un objectif de 600 000 tonnes de coton pour la campagne 2006-2007. Il advint que cet objectif ne fut même pas atteint de moitié.

Et que depuis lors la filière a sombré dans une noire morosité en impactant d’autres compartiments de l’économie nationale et en déclenchant des limogeages en cascades dont celui du ministre de l’agriculture de l’époque, Gaston Dossouhoui. Ce qui était vrai hier l’est encore aujourd’hui : en matière économique, il n’y a pas mieux que le réalisme.

Olivier ALLOCHEME

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